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• chapitre 20

Les cours terminés, Jisung et ses amis avaient décidé de sortir se détendre plutôt que de se plonger dans leurs révisions. Ils étaient en week-end et avaient envie de profiter de l'après-midi tous ensemble sur une note un peu plus décontractée. Ils avaient eu une semaine compliquée entre les exposés et les évaluations. Jisung n'avait pas été en mesure de se donner à fond dans ses études, surtout pas après la petite confrontation qu'il avait eue avec Minho et qui, depuis, tournait en boucle dans sa tête. L'homme savait ce qu'il ressentait, il en était désormais persuadé. Son attitude et ses paroles le démontraient. Et c'était à la fois terriblement gênant et excitant. Peut-être que cela débloquerait enfin quelque chose entre eux, même si Jisung avait toujours l'impression que ses sentiments n'avaient pas lieu d'être. Enfin, il trouvait Minho attirant et intrigant, il ne pouvait pas lutter contre cela, mais cette petite partie de culpabilité qui le grignotait était toujours là.

Dans le métro qui les menait à Hongdae, Jisung soupira et bascula la tête en arrière. Ce soir, en rentrant, il savait que Dayoung ne serait plus là et qu'il se retrouverait seul avec Minho. Il se demandait comment la soirée allait se dérouler en l'absence de sa demi-sœur. La semaine était passée vite, même trop vite, mais il n'avait pas eu de nouvel instant seul avec Minho. À vrai dire, il ne l'avait croisé qu'un soir au dîner et ça avait été expéditif. À peine un mot et un regard échangés, puis l'homme avait quitté la table prétextant être fatigué. Jisung avait l'impression que la tension s'était un peu essoufflée, mais il avait appris que Minho était souvent d'humeur changeante. S'il l'avait ignoré ces derniers jours, ça ne signifiait pas qu'il l'avait totalement oublié.

Mais pour le moment, il voulait profiter de cette sortie entre amis. Enfin, essayer de profiter. Ça n'allait pas être facile avec toutes les questions qui le tourmentaient.

Ils arrivèrent à destination sans pour autant savoir ce qu'ils allaient faire. Peut-être juste se balader et regarder les différentes boutiques. Ou alors se rendre à la salle d'arcade ou au karaoké. Alors qu'ils avançaient dans les rues animées, Jisung restait silencieux. Ses amis discutaient tous les trois mais il n'arrivait pas à prendre part à la conversation. Il les entendait sans vraiment porter attention à ce qu'ils disaient. Leurs paroles se perdaient dans le brouhaha ambiant, mais un coup de coude le rappela à la réalité.

— Ici la Terre ! s'exclama Felix en agitant la main devant le visage de Jisung.

Il secoua la tête et s'excusa.

— Faut arrêter d'être amoureux comme ça, s'amusa Jeongin.

Ce fut suffisant à lui faire piquer un fard. Il n'avait pas parlé de ce qui s'était passé avec Minho pendant le film ou après dans le couloir, mais peut-être était-ce le bon moment pour le faire. Après tout, il avait besoin d'avoir une confirmation extérieure afin de s'assurer qu'il ne se faisait pas des idées. Mais d'abord il préférait qu'ils rejoignent un endroit un peu plus calme.

— Du coup on parlait d'aller chez Nana, expliqua Felix.

Jisung cligna des yeux à plusieurs reprises.

— Nana ?

— Le salon de piercings !

— Ah ! Euh, oui, d'accord. Vous voulez vous faire percer ?

Ryujin acquiesça vivement.

— Je veux faire la langue depuis un moment, alors si j'y vais pas maintenant je vais encore me défiler.

— Et du coup pour la soutenir on va tous en faire un, t'as juste à choisir l'endroit.

Il fronça les sourcils. Il n'était pas préparé à faire un nouveau piercing mais un de plus ou un de moins… Il en avait beaucoup aux oreilles, il n'était même pas certain d'avoir encore assez de place pour en faire d'autres à cet endroit. Résigné, il suivit ses amis jusqu'au salon et ce fut Felix qui passa le premier pour un anneau au niveau de la narine droite. Jeongin fut le deuxième pour un lobe, rien de bien farfelu. Puis vint le tour de Ryujin qui garda la main de Jisung dans la sienne en guise de soutien émotionnel. Une fois son piercing fait et pas une seule larme versée, il ne restait plus que Jisung.

