— Hmm... ok, combien font mille-trois-cent-vingt-sept fois six-cent trente deux ? demande Silas, allongé sur mon lit.

   Il balade son crayon devant ses yeux, ce petit sourire canaille au coin des lèvres. Il ne me faut pas plus de cinq secondes pour lui répondre en le fixant moqueusement.

   — Huit-cent-trente-huit mille six cent soixante-quatre.

   Il ouvre la bouche en feignant d'être choqué, puis fronce son joli nez où s'éparpille quelques taches de rousseur. Ses yeux d'un vert si clairs me percutent brusquement. Il n'est pas en colère, il ne l'est que très peu. Juste incroyablement frustré. Il secoue la tête pour ébouriffer sa chevelure de feu et soupire en plongeant sa tête dans mon oreiller.

   — T'es une calculette humaine, sérieux...

   Je ris faiblement tout en haussant les épaules. Je n'y peux rien, c'est ainsi que je suis né. Les mathématiques et la physique chimie sont mes domaines de prédilection. Ma logique est imbattable quand il s'agit d'aligner des chiffres entre eux. Je retourne à mon devoir de français en fronçant les sourcils, plus sérieux.

   Derrière moi, Silas bat la mesure sur son propre manuel du bout de son stylo, ennuyé. L'école le prive de sa créativité, à ce qu'il paraîtrait. On ne se connaît que depuis le début de l'année, mais nous nous sommes rapprochés à une vitesse fulgurante à tel point que j'ai rapidement volé la place de son meilleur ami. Dommage, j'aimerais être tellement plus...

   Je me raidis aussitôt en sentant quelque chose de froid contre ma nuque. Le rire de Silas résonne dans mon dos. Je peste et le repousse tout en retirant la règle en acier qu'il a glissé sous le col de mon t-shirt.

   — Révise, sérieux ! bougonné-je.

   Il fait la moue. J'adore sa bouille dans ces moments-là. Elle me donne envie de le cajoler et de lui passer tous ses caprices. Ce que je fais la plupart du temps. Céder, hein, pas le prendre dans mes bras.

   — Mais je m'ennuie..., grogne-t-il.

   Un soupir m'échappe et je lui accorde un regard. Il me sourit avec innocence sauf qu'il a déjà compromis notre après-midi. Je sais que lorsqu'il n'a aucune envie de plancher sur ses devoirs, il est intenable. Et on est amis depuis seulement trois mois !

   — Encore une demi-heure et je te fais des crêpes pour le goûter.

   — Vrai de vrai ??

   — Ouais.

   — Oh, Aurelian ! T'es le meilleur des potes, s'exclame-t-il en m'agrippant par le cou.

   Je fais mine de bougonner alors que je me retiens de rougir. Il sent bon la menthe. Je crois qu'il m'a grillé les derniers neurones qu'il me restait. Avec plus d'entrain, il se concentre sur ses devoirs me laissant dans tous mes états.

   Je ne sais vraiment pas comment je vais tenir un an à ses côtés..., songé-je en barrant une phrase.

   L'année s'annonce compliquée.