Chapitre 2 : Le camp du bout du monde
Une fois de plus, George suivait la chaussée sinueuse qui faisait le tour de l'île. Il avait dépassé depuis longtemps l'orphelinat, pour remonter jusqu'à l'extrémité de la pointe nord, avant de redescendre en attaquant les deux lacets qui menaient à la crique de Lame Devil. Un long détour depuis la ville. Il existait bien une route, coupant en ligne droite à travers les terres, qui joignait plus directement le lieu où il se rendait, mais il n'avait pas envie d'éveiller la curiosité des fermiers échelonnés sur cet itinéraire.
Il roulait sans se presser, admirant la vue sur le large. La côte ouest défilait de façon beaucoup moins découpée que près du phare de Broken mats. Nulle falaise de ce côté-ci, mais une succession de barres rocheuses, qui s'élevaient de quelques yards avant de s'abaisser d'autant, enclavés de plages de galets sur lesquelles venaient se fracasser les vagues.
L'apparition d'un chemin de terre incita Craven à ralentir davantage. Il était presque arrivé sur le site. Tournant à gauche, il s'engagea dans le passage étroit qui sinuait entre deux collines. Veillant à rendre son véhicule invisible de la route, il se gara avant que le sentier ne reprît de la hauteur. Pour la deuxième fois de la journée, il dissimulait celui-ci. Cette fois, beaucoup plus facilement. Bien qu'essentiellement recouverts d'herbes rases et d'arbres rabougris, les coteaux qui l'entouraient s'élevaient assez pour offrir des pans entiers retirés des regards.
De toute façon, il était impossible d'arriver au camp en voiture. Les nouveaux venus s'étaient installés suffisamment loin de toute desserte pour ne pas être ennuyés par les promeneurs. Il fallait vraiment connaître le pays ou bien que le hasard vous servît favorablement pour les trouver. Le soleil d'automne avait heureusement asséché la rosée matinale, et George s'engagea sur la lande sans risque de finir les pieds mouillés.
Déterminé à battre le fer tant qu'il était chaud, il avait décidé de mener ses investigations l'après-midi suivant sa rencontre avec Roméro. Pour ses hommes, il était censé régler une question de chèvres broutant illégalement dans le jardin de la voisine de leur propriétaire. Un litige tout ce qu'il y avait d'ennuyeux - et pour une fois d'ordinaire - sur une si petite île.
Excédée par la dévastation de son potager, la veuve Mac Davis n'avait pas hésité à se déplacer au commissariat deux jours plus tôt, en le demandant personnellement pour porter plainte. Usant de diplomatie, Craven avait réussi à la calmer en lui promettant de passer rapidement rappeler à l'ordre le fautif. Une broutille qui lui donnait finalement un excellent prétexte pour se rendre au nord-ouest d'Andhon Island sans éveiller les soupçons. Pas un de ses subordonnés n'avait flairé l'astuce.
Remontant la colline, le commissaire tourna carrément le dos au cottage de la veuve Mac Davis. Traçant son chemin entre de larges touffes de genêts, il se dirigea à grandes enjambées vers la côte. Il s'occuperait de régler le problème de l'irascible vieille dame à son retour, mais pour l'instant, une mission autrement plus intrigante l'attendait. Le bruit de l'océan le guidait et il se fiait à son sens de l'orientation pour atterrir non loin du campement géré par le nommé Dirk. Après un quart d'heure de marche vivifiante à travers la lande, des rires d'enfants auxquels répondit une femme qui s'exprimait en langue étrangère lui apprirent qu'il n'était plus très éloigné de son but.
Escaladant une butte en prenant soin de rester derrière des branchages, il détailla le paysage pour prendre ses marques. En face de lui, battant les flancs d'une petite crique qui s'évasait en arc de lune, l'océan se hérissait d'une écume mousseuse. Comme souvent autour de l'île, sa plage de gros galets s'encadrait de deux barres rocheuses sur lesquelles les crêtes d'eau se brisaient au sein d'un fracas régulier. Sombres et tranchants, des récifs érigeaient leur dentelure menaçante un peu plus loin. Un danger bien réel, qui n'avait apparemment pas interdit au groupe d'étrangers d'accoster sur le rivage. Qui plus était en drakkar, s'il en jugeait à l'allure particulièrement majestueuse et totalement anachronique des trois embarcations qu'il voyait tanguer doucement sur les flots.
