11 : À nos rêves perdus
Oryane ignorait combien de temps elle resta là, à fixer le corps de Newt, hébétée.
Son univers avait littéralement tourné autour de lui.
Elle avait toujours pensé qu'il serait là à jamais pour la rattraper, ou pour la retenir.
Et au final, celui qui aurait eu besoin d'une main indéfectible, qui ne briserait pas son étreinte, c'était lui.
"Égoïste. Faible. Monstre."
Cette fois, Oryane ne lutta pas contre la voix de la dépression. À quoi bon tenter de se persuader qu'elle avait tort ? Elle était exactement tout ce qu'elle susurrait.
Elle avait tué l'amour de sa vie.
Tué.
Tué.
Tué.
"Monstre. Et tu prétendais l'aimer ?"
Oui, Oryane l'avait aimé, elle l'aimait encore, elle l'aimait à en crever. Comment avait-elle pu...?
Elle ne pouvait pas vivre sans Newt. Aucune personne ne pourrait jamais le remplacer.
Elle était un monstre. Peu importe qu'il l'ait supplié, qu'il ait la Braise, elle avait tiré. Après tous les meurtres qu'elle avait déjà perpétrés.
Une larme solitaire parvint avec difficulté à ses yeux et roula sur sa joue. Son regard dériva sur le flingue abandonné à côté du cadavre. Elle savait qu'il était encore chargé.
Ce serait tellement simple...
Une balle dans la tête, et la souffrance s'arrêterait pour de bon. Elle mourrait rapidement, aux côtés de Newt. Elle espérait juste qu'elle pourrait lui demander son pardon au paradis avant de descendre en enfer.
De toute façon, personne ne la regretterait.
Elle tendit la main vers le revolver quand un bruit de course et un hoquet d'horreur la firent stopper son mouvement et relever la tête.
Brenda se tenait à quelques mètres d'elle, les yeux écarquillés, la fiole de sérum serrée dans sa main. Un chagrin profond se creusa peu à peu sur les traits de son visage alors que ses yeux s'embuaient de perles salées.
- Je suis désolée... chuchota-t-elle la voix tremblotante. Je suis désolée...
Oryane ne répondit pas.
Elle savait que Brenda avait couru comme si sa vie en dépendait, évitant les tirs et explosions. Elle avait mis sa vie en danger, bravé tous les risques et mis toute sa vitesse pour arriver à temps.
Mais Newt ne recevrait jamais le sérum.
Brenda tremblait, ses prunelles emplies de larmes et de culpabilité. Oryane n'eut pas la force de réagir, de lui dire que l'unique fautive, c'était elle. Car comment réconforter quelqu'un quand on se noie soi-même ? Que nos poumons se remplissent de notre propre tristesse ? Oryane aurait été bien hypocrite.
Brusquement, les lumières revinrent dans un flash aveuglant. Teresa, que la jeune fille avait complètement oublié, se rappela à son bon souvenir :
- Oryane, je n'ai pas beaucoup de temps... Tu dois juste... revenir. Je sais pourquoi Brenda n'est plus malade !
La voix de Teresa était exaltée, et elle déclara :
- C'est ton sang, Oryane. J'avais raison. Brenda n'est plus malade parce que tu l'as guérie ! Tout ce que tu as enduré, les réactions chimiques et cérébrales que ça a engendré...
La brune expira un souffle agité dans le haut-parleur.
- Le remède existe. Et c'est toi, Oryane. Ca a toujours été toi.
La rousse n'avait pas voulu comprendre, avait refusé de comprendre, jusqu'au moment où Teresa prononça la phrase fatidique, avec l'emphase de l'ignorance :
- Oryane... tu peux sauver Newt !
Un barrage céda en la rouquine et elle prit sa tête dans ses mains avec un sanglot étranglé. Brenda plaqua ses mains sur sa bouche, pleurant toujours silencieusement.
- Trop tard, Teresa... murmura Oryane.
Trop tard.
- Il a encore la vie devant lui, Oryane. Et... il n'y a aucune raison que lui et Brenda soient les seuls à pouvoir bénéficier du traitement. Si tu reviens, tout va s'arrêter. Tout, après tant d'années, tant de douleur... Je sais combien tu as traversé, mais tout cela n'a pas été vain. Oryane, te rends-tu compte ? Tu es notre remède, tu es notre salut. Tu peux sauver l'humanité ! Il faut juste...
Le ton de Teresa devint suppliant.
- Il faut juste que tu reviennes à moi. S'il te plait... Je sais que tu feras le bon...
Un bip aïgu retentit et les lumières s'éteignirent de nouveau, emportant la voix de Teresa avec elle.
Oryane et Brenda se regardèrent. Sans même s'en être rendu compte, Brenda était devenue la première Immune par guérison, la première humaine après dix-huit ans de cauchemar à avoir jamais réchappé de la Braise. Grâce à Oryane.
Mais Newt n'aurait jamais cette chance.
