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Convalescence


Opération. 

Quelques jours de soins intensifs. Des séances interminables de trucs et bidules variés, souvent oppressantes. Puis retour dans la mère patrie. Papa travaille dur, une vraie machine. L'existence c'est maman, la maison près des vignes, la vieille horloge comtoise du salon. Le brouillard hâlé d'un soir d'été, le murmure du vent, la nuit dans les branches du noyer. A part cela, nothing !

Pour la première fois de ma courte existence, je sus véritablement ce que signifiait «être bienheureux». Dormir, s'éveiller, retrouver la grisaille, la terrible somnolence d'un univers sans passé, suspendu et sans devenir. Quelque chose ressemblant à une antichambre de la mort, en somme !

Au cours d'une période assez longue je fus en « flânerie mentale ». Je ne pensais à rien de précis, je continuais de flotter telle une fumée délayée par le vent. Des odeurs, des bruits. Les premières de cuisine, les seconds de conversation.

Plus tard, la téloche à trois chaînes me faisait chier : je n'arrivais pas à coordonner les images, à suivre les tragédies factices d'acteurs à la con. Et pis y'avait pas la télécommande... Lire aussi m'était impossible, les lettres se mouvaient dans les pages comme des dizaines de fourmis affairées. Mais je bouffais avec plaisir les plats préparés par maman. Son tablier imprégné de senteurs culinaires, me mettait en appétit !

Il existait en moi une fatigue qui me tenait lieu d'occupation. Je quittais mon lit pour gagner un canapé, et ça me faisait l'effet d'un voyage !

Je n'écoutais plus la connasse d'infirmière, ses questions, ses pronostics relatifs à un proche rétablissement. Elle puait, une odeur douceâtre de tabac froid. Me foutait la gerbe, cette morue ! Qu'est-ce que maman allait perdre du temps avec cette messagère de mort.

Par instant un épais mystère me flanquait une angoisse. Une espèce de cri me venait ; je le retenais, pas foutre la trouille à maman. Puis, la fumeuse de clope se caltait. Pas dommage. Je m'assoupissais. Je sentais alors que ma mère m'enveloppait d'une couverture et tirait les doubles rideaux afin de plonger mon visage dans l'ombre.

Ma sieste allait durer. Je gardais un vaporeux souvenir des allées et venues de mon ange gardien. Tout ce qu'il demandait c'est qu'on guérisse son « Petit ». Peu lui importait que ce soit grâce à un professeur ou à de la poudre à magicien.

Et il guérit...


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