— Alors t'as décidé où le faire ? marmonna Felix. À la bite ?

En réponse, il lui donna un coup de poing dans le bras et Jeongin se mit à rire.

— Ça risque d'être gênant pour la suite avec…

Cette fois, ce fut Jeongin qui écopa d'une remontrance physique. Il n'allait pas les laisser dire des bêtises sans se rebeller, il en avait assez qu'on se moque de lui et de sa situation. Le perceur lui indiqua qu'il pouvait revenir dans la pièce et il demanda à Ryujin de l'accompagner, il n'avait pas envie d'être avec un des deux autres.

— Alors, on fait ça où ?

— Au nombril.

L'homme hocha la tête et lui demanda de s'allonger tandis qu'il préparait tout ce qu'il fallait. Ryujin restait à côté de lui à lui caresser lentement le bras. Elle ne parlait pas, sans doute à cause de la douleur qu'elle ressentait, mais Jisung était heureux qu'elle soit présente. Et puis, c'était pour elle qu'il faisait ça, même si ça ne lui déplaisait pas de compter un piercing de plus dans sa collection. L'homme revint vers lui et après le discours habituel sur les normes d'hygiène, il lui demanda d'inspirer puis d'expirer pour glisser l'aiguille dans sa peau. Il ne cilla pas, ce n'était pas désagréable et bien moins douloureux qu'un piercing au niveau du cartilage. Le perceur plaça le bijou et désinfecta encore une fois avant de lui indiquer que c'était terminé. Jisung se leva et le remercia, puis il passa à la caisse pour le règlement.

— Ton gland va bien ? s'amusa Felix en sortant du salon.

Jisung lui tira la langue.

— T'es pas drôle, marmonna Ryujin.

— Je me suis fait percer le nombril.

Jeongin haussa un sourcil et esquissa un petit sourire.

— C'est sexy.

— Je sais, répondit-il, satisfait.

Ils rejoignirent finalement la salle d'arcade et comme à l'accoutumée, Jisung alla à l'étage avec Felix tandis que les deux autres essayaient de gagner des peluches aux machines à pinces. Ils s'étaient arrêtés sur une borne de jeu de combat et s'excitaient tous les deux sur les boutons tout en discutant de choses et d'autres. Les cours et les examens n'étaient jamais très loin finalement, mais il fallait dire que ces derniers temps, ils avaient eu beaucoup à faire.

— Je suis soulagé que les plus gros exposés soient enfin passés, lança Felix.

Jisung soupira. Il n'avait pas donné le meilleur de lui-même dans ses études depuis le sinistre dans son studio. Mais vivre sous le même toit que Minho l'empêchait d'être pleinement concentré. Et puis le travail que ce dernier lui avait confié lui avait demandé beaucoup d'investissement. Il n'en avait même pas encore fini avec le montage et il devrait s'y remettre ce week-end.

— Je suis pas vraiment satisfait de ce que j'ai fait, avoua-t-il. Mais bon, c'est pas simple en ce moment.

Felix lâcha rapidement son joystick pour lui tapoter l'épaule. Même s'il pouvait se montrer taquin, il était toujours là pour le réconforter à sa manière.

— Ça arrive, faut pas t'en vouloir.

— Hm, t'as raison mais… Hé ! N'en profite pas pour me dégommer !

Il donna un coup d'épaule à son ami, ce dernier profitant d'un moment de faiblesse pour tabasser son avatar. Quelques secondes plus tard, Jisung fut terrassé. Une petite moue déforma ses lèvres et il alla rejoindre le canapé dans un coin de la salle.

— Bon, du nouveau ? questionna Felix.

— Du nouveau ? À quel sujet ?

Il roula des yeux et administra une pichenette à Jisung.

— Tu sais très bien. Ton beau-frère canon.

— Ah, ça…

— Oui, ça.