Oryane baissa son regard bleu brisé sur le trou béant et ensanglanté dans la poitrine de Newt. Elle aurait pu... Elle avait un couteau sur son uniforme, elle aurait pu s'entailler et le planter dans le bras du garçon... Même sans cette histoire de vaccin, elle aurait pu ralentir...
Mais non. Il était trop tard.
"Faible. Incapable."
Oryane contemplait Newt, lui demandant par la simple force de son expression comment il avait pu tomber amoureux d'une fille comme elle.
Qu'avait-il vu en cette fillette immonde, en cette horreur ?
"Tu parles, il a juste eu pitié de toi. Pitié que tu ne mérites même pas."
Mais Oryane allait se racheter.
Elle commençait enfin à comprendre la raison des actions de Teresa. Tant de vies gâchées et de larmes versées, alors qu'elle aurait pu tout arrêter depuis le début.
Elle pensa avec ironie que WICKED ne l'aurait certainement pas traitée ainsi s'ils avaient su. Comment avaient-ils fait pour ne pas s'en apercevoir ?
Mais peu importe. Elle allait se livrer.
Aux prises de sang, à la torture et autres tests médicaux. Elle marchanderait la trêve contre la libération de Thomas et Aphéli, et la promesse de laisser tous ses amis en paix. Ce serait son dernier cadeau avant leur départ, elle leur devait bien ça. Avec un peu de chance, peut-être se rappelleraient-ils d'elle comme la fille qui avait sauvé le monde, et pas comme celle qui avait transformé leur vie en enfer. Et elle mourrait bien tranquillement dans les locaux de WICKED après avoir donné tout son sang. Qu'elle y aille ou non, elle commettrait un suicide, alors autant qu'elle parte en offrant à d'autres ce qu'elle n'avait jamais eu.
Le bonheur.
Brenda tendit une main hésitante vers elle, mais Oryane se releva sans un mot. Sa décision était prise. Elle saisit le revolver toujours au sol. Elle se rappelait de sa promesse des mois plus tôt.
Elle allait tuer Ava Paige. Puis elle laisserait Teresa faire le sale boulot.
Brenda ne bougea pas, restant figée, choquée et meurtrie, quand Oryane partit. Elle s'avança entre les commerces et disparut dans les rues bombardées, sans un dernier regard sur le corps de Newt, sans se retourner.
La brune entendit les garçons arriver derrière elle. Ils scrutèrent le corps sans y croire, dans l'état d'ahurissement le plus total. Puis Gally s'approcha et lentement, il ferma les paupières de Newt. Fry déglutit et renifla, retenant ses larmes, et Minho se laissa tomber près de son meilleur ami.
- Bon voyage blondinet, souffla-t-il. Tu as été le meilleur pote qu'on puisse rêver.
Et alors qu'un vacarme sans fin régnait sur la ville massacrée, une ruelle était plongée dans le noir et le deuil.
************************
Teresa contemplait le spectacle, beau et annonciateur de fin à travers la baie vitrée, la gorge nouée.
Cela faisait une dizaine de minutes depuis son appel. La ville s'effondrait peu à peu et Teresa sentait grandir en elle la peur qu'Oryane ne vienne pas. Et si elle était déjà en dehors de la ville ? Et si elle n'avait pas entendu la transmission ?
Et si elle refusait de revenir ?
Non, se raisonna Teresa. Elle connaissait sa meilleure amie. Elle pouvait se montrer égoïste, mais pas à un tel point.
Alors pourquoi mettait-elle tant de temps ? Ils n'en avaient plus.
Ava vint se placer à côté d'elle. Elles étaient désormais totalement seules dans l'enceinte désertée de WICKED. Une nouvelle explosion tout près fit légèrement vibrer le sol.
"- Teresa, il faut que tu y ailles, souffla doucement Ava.
- Elle va venir" rétorqua la brune, autant pour persuader Ava qu'elle-même.
- Madame !
Elles se tournèrent vers un garde qui arrivait à vive allure.
- Le dernier transport part dans 10 minutes.
- Il faut que tu le prennes, Teresa. Tu as énormément accompli, mais il faut que ta vie reste ta priorité. S'il te plait... pars, déclara Ava.
Teresa se mordit violemment la lèvre et jeta un dernier coup d'oeil par la fenêtre avant de s'éloigner vivement avec le soldat, plaquant une main devant sa bouche pour retenir ses sanglots.
Ava resta seule, perdue dans ses pensées, pendant encore de longues minutes.
À présent qu'elle allait inévitablement mourir, les souvenirs de ce qu'elle avait commis lui sautaient aux entrailles.
Mais elle avait fait tout cela pour sauver le monde.
Depuis quand doutait-elle ?
Un bruit de pas se fit entendre sur sa droite.
Ava se tourna légèrement pour regarder Oryane. La rouquine tremblait frénétiquement, les yeux vitreux et hantés, un revolver pointé sur elle. Les deux femmes se contemplèrent en silence.
- Est-ce que c'est vrai ? finit par murmurer Oryane à grand-peine.
