Chapitre 10 partie 2. Cassie.
La journée s’est passée sur le même thème. Gentillesse et tendresse, accueil bienveillant, attention de tous les instants.
J’ai été nourrie jusqu’à ce que je n’en puisse plus. Nesa m’a montré les environs, les pièces de vie, les salons, la bibliothèque. Les garçons comme insiste la gouvernante à les nommer, sont des geeks de première. Ils ont toute une partie du manoir consacrée aux ordinateurs, jeux en ligne, et consoles existantes. Leurs préférences vont aux jeux de guerres et de stratégies.
Leurs installations se regroupent autour de canapés confortables et tables basses supportant des boîtes par dizaine aux titres évocateurs : Final Fantasy, Metal Gear, Fortnite, Call of Duty, Overwatch, Black Oops, Z Nation, plus de la moitié me sont totalement inconnus, mais je comprends qu’ils aiment la baston et le sang, ceux-là. Je me demande qu’elle est leur moyenne d’âge. Enfin, D’Arkho doit avoir un bon vingt-cinq ans d’après ce que j’ai pu constater.
Je n’ai pas eu l’occasion de voir leur salle de réunion, mais ma curiosité ne va pas jusque-là. Je voudrais savoir surtout où ils peuvent être. À part Nesa et Viktor, personne ne se trouve dans la maison.
Je suis restée la plus grande partie de la journée dans la bibliothèque, assise dans un fauteuil de cuir à lire avec un plaid sur les genoux. Régulièrement approvisionnée par ma bonne étoile en gâteaux, biscuits et thé très chaud. Chouchoutée, c’est le terme.
Ces heures de détente sans penser au futur me font un bien merveilleux. Je ne pose pas mes questions à Nesa, elle a détourné la conversation les deux premières fois, donc j’ai compris que je n’en tirerais rien.
Mes jambes commencent à être ankylosées, je vais aller faire un tour dehors. Prendre l’air, respirer librement et admirer le coucher du soleil, voilà mon plan en attendant le retour de Damabiah et de ses hommes. Après, je ne les lâcherai plus jusqu’à ce que je sois satisfaite des réponses obtenues. Ils devront tout me dire, tout avouer.
*****
Poussant les portes extérieures, j’inspire fort. L’air frais pénètre mes poumons et me donne le coup de fouet qu’il me fallait pour me remettre en forme.
Les jardins sont entretenus au millimètre. Les bordures sont nettes, les arbustes taillés précisément et les plates-bandes remplies de fleurs de toutes les couleurs partagent les espaces de façon géométrique. Seul un massif d’arbres au loin est plus sauvage. Ce bois me paraît plus sombre, moins charmant, moins hospitalier.
Les terrasses font le tour de l’édifice, comprenant des bancs de pierre, des meubles de jardin en bois foncé ainsi que des statues assez flippantes, d’un style mélangeant le moderne et le fantastique. Ces sculptures ont des traits humains, mais aussi chimériques. Une queue longue et écaillée et des ailes de chauve-souris. Des visages torturés, grimaçant comme sous l’effet d’une douleur ou d’une peur sans nom. Issu d’un croisement entre l’homme et mes pires cauchemars. Elles me font frissonner, horrible rappel de mes nuits. Leurs griffes au bout des leurs mains sont dirigées vers le ciel, semblant menacer d’hypothétiques dangers. Sont-ils placés là pour prémunir le manoir ou prévenir le mal de ce qu’il se passera s’il vient plus avant sur le territoire de l’ange ?
Je reviens vers ma chambre, car le soleil se couche doucement et l’obscurité arrive, et j’en trouve encore une devant mes fenêtres. La créature est grande, imposante, ses ailes déployées en arrière. Ses lèvres sont relevées en un rictus diabolique, découvrant deux paires de canines pointues et affûtées. Le sculpteur lui a donné les traits de D’Arkho en plus rude, plus épais. Son expression est aussi tourmentée que toutes les autres. Mon cœur se serre à la vue de cette douleur que la statue ressent. L’artiste a su tellement bien transmettre ces sentiments, ils semblent si réels. La couleur gris foncé de la pierre donne du relief aux détails. Le pli d’un vêtement, un collier en cordelette avec un médaillon dont le dessin est archaïque. Les moindres éléments sont ciselés, gravés avec minutie.
Je suis perdue dans mes pensées, dénombrant les points communs avec l’un de mes sauveurs, caressant le bras tendu, observant ce regard qui fixe la forêt.
Soudain, un craquement me fait sursauter.
Je recule précipitamment, la statue a bougé ! Mais… ce n’est pas possible. Sa peau se fragmente, les morceaux tombent. La créature tremble puis se secoue, ses yeux brillent dans le noir. Je suis à nouveau en présence d’un démon, il va me faire du mal. La panique me submerge et je m’enfuis sans réfléchir vers le jardin. Je cours à perdre haleine. Il faut que je me cache, que je le sème, qu’il ne me retrouve pas. Le cœur au bord des lèvres, les larmes sur les joues, je cours sans me retourner.
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