12 : Chère Oryane
- Bouh !
La petite fille sursauta quand des mains vinrent se plaquer devant ses yeux.
"- Qui c'est ? demanda une voix taquine.
- Hmmm... Gally ? fit la rouquine en faisant mine de réfléchir, le sourire aux lèvres.
- Perdu."
Samuel retira ses mains de ses yeux et rit en voyant la fausse moue vexée d'Oryane.
"- Six ans qu'on se connait et tu reconnais pas ma voix ?
- Tu parles, je faisais semblant.
- Mouais, c'est ça."
Samuel jeta un coup d'oeil au bras de la fillette et ses yeux s'assombrirent en voyant les bleus dessus.
- Ils t'ont encore frappée ?
Oryane se mordit les lèvres.
"- Je vais leur dire deux mots.
- Arrête, Sam...
- Enfin Ory, regarde-toi ! s'emporta le blond en désignant son corps amaigri. Tu as 10 ans et tu en fais 7 !
- Est-ce qu'on pourrait pas juste arrêter de parler de ça ?"
Samuel la dévisagea un instant avant de soupirer.
"- OK. En plus j'ai un cadeau pour toi.
- C'est vrai ?" questionna Oryane, une lueur d'intérêt s'allumant dans ses yeux.
Le blondinet se pencha vers elle avec un air de conspirateur.
- Regarde.
Et il sortit quelque chose de la poche de sa chemise. Oryane en resta bouche bée.
C'était une rose. Une vraie rose écarlate, magnifique, dont les pétales s'étendaient en une corolle gracieuse.
- Mais comment...?
Samuel se rengorgea, fier de lui.
- Moi, Minho et Alby, on a trouvé un moyen de quitter l'enceinte de WICKED.
La rousse en chancela.
"- Quoi ?
- Tu sais, le réseau de tunnels qu'on emprunte ? Il y en a un qui mène à une serre intérieure, et on peut partir d'ici ! Et quelqu'un y a planté toutes sortes de fleurs. Je sais pas comment il les a fait pour les faire pousser, mais le résultat est là."
Il se laissa tomber sur une chaise, exultant.
- On en discute avec les gars, mais avec un peu d'organisation, on devrait pouvoir partir d'ici.
Oryane sentit son coeur se serrer.
"- Ils nous rattraperaient.
- Mais non. On se cachera.
- Mais tu sais très bien que toi tu ne peux pas t'enfuir."
Samuel se renfrogna.
"- Bien sûr que si.
- Non Sam, c'est beaucoup trop dangereux ! Tu n'es pas immunisé, un pas dehors et tu peux attraper la Braise !
- J'en ai marre d'être différent des autres, d'accord ? Ces enfoirés n'avaient pas qu'à pas nous capturer.
- Mais je veux pas que tu tombes malade..."
Les lèvres de Sam tremblèrent.
- Ça n'arrivera pas.
Coupant court à la discussion, il jeta les épines de rose par terre et s'avança pour lui planter la fleur dans les cheveux.
Tandis que ses doigts fourrageaient dans ses boucles rousses, il murmura néanmoins :
"- Oryane ?
- Oui ?
- Si un jour j'attrape la Braise... tu m'aideras, hein ?"
La fillette attrapa sa main et la serra.
- Je te le promets.
*****************
Oryane sentait une odeur de sel.
Un vent léger lui caressait les cheveux, charriant avec lui cet étrange parfum.
Où était-elle ? Que s'était-il passé ?
Quand elle inspira, nulle douleur ne foudroya son corps.
Elle était allongée sur quelque chose de moelleux. Un lit ?
Elle ouvrit lentement les yeux et dès que le soleil l'aveugla, les réminiscences la frappèrent en plein coeur.
Le sauvetage. L'attaque. Teresa. Newt.
Elle laissa échapper un hoquet étranglé en se redressant.
