Chapitre 11. D'Arkho.
Mon réveil est comme toutes les nuits, brutal. Je reprends conscience comme un noyé qui refait surface. Mes poumons se gonflent, mes muscles se tendent, la couche pierreuse de ma peau s'effrite et se décompose en fines particules de cendres.
Mes ailes se déploient et battent en mesure. J'aime cette impression de liberté, de légèreté. Mon cœur frémit et mes sens redeviennent efficaces. À côté de moi, une silhouette recule, mon ouïe perçoit un hoquet de surprise, mon odorat reconnaît le parfum doux de notre invitée. Ma queue balaie le sol, je fais un pas en arrière, observe ma voisine et... merde, elle s'enfuit.
Elle m'a vu dans mon état primaire de Gargouille et elle flippe. Bien sûr, c'est normal après tout, elle n'a sûrement pas eu plus d'infos et surprend mon retour à la vie. Je suis affreux sous cet aspect avec mes griffes crochues, mes traits grossiers et plus épais, cet appendice qui se balance en suivant le rythme de mon énervement. Je ressemble aux démons avec mes cornes et mes canines.
Cassie court vite, elle est déjà à la moitié de la pelouse. Pour une fille qui était cloîtrée sans sport, je la trouve très résistante.
- Qu'est-ce que tu as encore fabriqué, D'Arkho ?
Mon commandant vient d'arriver près de moi. Il a repris son aspect humain, et me regarde comme si j'avais volé un bonbon à un enfant.
- Putain ! Pourquoi ce serait moi qui aurais foiré cette fois ?
- Parce que c'est ta spécialité ? me rétorque-t-il, blasé.
Bon OK, je suis souvent dans les emmerdes, à cause des femmes, de l'alcool ou des voitures. Non, soyons honnêtes, tous les véhicules pour peu qu'ils soient rapides, j'aime aussi les motos. Je souris à cette pensée, mais O'kyel m'interrompt en me donnant un coup de poing dans le haut du bras, et il désigne la petite forme qui court à perdre haleine vers la forêt.
- Bon, tu vas réparer tes conneries ?
- Je suis innocent, je m'exclame en levant les yeux au ciel. Mais oui, je vais y aller. Faudra quand même reconnaître qu'elle traînait dehors quand je me suis réveillé, comment je pouvais savoir moi ?
- Rien à foutre, rattrape-la !
Mon chef est toujours pareil, il grogne et ordonne. Il ne se lance jamais sans avoir calculé toutes les probabilités d'erreurs ou d'échecs. Par contre, du point de vue sociabilité, c'est un vrai néant. Il ne sourit pas, ne se marre jamais et le jour où il sera béat d'admiration pour un joli cul, soit je meurs de rire, soit je me flingue. Il est impossible que ça arrive, il est trop terre à terre pour avoir seulement une pensée autre que pour le boulot.
Je prends mon élan et saute au-dessus de la rambarde en marbre blanc. Mes pieds touchent le sol avec souplesse et je commence la poursuite. Mon sang se met à couler plus vite dans mes veines. J'aime la sensation, pourchasser une proie, deviner ses mouvements, anticiper ses décisions pour mettre au point une attaque. Ma nature se révèle dans ces moments-là. Je suis submergé par les hormones, mes instincts prennent le pouvoir. Si je pouvais allonger le temps de chasse, jouer un peu, ce serait une nuit comme je les aime. Je dois rester concentré pour ne pas oublier qui je suis et contrôler ce qui fait de moi un prédateur.
Cassie vient de plonger dans les profondeurs du bois. Se faufilant entres les arbres, elle bondit et retombe tout en légèreté, changeant de direction de façon aléatoire comme une biche aux abois.
Mon champ de vision se rétrécit, ma respiration devient plus intense, j'emmagasine l'oxygène et donc de l'énergie. L'excitation a remplacé la joie féroce du chasseur. Derrière mes rétines, je vois du sang et de la chair à mordre, à déchirer. J'en ai le goût dans la bouche par anticipation. La poursuite me grise, elle est rapide, mais pas autant que moi et même si je n'utilise pas mes ailes, je gagne du terrain.
Ma conscience se rétrécit à mes seuls souhaits : me jeter sur elle, la coucher sur cette terre odorante, entendre son souffle saccadé et son petit cœur affolé. Mes canines poussent sous l'effet de mon ivresse des sens. Trop de stimulus m'exaltent. Je déraille complètement, cette femme essaie de me semer, mon instinct devient plus fort et m'engloutit et emporte le peu de raison qu'il me reste. Je l'attraperai, la prendrai, laisserai tous mes désirs s'exprimer. Je ne me rends pas compte de mes gestes, mais je mets en pratique tous mes fantasmes. Un cri infime s'échappe de sa bouche, son corps se tord sous mes mains, je la plaque et l'écrase sous mon poids. Ses formes se logent contre mon torse et mes hanches.
Ma prise se débat vivement, mais elle est bien plus faible et fragile. Elle ne saura pas me résister. J'ai envie de déguster, de me délecter de sa chaleur, de son sang. Il doit avoir une saveur piquante sous l'effet de sa peur.
Je colle ma bouche contre sa carotide frémissante. Ma langue vient taquiner sa peau et la lécher. Mon corps se raidit contre le sien, mon sexe gonfle et se retrouve comprimé entre nous deux. Elle est délicieuse. J'adore les femmes, je vais la prendre avant de la boire.
- Pitié, non...
- Mmh, tu es si douce.
Je remonte vers sa mâchoire, la contourne et cherche sa bouche. Elle est close, mais je lui ferai du charme jusqu'à ce qu'elle craque et me laisse entrer.
Ma captive se détourne, pleurniche et me repousse. Ses petites mains n'ont aucune force, pareilles à des griffes de chaton. Inefficace et mignon.
- Arrêtez ! gémit-elle.
Son ton est difficile pour moi à reconnaître. Un semblant de désespoir ? Un refus pour jouer ? Mes maîtresses aiment quand je les maintiens, quand je les empêche de se mouvoir. Ses poignets fins sont minuscules entre mes doigts. Je les serre en une menotte des plus excitantes. Elle s'amuse avec moi, résiste et rejette mes avances. Mon but est alors trouvé : plus d'efforts de ma part pour avoir la satisfaction de l'entendre gémir de plaisir.
Comme elle me soustrait ses lèvres, je me rabats sur sa joue et me dirige vers son oreille. Ma main libre la malaxe, la caresse, soupèse ses seins et les comprime dans une tentative pour faire ériger ses pointes et les rendre douloureuses. Je veux qu'elle ait besoin de ma bouche sur eux, qu'elle me supplie de la mordre, de la sucer, de la lécher... Mes hanches se balancent en cadence contre son bassin, poussant ses jambes à s'écarter.
Mes tempes bourdonnent sous l'afflux de sang, je n'entends pas ce qu'elle me gémit. Je suis trop intéressé par sa peau, sa douceur. Mais soudain, un doute coupe mon élan. Sa joue humide... ses plaintes, ses gestes de refus, pourquoi ne veut-elle pas ?
Je me soulève à bout de bras et l'observe. Elle est pâle et crispée.
Merde ! Cassie, c'est Cassie ! Ce n'est pas une femme ordinaire, c'est ma protégée.
Je bondis sur mes pieds et recule. Je fourrage ma crête de cheveux de mes doigts crochus. Quelle connerie, j'ai agressé celle que je devais récupérer, celle que je dois défendre et préserver de tout mal. Lui courir après m'a retourné encore une fois le cerveau et j'ai oublié mon objectif premier, pour juste me laisser porter par mes envies.
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