Chapitre 24. D'Arkho
— Waouh ! Je n'avais jamais vu une marque de ce côté.
— Personne n'en avait jamais rencontré, explique notre commandant.
Son masque d'indifférence s'effrite quelques secondes et j'y aperçois une lueur de surprise, d'incompréhension et une pointe d'appréhension. Il se reprend très vite néanmoins.
— Tu ne fais jamais rien comme les autres mon gars ! Et encore une fois tu te surpasses.
Mon calme est revenu et la cible de ma colère est partie se faire rafistoler par Dame Nesa. Mes compagnons me libèrent, mais restent à mes côtés, prêts à de nouveau m'immobiliser au besoin. Je devine leur surprise et leur sentiment d'incompréhension. J'aime me battre, mais jamais sans raison valable. Ils ne me regardent plus de la même façon, juste comme si j'étais une grenade dégoupillée qui risque d'exploser à tout moment.
O'Kyel observe minutieusement les volutes du dessin, marmonne entre ses dents et fronce les sourcils. Je n'en mène pas large, s'il est contrarié ce n'est jamais bon signe.
— Et qu'en dit Damabiah ?
— Il m'a ordonné de venir ici me défouler pour me sortir de la tête ma fixation sur Cassie.
Roga se marre ouvertement à mes côtés.
— C'est réussi mon gars, tu t'es bien lâché, mais tu restes obsédé.
— La ferme Roga, intervient Raze.
C'est le réservé de notre cercle, toujours à réfléchir et à calculer les risques. Jamais un mot plus haut que l'autre.
— Oh, c'est juste une blague. C'est amusant ce retournement de situation. Que lui, se moque-t-il en me désignant, lui, le coureur, le farceur, celui qui n'en fait pas une de bonne depuis des mois, se retrouve à devoir être sérieux et qu'en plus il est sous le coup d'une... malédiction où il ne peut rien faire d'autre que de penser à sa protégée. Je trouve ça hilarant.
— Connard !
— Ce n'est pas une malédiction, conteste notre chef. Et, je crois avoir une solution temporaire pour diminuer les effets de ce sortilège.
— Ah !
— Oui, mais tu ne l'auras pas de suite. La nuit est trop vieille, nous n'aurons pas le temps de rassembler les ingrédients. Et après, ça prendra trois nuits avant que tu ne sois bridé.
— Bridé ?
— L'attraction sera amoindrie, tu auras de nouveau ta liberté de penser et d'agir.
— Ça me convient.
Le soulagement et l'impatience d'être enfin moi-même se mêlent à une pointe de déception. J'aime, il faut le reconnaître, cette sensation quand je suis auprès de ma douce Equill. Comme si j'étais complet pour la première fois de ma vie.
— En attendant, tu devras rester sur tes gardes et ne pas... déraper avec Cassie. S'il le faut, je nommerai l'un des guerriers pour te seconder.
— Pour me babysitter tu veux dire ?
— Je n'ai aucunement l'intention de perdre mon lieutenant, juste parce qu'il ne sait pas garder ses mains en poche ou sa langue dans sa propre bouche.
Aïe. Il me connaît bien et sait prévoir les problèmes. Je baisse le menton en signe de déférence et soumission, mais pas les yeux. J'ai ma fierté.
— Bon, viens dans la salle de détente, nous devons attendre Damabiah puis, nous aurons notre réunion. Car en plus de toi, nous avons d'autres soucis plus importants qu'à l'accoutumée.
Nous nous dirigeons donc dans un bel ensemble vers notre pièce principale. Nous y passons le plus clair de notre temps quand nous ne sommes pas sur le terrain ou à notre entraînement, ou... à courir après les femelles humaines. Il faut dire que notre libido tient plus du démon que de l'homme. Le sexe est très important pour notre équilibre mental. Si on en est privé, des troubles du comportement se déclarent assez vite. Comme un junkie sans sa dose régulière.
La pièce est grande, avec tout le matos de gaming ultra récent et à la pointe. Une partie de Call of Dutty me calmera sûrement. L'attente n'est pas mon fort, autant me bourrer le crâne avec des flingues virtuels que de me battre encore une fois. Je me laisse tomber sans grâce dans le canapé trois places et étends mes jambes devant moi. La nuque rejetée contre le dossier et les yeux clos, je tente un exercice de respiration pour oublier la distance qui me sépare de ma belle. Elle dort, ne risque rien. Et aucun des mâles gorgés de testostérone n'est à l'étage, puisqu'ils sont là à discuter de mon cas en m'ignorant complètement.
— Quel est l'autre problème ? je demande dans un sursaut de lucidité. Tu as dit que je n'étais pas le seul.
— Oui, la frontière autour du Manoir est compromise.
— Quoi ?
— Bordel !
— Mais comment ?
Tout le monde parle en même temps sous l'effet de cette bombe.
— Cassie et D'Arkho ont été attaqué dans les bois. Ils étaient censés être dans le périmètre protégé par le bouclier créé par les Anges.
— Oui, sur le coup, je ne me suis pas posé de questions, j'aurais peut-être dû, mais je ne pensais qu'à mettre l'Equill à l'abri.
Et aussi à la baiser, l'embrasser, la lécher, la caresser. Prendre ses formes douces et délicates dans mes mains, pouvoir faire d'elle ce que je veux.
— Stop ! D'Arkho, reviens parmi nous, m'interpelle mon commandant.
J'ai encore dérivé en me souvenant de son corps sous le mien. Merde ! Il faut que je me concentre. Une claque assez violente envoie ma tête valdinguer vers la droite. Je croise l'expression hilare de Kr'ayn. Il vient de me balancer une beigne.
— Mais qu'est-ce qui te prend, Ducon ? je grogne en le crucifiant du regard.
— Je te rends service en te remettant les idées à l'endroit. Tu peux me remercier. C'est un plaisir de t'aider.
Si j'avais le temps et si j'étais certain que mes potes ne me retiendraient pas, je lui sauterais bien dessus moi aussi pour lui en coller une.
— Les enfantillages ne sont pas les bienvenus ici messieurs, ordonne Ok'yel.
On se marre quelques secondes puis tout le monde se fixe soit sur un bout de canapé, un tabouret ou même contre la cheminée pour Venc'yr qui vient de nous rejoindre discrètement. J'évite de le regarder pour ne pas encore une fois me perdre dans mes colères de jalousie possessive.
— Les Anges ont utilisé un rituel sacré pour mettre en place un sort de protection. Les démons ne peuvent pas entrer, reprend-il très sérieusement.
— Pourtant ça s'est produit.
— Oui, Raze et Roga ont pourchassé les survivants qui ont attaqué, mais ne les ont pas retrouvés.
— Ils se sont cachés dans les Ombres comme les lâches qu'ils sont.
Roga est mauvais perdant, il est notre meilleur limier. Quand il perd la trace de sa proie, il est toujours d'un caractère de chien pendant des nuits. Il casse une des baguettes de batterie avec laquelle il jouait du tempo. Rythme inconnu et silencieux pour nous, mais bien réel dans sa tête. C'est un batteur accompli, qui passe de nombreuses heures à répéter, dans sa salle insonorisée exprès ou en virtuel comme maintenant.
— Donc... quelque chose ou quelqu'un a trouvé le moyen d'approcher de la frontière et de la briser ?
— Les démons ne peuvent pas la toucher, donc ils se sont servis d'un humain. Ils en contrôlent pas mal en leur promettant pouvoir, puissance, argent. Facile à manipuler puisqu'ils mentent sans honte.
— Un humain ? Comment savoir qui ?
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