Romero avait raison. Il n'était pas besoin d'être expert pour deviner que ces navires étaient récents. Des antiquités n'auraient d'ailleurs certainement pas pu franchir le bouillonnement de la passe étroite menant à la crique sans se briser.
Installé loin des vagues, sur un large terre-plein herbeux surélevé qui s'adossait à la colline, le groupe avait recréé l'ambiance d'un véritable campement ancré dans un Moyen-âge parfaitement réaliste. À l'ère viking plus précisément, s'il en jugeait aux haches de guerre et aux écus ronds côtoyant la marmite accrochée au-dessus d'un feu extérieur, et aux grands cadres en bois servant de suspensoirs pour sécher les poissons. Et ce n'était pas l'accoutrement des résidents qui démentait cette impression de retour en arrière.
Appelés par la douceur du jour hors des cahutes constituées de fûts de jeunes arbres ou des tentes recouvertes d'un assemblage de peau de chèvre, ils semblaient issus d'un autre âge. Vêtus à la manière de Dirk pour les hommes, portant de longues robes et des surcots de lainage pour les femmes, habillés de tuniques retenues à la taille par une lanière en cuir pour les enfants. Une pub vivante pour animation touristique.
De plus en plus intrigué, Craven répertoria les microsociétés qu'il connaissait, et qui évoluaient selon des modes et des coutumes anciennes par le monde, les amish étant parmi les plus célèbres. de ces doux dingues ne lui paraissait assez fou pour s'engager sur une mer démontée dans un drakkar. Soit ces gens étaient totalement à la masse, soit guidés par un gourou suffisamment charismatique pour leur faire oublier le sens commun du danger. Dans les deux cas, Wes avait raison. Leur rendre une petite visite de courtoisie s'imposait.
À présent, George s'admonestait presque de ne pas avoir effectué cette démarche plus tôt. Certes, sa récente mésaventure avec l'un des élèves de sa chère Molly avait été assez éprouvante pour le déconnecter du monde – dans tous les sens du terme – mais maintenant qu'il avait recouvré tous ses moyens, ignorer l'énigme suscitée par ces étrangers aurait été une faute impardonnable.
Reprenant sa marche, Craven s'astreint à descendre la colline d'un pas de promeneur inoffensif. Devant lui, deux femmes s'échinaient à gratter un pauvre lopin de terre qu'elles avaient défriché pour y planter quelques légumes et des céréales sauvages. Se relevant à son approche, elles cessèrent aussitôt tout mouvement pour le suivre d'un regard méfiant. Adoptant le rôle d'un touriste en quête de curiosité, George les salua d'un signe poli du menton, en poursuivant sa route sur le sentier tracé par les passages répétés.
Sur la plage, les enfants avaient également arrêté de jouer et toutes les têtes à l'intérieur du camp se tournaient à présent vers lui. Chacun interrompait sa tâche pour l'observer, et seuls les cris des mouettes et le bruit des vagues troublaient le lourd silence qui s'installait. Conservant un sourire avenant, Craven continuait d'avancer comme si de rien n'était vers l'unique entrée menant aux habitations.
Ces gens avaient érigé une véritable place forte retranchée. Une palissade de pieux en bois, taillés en pointe du côté de l'extérieur, délimitait le village. Entrelacées à leur branchage, des ronces aux épines acérées complétaient ces défenses. Le tout formait une enceinte suffisamment basse pour permettre de voir ce qui se déroulait à l'intérieur une fois la colline descendue, mais assez dissuasive pour interdire aux curieux de s'aventurer à la franchir. Le seul passage résidait dans le portail à deux battants, qui pour l'heure bâillaient sur la campagne.
Tout ce petit monde semblait parfaitement parano.
S'en tenant à son rôle de promeneur, aussi intrépide qu'imprudent, George poursuivait son approche vers la barrière ouverte en contournant quelques poules. Il l'avait presque atteinte, quand plusieurs hommes sortirent de la grande hutte centrale. Parmi eux, les dépassant tous d'une bonne tête, il reconnut le dénommé Dirk. Casqué de cuir et serrant sa hache d'une main ferme, celui-ci ne paraissait pas dans ses meilleurs jours. En réalisant qu'il ne portait pas son arme, le sourire de Craven baissa d'un cran. Il n'en continua pas moins d'avancer. Il espérait au moins arriver jusqu'aux premières cahutes, pour essayer de jeter un coup d'œil à l'intérieur.
