Évana
Je secouai mes chaussures, désespérée par tout le sable qui s'en écoulait. Pourquoi est-ce que le bureau de Madame Anters avait eu besoin d'être une plage ?
L'odeur iodée de la mer me rentrait dans les narines, si bien que je suffoquais presque. Il faut dire que l'eau et le feu ne font pas bon ménage.
Mme Anters, percevant mon malaise, se retourna, un sourcil haussé.
– Nous pouvons faire une pause si vous le souhaitez, déclara-t-elle.
Je grognai en réponse. Un rire s'échappa des lèvres fines de la directrice. Elle semblait vraiment s'amuser. Ce qui me héritait au plus haut point. Qu'est-ce qu'elle nous voulait à la fin ?
Mme Anters dut lire la question sur mes lèvres car elle poussa un soupir contrit avant de prendre la parole :
– Je voulais vous faire installer confortablement mais vous avez l'air de n'en plus pouvoir.
Sylvia me jeta un coup d'œil. Je ne pus pas clairement voir son expression à cause des rafales de vent qui poussaient mes cheveux à battre mon visage.
Mme Anters arborait un air sérieux. Tellement sérieux que c'en était effrayant. Elle planta son regard dans le mien avant d'annoncer :
– Créaturia a été détruit.
Je ne sus que dire, que faire. Mes jambes se dérobèrent sous moi. Je plantai mes mains par terre, mes ongles s'emplissant de sable.
Comment n'avais-je pu ne pas remarquer cette altération dans l'Histoire de l'Univers. C'était tellement évident ! C'était de là que venait la pénurie de plusieurs aliments, le ciel orageux qui dansait bien souvent au-dessus de nos têtes, l'excitation de plus en plus virulente de mon Feu ! Tout. Cela expliquait tout. Sans rien nous faire comprendre.
– Comment ? murmurai-je.
Les rafales de vent me fouettaient toujours le visage. Au milieu d'un tourbillon de sable, Mme Anters avait l'allure d'une déesse. C'est d'une voix cristalline qu'elle répondit :
– Les Ténèbres.
Sylvia aussi s'était effondrée au sol. Je la vis clairement écarquiller les yeux et sécher ses larmes. Ses cheveux volaient derrière elle. L'éclat de ses yeux violets était plus vif que jamais. Elle ouvrit les lèvres et, pendant un instant, la substance du monde s'arrêta.
– La voix avait donc raison.
Les yeux de la directrice s'étrécirent, faisant penser à un chat en chasse. Elle s'accroupit près de Sylvia et lui posa une main rassurante sur l'épaule. Pour moi, cette main représentait un étau qui se refermait sur mon amie.
Ma profonde amitié pour Sylvia s'empara des flammes dansantes au fond de moi pour les jeter sur la sorcière dont les longs doigts se tordaient du désir d'en savoir plus. Toujours plus.
Mais la sorcière l'avait senti. Elle se tourna vers moi, plantant ses yeux dans les miens. Elle arborait l'air du prédateur qui sait qu'il a gagné.
Et ce prédateur avait raison. Les flammes naissantes aux pieds de la directrice s'éteignirent net.
Je m'effondrai de tout mon corps cette fois. Des larmes salées me torturaient les joues alors qu'elles coulaient. J'avalai des cheveux au passage. Je faillis presque ne pas percevoir la présence de Sylvia près de moi. Elle posa une main sur mon front, comme un poid pour me raccrocher à la réalité. Tu es là. Bien présente. Tandis que mon amie m'insufflait ces pensées, je fermai les yeux. Oui. C'était bien moi. Plus cette autre personnalité qui s'était emparée de moi l'espace d'un instant. Je sentis alors les appels de Flambeau. Ils me martelaient l'esprit comme ses griffes pouvaient marteler la peau lorsqu'il était fâché. Et il l'était, assurément.
– Où es-tu ? Je n'arrive pas à percevoir ta présence à Arcadia ! Ça me fait peur. Très peur. Tu vas bien ? S'il te plaît réponds-moi ! Évana !
Ou seulement désespéré. Un sourire narquois s'étendit sur mes propres lèvres. Qu'étais-je idiote ! J'aurais dû prévenir mon phénix !
Le "bureau" de Mme Anters était coupé de toute magie. Ou, plutôt, en était beaucoup trop rempli, ce qui brouillait les signaux. Mon phénix ne pouvais donc pas me percevoir. Quant à moi, comment le pouvais-je ? Eh bien, je n'en savais rien.
Je sursautai violemment lorsque Mme Anters reprit la parole :
– Voulez-vous nous aider à stopper la propagation des Ténèbres, jeunes filles ?
Mon ventre se noua. Pourquoi nous ? La directrice avait bien calculé son jeu : elle savait qu'on ne pouvait pas refuser, au risque de la disparition de tout. Je levai la tête pour prendre une grande goulée d'air. L'air avait si bon goût ! Un goût de liberté. J'aurais tellement aimé devenir cette entité de la nature ! Hélas, je devais me contenter de mon faible corps.
Un soupir de désespoir s'échappa de mes lèvres. C'est à ce moment que je me rendis compte que Sylvia se tenait à mes côtés, attendant ma réponse. Elle dut se lire dans mes yeux, car mon amie se leva, bien en face de la directrice.
– Nous acceptons d'essayer de sauver les mondes.
Le sourire de Mme Anters s'élargit de manière anormalement manipulatrice. L'espace d'un instant, je vis par ses yeux et sentis les fils qui partaient de ses doigts pour aller se planter dans notre chair. Je secouai la tête. Il fallait que j'arrête de me faire des films.
– Je vais donc vous présenter votre équipe, déclara calmement la femme que je prenais pour une sorcière.
Notre équipe ? Nous allions avoir une équipe ? Je pris alors conscience de ma bêtise. Il était évident que Mme Anters n'allait pas laisser des enfants de treize ans sauver le monde !
Une autre constatation fit jour dans mon esprit : le fait qu'elle nous le demande, à nous, était complètement absurde.
Avait-elle l'approbation royale pour mener se projet ? Comment pourrait-on stopper la propagation des Ténèbres ? Avec des flammes et des pensées ? Quels étaient les capacités des membres de cette fameuse "équipe" ? Comment pourrions-nous travailler ensemble sans se connaître ? On parlait de sauver les mondes là ! Non pas un monde mais deux ! Le mien, Arcadia, et celui des sans-pouvoirs, Neutre.
Je repris ma respiration. Je devais essayer. Quel qu'en soit le prix. La raison était égoïste : je voulais continuer à vivre.
Je revins dans l'instant présent et saisit six mots avant de voir la silhouette de ma sœur entrer dans mon champ de vision :
– Voici les membres de votre équipe.
★★★★
Ça. Fait. Super. Longtemps.
Je suis horriblement désolée.
Mon excuse : je devais m'acclimater à mon nouveau pays et j'avais une petite panne d'écriture.
Enfin, n'oubliez pas de voter et de commenter ! Ça me donnera du courage pour continuer !
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