Ava ne dit rien.
"- Newt... Est-ce que j'aurais pu le sauver ? balbutia la jeune fille.
- Oui. Je suis désolée, Oryane."
La rousse émit un petit sanglot, alors que la main tenant l'arme tremblait de plus en plus. Puis elle renonça et jeta le flingue par terre, hoquetant, secouée de spasmes.
La docteure s'approcha de l'adolescente, légèrement inquiète.
- Tu peux tous nous sauver, dit-elle simplement.
Oryane releva des yeux larmoyants et injectés de sang sur elle.
"- Promettez-moi... que vous allez libérer mes amis et les laisser tranquilles...
- Je te le promets."
La femme blonde posa sa main sur son épaule.
- Oryane je t'en prie, pardonne-moi pour t...
Oryane ne comprit pas tout de suite quand le coup de feu retentit.
Ava et elle baissèrent le regard à l'unisson sur la tache rouge s'étendant sur la blouse immaculée de la scientifique.
Elle émit un hoquet étranglé, s'accrochant à Oryane, mais celle-ci, hébétée, ne la soutint pas et la regarda s'effondrer à terre.
- Le Sanctuaire... articula Ava.
Oryane s'agenouilla près d'elle, le coeur battant et en état de choc.
"- Quoi ? Que voulez-vous dire ?
- Là où tout a commencé... Va là où tout..."
Ava expira une ultime fois, laissant une Oryane ébranlée.
Sans un regard pour sa supérieure qu'il venait d'assassiner froidement, Janson s'avança vers elle, le flingue pointé sur elle. Oryane se maudit intérieurement d'avoir jeté son propre pistolet : un geste, et elle se faisait descendre.
Janson se pencha, et soudain, vif comme l'éclair, il lui enfonça quelque chose dans le cou.
Stupéfaite, Oryane retira la fléchette de tranquillisant et chancela alors que tous ses muscles s'engourdissaient d'un coup.
Elle bascula et sa vue se flouta. Elle tendit désespérément la main vers le revolver abandonné, mais Janson l'envoya balader d'un coup de pied.
- N'y pense même pas, fit-il.
La rousse se recroquevilla sur elle-même en gémissant, alors que le monde se résumait à des taches de couleur. Elle entendit Janson chuchoter.
- Oh, Oryane... Tu aurais dû écouter tes amis. Tu n'aurais jamais dû t'arrêter de courir.
Et la dernière chose qu'Oryane vit avant que sa vision s'obscurcisse fut les yeux morts d'Ava Paige qui la fixaient, allongée à son côté et baignant dans une mare de sang.
********************
Oryane était allongée sur un siège médical quand elle reprit difficilement conscience.
Elle déglutit, observant le labo où elle se trouvait.
"Le retour du cauchemar."
C'est alors qu'elle sentit une aiguille se retirer de son bras. Elle tourna illico la tête et ses yeux se plongèrent dans ceux de Teresa. La brune prit la seringue pleine de sang avant de partir s'affairer près de la table.
- Est-ce que tu sais ce qu'est vraiment cette ville, Oryane ?
La voix de Janson lui parvenait de derrière elle, alors qu'il scrutait les explosions à travers le verre.
- C'est un canot de sauvetage. Le monde peut bien couler... ce n'est pas pour autant que nous devons nous noyer avec lui.
Il jeta un coup d'oeil à Teresa.
"- Encore combien de temps ?
- Quelques minutes" répondit la brune, tendue, en créant le sérum.
Janson s'avança vers Oryane avec un sourire narquois. La rouquine sentit son sang bouillir et voulut lui sauter dessus, mais...
Elle était ligotée au siège.
Elle grogna et tira de toutes ses forces sur les entraves métalliques lui enserrant les poignets et le ventre, sans succès. Elle foudroya l'homme-rat du regard.
"- Pourquoi vous ne me tuez pas ?
- Te tuer ? ricana Janson. Oh non. Par par une simple balle, en tout cas. Au contraire, nous allons t'accorder un traitement spécial. Nous allons te garder en vie... juste ce qu'il faut, du moins. Et en échange..."
Il prit une énorme seringue abandonnée sur le bureau.
- Tu nous permettras de faire notre sélection. Parce qu'évidemment, il n'y aura pas assez de sang pour tout le monde. Le temps des choix difficiles est arrivé.
Oryane aurait voulu lui enfoncer cette foutue seringue dans le nez. Elle s'était imaginé une mort digne, où elle serait bien traitée vu sa valeur, et où elle finirait au moins acclamée. Oui, c'était prétentieux, mais c'était ce qu'elle voulait.
Au lieu de quoi, elle allait crever comme une infâme, entre les mains du plus bel enfoiré que la Terre ait jamais porté.
"- Je finirais par mourir, rétorqua-t-elle d'une voix rauque. Et vous serez bien embêtés. Parce que même si vous immunisez certaines personnes, les générations suivantes ne le seront pas pour autant. Cette connerie n'est pas héréditaire.