Le chef de l'étrange communauté ne lui en donna malheureusement pas le temps. Un ordre sec claqua dans une langue gutturale. Le géant roux venait vraisemblablement de commander aux autres de ne pas bouger, tandis qu'il se dégageait du groupe pour se porter à sa rencontre à grands pas. Ses enjambées étaient suffisamment larges et rapides pour qu'il s'interposât juste avant que George ne passât le portail.
Prudent, le policier s'arrêta. Les sourcils froncés de son opposant, sa mine austère et la longue cicatrice enlaidissant son visage faisaient de celui-ci le meilleur des molosses. Une telle charge lui indiquait clairement de déguerpir, sans qu'un seul mot ne fût prononcé. Craven ne se laissa pas intimider pour autant. La diplomatie n'étant plus de mise, il décida de jouer cartes sur table. Arborant un sourire toutefois aimable, il aborda le colosse en sortant son badge d'identification.
— Police d'Andhon Island. Je suis George Craven, le commissaire.
S'il pensait réfréner la frénésie de celui-ci de l'envoyer au diable, à défaut de l'impressionner, il s'était trompé. Gonflant le torse comme un coq prêt à en découdre avec une fouine tournant trop près autour de son poulailler, ce dernier répondit d'un ton sec, dans un anglais approximatif.
— Pas de visiteurs sur nos terres !
La partie s'engageait mal, et Craven devinait que faire preuve d'autorité ne servirait à rien.
— Vos terres ? enchaîna-t-il sans perdre son sourire. Il me semble plutôt que vous vous êtes accaparé celle d'un des insulaires.
Ne cherchant pas à nier, Dirk répliqua sans pour autant montrer le moindre repentir.
— C'est le vieux qui est allé se plaindre ? On lui apporte pourtant des œufs de nos poules, et un lapin par semaine, qu'une de nos femmes prend le temps de lui cuisiner.
À moins de mentir et d'engager encore plus mal les pourparlers, le policier se devait de le détromper.
— Non, le vieux Scott n'a rien dit. Apparemment votre arrangement lui convient. Mais en tant que représentant des forces de l'ordre, il m'appartient de venir vous mettre en garde contre l'illégalité de votre installation.
— Nous ne faisons aucun mal.
Cherchant l'apaisement, Craven acquiesça :
— Je le constate, et personne n'a rien à redire contre vous en ville.
In extremis il se retint d'ajouter : « d'autant plus que vous êtes le seul à sortir ».
— Alors vous n'avez rien à faire là, grogna son interlocuteur. Vos lois autorisent de paisibles voyageurs à prendre un peu de repos. Je me suis renseigné.
Voyageurs ? Vos lois ? Voilà qui attestait de leur origine étrangère. Sauf que concernant sa seconde assertion, Dirk se trompait : mis à part en des points très précis dans le monde, le droit de propriété était quasiment universel. Ceci étant, tant que le vieux Scott les tolérerait sur ses terres, il n'avait effectivement pas grand-chose à dire. Ce qui ne l'aidait pas vraiment à s'incruster.
Espérant amadouer le géant par la discussion, il ouvrait la bouche sur une banalité, quand celui-ci referma brusquement le portail devant lui en maugréant d'un ton qui n'admettait aucune insistance :
— Bien le bonjour chez vous.
Sur ce, Dirk tourna les talons. George venait de se faire éjecter au même titre que Wes lorsque celui-ci avait tenté une approche. Toujours silencieux, le reste des villageois l'observait. S'introduire de force n'était certainement pas la meilleure manière d'entrer dans leurs bonnes grâces. C'était même une stratégie nettement déconseillée pour un homme seul.
Faisant contre mauvaise fortune bon cœur, Craven se retira d'un pas tranquille, non sans avoir auparavant salué l'assistance d'un hochement de tête cordial. Il ne s'attendait naturellement à aucun retour, ainsi fut-il surpris de s'attirer l'ébauche d'un sourire de la part d'une jeune femme et de recevoir un signe de la main plus marqué d'un petit garçon. Tout le monde ici n'était peut-être pas remonté de façon épidermique contre les visiteurs. De toute manière, il ne s'avouait pas vaincu. Le challenge l'excitait, et il échafaudait déjà un autre plan pour accéder à cette citadelle.
