𝐂𝐡𝐚𝐩𝐢𝐭𝐫𝐞 𝐪𝐮𝐢𝐧𝐳𝐞
𝓛es doigts enroulés sur cette poignée de porte, j'étais figé sur place. Je ne savais pas quoi lui répondre. Elle était là devant moi, son dos contre le mur, les mains trempées de larme. Je ne voulais pas la brusquer, ni la blesser. Je prenais mon courage à deux mains et je prononçais :
— Tu veux vraiment que je reste ici ? Avec toi ?
Elle hochait simplement la tête. Il y a encore quelques minutes, tout ce qu'elle voulait, c'était que je disparaisse à tout jamais. Et maintenant, elle ne voulait plus que je partes. Je ne comprenais pas. Malgré tout, une force intérieur me poussait à rester. Je décidais de refermer la porte et de revenir sur mes pas.
En me voyant arriver, Dylan s'asseyait sur le banc en bois sur lequel était disposé de nombreux sacs. Jamais je n'aurais pensé qu'un jour, je me retrouvais dans un vestiaire aussi lugubre avec une fille en pleure. Jamais. Comme quoi, tout peut arriver dans la vie. Il faut toujours garder espoir.
Sauf que l'espoir ne faisait plus parti de mon vocabulaire. Il y avait bien longtemps que j'avais arrêté d'espérer. À quoi cela servait d'espérer aller mieux ? Alors que je savais pertinemment que mon état se détériorait de plus en plus. Les jours défilaient et un jour ; viendra mon heure.
— C'était pas malin de ma part de te dire toutes ces choses, articulais-je pour combler le silence qui s'était installé.
— C'est pas ta faute, murmurait-elle en pliant ses jambes contre sa poitrine.
Elle mentait. J'avais fait quelque chose qui l'avait faite pleurer. Et je m'en voulais. Je ne connaissais rien de son passé, de ses cicatrices et pourtant je savais qu'elles étaient là.
— De quoi tu veux qu'on parle ? la questionnais-je pour l'aider à penser à autre chose.
Je la voyais réfléchir. Ses iris noisettes étaient plongées dans le vide. Est-ce qu'elle était en train de faire une crise d'angoisse ? C'était fort probable. Je m'y connaissais pas mal sur le sujet car Abby en a faite pendant longtemps. Désormais, elles sont de plus en plus rares.
— Racontes-moi ce que tu as fait aujourd'hui.
— Je me suis réveillé aux alentours de huit heures du matin puis je me suis préparé. J'ai amené ma soeur chez sa psy et je l'ai attendu dans le couloir. Après je l'ai emmené déjeuner dans un petit restaurant en bas de ma rue. Nous sommes rentré et mon meilleur ami est venu passer l'après-midi chez moi. Puis, comme tous les soirs depuis une semaine, je suis venu dans ce bar...
Durant mon récit, elle avait fermé les yeux surement pour se concentrer sur ma voix. Je posais ma main sur la sienne en espérant qu'elle aille mieux. Je sentais son pouls battre à un rythme effréné. Désormais, j'en été persuadé, elle avait fait une crise d'angoisse.
— Je peux te poser une question ? lui demandais-je d'une voix à peine audible.
— Oui, disait-elle dans un murmure.
Les yeux toujours clos, elle ne bougeait pas. Je remarquais qu'elle n'avait pas essayé de retirer ma main de la sienne. J'inspirais une grande bouffée d'air. Je voulais savoir ce qui l'avait rendu comme cela. Beaucoup n'aurait pas compris qu'elle avait vécu un événement douloureux par le passé. Mais moi, je le savais. C'était comme une évidence.
Comme moi, elle s'efforçait d'oublier. Dylan le faisait par l'alcool alors que moi, je couchais avec des filles. Mais au fond, tous les deux, on n'était pas aussi différents qu'elle le pensait. La douleur était présente dans nos deux coeurs.
— C'est quoi ta couleur préférée ?
Contre toute attente, elle pouffait de rire. Mon coeur se décontractait. Je venais de réussir à changer ses pensées négatives par des plus positives. Ses pupilles s'ouvraient et elle tournait le regard vers moi. Lorsqu'elle remarquait que ma main était posée sur la sienne, elle la retirait gênée.
