Je regagne ma chambre, il me retient dans le couloir, on se fixe avec complexité. Je pensais avoir surmonté cette déception, mais tout ça n'était qu'une douce illusion. Il s'approche de moi, mon cœur bat à tout rompre. Mes mains se posent sur ses avant-bras, s'il continue de s'approcher, j'ai peur de perdre le peu de contrôle qu'il me reste. Mais il continue d'avancer, jusqu'à ce que je heurte le mur. Son corps approche et percute le mien. Je ferme les yeux, pour ne pas voir cette flamme qui m'embrase. Il relève ma tête, mes yeux s'ouvrent, il approche son front contre le mien. Son souffle me chatouille, sa respiration est haletante.

— Arrête de jouer avec ma faiblesse.

Il se détache de moi et se dirige vers sa chambre.

Je reste hagard de longues secondes, tentant de trouver une explication rationnelle à tout ça. Mais la seule raison me dépasse. Je me prépare pour cette journée, sa famille est de retour dans le domaine. Ma mission semble de plus en plus compromise et Roberto risque de me mettre à la porte, si je ne lui transmets pas dans la journée de quoi commencer ses croquis.
La maison semble remplie de vie, elle est animée par sa famille, j'entends des rires, des enfants qui courent. Je rejoins la terrasse, il profite d'un barbecue familial. Je ne me sens pas à ma place. Je me retourne pour regagner ma chambre.

— Inès.
Sa mère m'appelle.

— Oui, madame.

— Joins-toi à nous !

— Je ne voulais pas vous déranger.

— Tu es la bienvenue.

Elle demande au domestique de me servir à manger et à boire. Je m'installe sur une des tables et je les observe rire et se chamailler. Deux de ses sœurs avec leurs enfants sont présentes. Elles m'ignorent, mais je ne peux pas leur en vouloir, je ne suis pas de leur milieu. Les enfants sont autour de moi et discutent en arabe de ma couleur de peau rougeâtre. Je ris tant, leur théorie est adorable.

— Laissez-la tranquille.
Les enfants déguerpissent.

— Merci, Amir, mais ça ne me dérange pas.

— Ces garnements n'écoutent rien.
Je souris.

— Ça va mieux, ta réaction allergique ?

— Oui, beaucoup mieux, merci.

Il sort une feuille de sa poche et me la montre. Je la regarde avec curiosité.

— Qu'est-ce que c'est ?

— Pour faire avancer ton projet.

Je l'ouvre, et y sont inscrits les gouts en termes de couleur de sa fiancée, la longueur souhaitée, les matières souhaitées. Tout y est, je vais peut-être partir plus vite que prévu. Je reprends espoir.

— Merci.

Il s'éloigne en direction de sa mère. Il la prend dans ses bras, c'est touchant. Ça me renvoie à ma famille, à mon père qui ne souhaite toujours pas entrer en contact avec moi. Je les laisse profiter en famille et je commence à travailler sur la robe le reste de l'après-midi. J'ai demandé à ne pas être dérangé. Mais quelqu'un frappe à la porte en début de soirée. La mère d'Amir est derrière la porte.

— Bonsoir Inès.

— Bonsoir.

— Nous sortons au restaurant en famille.

— Profitez bien.

— Tu nous accompagnes.

— Non, non, ne vous préoccupez pas de moi.

— Jeune fille, on ne désobéit jamais à une vieille femme.
Je souris.

— Bien.

Je referme la porte et me change pour les rejoindre dans le hall. Je m'apprête d'une des robes prêtées par Roberto, pour des occasions. Cela fait des mois que je n'ai pas porté de hautes coutures. J'émets un râle de douleurs, c'est difficile de renoncer à tout ça. Je m'apprête et je rejoins le hall.

En descendant les escaliers, leurs yeux sont tous tournés vers moi, je suis gênée. Je fixe Amir, qui me dévore du regard. Je fixe les marches des escaliers, pour éviter un drame. En arrivant en bas des marches, Amir accapare mon bras à la vue et aux yeux de tous.

— Tu es magnifique.

— Merci.

Les membres de sa famille rejoignent leur véhicule, et nous abandonnent dans le hall de la maison. Je sens sa main caresser mon bras, je suis au bord de l'évanouissement. Je me tiens fermement à son bras par peur de tomber.