𝐂𝐡𝐚𝐩𝐢𝐭𝐫𝐞 𝐭𝐫𝐞𝐧𝐭𝐞-𝐭𝐫𝐨𝐢𝐬
𝓙e regardais l'eau ruisseler le long de mon corps. Elle épousait parfaitement les ondulations de ma peau nu. J'osais à peine poser les mains sur mon cou. Les marques autour de celui-ci commençaient à s'effacer. Mais resteront à jamais dans ma mémoire ; et ça, personne ne pourra jamais me le retirer.
Mais maintenant que Gian connaissait la vérité, j'avais l'impression d'être libéré d'une partie du poids. Un sentiment de soulagement m'avait envahi ce soir-là. Il avait du ressentir la même chose hier soir lorsqu'il s'était confié sur la tragique mort de ses parents. Et j'espérais l'avoir délivré également d'un poids.
Cela faisait une dizaine de minutes que je laissais l'eau couler. J'aimais le bruit que cela entrainait ; c'était comme apaisant. J'avais besoin de me sentir bien et d'enfin pouvoir respirer. Ne pas boire avait été un véritable combat contre moi-même hier soir. Et j'étais fière de l'avoir remporté. J'espérais seulement que ce ne soit pas le seul que je gagnerai. Je comptais bien ressortir victorieuse de chacun d'entre eux.
Hier, j'étais rené de mes cendres. J'avais dit adieu à l'alcool. Et j'avais dessiné. Certes, je n'avais pas peint mais je comptais bien m'y remettre peut-être que l'inspiration reviendra. Qui plus est, Gian était un modèle plutôt pas mal.
— Dylan ! hurlait Evy en frappant de toutes ses forces contre la porte de la salle de bain. Y'a un mec qui veut te voir !
Mon cœur ratait un battement. J'arrêtais l'arrivée d'eau afin de pouvoir entendre ce qu'elle me disait de l'autre côté de la porte. Je n'étais pas certaine d'avoir bien entendu. Et je préférais être sure avant de m'imaginer quoique ce soit.
— Tu m'entends ?! continuait-elle de crier. Y'a quelqu'un qui t'attends impatiemment.
J'avais donc bien entendu. Quelqu'un était là et je supposais que c'était lui. Un sourire s'étirait sur mes lèvres ; je ne pouvais pas m'en empêcher. Après la soirée d'hier, tout avait changé. Lui, moi et tout ce qui nous entourait avait changé.
Je me précipitais hors de la douche en disant à mon amie de le faire attendre. Je me séchais rapidement avec une serviette et je m'empressais de m'habiller. J'enfilais un pull beige en maille que je rentrais dans un jean brut. Je brossais ma longue chevelure en arrière.
Puis, je sortais de la salle de bain et je me pressais de rejoindre la pièce principale. Je trouvais Evy en pleine conversation avec un garçon brun. Ce n'était pas lui. Ce n'était pas Gian. Mais mon cœur ne cessait de s'accélérer. J'avais l'impression que c'était irréel. Comme si tout ce que je voyais ; ce n'était que mon imagination qui me jouait des tours.
Je ne pouvais pas y croire. Non, cela ne pouvait pas être lui. Il n'aurait pas fais tout ce chemin pour moi. Pour me voir moi et personne d'autre. Pourtant, j'avais beau me pincer très fort le bras, il était toujours là ; dos à moi. Je ne rêvais pas.
— Tu sais pourquoi on dit que les blondes sont stupides ?
Evy faisait basculer sa tête gauche à droite en guise de réponse.
— Parce que pendant longtemps, la chevelure blonde des femmes a été associé aux bimbos et que depuis, c'est resté, expliquait-il fier de lui.
Mon amie levait les yeux au ciel face à sa réponse. Elle n'avait pas vraiment l'air convaincu par la technique de drague de mon frère. Cela ne m'étonnait même pas. Il était toujours aussi idiot qu'avant. Pourtant, je tenais à lui et ce n'était pas prêt de changer. Jamais je n'aurais pensé le voir ici, dans mon appartement à Seattle.
— Je comprends mieux pourquoi tu es toujours célibataire, lâchais-je en arrivant derrière lui.