- Elle l'est forcément. Il n'y a jamais de hasard dans la vie. C'est pourquoi nous allons bien te tuer en fin de compte, quand tu ne nous fourniras plus la quantité de sang nécessaire. Nous t'allongerons sur ce même siège, nous t'endormirons et nous disséquerons ton précieux petit cerveau, pour enfin comprendre."
Oryane avait déjà regardé la mort en face un nombre incalculable de fois. Mais l'idée de se faire endormir à jamais sans pouvoir se battre, qu'on lui ouvre la tête, qu'on lui extrait le cerveau lui fila une nouvelle nausée.
Toujours près de la table, Teresa s'était raidie.
"- Vous ne pouvez pas... murmura Oryane.
- Bien sûr que nous pouvons. Tu es une grande fille Oryane, il fallait réfléchir avant de se jeter dans la gueule du loup. Nous t'anesthésierons évidemment durant l'opération. Mais il te sera impossible de rester en vie après nos petites explorations neuronales, surtout vu l'état de faiblesse dans lequel tu seras déjà plongée."
Elle serra les dents.
"- A quoi ça vous servirait ? Vous comptez découper les bébés dans le ventre de leurs mères pour leur trafiquer l'esprit si vous découvrez le secret de l'immunité ?
- Bien sûr que non. Nous créerons une injection ou des pilules. Et encore une fois, nous ne sauverons pas tout le monde. Nous prendrons ceux qui le méritent."
Quand il parla de sauvetage, une alarme s'alluma dans le cerveau d'Oryane.
- Et Thomas et Aphéli ? Vous devez les libérer ! Je suis revenue, c'était une de mes conditions !
Janson ricana.
- C'est le Dr Paige qui les a sottement acceptées, et grâce à moi elle n'est plus. Je suis un homme de prudence, Oryane. Si jamais l'opération ne marchait pas, ou que tu cherchais à te rebeller, je les aurais sous la main.
Oryane sentit des larmes lui brûler les yeux, mais elle les refoula. Elle ne lui ferait pas le plaisir de pleurer devant lui.
Non seulement elle allait mourir de façon ignoble, mais ses amis ne seraient jamais libres.
"Je ne suis qu'une erreur."
- Tu n'es qu'une erreur, Oryane, poursuivit Janson avec un ravissement malsain, comme s'il avait lu dans ses pensées. Tu ne sauveras personne, hormi ceux que nous choisirons. Tu es née erreur, tu as vécu erreur, et tu mourras ainsi. Au moins nous auras-tu vraiment servi à quelque chose.
Oryane se mordait les lèvres si fort pour s'empêcher de craquer que le sang coula sur sa langue.
"- Je te fais une faveur. Tu vas rejoindre ton idiote de mère, tes chers amis et ton petit blondinet. Tu reverras même tes agresseurs ! Andrew et ce garde... Quel était son nom déjà ? Peu importe, persifla Janson, un sourire venimeux aux lèvres.
- Taisez-vous" chuchota Oryane d'une voix brisée.
Exultant de la voir dans un tel état de faiblesse, Janson continua :
- Je suis même tellement généreux que je te promets d'envoyer après toi tes autres copains dans la tombe...
Oryane n'avait plus de lèvres à présent.
"Bordel, faites qu'ils n'aient pas cherché à nous libérer et soient partis en berg, pitié..."
Elle priait silencieusement les rebelles en train de saccager la ville d'enfin se concentrer sur le véritable objet de leur haine, de lancer une bombe sur la tour, de mettre rapidement fin à ses souffrances.
Janson se tourna vers Teresa, en train de transvaser le sérum bleu dans un tube. Il le lui arracha presque des mains sans un regard.
- Merci pour ton sacrifice Oryane, dit-il en revenant près d'elle. Je ferais en sorte que ton nom soit vaguement mentionné quelque part dans les manuels d'histoire dans quelques années.
Il débouchonna le tube, alors qu'Oryane le regardait sans comprendre. Puis il releva la manche de sa veste, révélant son bras complètement noirci.
Il plongea son regard avec un sourire dans les yeux écarquillés de la rouquine.
- A ta santé.
Et il s'effondra au sol dans une rivière de verre quand Teresa lui fracassa l'arrière du crâne avec un vase.
Elle rattrapa le tube au vol et se précipita sur Oryane pour la détacher.
- Il faut qu'on se dépêche !
Dès que ses entraves furent retirées, Oryane bondit au sol, se frottant les poignets. Elle contempla Teresa avec méfiance.
"- Dis-moi où sont Thomas et Aphéli.
- Je ne sais pas !
- Tu mens !
- Non, je te le jure !"
Oryane fixa son ex-meilleure amie avec lassitude, alors que son cerveau tournait en boucle.
"- Ils sont forcément dans le bâtiment...
- Je ne sais pas. Je pense pas, vu ce qui se passe. Ils peuvent très bien être dans un berg, à des kilomètres de nous..." répondit Teresa doucement.