Fort de sa nouvelle idée, il rejoignit son véhicule pour donner corps au prétexte de sa sortie en rencontrant la veuve Mac Davis. Une fois cette affaire réglée, il laissa un message laconique à Wes sur son portable. À mots couverts, il l'informait de son échec, tout en évoquant sa détermination de continuer. De retour en ville, il ne rentra pas au commissariat, mais fit un détour par la bibliothèque. Son plan B en passait par là.
Cette fois-ci, il se gara au vu et au su de tout le monde. En poussant la porte de l'antre livresque du meilleur ami de Molly, il savait qu'il ne susciterait aucune curiosité. Sa relation avec l'institutrice était actée par tous les habitants d'Adhon Island et, par extension, celle avec l'une des têtes pensantes les mieux faites de l'île. Il avait même une excellente raison de le rejoindre.
L'absence de sa chère et tendre, en visite une quinzaine de jours chez une cousine vivant sur l'une des îles Shetland, pouvait expliquer un rapprochement suite au départ de leur sujet d'intérêt commun, le téléphone et la webcam avec cette dernière n'interdisant pas une évocation nostalgique entre personnes interposées. Il risquait de passer pour un amoureux un peu idiot, mais il n'avait pas d'autre alternative pour étayer le Cheval de Troie susceptible d'obliger Dirk à lui accorder un droit d'entrée.
Apparaissant de derrière un rayonnage, Terry Hook n'eut pas vraiment l'air étonné de sa visite. Grand et blond, c'était encore un très bel homme malgré sa quarantaine bien sonnée, après lequel soupiraient plus d'une femme du voisinage. En plus d'être instruit, doux et parfaitement policé, il possédait un sens de l'humour certain qui faisait des ravages lorsqu'il conseillait les lectures d'une célibataire ou d'une veuve hésitante. On ne lui connaissait pourtant ni aventure ni maîtresses épisodiques.
Un manque de réactivité au beau sexe qui déliait les mauvaises langues sur des orientations moins avouables, qu'il valait effectivement mieux passer sous silence si elles étaient réelles, tant ce petit monde rempli de nids de vipères n'attendait qu'une occasion pour se déchaîner. À moins qu'il n'eût fait vœu de chasteté, comme le suggéraient quelques bigotes âgées ; une idée farfelue, qui avait toujours beaucoup amusé George.
Souriant d'un air complice, Terry l'accueillit avec un brin d'ironie amicale.
— George Craven au sein de ma modeste bibliothèque ? Quel honneur. Alors, si tu es là pour ça, oui, je peux guider ton choix sur les derniers livres parus ; et, non, je n'ai pas encore reçu de nouvelles de la plus jolie rousse de l'île aujourd'hui.
George en resta coi un instant. Son addiction à Molly était-elle si évidente que cela ?
— J'aurais surtout besoin que tu me rendes un service, se reprit-il.
Intrigué, son ami posa le livre qu'il tenait à la main pour s'adosser d'un air intéressé contre le comptoir de prêt.
— Lequel ?
— Je sais que tu es féru d'histoire du Moyen-âge, et il me faudrait quelques informations sur les us et coutumes des Nordiques. Notamment de ceux qui s'amusaient à venir piller nos côtes à une époque reculée.
— Tu t'intéresses aux Vikings, maintenant ?
— C'est pour une enquête, se défaussa-t-il.
Inclinant la tête, Hook esquiva à son tour une réponse directe.
— J'ai du mal à croire que ta démarche soit d'un ordre professionnel. Qui plus est, le sujet est vaste. Si tu me donnais la raison de cette curiosité soudaine, je pourrais te renseigner plus efficacement.
Il était loin d'être tombé de la dernière pluie, et Craven jugea que l'impliquer à minima ne pouvait que l'inciter à se mobiliser davantage en sa faveur.
— J'ai besoin de m'assurer que les hurluberlus installés au nord-ouest de l'île ne nous causeront pas de problème. D'après ce que j'ai pu voir, ils vivent sans le moindre confort. Ça n'a pas l'air de les gêner, alors que l'hiver arrive dans trois mois à peine. J'ai du mal à croire à leur numéro. Ils peuvent camoufler n'importe quoi à l'intérieur du campement. J'aimerais m'assurer que tout est bien net. Seulement, le molosse qui leur sert de chef n'est pas disposé à me laisser franchir l'enceinte.