C'était assez gênant d'en parler, mais il était arrivé à la limite. Il s'était tu toute la semaine, il ne pouvait pas continuer ainsi. Il avait besoin de se confier, surtout que ce soir il se retrouverait seul avec lui pour la toute première fois et il avait besoin de conseils. Ou tout du moins d'un soutien.

— Tu vas pas te moquer ?

— Si c'est pas encore une histoire de porno gay ça devrait aller.

Il n'avait pas vraiment envie qu'on lui rappelle ce moment embarrassant. Mais ses révélations allaient ajouter un peu plus de contenu sur sa liste des situations incommodantes qu'il avait vécues avec son beau-frère. Après avoir ravalé sa salive, il se laissa tomber contre le dossier du canapé.

— Le week-end dernier il s'est passé un truc.

— Et c'est que maintenant que tu le dis ? s'indigna Felix.

Jisung le fusilla du regard. Il n'était jamais content !

— J'avais besoin d'y réfléchir parce que… déjà c'était un accident à la base.

— Allez, crache le morceau.

Un court silence prit place, puis il se lança.

— Quand on était dans le canapé pour regarder un film, mon pied a touché le sien sans faire exprès.

Aussitôt, les yeux de Felix s'écarquillèrent et il se redressa. Il semblait comprendre où il voulait en venir.

— Non, me dis pas que…

— Il a pris mon geste comme une invitation et il est venu me caresser le pied.

— Oh, putain.

— Comme tu dis.

Se remémorer cette scène lui provoqua un frisson dans tout le corps. Il n'avait pas oublié la sensation que ce mouvement ô combien sensuel lui avait provoquée. C'était électrique, agréable, mais aussi terriblement effrayant. Ce qui en avait découlé l'avait laissé sans voix, il n'arrivait même plus à savoir si ce qu'il avait vécu devant sa porte de chambre était réel ou non.

— Et après, il m'a demandé ce que je ressentais quand on était proches.

— Tu lui as dit qu'il te faisait bander ?

Felix reçut un autre coup qu'il encaissa dans un gémissement étouffé.

— Sérieux !

— Oui, désolé, mais c'est un peu ça, non ?

Jisung préféra ignorer sa question.

— Je crois qu'il me veut.

— Bonne nouvelle alors.

— Je vais me retrouver seul avec lui pendant quatre jours, tu te rends compte ?

Felix acquiesça d'un air détaché. Ce n'était pas vraiment ce que Jisung attendait de sa part. Il aurait aimé qu'il le rassure, qu'il comprenne que cela allait être compliqué. Il ne pouvait pas faire de miracle, mais juste lui dire que tout allait bien se passer était suffisant.

— J'ai besoin de toi et tout ce que tu trouves à faire c'est t'en battre les couilles ?

— Ji, je t'adore et tu sais que je suis là si t'as besoin, mais clairement qu'est-ce que tu veux là ? Que je te donne l'autorisation pour foncer et te faire plaisir avec lui ?

Lui. Son estomac se tordit. Un simple mot et ils savaient tous les deux de qui il était question. Felix avait raison. Il n'avait besoin de l'aval de personne, et il savait au fond de lui que s'il devait craquer, il craquerait. Malgré la culpabilité. Malgré la morale. Qu'attendait-il de ses amis ? Même s'ils se montraient réticents, il ne les écouterait pas. Alors s'ils allaient dans son sens, c'était peut-être tant mieux.

— Je sais pas, excuse-moi.

Felix lui massa délicatement l'épaule.

— Ça se contrôle pas une attirance comme ça. Et si c'est réciproque… De toute façon lutter contre ça, ça va juste attiser encore plus le désir que tu ressens pour lui. Que vous ressentez l'un pour l'autre je devrais dire. Je le connais pas, je l'ai jamais vu, mais au pire qu'est-ce que tu risques ?