Oryane refusait d'y croire. Elle quitta la pièce en tirant Teresa derrière elle, priant pour que Janson ne se réveille pas de sitôt.
Elle fouillait désespérément les environs du regard, comme si elle s'attendait à ce que Thomas et Aphéli émergent brusquement de derrière un mur en criant "Trouvé !" Ils était forcément ici...
Soudain, un détail lui revint en mémoire et elle se tourna vers Teresa.
- Le Sanctuaire ! Qu'est-ce que c'est ?
La confusion se peignit sur le visage de Teresa.
"- Je n'en ai jamais entendu parler...
- Merde !"
Oryane se mit à faire les cent pas, la tête entre les mains. Dehors, les explosions se rapprochaient inexorablement d'eux...
"- Tu n'as pas un indice ? Qui t'en a parlé ? suggéra Teresa.
- Ava Paige. Elle a dit..."
Oryane s'immobilisa.
- Que je devais aller là où tout a commencé. Peut-être que c'est ce fameux Sanctuaire ?
Teresa n'eut aucune illumination, réfléchissant en panique à son tour.
"- ÇA NE VEUT RIEN DIRE ! hurla Oryane, frustrée. Putain, j'en ai marre d'eux ! De vous ! De tout !
- Non Oryane, calme-toi ! Elle ne t'aurait rien dit que tu ne puisses pas comprendre dans l'urgence ! Réfléchis !"
L'adolescente s'adossa à un mur, la respiration sifflante.
- Où est-ce que tout a commencé ? demanda Teresa, comme si le formuler à voix haute allait déjouer le mystère.
Et soudain, Oryane sut.
- Il faut aller là où leur plan a débuté. Le commencement de notre enfer.
En fin de compte, elle allait revoir le seul endroit où elle avait été heureuse.
Thomas et Aphéli étaient enfermés dans le Labyrinthe.
*******************
- Mais on sait même pas où il se situe précisément ! se lamenta Oryane.
Teresa se mordit les lèvres.
- En fait si.
Oryane se tourna vivement vers elle.
- Tu penses bien que les Labyrinthes étaient forcément reliés au QG en cas de besoin. Il existe des tunnels souterrains. En courant, on peut y être dans une demi-heure.
La jeune fille expira un souffle résolu.
- Montre-moi.
******************
Elles filaient dans les conduits éclairés par des ampoules nues. Oryane sentait son coeur accélérer à mesure qu'elle se rapprochait. Elle allait retrouver son foyer.
Le sol tremblait régulièrement au dessus d'elle, alors que les bombardement dévastaient le paysage de la ville et à des kilomètres à la ronde. Oryane supplia silencieusement pour ne pas se faire ensevelir.
Le tunnel s'amincit peu à peu, si bien qu'elles furent obligées de se recroqueviller. Une lueur bleutée leur parvint de derrière une grille. Le bout du chemin.
Oryane poussa dedans d'un violent coup de pied. Elle atterrit sur le sol, et les deux filles la suivirent rudement.
La rousse releva les yeux et sentit sa gorge se nouer.
Elle était dans la salle aux écrans. Ceux-ci continuaient de tourner, alors même qu'il n'y avait plus rien à montrer depuis longtemps.
La salle où Ava Paige leur avait appris la vérité.
La salle où ils avaient cru à tort être sauvés, avant de comprendre que leurs cauchemars ne faisaient que démarrer.
Elle scruta, figée et silencieuse, la montagne de verre écroulé au bout de la pièce, alors que les souvenirs revenaient.
Elle se revit serrer la main de Newt, sous le choc des révélations. Elle revit Gally surgir, menaçant Thomas, et Andrew...
Elle revit le coup de feu et le regard perdu de Chuck alors que la balle venait se ficher dans sa poitrine.
Leurs corps n'étaient plus là.
Teresa aussi regardait les moindres recoins de la pièce, avant de déclarer d'une voix rauque :
- On était sortis par là.
Elle désigna la porte EXIT. Oryane la suivit sans plus attendre, l'estomac et le coeur noué.
Elles se retrouvèrent dans le couloir mal famé, qu'elles suivirent en silence. Elles arrivèrent près d'une ouverture ronde, où un petit panneau était accroché. Après un instant d'hésitation, Teresa posa son doigt dessus et il bipa, le capteur passant au vert. L'ouverture coulissa et elles pénétrèrent dans le trou abandonné des Griffeurs.
Dès lors, tout revint en mémoire à Oryane et elle se remit à courir, le trajet jusqu'au Bloc parfaitement clair dans sa mémoire. Elle avait besoin de s'éloigner d'ici, et des cadavres de Griffeurs qui pourrissaient un peu partout.
Au lieu de se sentir enfermée, elle ressentit une profonde sérénité en courant entre les hauts murs de pierre. Les embranchements, le lierre... Tout lui était si familier... Comment faisait-elle pour avoir une putain de nostalgie pour le Labyrinthe ?
