Cyril divaguait dans les couloirs depuis de longues minutes à la recherche d'une occupation pour tuer l'heure qu'il avait devant lui. Il s'était souvent dit que choisir allemand en deuxième langue vivante, contrairement à tous ses amis, n'avait pas été sa meilleure idée. Soudain, à l'entrée de l'unique salle d'étude du lycée, son regard fut happé par quelque chose, ou plutôt quelqu'un. Peu habitué à cette salle, il s'y aventura le pas incertain pour prendre place à côté de la fille qui avait retenu son attention. 

« Salut ! »

Salomé se retourna vers le nouveau venu et fut surprise de reconnaître Cyril. Il lui sourit.

« Toi aussi du coup tu fais allemand ?

— Ouais, on était en cours ensemble l'an dernier. »

Cyril se mordit la lèvre. C'était vrai, et pour quelqu'un qui pensait avoir des sentiments pour l'adolescente, il n'était pas très observateur. Il s'en excusa, mais espéra n'avoir pas tué la conversation. Heureusement pour lui, Salomé se détendit en le regardant, encline à poursuivre.

« Tu as passé des bonnes vacances ? lui demanda-t-elle, espiègle.

— Ça me rappelle quelque chose, s'amusa Cyril. Mais oui, très bonnes, et les tiennes ? »

Malgré le fait que l'envie de voir la jeune fille avait été très présente après son rêve – qui continuait de l'obséder – il s'était dégonflé lorsqu'il avait remarqué que la petite famille était revenue de vacances.

« Ouais, c'était sympa. »

Cyril hésita un instant.

« Pourquoi tu m'avais évité l'an dernier quand je t'ai posé cette question ?

— Je... Je ne sais pas, balbutia Salomé. Je crois que c'était tout ce qu'on disait autour de toi. Que tu n'étais qu'un mec qui jetait les filles après avoir couché avec.

— Les rumeurs ont changé ? s'étonna le lycéen.

— Non, pas vraiment, murmura-t-elle.

— Qu'est-ce qui a changé cette année alors ? »

Cyril ne savait pas s'il en demandait trop, il n'avait pas envie de brusquer son amie alors que celle-ci se détendait pour la première fois, en sa présence. Il sentit Salomé se raidir sur sa chaise, et il eut peur un instant qu'elle reprenne le travail qu'elle réalisait avant son arrivée et qu'elle l'ignore.

« T'as l'air sympa en fait, lâcha-t-elle finalement.

— C'est gentil, grimaça-t-il. »

Elle éclata de rire et quelques autres personnes se retournèrent vers eux, le regard noir.

« Non, je ne sais pas en fait. Mais j'ai pas l'impression que t'as envie de coucher avec moi. »

« Si tu savais » se retint de dire Cyril, en gardant ses pensées pour lui.

« Et de me jeter par la suite, ajouta Salomé. »

Cyril ne savait plus quoi dire et resta interdit. Il se reprit finalement devant l'air inquisiteur de l'adolescente. Il n'avait pas envie de se trahir, pas maintenant.

« Non, on pourrait bien s'entendre, je crois. »

Elle hocha la tête avant de jeter un regard à la feuille devant elle.

« Tu fais quoi en fait ? s'enquit Cyril.

— Notre professeure de français nous a demandé d'écrire un plan de commentaire pour le premier texte de l'année.

— Déjà ?! s'étonna-t-il.

— On est en L, j'imagine que plus tôt on commence, mieux c'est. »

Le lycéen confirma d'un geste, leur professeur d'économie leur avait aussi donné des devoirs alors que la rentrée avait eu lieu deux jours auparavant. Il n'y avait pas de répit, surtout lorsque les premières épreuves du bac étaient programmées pour la fin de l'année. Étant en ES, Cyril s'estimait plutôt tranquille, les matières qu'il devait passer n'avaient pas un gros coefficient dans sa filière et il se sentait déjà serein. Le plus compliqué serait d'obtenir de bonnes notes toute l'année pour prétendre à entrer en prépa par la suite. Surtout qu'il visait les parisiennes y voyant le moyen de s'échapper définitivement de sa famille.

« Tu veux que je te laisse ? proposa Cyril, bien qu'il ne sache toujours pas comment occuper le restant de l'heure.

— Non, on peut continuer à parler. Ce n'est pas urgent » sourit Salomé.