𝐂𝐡𝐚𝐩𝐢𝐭𝐫𝐞 𝐪𝐮𝐚𝐫𝐚𝐧𝐭𝐞-𝐝𝐞𝐮𝐱
— Tu dois absolument revenir..., grelottait Evy derrière le fil.
Alors que je venais de sortir de la chambre d'hôpital dans laquelle mon père se trouvait, je faisais les cents pas dans le couloir. En voyant le prénom de mon amie s'afficher sur mon écran, je n'ai pas hésité à décrocher.
Mes neurones avaient du mal à se connecter entre elles. Je ne comprenais pas ce qu'elle essayait de me dire. Ou plutôt, je ne voulais pas y croire. À la simple entente de sa voix, je savais qu'il se passait quelque chose. Je ne savais pas de quoi il s'agissait mais cela n'allait surement pas me plaire.
— Dis-moi ce qu'il se passe, Evy, lui répondais-je dans le néant.
— C'est..., c'est Gian..., finissait-elle par lâcher.
Je retenais ma respiration. Je m'arrêtais de marcher. Je ne pouvais pas y croire. Non, c'était dans ma tête. Elle n'avait pas vraiment prononcé son prénom. Dites-moi que c'est simplement mon inconscient qui veut me jouer des tours.
Je refusais de croire qu'il puisse lui arriver quoique ce soit. D'autant plus après être parti sans le lui dire. Il m'en voulait. Et il avait toutes les raisons de m'en vouloir. J'avais commit une terrible erreur. Je l'avais laissé tomber sans même me retourner.
J'aimerai tant pouvoir revenir en arrière. L'emmener avec moi. Lui confier mes pensées les plus sombres. Lui faire entièrement confiance. Mais ma plus grande crainte avait toujours été de laisser entrer quelqu'un dans ma tête.
— Il a été admis en urgence à l'hôpital..., continuait-elle avec une voix remplie d'émotion.
Tout était de ma faute.
Je ne pouvais en vouloir qu'à moi-même. Si son heure était venue et qu'il disparaissait de ce monde sans que je n'ai pu être à ses côtés ; je m'en voudrais toute ma vie. J'avais été égoïste. Et surtout idiote.
L'ensemble de mon corps se mettait à trembler. J'avais du mal à tenir debout sur mes deux jambes. Ma tête tournait à une vitesse folle. C'était comme si mon monde venait de se briser en mille morceau. Le problème, c'est que mon monde ; c'est lui. Et lui seul.
Jamais je ne pourrai recoller les morceaux s'il n'en faisait plus parti. S'il n'était plus là avec moi. Il avait toujours été le seul à me faire sourire lorsque je n'allais pas bien. Il était le seul à y parvenir. Il coulait dans mes veines et il avait une place immense dans mon cœur.
Le téléphone toujours contre l'oreille, je me tenais à un mur afin de ne pas tomber à la renverse. Je ne pensais qu'à une seule et unique chose ; boire. S'il y avait une bouteille qui trainait, je l'aurais attrapé et bu dans la minute qui suivait.
Je voulais ressentir de nouveau le goût amer couler dans les profondeur de ma gorge. J'en avais besoin pour surmonter tout cela. Je n'avais pas les épaules pour le supporter. J'avais l'impression de tomber de haut. De m'écrouler. De faire un saut dans le vide.
— Dylan ? Allô ? s'inquiétait Evy de l'autre côté du téléphone.
— Il est... il est..., bégayais-je en pleurant toutes les larmes de mon corps.
— Non...
Un sentiment de soulagement s'emparait de moi. Mais ce n'était pas pour autant que je sautais de joie. Il avait beau être encore en vie, il ne devait pas aller bien du tout. Il fallait que je rentre à Seattle et sans tarder.
Je prévenais Evy que j'allais prendre le premier vol pour rentrer puis je raccrochais. Complètement lessivée, je rentrais dans la chambre de mon père en pleure. Lorsque Tyron me voyait dans cet état, il s'empressait de se jeter dans mes bras. Il me serrait fort contre son torse.
— Il faut absolument que je retourne à Seattle, prononçais-je la boule au ventre.