Elle se rappela sa première nuit dedans, quand elle avait foncé avec Thomas pour sauver Alby. Cela remontait à sept, huit mois, mais elle avait l'impression qu'une vie entière s'était écoulée (et moi aussi...)
Elle repensa à l'Oryane de ce temps-là, qui avait manqué de se pisser dessus en apercevant son premier Griffeur.
"Ah. Si j'avais su."
Les crétaures horrifiques ressemblaient à des chatons par rapport aux Fondus.
Au bout d'une dizaine de minutes, elle aperçut d'immenses portes qui lui paraissaient atteindre le ciel gris et artificiel et retint son souffle.
- Home sweet home, murmura-t-elle en pénétrant dans le Bloc, les larmes lui montant aux yeux.
Tout était là.
Les cabanes dans un état pitoyable. Elle avait pratiquement oublié l'incendie qui avait tout ravagé.
La Boite, grande ouverte et vide depuis une éternité.
L'observatoire, surplombant fièrement le Bloc et offrant une vue imprenable sur le Labyrinthe.
La forêt, avec sa rivière et son cimetière.
Le mur gravé de leurs noms.
Le jardin laissé à l'abandon, envahi d'herbes folles, les fruits et légumes moisis.
La table en bois branlante où ils prenaient leurs repas tous ensemble, enchainant connerie sur connerie.
La hutte des Medjacks, où Newt lui avait fait sa déclaration.
Newt...
Combien de rêves avaient-ils perdus depuis leur évasion ?
Elle se força à se détourner de la cabane en inspirant douloureusement. Elle se morfondrait plus tard.
- Thomas ! Aphéli ! cria-t-elle.
Blanc.
Teresa et Oryane échangèrent un regard. Au moment où elles décidaient de se séparer, un mouvement au bord de la forêt attira leur attention.
Thomas en sortit avec précaution, soutenant une Aphéli trébuchante.
Oryane se jeta sur eux, tellement soulagée qu'elle crut en pleurer.
"- Putain Ory, j'ai jamais été aussi content de te voir ! soupira le garçon.
- Plaisir partagé. Aphé ?"
Elle se tourna vers la jeune fille. De corpulence mince d'origine, elle avait encore beaucoup maigri. Elle s'appuyait sur Thomas, le regard lointain.
- Aphé ? répéta Oryane, soudain prise de crainte.
Et si les tests de WICKED avaient rendu folle son amie ?
L'adolescente posa le regard sur elle. Après quelques secondes, la joie transcenda son visage.
- Oryane !
Elle lui sauta dans les bras.
- Je suis tellement contente de te voir en bonne santé !
- Ça n'a pas été évident tous les jours. Où est Minho ? questionna la jeune fille en scrutant autour d'elles, cherchant l'asiatique.
- Il n'a pas pu venir, mais il nous attend avec les autres, répondit Oryane, en priant pour que ce soit le cas. Mais il faut qu'on se barre d'ici."
Thomas et Teresa eux, se regardaient en silence, une tension palpable entre eux. Finalement, la brune déclara :
"- Je suis contente de te revoir, Thomas.
- Merci de nous avoir sauvés la vie" répliqua le garçon sur le même ton.
Et soudain, tout explosa autour d'eux.
Une forte secousse les projeta au sol alors que la terre se mettait à trembler et que les cabanes s'écroulaient sur elles-mêmes.
- Qu'est-ce qui se passe ? hurla Thomas.
- LES GRENADES !
Un grondement assourdissant leur parvint alors. Ils levèrent lentement les yeux.
Un mur du Labyrinthe explosa, et son voisin s'ébranla, puis un autre, dans une pluie de pierre.
- ATTENTION !
Aphéli projeta Oryane au sol pour éviter un énorme pan de métal grésillant, en feu.
- C'est le ciel ! Le ciel est en train de tomber !
Les morceaux du dôme artificiel du Bloc filaient vers eux à une vitesse alarmante, s'écrasant autour d'eux dans des colonnes de feu.
Thomas se tourna vers eux, le visage blafard et apeuré.
- COUREZ !
Ils foncèrent vers les portes et s'y engouffrèrent, slalomant à toute vitesse entre les murs embrasés, les panneaux métalliques.
Le Labyrinthe était en train d'être détruit.
Ce furent les minutes les plus longues de la vie d'Oryane et elle jeta un dernier coup d'oeil derrière elle, au moment où les portes s'affalaient à leur tour et que le dôme heurtait le sol dans un vacarme époustouflant.
Le Bloc n'était plus.
***************
Quand ils re-rentrèrent enfin dans la tour, les lumières s'étaient éteintes, et tout n'était plus que rouge. Les hurlements de victoire des rebelles résonnaient dehors alors qu'ils mitraillaient WICKED, anéantissant le point central de la ville.
- Où est la sortie ? hurla Aphéli.
Teresa ne répondit pas, regardant effarée la tour en proie aux flammes. Tout tremblait tellement autour d'eux qu'Oryane se demanda si elle avait un jour vraiment connu un sol stable. Tout en elle n'était plus qu'instinct de survie, toute autre pensée oubliée...