— Je suis plus que sérieux, réponds à ma question, insistais-je.
— Rouge, me souriait-elle.
Cela ne m'étonnait même pas. Cette couleur lui correspondait à la perfection. Comme le rouge, elle était splendide et avait du caractère. Plus je restais en sa compagnie, plus je me rendais compte qu'elle n'avait rien à voir avec les filles que je fréquentais d'habitude.
Dylan était différente.
Elle avait une part de mystère qu'elle gardait en elle. Et que je voulais découvrir. Ma curiosité était mise à l'épreuve. Les autres filles n'avaient jamais rien de spécial. Alors qu'elle ; si.
— Et toi ? me retournait-elle la question.
— Le noir.
Elle haussait un sourcil, surement était-elle étonnée de ma réponse. À vrai dire, même moi, je l'étais. Petit, la couleur que j'aimais le plus était le bleu, comme la couleur de l'océan. Mais la vie avait fait que j'avais changé. Je n'étais plus un enfant. Le Gian de l'époque avait grandi. Il était devenu plus morose, plus détruit. La vie l'avait endurcit.
— Pourquoi le noir ? Tu es au courant que ce n'est pas une vraie couleur ?
Cette fille me surprendra toujours. Elle avait l'air d'en connaitre un rayon sur les couleurs. Pour moi, le noir était une couleur comme les autres, je ne voyais pas la différence. Certes, elle était sombre, énigmatique et vide. Mais elle existait car je la voyais tous les jours sans exception.
— Pourquoi ce ne serait pas une couleur, après tout, si elle a un nom, c'est qu'elle l'est, déclarais-je en observant sa réaction.
— Les seules couleurs sont celles de l'arc-en-ciel, le reste, ce sont simplement des valeurs, m'expliquait-elle. Par exemple, le rose est un dérivé du rouge car lorsque tu mélanges du rouge et du blanc...
— Ça donne du rose, la coupais-je.
Elle acquiesçait.
— Impressionnant, je ne savais pas, ajoutais-je. Et je peux savoir d'où te vient toutes ces connaissances sur les couleurs ?
Son regard se détachait du mien. Peut-être que j'avais posé une question qu'il ne fallait pas. Comme d'habitude, j'avais le don de tout gâcher. Mais rapidement, elle reprenait du poil de la bête et me répondait :
— Je peins, ou plutôt peignais, lâchait-elle d'un ton triste.
Je comprenais beaucoup mieux désormais. Tout s'éclairait dans ma tête. Et le souvenir de cette toile qui était tombé devant mois il y quelques semaines, me revenait. C'était la sienne. Et je l'avais jeté à la poubelle.
— Je suis certain que tu étais doué, pourquoi tu as arrêté ?
— Ne te sens pas obligé de faire la discussion avec moi, se braquait-elle soudainement.
Est-ce que j'avais fait ou dit quelque chose de mal ? Je n'en avais pas l'impression. Alors pourquoi elle devenait froide tout à coup ?
— Ça m'intéresse.
Elle plongeait ses iris noisettes légèrement brillantes dans les miennes. Son regard en disait long, elle était triste. Je ne pouvais pas m'empêcher de la regarder. Les traits de son visage étaient tellement fins et magnifique. Son nez était petit et se fondait à la perfection avec le reste. Sa peau pâle me donnait la sensation qu'il pouvait se fissurer d'une minute à l'autre.
— Peindre était ce qui faisait battre mon coeur depuis toujours. Mais la vie a fait que mon talent a disparu et la passion également. J'ai arrêté il y a un mois, m'expliquait-elle.
Alors que nos yeux étaient encrés les uns dans les autres, des coups à la porte nous faisait sursauter. J'ai presque cru que j'allais faire une crise cardiaque. Sans que l'on donne notre accord, la porte s'ouvrait en grand. La silhouette d'une jeune femme, amie de Dylan, apparaissait. Ses mains étaient posées sur ses hanches et ses sourcils étaient froncés.
