XIX - La quête des Cieux - premier mouvement
Aïzie se pencha sur l'encolure de la khaïte et lança un regard vers Ivara, qui planait non loin de lui sur le fin et rapide Zéphyr. Il était étrange pour lui de ne pas chevaucher Nuée, mais il avait totalement confiance en Rafale, qu'il avait montée à de multiples occasions. Il aurait aimé pouvoir parler à la jeune fille, mais il savait que le vent arracherait ses paroles et les réduirait en lambeaux avant qu'elles puissent atteindre son amie. La belle chevelure d'or pâle de la semeuse était dissimulée sous son casque de cuir ; d'épaisses lunettes protégeaient ses grands yeux mauves.
Les deux jeunes gens planèrent en silence pendant des heures, tandis que leurs khaïtes attrapaient les courants ascendants, l'un après l'autre. Le paysage en dessous d'eux était devenu invisible depuis bien longtemps : ils survolaient un océan de nuages blancs, crevés parfois par un pic rocheux couronné de neige. Le soleil avait pris une teinte d'or, puis de cuivre, illuminant les nuées d'une palette de couleurs chaudes.
Aïzie se demanda si Luciellus était rentré à temps et s'il avait pu sauver Catena. Le jeune Ange lui manquait déjà ; peut-être en raison de cette innocence qui lui donnait envie de l'aider et de le protéger. Il avait des amis sur l'île, beaucoup même, mais il les connaissait depuis toujours ; si les anciens amis étaient précieux, les nouveaux l'étaient tout autant, et d'une façon plus émouvante encore. Sa situation était si douloureuse, si injuste... Aucun enfant du ciel ne méritait d'être enchaîné de cette manière.
Il ne pouvait s'empêcher de repenser aux questions posées par Lucielus sur sa famille, ses parents... Il avait beau fouiller dans sa mémoire, il réalisait qu'il n'avait aucun souvenir de son père ni de sa mère. Aussi loin qu'il se rappelait, son oncle Afras constituait sa seule famille. Cela en soi n'était pas si étrange : ses parents étaient probablement morts quand il n'était qu'un petit enfant.
Non... Ce qui le perturbait plus, c'est qu'il ne parvenait pas à se souvenir de l'époque où il était... plus jeune. Il n'était même pas sûr de savoir quel était son âge réel. Quatorze, quinze ans ?
Il lança un regard en direction d'Ivara, en se demandant si elle se trouvait dans un cas semblable : elle vivait avec sa tante Alïana, la maîtresse tisserande de l'île. Sans doute l'avait-il connue enfant, mais pour lui, elle avait toujours été cette adolescente élancée aux longs cheveux blonds et aux yeux mauves.
Quand la nuit arriva, ils firent atterrir leurs khaïtes sur une crête rocheuse. Après un repas frugal assaisonné de neige et d'altitude, ils décidèrent de dormir quelques heures sous les chaudes couvertures de leur paquetage. Mais le sommeil fuyait Aïzie : il entendait la respiration régulière de sa compagne, allongée non loin de lui sous l'aile de Zéphyr. Il n'avait pas eu le courage d'aborder avec elle le sujet de leur passé. Ses questionnements et l'inquiétude qu'il éprouvait pour son ami Luciellus, tout comme la crainte de ne pas réussir à découvrir ce qu'il cherchait dans ces vastes cieux le préoccupaient à chaque instant.
« Ivara ? » appela-t-il d'une voix à demi ensommeillée, espérant la trouver toujours éveillée.
Il ne reçut aucune réponse ; il demeura donc seul avec ses doutes sous l'immense voûte constellée de lumières, aussi nombreuses que l'étaient ses interrogations.
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