Brusquement, des mains saisirent Teresa et la projetèrent dans une vitre.
Janson bondit sur Oryane et lui envoya son poing dans la mâchoire.
Le menton en sang, Oryane trébucha. Thomas et Aphéli se précipitèrent sur Janson mais il les repoussa violemment, le regard fou, presque inhumain. Quand Aphéli revint à la charge, il lui envoya la tête contre un mur.
Oryane sentit une rage sourde, palpitante, l'envahir. Alors elle se releva brusquement sur Janson et le frappa à la joue. La tête de l'homme partit en arrière et elle le frappa de nouveau. Janson reprit contenance et la plaqua contre un mur, avant de saisir ses cheveux, les enrouler autour de son cou et tirer.
Oryane tomba à genoux en luttant pour respirer, alors qu'il l'étranglait lentement.
Elle finit par lui faire un croche-pied maladroit et il la jeta au sol.
Teresa se releva enfin, et elle, Thomas et Aphéli toisèrent Janson, hébété, qui sortait son flingue.
- Fini de jouer.
Et au même moment, la tour explosa.
Dehors, les rebelles hurlèrent de joie alors qu'ils envoyaient toujours plus de bombes.
Teresa releva presto Oryane et ils se mirent tous les 4 à courir pour disparaitre dans un autre couloir. Thomas lança un coup d'oeil derrière eux et poussa brusquement Teresa sur le côté.
- ATTENTION !
Oryane et Aphéli se précipitèrent alors qu'une dizaine de balles fusaient vers elle.
Aveuglés par le rouge et la fumée, ils pénétrèrent tant bien que mal dans la première salle qu'ils trouvèrent. C'était la salle d'examen. Ainsi, avec les produits et éprouvettes abandonnés, les lumières rouges clignotant dans le noir et les fils d'électricité crachant des étincelles, elle ressemblait à une salle de torture.
Un glapissement les fit sursauter. Se tournant d'un bond, ils contemplèrent les Fondus toujours enfermés derrière le verre blindé. Tout le monde s'était enfui en les laissant en proie à l'attaque. Pour eux, à partir du moment où on avait la Braise, la vie du contaminé perdait toute valeur.
- Thomas ?
Alertée par la voix alarmée d'Aphéli, Oryane se retourna. Le jeune homme écarta sa main de son ventre, alors qu'une tache de sang s'étendait dangeureusement sur son T-shirt.
- Non ! cria Teresa en se précipitant sur lui.
Thomas bascula sur le sol, et Teresa se mit à fouiller dans les tiroirs frénétiquement. Elle en ressortit des bandages et les pressa sur l'estomac de Thomas pour comprimer l'hémorragie.
"- Partez, articula Thomas.
- Non. Pas sans toi" rétorqua la brune.
Aphé et Oryane fouillaient la pièce, mais elles se durent se rendre à l'évidence et se regardèrent avec désespoir : il n'y avait aucune issue à part la porte.
Et celle-ci s'ouvrit brusquement.
Oryane retint un cri et plongea sous une table, tandis que ses amis en faisaient de même.
Janson entra dans un nuage de fumée, le sang coulant sur son visage, le revolver toujours braqué. Il jeta un bref regard méprisant aux Fondus tapant sur les parois de leur cage, avant de fixer la pièce en apparence vide.
- Je dois admettre que tu m'as bien dupé, Teresa, déclara-t-il en avançant lentement entre les tables. Je pensais que nous étions amis. Ou peut-être est-ce juste ta nature de trahir les gens qui tiennent à toi ?
Oryane retint son souffle derrière sa chaise, le coeur battant à cent à l'heure. Elle avait l'impression qu'il pulsait si fort qu'il résonnait dans la salle.
Janson se tourna vivement quand il entendit un bruit, mais c'était juste un bécher qui roulait sur le sol. Son visage se crispa.
- Allez, sortez de vos cachettes... Vous savez aussi bien que moi que vous n'avez aucune solution. Inutile de verser plus de sang que nécessaire...
Teresa se déplaça à quatre pattes pour changer d'endroit, et cria quand Janson apparut devant elle. Elle recula précipitamment, apeurée.
- Tu as quelque chose qui m'appartient.
La brune se releva lentement, brandissant la fiole de remède. Janson sourit.
"- Pas ça. Où est Oryane ?
- Elle n'appartient à personne. Prenez juste le sérum et laissez-nous partir.
- Pourquoi ? Tu es persuadée qu'elle est spéciale ? C'est juste une erreur, un rat de laboratoire. Elle n'a rien fait pour mériter ce cadeau.
- Peut-être, répliqua Teresa, frémissante. Mais il est à elle."
Le visage de l'homme-rat se tordit en un rictus.
- Qu'en penses-tu, Oryane ? cria-t-il. N'as-tu pas déjà assez de sang sur les mains ? Thomas, tu serais prêt à me laisser tuer ta copine ? Et toi Aphéli... n'as-tu pas envie de te venger de ce qu'on t'a fait endurer ?