— Je t'emmène à l'aéroport, déclarait-il.
Je le remerciais intérieurement de ne pas me poser de question. C'était la meilleure chose qu'il pouvait faire. Je n'avais pas envie d'en parler. Tout ce que je souhaitais ; c'était le voir. Croiser son regard. Toucher sa main. Sentir son cœur battre contre mon oreille.
— Dylan ? m'interpellait mon père allongé dans son lit, le pied dans un plâtre.
Je me séparais de mon frère pour faire un pas en avant. Les deux êtres que j'aime le plus au monde sont tous les deux à l'hôpital. Mais mon choix était fait. C'était lui que je voulais retrouver coûte que coûte. Il était la seule personne à m'avoir décelé. Il a su voir clair en moi. Il m'a déchiffré seulement en me regardant.
— Je suis tellement fier de la femme que tu es devenu.
Je me saisissais de sa main afin de la serrer si fort dans la mienne. La sincérité de mon père me touchait en plein cœur. Ce n'était pas dans ses habitudes de se livrer sur ses sentiments et cela devait être de famille. Alors je l'écoutais avec une grande intention.
— De nous trois, tu es celle qui à le plus souffert et tu ne le montres pas. Tu es toujours là pour les gens qui comptent pour toi. Jamais tu n'as baissé les bras. Et je t'admire énormément pour ta force incroyable. Je ne sais absolument pas d'où tu la puises.
— Tu as tord, je les ai déjà baissé, le contredisais-je. Mes bras...
— Peut-être mais tu t'es relevé sinon tu ne serais pas devant moi à l'heure actuelle. Maintenant, tu vas me faire le plaisir d'aller retrouver ce garçon, lâchait-il en me poussant avec sa main.
Ma vue était embuée de larmes et pourtant, un sourire me restait collé au visage. Ce qu'il venait de me dire, me touchait réellement. C'était la première fois qu'il me disait qu'il était fier de moi. Il ne connaissait pas toute l'histoire mais il avait raison. Je suis plus forte que ce que je crois. Et je pourrais l'être encore plus.
Avant de partir avec Tyron pour l'aéroport, je serrais fort mon père dans mes bras en faisant attention de ne pas lui faire mal. Je lui promettais qu'après que tout sera arrangé, je passerai le voir. Ensuite, nous ne perdons pas de temps et mon frère me conduit jusqu'à l'aéroport.
En sortant de la voiture, j'eus un pincement au cœur de les laisser tomber. J'avais comme l'impression que quoique je fasses, je faisais souffrir quelqu'un. Quand ce n'était pas Gian ; c'était Tyron et mon père.
— Allez va t'en ! s'exclamait-il en me faisant un signe de la main. Tu mérites d'être heureuse petite sœur, je t'aime !
Cette fois-ci, je ne parvenais pas à retenir les larmes et je les laissais s'écouler à flots le long de mes joues. Est-ce qu'il avait raison ? Est-ce que j'avais le droit au bonheur ? Cela faisait tellement longtemps que je vivais dans la souffrance. Dans un doute incessant. Dans un malheur sans fin. Dans une réalité qui n'était pas la mienne. Dans un cauchemar se jouant en boucle dans ma tête.
Alors je pense que oui, j'ai le droit d'être heureuse pour une fois. C'était pour cette raison que j'étais montée dans cet avion. Pendant tout le trajet, j'avais dessiné un cœur meurtri sur un petit carnet. Un cœur qui avait souffert ; beaucoup trop souffert. Un cœur parsemé de cicatrices sanglantes. Un cœur devenu fragile.
Mon cœur.
Après être sorti de l'aéroport de Seattle, j'avais pris un taxi qui m'avait emmené directement devant un grand hôpital. Des sanglots me parcouraient tout le corps. L'imaginer allongé au milieu de quatre murs blancs vides ; m'effrayait. Est-ce que j'étais vraiment prête ? Est-ce que j'aurai assez de courage pour aller le retrouver ?
Pas à pas, j'avançais pour rentrer dans cette immensité. Au fur et à mesure de marcher, je me sentais de plus en plus mal. Ma gorge se nouait, mon ventre se serrait et ma poitrine m'oppressait. Mon cerveau avait du mal à s'oxygéner. J'avais une bombe à retardement à la place du cœur.