Elle se trouvait dans une espèce de petite cabane de bois, un peu comme celles du Bloc, seule. Les rayons du soleil inondaient son visage.
Et cette odeur... C'était celle de la mer.
Elle baissa les yeux sur elle-même. Elle portait des vêtements propres et son bras était enserré dans un bandage blanc.
Elle balança ses draps et s'assit en se prenant la tête entre ses mains pour respirer.
Elle aurait voulu que Newt soit près d'elle pour lui expliquer, la rassurer... Mais il ne le serait plus jamais.
Elle se leva précautionneusement, les jambes flageolantes. Elle se dirigea vers les tentures de la hutte et les écarta pour en sortir.
Une longue plage de sable fin s'étirait à perte de vue devant elle. Et derrière, une mer turquoise, qui venait lécher doucement le rivage.
Puis elle regarda derrière elle.
Ils étaient sur une île. Une clairière verte était encadrée par l'océan, fleurie, verte, immense. Et une cinquantaine de personnes y bougeait. L'écho de rires et de discussions lui parvenait des habitations rustiques et des tentes, alors que des gens bricolaient, ou récoltaient des légumes. On aurait dit... le paradis.
(Je n'ai pas réussi à trouver d'image du film, mais imaginez-vous l'île de Vaiana en un peu moins fleuri)
À l'horizon, de gigantesques montagnes. L'île était définitivement énorme, parsemée d'arbres.
Oryane resta figée. Ils l'avaient trouvé. Leur lieu sûr, leur paradis. Ils étaient loin du monde.
Elle fit quelques pas vers la communauté.
Minho, qui conversait avec Aphé en cueillant le maïs, releva la tête et aperçut la rouquine qui fixait d'un air à la fois perdu et émerveillé autour d'elle. Il se leva aussitôt et se dirigea vers elle.
Les gens commençaient à remarquer la présence d'Oryane. Tous délaissèrent leurs occupations pour s'approcher doucement d'elle, curieux.
Brenda, Thomas, Frypan, Minho et tous les amis d'Oryane parvinrent à elle en premier.
Ils se regardèrent en silence.
Puis Minho s'avança et prit la rouquine dans ses bras, la serrant fort contre lui.
Oryane se mit à sangloter dans son étreinte, et Thomas et Frypan vinrent les rejoindre.
Les quatre Blocards finirent par s'écarter les uns des autres. Eux aussi étaient dans un état impeccable, sans aucune trace de sueur. Oryane parcourut ses amis du regard. Leur vêtements étaient blancs, les cheveux de Brenda en un joli chignon, leurs peaux claires.
Brenda lui adressa un sourire mouillé de larmes, et Harriet et Aris firent de même. Gally vint lui faire une accolade, cachant tant bien que mal son émotion et Aphéli expira un souffle tremblant.
- Tu es enfin réveillée...
Puis le regard d'Oryane tomba sur Sonya.
La blonde la contempla, les mèches rebelles de son indéfectible tresse lui tombant devant les yeux. Elles se jetèrent dans les bras l'une de l'autre.
"- Il t'aimait, articula Sonya. Si je sais une chose sur mon frère, c'est qu'il t'aimait plus que tout au monde.
- Je suis désolée, sanglota Oryane. Je n'ai pas pu le sauver...
- Je sais... Je sais."
La jeune fille se dégagea et contempla tour à tour chacun de ses amis, tremblante.
"- C'est vraiment fini ?
- Pour toujours."
*******************
Tous assis sur les bancs, le groupe avait le regard rivé sur Vince, qui se tenait devant les vagues où se reflétait le soleil couchant.
- Nous avons fait tant de chemin ensemble. Tant de sacrifices, tellement pour faire de ce rêve une réalité. Nos amis... Notre famille...
Un silence ému planait sur l'assistance, alors que les souvenirs dansaient dans leurs yeux.
Vince leva sa chope en l'air.
