Chapitre 45
Plume nacarat, plume nacarat,
Une amitié calcédoine,
Au cœur d'un rêve imaginaire.
Le prochain cours en question c'est, n'en déplaise à Madame Jacolot, l'option que je partage avec Gauthier. Je ne l'ai pas fait exprès, rassurez-vous. J'aurais commencé à m'inquiéter si j'avais poussé ma rébellion aussi loin.
En arrivant, je découvre avec surprise que le Diamant m'a réservé une place à côté de lui. J'essaie tant bien que mal d'oublier les insinuations étranges de l'enseignante pour me concentrer sur le cours, avec plus ou moins de réussite.
💎💎💎
À la fin de la matinée, je me faufile derrière le Diamant. L'aura de mystère qui plane autour de lui s'est intensifiée avec les assertions émises en Sciences Occultes et cette fois, je suis bien décidée à lui soutirer des informations... qu'il le veuille ou non.
Malheureusement, mes recherches sont totalement infructueuses. Peut-être se sent-il suivi, ce qui expliquerait pourquoi il déambule à vive allure sur le campus pendant les quinze minutes qui précèdent la pause-déjeuner.
Quelque peu dépitée, j'entre dans le réfectoire avec l'espoir de trouver une table libre sur laquelle je pourrai broyer du noir tranquillement.
En jetant un regard circulaire à la salle, je retrouve Gauthier nonchalamment adossé contre l'un des murs et, encore plus frappant, en train de rire à gorge déployée avec...
— Aaron.
J'en suis tellement stupéfaite que je reste bouche bée au milieu de la cafétéria. Quand le Diamant s'en aperçoit, son visage se crispe.
Quel hypocrite !
De mon côté, je suis trop interloquée pour esquisser le moindre mouvement. Le peu de confiance que j'ai réussi à lui accorder s'envole là, sous mes yeux ébahis, alors qu'il est en pleine discussion avec celui qu'il a lui-même qualifié d'« ennemi ».
Le plus risible, c'est que c'est Aaron qui coupe court au profond état d'hébétude dans lequel je suis plongée en m'interpellant de l'autre bout du réfectoire.
Tous les regards se tournent vers moi.
Les joues en feu sous l'effet de toute cette attention, je fais d'abord mine de ne rien avoir entendu.
Évidemment, cet idiot réitère l'opération. Je suis bien obligée de réagir.
Je parcours nerveusement la salle à la recherche d'une table libre puis, à contrecœur, j'avance lentement vers les deux colocataires, bien décidée à ne pas me laisser impressionner.
— Rubis ! s'exclame Aaron à mon approche. Pas trop ennuyeuse, cette première matinée de cours ?
— Au contraire. C'est étonnant, mais il reste des personnes honnêtes, ici.
Je lance un regard noir à son ami... qui s'absorbe dans la contemplation de ses pieds.
— Je suis entièrement d'accord ! Pas toi, Gauthier ?
Aaron semble prendre un malin plaisir à alimenter notre mécontentement. Qu'est-ce qu'il m'énerve !
Il ne m'a pas appelée « Rub's », au moins.
Mais où sont donc passées Gaby et Alix ? Je m'apprête à sortir une réplique cinglante lorsque mon Émeraude préférée fait justement son apparition. Ai-je déjà précisé à quel point elle est exceptionnelle ?
— On y trouve aussi pas mal d'hypocrites, si tu veux mon avis.
Gaby laisse le temps aux garçons d'encaisser le coup, avant de m'entraîner à l'écart :
— Tu viens, Rubis ? Je t'ai réservé une place.
Je ne me fais pas prier et la suis sans lancer un regard en arrière, tout en me confondant en remerciements.
— T'inquiète, je suis toujours contente d'arracher une amie à sa discussion avec des demi-dieux personnifiés. J'étais justement en train de me dire qu'ils n'étaient pas ton genre... Je n'allais pas te faciliter la tâche, tout de même ! Le plus petit, je crois qu'il pourrait me plaire.