Rapidement, j'arrivais au troisième étage dans le service de cardiologie. Je ne savais pas dans quelle chambre il se trouvait alors je longeais les couloirs dans l'espoir de trouver quelqu'un qui pourrait m'aider. La tension en moi était à son comble. Je pouvais vriller d'une minute à l'autre.
Soudain, je me raidissais sur place. Je croisais son regard bleuté, complètement à l'opposé de celui de Gian. Abby venait de sortir d'une chambre. Elle serrait un t-shirt blanc dans ses bras. Je devinais que c'était celui de son frère. Je m'avançais pour aller à sa rencontre.
J'avais comme l'impression qu'il s'était passé quelque chose le temps que j'arrive. Elle se laissait tomber le long d'un mur pour finir assise sur le sol. Je décidais de l'imiter. J'avais du mal à ressentir une quelconque émotion comme si elles s'étaient mises sur pause pour m'éviter de trop souffrir.
Ma vie était un éternel recommencement. Lorsque tout allait bien, cela ne durait jamais longtemps et en moins de quelques secondes ; tout partait à la dérive. Je n'avais aucun contrôle sur cela et je détestais. J'espérais qu'un jour, je sois enfin heureuse.
— Je suis désolée..., murmurais-je en tournant légèrement la tête vers elle.
— Pourquoi tu t'excuses ? prononçait-elle malgré les larmes qui déferlaient sur ses joues.
Elle avait raison. Je ne savais même pas moi-même pourquoi je m'excusais auprès d'elle. Ce n'était pas à elle que je devais des excuses mais à Gian. Mon cœur se serrait un peu plus dans ma poitrine. Je l'imaginais inconscient dans son lit, les yeux complément clos et sans vie.
— Je ne sais pas vraiment, articulais-je confuse.
— Je comprends que tu sois déboussolée ; c'est légitime. Tu sais, j'ai l'impression de revivre la même chose qu'avec mes parents. Mais d'un côté, c'est différent car cette fois, j'y étais préparé, se confiait-elle à moi.
Dans ma tête tout se chamboulait. Je ne pouvais pas croire qu'il allait mourir. C'était impossible pour moi de l'imaginer. Il y a encore quelques heures ; on était blotti dans les bras l'un de l'autre et on riait aux éclats. Il avait la joie de vivre et tout à coup, plus de son plus d'image. Non, je refusais de le laisser partir.
— Il est où ? Dans sa chambre ? Je veux le voir, m'exclamais-je tout en me relevant.
Abby m'imitait et me faisait face. Ses yeux s'incrustaient dans les miens. Je n'aimais pas ce regard. C'était celui qu'on avait lorsque l'on s'apprêtait à annoncer une horrible nouvelle. Je pouvais très bien imaginer ce qu'elle allait me dire. Mais je ne voulais pas l'entendre. Je voulais que ses lèvres restent scellées.
— Ils l'ont emmené au bloc cinq minutes avant que tu n'arrives, m'annonçait-elle en se saisissant de l'une de mes mains.
Mes paupières restaient grandes ouvertes. Il y avait un espoir. Il allait peut-être s'en sortir. Si il était parti au bloc opératoire, c'est qu'il était toujours en vie. Son cœur se battait pour le maintenir en vie le plus longtemps possible.
— Il va survivre ?
— Personne ne sait. Ils ont réussit à avoir un cœur en urgence compatible avec Gian mais, son état est vraiment critique. Je ne veux pas que tu te fasses de faux espoirs, m'expliquait-elle.
Je l'écoutais attentivement. Abby faisait preuve d'une grande maturité dans ses paroles et j'appréciais vraiment qu'elle soit honnête avec moi. Je donnerais tout pour qu'il survive à cette opération. S'il y a bien une personne qui mérite plus que tout au monde de vivre ; c'est bien lui. Il commence à peine sa vie, il ne peut pas s'éteindre aujourd'hui.
Ce n'est que le début de notre histoire et je ne suis pas prête à tourner la page finale...
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