- Ce soir, je veux que nous levions nos verres à tous ceux qui ne sont pas là. Tous nos proches perdus... Cet endroit est pour vous, pour nous tous !
Toutes les tasses furent brandies en l'air, et des murmures et des sanglots emplirent l'air.
- Et ça, reprit Vince en désignant le haut bloc de pierre derrière lui, c'est pour eux. Alors à votre temps... à votre manière... vous pourrez venir faire la paix. (Il planta le couteau sur le socle de la pierre.)
Puis il se retourna et garda le silence quelques instants, avant de lever de nouveau sa tasse et de hurler.
- Bienvenue au Paradis !
Tout le monde se mit à hurler et à se lever. Le feu de camp illuminait les visages baignés de larmes, les étreintes, les sourires.
- Qui veut manger ? cria Frypan, recevant aussitôt un tonnerre d'acclamations.
Le groupe se dispersa un peu, venant s'asseoir près du feu, ou riant entre eux, alors que certains se dirigeaient vers la pierre ou la plage.
Une nouvelle vie débutait.
Toujours perchée sur le banc, Oryane contemplait d'un air vide les fêtards, Thomas à son côté. Celui-ci finit par déclarer :
"- On a enfin trouvé une famille.
- Oui."
Quelque chose revint brutalement en mémoire à Oryane et elle se mit à chercher dans ses poches, ressentant un brusque élan de panique. Quand ses mains se resserrèrent sur le pendentif de Newt, elle souffla de soulagement.
Elle le sortit et le regarda un instant avant de le tendre à Thomas.
- Newt voulait que je te donne ça.
Thomas cligna des yeux en le prenant, refoulant ses larmes.
- J'aurais aimé lui dire au revoir.
Oryane garda le silence. Le brun secoua la tête et se leva.
- J'y vais. A plus.
L'adolescente resta seule pendant encore quelques minutes, puis elle se força à se mouvoir vers la pierre, où quelqu'uns étaient déjà rassemblés.
Gally ne leva pas les yeux vers elle, occupé à graver solennellement le nom de Chuck dans la pierre. Mais Minho l'accueillit d'un sourire.
- Hey, rouquine.
Gally lui passa le couteau, et Oryane regarda l'asiatique tailler le nom de Newt.
"- Je fais celui de Teresa ?
- Je pense que Thomas voudra le faire."
Minho hocha la tête, avant de lui presser l'épaule.
- Ne tarde pas à nous rejoindre, hein ?
Il se dirigea vers leur groupe d'amis près du feu.
Oryane entendit du bruit derrière elle et se retourna pour voir Vince. Le meneur saisit le couteau, avant de marquer une brève hésitation et de la regarder.
- Tu veux ?
La rouquine sentit son coeur se serrer. Mais elle acquiesça.
La lame dansa sur la roche alors qu'elle inscrivait le prénom de Mary.
Puis elle se recula pour contempler le Roc des Héros.
"Tant de noms..."
Elle vit Brenda s'approcher d'elle.
- Est-ce que je peux te parler ?
La rousse acquiesça. La jeune fille lui agrippa les mains.
- Écoute, c'est moi qui te soignais et j'ai découvert quelque chose...
Elle lui murmura quelque chose à l'oreille et Oryane sut que sa vie venait de prendre un nouveau tournant.
******************
Elle se laissa tomber au sol de la cabane sitôt la porte fermée, savourant la solitude.
Elle n'arrivait pas à rester près des célébrations. Tout ici criait l'absence de ses amis. L'absence de Newt.
La cabane de soins, qui lui rappelait un peu celle des Medjacks, était aussi celle un peu fourre-tout où le Bras Droit avait déposé tous les coffres en attendant de les décharger et les ranger.
Lasse, elle se dirigea vers le sac d'elle et ses amis et y fouilla pour y trouver une couverture ou autre chose pour dormir. Elle tombait de fatigue.