Tyron se retournait afin de se retrouver face à moi. Il n'avait pas changé depuis Noël. Et je devais avouer que sa bouille d'idiot m'avait beaucoup manqué. Au lieu de répondre à ma remarque, il me serrait dans ses bras pendant quelques secondes.
— Qui te dit que j'étais en train de draguer, répondait-il finalement.
— Tyron Darius Pratt, tu ne pourras jamais me duper ; jamais.
Je le voyais soupirer. Il était déçu. Pourtant je le connaissais par cœur autant qu'il me connaissait. C'était la définition parfaite des relations entre frères et sœurs. Une complicité inexplicable. On avait toujours été soudé même si la vie avait séparé nos chemins il y a quelques mois.
— T'es pas drôle, c'est moi le grand-frère, alors c'est moi qui devrait être en position de force, râlait-il en faisait la mou.
Je ne pouvais pas m'empêcher de lâcher un rire. Evy également pouffait de rire. En voyant que l'on se moquait de lui, Tyron attrapait la poignée de sa valise et faisait mine de partir. Il était toujours comme cela. Et c'était dans ces moments-là que je réalisais que je ne pourrais jamais me passer de lui.
— Si c'est comme ça, je retourne au fin de Portland ! Salut les rageux !
— Ce n'est pas de ma faute si tu ne peux pas t'empêcher de sauter sur tout ce qui bouge.
Il s'arrêtait net et se retourner vers moi. Il me lançait son meilleur regard noir. C'était pour toutes ces raisons j'aimais autant mon frère. Il était toujours là pour moi et il n'était pas comme les autres. Un feu spécial brulait en lui et procurait du bonheur aux autres. Et surtout : à moi.
Evy nous laissait nous retrouver entre frère et sœur et elle partait s'isoler dans ma chambre. Tyron abandonnait sa valise dans l'entrée de l'appartement. Il s'approchait de moi, posait sa main à côté de sa bouche avant de me chuchoter :
— Ce n'est pas de ma faute si ta copine est une bombe atomique.
— J'hallucines ! Ty !
Je ne pouvais pas m'empêcher de sourire malgré tout. Il était vraiment fort. Très fort. Je ne savais pas comment j'avais fait pour survivre tout ce temps ici, sans lui. Il était tellement fort pour faire rire les autres et surtout, pour leur remonter le moral.
— Lâches l'affaire, son cœur est déjà prit.
Je l'entendais jurer dans ses dents. Mais il reprenait du poils de la bête en s'installant confortablement dans le canapé. Malgré les échecs, il se relevait toujours. Voilà ce qui nous différenciait. Moi, je me laissais entrainer six pieds sous terre et je réalisais trop tard que j'aurai du me battre. Que j'aurai pu le faire. Car si je creusais au fond de mon âme, une force inexploitée s'y cachait.
— Plus sérieusement, qu'est-ce que tu fais ici ?
— Je n'ai pas le droit de rendre visite à ma petite sœur pour cette nouvelle année ? me retournait-il la question.
Il se laissait tomber dans le canapé et son regard divaguait sur chaque recoin de mon petit appartement. Les cartons étaient toujours empilés dans tous les coins. Rien n'avait réellement changé depuis que j'avais emménagé. C'était comme si au fond de moi, je savais que je ne resterai pas éternellement ici.
— T'aurais pu au moins déballer tes cartons, relevait-il.
— J'ai pas le temps pour ces conneries, mentais-je.
Car en réalité, je l'avais ce temps. J'en avais beaucoup depuis que je ne peignais plus. Le temps ce n'était pas ce qu'il me manquait. Non, c'était le courage. Il s'était volatilisé de mon corps lorsque mes cicatrices étaient apparues.
Je m'approchais de la grande baie vitrée afin d'observer la ville de Seattle. Est-ce que j'étais vraiment à ma place ici ? Qu'est-ce qui pouvait bien m'y retenir ? En faite, la question, c'était plutôt qui me retenait. Et la réponse était glissée dans les profondeurs de mon cœur.
Les heures s'étaient écoulées tellement vite, on avait rattrapé le temps perdu. Puis, en plein milieu de l'après-midi, on avait décidé de visiter un peu Seattle. Il était vrai que depuis que j'étais arrivée, je n'avais pas vraiment eu l'occasion de m'aventurer très loin.