— Et tu penses que t'informer sur le mode de vie des anciens Nordiques va t'aider ?
Sûr de lui, George acquiesça.
— À la façon dont ce type semble accroché à son jeu de rôle, oui. Il devait bien exister un code ou une tradition qui permettait à un étranger de demander l'hospitalité aux pourfendeurs des mers sans risquer un coup de hache. Une fois à l'intérieur de la place, il ne me restera plus qu'à fureter pour détecter des anachronismes. Si je lui mets le nez dedans, ça devrait le ramener à notre bon vieux vingt et unième siècle. La discussion sera alors plus facile. Son groupe et lui ne font rien de mal, mais j'aimerais tout de même bien comprendre comment ils sont arrivés là et la façon dont ils envisagent l'avenir.
Sans un mot, Terry se détourna pour se munir d'un petit escabeau à trois marches. L'installant sous un rayonnage rempli d'ouvrages dont la tranche trahissait l'ancienneté, il attrapa un livre en hauteur. Rapidement, il feuilleta les premières pages, avant de le refermer d'un claquement sec pour redescendre vers Craven.
— Tiens, tu peux commencer par lire ceci, dit-il en lui tendant son trophée. C'est un excellent condensé de l'histoire et des mœurs qui t'intéressent. Je préfère cependant te prévenir : je peux parfaire ta culture historique, mais une fois à l'intérieur de leur camp, tu ne trouveras rien qui cloche.
— Merci pour ta confiance.
— Ça n'a rien à voir avec la confiance, George. Tu ne trouveras rien, parce qu'il n'y a rien à trouver.
Son sérieux intrigua Craven.
— Traduction ?
— Je suis allé faire un tour de ce côté, révéla Terry. Tu sais que le Moyen-âge m'a toujours passionné. Alors un village entier bâti sur ce modèle...
— Et ? l'encouragea son ami.
— Et je peux t'assurer que tout, jusque dans le moindre détail correspond à la réalité d'un monde oublié.
— Tu as réussi à te faufiler à l'intérieur ?
— Un ramasseur de champignons inoffensif qui se tord la cheville près de l'enceinte et qui arrive en clopinant pour demander de l'aide, ça n'attire pas vraiment la suspicion. J'y ai définitivement perdu tout espoir de les éblouir par mon courage, mais j'ai obtenu mon billet d'entrée jusque chez celle qui leur sert de guérisseuse. Autant te dire que j'ai pu juger de leurs méthodes ancestrales sur pièce.
— Pas très prudent de t'introduire de cette manière, remarqua Craven, impressionné malgré tout par l'audace de son ami.
— Parce que tu voudrais peut-être me faire croire que, toi, tu t'y es rendu en force ? lui retourna Terry un éclat amusé dans le regard.
Déterminé à rétablir son autorité, le policier rétorqua :
— Je rendais visite à la mère Mac Davis : problème de chèvres. Je n'allais tout de même pas emmener toute la brigade avec moi pour ça.
— Et tu as ensuite été pris par un besoin irrépressible de faire un détour pour voir les nouveaux venus, compléta son ami avec un sourire entendu. Tu sais, c'est dommage que Molly soit absente. Elle te tirerait les vers du nez en deux temps trois mouvements. Si tu me disais vraiment pourquoi tu t'intéresses à eux...
Faussement désinvolte, George répondit :
— Curiosité de flic, sans plus.
Ce qui, dans l'absolu, n'était pas un mensonge. Il ne tenait pas à parler de Wes. Il faisait confiance au bibliothécaire, mais la façon dont Roméro l'avait contacté démontrait que ce dernier désirait rester particulièrement discret sur son implication dans cette affaire. L'ange de l'île avait certainement ses raisons pour cela. Craven se tairait donc
— Ouais, grommela Hook, visiblement peu convaincu. Tu as du temps à perdre demain ?
— Pourquoi ?
— Eh bien, si une nouvelle promenade te tente, on pourrait pousser jusqu'au camp de Dirk. Ce qui ne t'épargnera pas de réviser tes bases. Tu disposes de la nuit pour potasser ce bouquin.
— Parce qu'à toi il ouvrira ?
Lui adressant une œillade, Terry répliqua :
— Fais-moi confiance.
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