Ses mains se refermèrent sur un petit cahier noir.
Perplexe, elle l'en sortit. Sur la couverture, une fine écriture dorée élégante annonçait "Journal".
Oryane n'en croyait pas ses yeux. Elle ignorait que l'un de ses amis tenait un journal intime.
Par curiosité, elle regarda juste la première page jaunie par le temps pour voir à qui il appartenait.
Newt.
Oryane se sentit basculer et ses mains tremblèrent sur le cahier. Elle le fixait, incapable de savoir comment réagir.
Elle mourrait d'envie de le lire. Et de l'autre, elle savait que si elle cédait à la tentation, ni son coeur ni son esprit ne s'en remettraient.
Finalement, la douleur l'emporta et elle ouvrit le journal.
La première page était couverte d'une écriture fine et penchée.
"Je viens de trouver ce vieux truc dans une des caisses du port. Personne n'a jamais écrit dedans. Je pense que je vais le garder, on sait jamais."
Tremblante, Oryane feuilleta rapidement. Newt avait visiblement commencé à écrire peu de temps après l'attaque du camp du Bras Droit.
Au fil des mois, son écriture devenait plus grosse, rageuse, appuyée, comme un symbole de la folie meurtrière dans laquelle il s'enfonçait peu à peu.
Le journal s'arrêtait en plein milieu. Newt avait écrit si violemment que les deux mots emplissaient toute la double page.
TUEZ-MOI.
- Newt... murmura Oryane alors que les larmes lui montaient aux yeux.
Elle revint au début et plongea dans les pensées et sentiments du garçon qu'elle aimait.
Il écrivait bien. Très bien, même. Il chantait, donc il devait forcément écrire des paroles, mais Oryane était tout de même surprise de la poésie des textes. Poésie qui devenait plus macabre au fur et à mesure, comme un délire démentiel.
04/03
En cet instant où les ténèbres chuchotent en moi et m'enveloppent dans des filaments de noirceur et de pourriture, où je respire la puanteur d'un monde à l'agonie, où mon sang s'échauffe et prend une couleur violacée, une chose demeure et m'apporte un peu de paix. J'ai eu des amis et ils ont pu compter sur moi.
C'est ça le plus important.
C'est même la seule chose qui importe.
Newt
19/03
C'est une drôle de sensation, de perdre ce qu'on aime. Quand j'en suis capable, j'y pense ces derniers temps. Si je pouvais remonter en arrière, à mon enfance, et qu'une espèce de divinité me révélait mon avenir pour me laisser choisir, qu'est-ce que je déciderais ? Si elle me dévoilait les deux plus grandes pertes qui m'attendent, et me demandait laquelle je souhaite empêcher, qu'est-ce que je déciderais ?
- Alors, Newt ? me questionnerait cette créature céleste. Ta conscience, ou tes amis ?
Je sais bien ce que je lui répondrais : c'est quoi la différence ?
Newt
11/04
Quand j'essaie d'envisager l'avenir, tout ce que je vois c'est le passé. Un passé qui n'avait rien de merveilleux, un avenir que je ne connaitrai jamais.
Cela n'a pas beaucoup de sens, mais qu'est-ce que ça sonne bien, pas vrai ?
Newt
02/05
La folie est là. Je l'entends qui frappe à la porte.
On dit qu'il y a des choses pires que la mort. C'est vrai.
Mais n'empêche que la vie et la mort sont le commencement et la fin de la beauté. L'une ne va pas sans l'autre. Un peu comme moi et Ory.
... J'ai l'impression de perdre les pédales.
Newt
Et Oryane continua de lire, encore et encore, malgré la souffrance qui lui arrachait le coeur, malgré les phrases de plus en plus haineuses et folles, avec l'avidité d'un drogué.
Quand elle eut terminé, elle pleurait en silence. Elle laissa tomber le journal et quelque chose s'en échappa.