À bien y réfléchir, pas grand-chose. Après tout, il n'allait pas rester chez Dayoung et Minho pour toujours. Le moment de retourner dans son studio arriverait et cette histoire serait derrière lui. Il avait le droit de s'amuser, de profiter et de prendre du bon temps. De toute façon, il savait d'ores et déjà qu'entre eux ce serait purement physique et rien de plus. Il y avait une telle tension lorsqu'ils se trouvaient dans la même pièce qu'ils allaient forcément se sauter dessus. Ce serait intense, et rapide. Puis l'euphorie finirait par retomber et ils reprendraient leurs vies tranquilles après avoir goûté le délicieux interdit qu'ils représentaient l'un pour l'autre.

— Ça fait des semaines que t'as le cul entre deux chaises, lança Felix. Un jour tu veux te le faire, le lendemain tu veux plus. Puis finalement oui…

— Parce que c'est difficile à accepter. Plus le temps passe et plus je me rends compte qu'il va vraiment se passer un truc entre nous.

— Ça te fait peur ?

Il considéra la question un instant avant de soupirer.

— Je crois, oui.

— Parce que t'es vierge ?

Ses joues devinrent écarlates en une fraction de seconde. Il y avait un peu de ça, mais il avait honte de l'avouer. Ses amis avaient tous bien plus d'expérience que lui en matière de sexe, il était le seul à ne jamais avoir eu de relation sexuelle. Tout ce qu'il avait fait était d'embrasser son petit ami avec la langue au lycée, et plus rien depuis. Il ne savait même plus quelle sensation cela procurait d'être proche de quelqu'un, de partager des étreintes et des baisers.

— En fait oui, c'est sans doute ça, marmonna-t-il. D'accord il me plaît et il m'attire beaucoup, mais j'appréhende…

Il allait peut-être un peu vite en besogne, mais il était obligé de penser au fait qu'ils allaient potentiellement coucher ensemble. Minho était un homme qui dégageait quelque chose de très sexuel, il était plutôt clair qu'ils n'allaient pas simplement partager quelques chastes baisers et se regarder dans le blanc des yeux s'ils venaient à craquer.

— C'est pas si terrible tu sais. En fait, si vous en avez tous les deux envie et que vous faites bien les choses, en vous respectant, ça ira.

Jisung sentit à nouveau ses joues brûler.

— On est vraiment en train de parler de… ma première fois ?

Il plaqua une main devant ses yeux, comme si cela allait le faire disparaître. Ils leur arrivaient de plaisanter sur le sujet, mais là c'était un peu trop sérieux.

— J'essaye de te rassurer, dit Felix en haussant les épaules.

— Je sais pas si ça fonctionne vraiment.

— À mon avis, une fois que tu seras dans l'action t'y penseras plus.

Il frissonna rien que d'imaginer une quelconque intimité avec Minho. Même juste l'idée de l'embrasser ou de se retrouver tout proche de lui le rendait déjà fébrile. Il allait faire une syncope si ça se produisait. Et ce soir marquait le début de quatre jours de cohabitation qui pouvaient tout changer.

Felix finit par se lever et lui proposa de rejoindre leurs camarades au rez-de-chaussée. Jeongin et Ryujin étaient devant une machine à pince, concentrés sur les gestes précis du jeune homme qui avait visiblement déjà gagné une peluche. Malheureusement, il n'en remporta pas une autre, mais il tint tout de même à offrir le petit hamster rose à Ryujin. Elle le serra contre elle avant de saisir son ami pour lui offrir une étreinte qu'il accepta non pas sans grimacer.

Ils continuèrent de se balader un peu et Jisung parla de ce dont il avait fait part à Felix. Bien entendu, ses deux autres camarades eurent la même réaction, et le même discours. Il fallait qu'il profite, sans pour autant se mettre la pression.

Quand le soleil commence à décliner. Jisung annonça qu'il devait partir et ses amis lui souhaitèrent bien du courage pour ce week-end qui s'annonçait aussi étrange qu'excitant. Il rit nerveusement, mais dans le fond il savait qu'ils ne pourraient jamais vivre sous le même toit rien que tous les deux sans se jeter l'un sur l'autre. Il en avait eu la confirmation, alors ce qui devait se passer se passerait. Il descendit dans une station de métro pour rejoindre l'appartement de Minho, sans savoir si ce dernier serait déjà rentré ou non. Il aurait la surprise.

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