Tyron avait conduit jusqu'au front de mer. Celui-ci longeait Elliott Bay. En sortant de la voiture, j'étais obnubilée par les couleurs qui surplombaient le ciel. Un dégradé de rose s'y propageait et je ne pouvais pas m'empêcher d'avancer pour mieux le voir. D'un pas rapide, j'arrivais au bord du ponton. Autour de moi, des centaines de bateaux.
— Tu n'étais jamais venu ? me questionnait-il.
— Non. Comment tu connais cet endroit ?
— J'ai mes sources.
Je détournais le regard du ciel pour regarder mon frère. Celui-ci était en train de s'installer sur le rebord du ponton. Je faisais de même tout en insistant pour connaitre sa source. Mais il n'en démordait pas et refusait de me dire quoi que ce soit. Je laissais donc tomber lorsque je comprenais qu'il ne lâchera pas le morceaux.
— Seattle est vraiment une très belle ville, commentait-il en fixant le spectacle.
Je laissais tomber ma tête sur son épaule. Je restais muette. Tyron avait raison, cette ville était parfaite. Trop parfaite pour une fille comme moi. Pourtant quelque chose me raccrochait a elle. Même si un jour je partais d'ici, elle restera à jamais gravé dans ma tête.
— Tu sais que si tu veux revenir, personne ne te jugera ?
Instinctivement, je reculais ma tête de mon frère. Mes sourcils se fronçaient. Je comprenais mieux la raison de sa venue. En réalité, ce n'était pas pour moi qu'il était là. En quelque sorte, il voulait se prouver qu'il avait raison et que les paroles qu'il m'avait dite avant que je ne partes de Portland étaient justes.
« Tu ne devrai pas t'enfuir. Surtout seule. Tu ne tiendra jamais un mois seule dans une aussi grande ville que Seattle. Je suis certain que dans quelques jours, tu refera ton apparition à Portland » m'avait-il dit. Sur le coup, j'avais très mal réagit. J'avais quitté Portland plus énervé que jamais et c'était pour cette raison que je ne voulais pas y retourner pour les fêtes.
Puis avec un peu de réflexion, je m'étais dit que c'était peut-être parce qu'il ne voulait pas que je partes.
— C'est papa qui t'as dit de venir ? le questionnais-je d'un ton froid.
Il tournait son visage vers moi en tentant de me toucher le visage. Mais je glissais mon corps sur le côté pour m'éloigner de lui. Pourquoi les gens avaient toujours quelques choses derrière la tête ? Pourquoi ils n'agissaient tout simplement pas par instinct ?
— Je t'assures que non, répliquait-il.
— Je ne te crois pas.
Ma tête était sur le point d'exploser. Je ne rentrerai jamais à Portland ; c'était une certitude. Portland était mon passé. Seattle, mon présent. Et peut-être que j'aurai un avenir ailleurs, qui sait ?
— Je ne voulais pas te vexer, je voulais seulement te rassurer car depuis que tu es parti, j'ai l'impression que tu n'es plus la même...
Non mais dites-moi que je rêves ! Évidement que j'avais changé. Évidement que je n'étais plus la même. Comment ne pas changer après tout ce que j'avais vécu ? Sauf que tout cela, il ne le comprendrait pas alors je ne disais rien. J'en avais marre de me battre.
— Je voulais m'assurer que tu allais bien, ça sert à ça les grand-frère, continuait-il dans sa lancée.
— Je vais bien, j'ai tout ce qu'il me faut ici. Si j'ai quitté Portland, c'est pour ne plus jamais y revenir.
La tension qui s'était installée entre nous retombait peu à peu. Je me rendais compte que je m'étais emportée pour rien. Qu'à force de me méfier de tout et de tout le monde, je risquais de perdre les gens que j'aimais. Alors je me rapprochais à nouveau de Tyron et je posais ma tête contre son épaule. Le silence qui s'était installé était apaisant et nos deux regards étaient focalisés sur le ciel rosé.
Bạn đang đọc truyện trên: Truyen247.Pro