Oryane la ramassa. C'était une feuille de papier pliée en deux. Elle l'ouvrit.
C'était une lettre.
Pour elle.
Newt avait-il tout prévu depuis le début ?
Oryane prit une grande inspiration tremblante pour se préparer mentalement, même si cela ne suffirait pas. Elle lut les mots écrits spécialement à son nom par le jeune homme.
Chère Oryane,
D'aussi loin que je me rappelle, c'est la première lettre que j'écris. Depuis mon arrivée dans le Labyrinthe, du coup. La première, et la dernière.
J'espère que tu tomberas dessus. Je vais la cacher dans mon journal. Si jamais quelqu'un d'autre trouve ce cahier, peut-être pourra-t-il reconstituer notre histoire et afficher aux yeux du monde les horreurs que nous avons subies.
Mais si c'est toi...
J'espère que tu me pardonnes.
Pardonne-moi de t'avoir caché la vérité. Je te vois te rapprocher du gouffre chaque jour, et j'avais peur, peur du coup peut-être fatal que cette révélation te porterait. Je pensais que quand tu me verras me transformer, tu sauras reconnaitre qu'il est trop tard, qu'il faut aller de l'avant.
Au fond de moi, je sais que je me voile la face. Mais n'est-ce pas la définition même du déni ?
Mais je veux que tu saches que je ne suis pas effrayé.
De mourir, en tout cas. Perdre la tête, tout ce qui me rend humain, c'est ça ma plus grande terreur.
Alors toutes les nuits, je me répète leurs noms, comme une prière.
Ben.
Alby.
Chuck.
Winston.
Et les souvenirs resurgissent.
Les petits bonheurs, comme ce rayon de soleil qui venait lécher le Bloc à l'aube, annonçant la fin de la nuit et des cauchemars. Et même le ragoût qui sentait les pieds de Frypan.
J'aurais jamais cru que tout ça me manque autant.
Et puis je me rappelle de toi.
La petite nouvelle complètement effarouchée, qui se rappelait son nom et qui était la première fille que nous voyions depuis bien longtemps.
Mais dès que je t'ai vue, j'ai su que mon monde ne tournerait plus jamais de la même façon. Tout m'a hypnotisé chez toi. Cette force fragile, cette beauté. J'avais l'impression de voir pour la première fois les étoiles.
Je crois bien que je suis tombé amoureux de toi.
J'ai su que je ne te quitterais plus, que je te suivrai partout.
Et c'est ce que j'ai fait. C'est ce que nous avons tous fait.
J'aimerais tant que tu te vois comme moi je te vois. Pas une erreur ou que sais-je, mais une fille qui en commet et fait tout pour les réparer, en restant fidèle à ses valeurs. Une fille loyale, et profondément du côté du bien.
Je sais que si je pouvais retourner dans le passé aujourd'hui, je ne changerais strictement rien.
Et ce que je veux, Oryane... c'est qu'un jour tu puisses te retourner et te dire exactement la même chose.
Ton avenir est entre tes mains maintenant. Je sais que tu vas t'employer à faire le bien. Comme tu l'as toujours fait.
Et je veux que tu continues. Je veux que tu danses, chantes, ris. Je veux que tu t'épanouisses, que tu vieillisses, que tu retombes amoureuse.
Je veux que tu sois heureuse.
Parce que tu le mérites.
Et je serai toujours là, près de toi.
Prends soin des autres pour moi. Et prends soin de toi.
Merci pour tout. Je t'aime.
À plus mon ange,
Newt.
C'en fut trop pour Oryane.
Elle se laissa tomber au sol, se roulant en boule, et elle éclata en bruyants sanglots.
Elle pleura ce qu'on lui avait donné et ce qu'on lui avait pris.
Elle pleura ce qu'elle n'avait pas eu et ce qu'elle n'aurait jamais.
Elle pleura la vie, seule.
Désespérément seule.
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