Je ne peux retenir mon rire plus longtemps. Elle a beau être un tantinet étrange, Gaby est vraiment une personne que j'apprécie.
La table qu'elle occupe est à l'opposé de celle de Gauthier et d'Aaron, ce qui n'est pas pour me déplaire. Après ce qui vient de se passer, subir leurs regards insistants aurait été un peu trop dur à supporter, en plus de tout le reste. Ça ne les empêche pas d'essayer, évidemment.
— On dirait que tu lui as tapé dans l'œil, insinue mon amie en désignant Gauthier, même si j'ai l'impression que ce n'est pas le genre à se laisser marcher sur les pieds. Tu crois que j'ai bien fait d'intervenir ?
— Carrément ! J'aurais fini par l'envoyer paître, de toute façon.
— Tu as raison. Non pas qu'il soit bougon, mais...
— Bougon ? Ce n'est pas le premier mot qui me viendrait à l'esprit pour le décrire.
Plutôt mystérieux, attirant et tout aussi énervant.
Qu'est-ce que je raconte, moi ? Quand bien même Gauthier dégage un charisme évident, ce n'est pas une raison pour entrer dans son jeu.
— Tout à l'heure, il est venu me demander si tu étais dans les parages. Il voulait discuter avec toi à propos d'un livre, comme quoi tu ne devais pas en parler ou je ne sais quoi. Lorsque je lui ai demandé des détails, Monsieur est monté sur ses grands chevaux. Ça m'a tellement saoulée que...
Mais je ne l'écoute plus. Je suis bien trop occupée à prendre conscience de mon erreur.
Je comprends mieux pourquoi Madame Jacolot m'a conseillé de l'éviter, maintenant ! En découvrant le manuscrit, elle a su qu'il ne provenait pas d'une librairie classique. Sans m'en rendre compte, j'ai réduit à néant la réputation de Gauthier en quelques secondes seulement, tout ça à cause de ce bouquin décidément trop extraordinaire.
— Rubis, tu m'écoutes ? m'interrompt Gaby après avoir achevé sa tirade.
— Excuse-moi, j'ai tendance à être régulièrement dans la lune.
Aloïs, la nouvelle coqueluche de la fac, apparaît au moment même où je réalise que la réaction du Diamant face à ma bourde m'importe peu, si l'on considère qu'il est lui-même un adepte de la trahison.
— Est-ce que je peux m'asseoir avec vous ? Je n'ai personne avec qui traîner et je me disais que, peut-être...
— Évidemment ! le coupe Gaby, enchantée à l'idée de passer la pause-déjeuner à côté du Saphir à sensation de Talesia.
On dirait qu'elle a vite oublié Aaron. Installé trop loin, sans doute. Maintenant, c'est Aloïs qui occupe toutes ses pensées.
— Alors, le taquine-t-elle, pourquoi tu viens traîner avec deux looseuses comme nous alors que toutes les filles de l'école bavent sur toi ?
Il me lance un drôle de regard avant de lui répondre :
— Vous m'avez l'air sympa, et les gens qui sourient sont toujours beaucoup plus accueillants.
Sa remarque pas tout à fait anodine ne manque pas de me faire rougir. Pour ne pas me ridiculiser davantage, je me propose pour aller chercher de l'eau. Bien sûr, c'est sans compter sur ma meilleure amie : la maladresse !
En me levant, je me prends les pieds dans une chaise voisine. Je manque de m'étaler par terre, mais une fille au regard perçant me rattrape de justesse. Contrairement à ce que j'aurais parié en temps normal, son visage bienveillant ne cache aucune moquerie, au contraire :
— Moi aussi, j'ai quelques problèmes d'adresse.
Vous aussi, vous êtes maladroit.e.s comme Rubis ?
– Un peu... 😅
– Pas du tout ! 😌
À quoi Gauthier joue-t-il, avec Aaron ?
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