— Salut Gian, prononçait-elle mon nom en l'accentuant.
— Evy, la saluais-je avant de me lever du banc.
Une tension s'était instaurée entre nous. Pourtant, je n'avais rien contre elle mais quelque chose me disait qu'elle essayait de protéger son amie. Elle n'avait pas tout à fait tord car j'étais quelqu'un de dangereux.
— Tout va bien, Dylan ?
L'intéressée hochait la tête en se levant à son tour. Fébrile, elle me souriait et rejoignait son amie. Je ne disais rien car il n'y avait rien à dire. J'avais fait ce que je devais faire ; m'excuser. Désormais, chacun pouvait partir de son côté.
Les deux filles quittaient le vestiaire sans un mot. Néanmoins, j'avais l'impression qu'un vide plus profond se créait en moi. Je décidais de les rattraper. Peut-être que s'était une erreur mais quitte à passer pour un connard, autant le faire à fond.
— Est-ce que je pourrais avoir ton numéro si un jour, j'ai besoin d'un avis sur les couleurs ?
Dylan se retournait et elle avait l'air étonné. Evy, quant à elle, me dévisageait. Pourtant, je ne comptais pas lâcher l'affaire. Le comprenant, elle sortait son portable et je sortais le mien. On s'échangeait nos numéros. Puis, sans même un au revoir, elles disparaissaient.
Je me dirigeais vers le bar et je m'installais sur la chaise haute. Je commandais un whisky. Je le buvais en seulement deux grandes gorgées. J'en commandais un deuxième. Puis un troisième. Au bout de mon cinquième verre, le barman refusait de m'en servir un autre. Je soupirais et décidais de partir.
La nuit avait pris possession de Seattle. Le brouillard s'était installé et le froid me donnait des frissons dans l'ensemble du corps. Je marchais en faisant attention où je mettais les pieds. J'avais conscience que ma démarche pouvait se comparer à celle d'un ivrogne. Pourtant, je n'en avais rien à faire.
Inconsciemment, ma marche de minuit m'avait mené jusqu'à la tombe de mes parents. C'était surement la pire idée de se retrouver seul dans un cimetière et surtout en plein milieu de la nuit. Je m'accroupissais devant leur tombe. Je posais mes deux bras sur celle-ci et je laissais tomber ma tête en avant.
— Papa, maman, je marquais une pause. Je vais mourrir.
En guise de réponse, le silence le plus complet.
— Je suis tellement désolé de ne faire que vous décevoir. Je sais très que je ne suis pas le fils que vous auriez voulu que je sois. Pourtant, c'est trop tard. Je ne peux plus changer. La seule chose que je sais faire, c'est faire souffrir les autres pour qu'ils comprennent la douleur qui est constamment dans ma poitrine ; dans mon être tout entier.
— Tu peux te battre, Gian...
Je relevais ma tête. Il n'y avait personne autour de moi. C'était simplement des voix dans ma tête. Je devenais fou. Complètement cinglé. Mais qu'est-ce qu'il n'allait pas chez moi ? Je n'étais même pas foutu de protéger Abby.
Les larmes me montaient aux yeux et je les laissais couler sur la tombe givrée. Le vent glacial ne m'empêchait pas de rester planté là. Je m'en voulais tellement. Je laissais de nouveau ma tête tomber. Mes yeux se fermaient et ma respiration devenait de plus en plus rare.
Je n'étais pas fort. Je ne le serrais jamais.
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NOTE
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Si vous saviez à quel point j'ai hâte d'avoir votre avis ! 🙈
Ce chapitre est à la fois mignon et mélancolique je trouve. D'un côté, le dialogue échangé par Dylan et Gian est léger mais d'un autre côté, la fin est plutôt triste...
Vous en avez pensez quoi de leur discussion ? Gian s'est rendu compte que la toile du début était celle de Dylan !!!
Et cette fin de chapitre ? Vous pensez qu'il va se passer quoi au prochain chapitre ? (Vous n'êtes pas prêt haha je préfère vous prévenir)
N'hésitez pas à commenter et à voter pour me motiver à écrire !❤️
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