Silence.
- Tu ne peux peut-être pas la tuer, Oryane, clama Janson en pointant Teresa. Mais moi je peux.
Toujours rien.
- Bien. C'est ton choix.
Teresa tressaillit.
- Janson !
L'homme-rat se retourna et se baissa immédiatement alors que Thomas, au prix d'un effort surhumain vu sa blessure, lui lançait une boite à la tête. Elle la manqua et alla s'écraser sur la vitre derrière lui.
Janson se redressa et visa Thomas, avec un rictus triomphant.
- Raté, fils de pute.
Un sourire barbouillé de sang s'étira lentement sur les lèvres de Thomas.
- Vraiment ?
Et tous entendirent la vitre des Fondus se fissurer dans le silence.
Janson voulut courir, mais trop tard. Les Fondus se jetèrent sur le verre avant d'atterrir sur lui. Les hurlements de l'homme-rat se perdirent dans les gloussements bestiaux pendant que les infectés le déchiraient et l'avalaient.
Teresa se rua vers Thomas, conscient à grand-peine, pour le soutenir.
- Vite ! s'écria Oryane en entrainant Aphéli vers la porte.
La cage d'escalier était envahie par le feu. Le brasier montait vers eux, ils ne pouvaient plus descendre. En désespoir de cause, ils continuèrent de monter, jusqu'à déboucher sur le toit de la tour.
Autour d'eux, seules les flammes subsistaient, et les bâtiments incendiés qui tombaient peu à peu. Oryane comprit alors que c'était ici qu'ils allaient mourir. C'était fini.
À bout de forces, Thomas chuta sur le sol. Aphéli se laissa tomber et se recroquevilla, éclatant en sanglots. Oryane ne parvenait plus à réfléchir, engourdie.
Teresa tomba avec Thomas, le maintenant serré contre elle. Le garçon la regarda dans les yeux en luttant contre le néant.
- Je suis désolée... sanglota Teresa, les larmes coulant sur ses joues. J'ai essayé...
Elle tendit la fiole de remède dans ses mains ensanglantées à Thomas. Il l'ignora et murmura :
- Je sais.
Et alors que le monde brûlait autour d'eux, ils s'embrassèrent. C'était vraiment terminé.
Oryane mit du temps à réagir, prostrée, quand le vrombissement lui parvint.
Ils levèrent tous les yeux.
Au milieu du chaos, des cendres et de la fumée....
Le berg apparut.
- ILS SONT LÀ ! hurla Jorge.
- Ouvrez la trappe ! cria Brenda alors que tous les adolescents se mettaient à courir dans le véhicule.
- Tom... Il faut y aller... implora Teresa en soulevant le garçon amorphe.
Aphé et Oryane se relevèrent aussi avec difficulté, avançant trop lentement vers le berg qui stationnait. La trappe s'ouvrit et Vince et Minho s'aplatirent au sol pour leur tendre la main.
- Je ne peux pas me rapprocher plus ! s'écria Jorge.
Ils étaient trop loin...
- Allez, Thomas, accroche-toi !
- Lili ! hurla Minho en tendant sa main à la jeune fille, mais une nouvelle explosion les fit vaciller.
- IL FAUT QUE VOUS SAUTIEZ !
Puisant dans ses dernières forces, Aphéli se jeta sur le berg. Minho la saisit par les bras et la ramena contre lui, tremblant, avant de crier :
- Thomas, Oryane, grouillez, putain !
Thomas s'effondra, à bout de forces, tendant une main faible et tremblante vers le berg.
- ALLEZ !
Teresa serra les dents et projeta le garçon qu'elle aimait. Vince et Frypan le rattrapèrent et l'allongèrent au sol.
Pendant une brève seconde, Oryane voulut rester ici. À quoi cela servait-il qu'elle continue de vivre ? Ses amis étaient sauvés, elle n'avait plus à s'accrocher.
Mais encore une fois, on décida pour elle. Teresa la poussa et des doigts empoignèrent Oryane. Son dos atterit sur la moquette du berg.
C'est alors que dans un formidable grondement, un bâtiment s'écroula et vint frapper la tour de WICKED.
Teresa chuta avant de se relever avec difficulté.
Thomas et elle se regardèrent. Le jeune homme tendit la main vers elle, implorant.
Puis Teresa lui adressa un dernier sourire.
Et elle bascula.
Le hurlement d'outre-tombe de Thomas était le son le plus horrible qu'Oryane ait jamais entendu.
Et ils restèrent tous là, alors que le berg s'éloignait, survolant la ville dévastée.
Oryane sentit un immense vide assommant l'envahir. Elle ferma les yeux alors qu'autour d'elle on la tâtait, on s'exclamait, on s'agitait.
La Dernière Ville était tombée, emportant WICKED avec elle.
Et quand Oryane plongea dans un sommeil comateux, elle pria pour ne plus jamais se réveiller.
Bạn đang đọc truyện trên: Truyen247.Pro