
Chapitre 13: La tempête
Marinette marchait de long en large dans son appartement. Depuis que Nathalie lui avait apporté la revue offensante, elle ne tenait plus en place. Elle était toujours restée prudente, elle s'était toujours assurée de ne pas se laisser prendre au jeu des journalistes par rapport à sa vie privée. Un copain sérieux, pas d'esclandre, aucune déclaration inappropriée, elle s'assurait qu'il n'y aurait rien à lui reprocher et voilà qu'un simple goûter avec son patron s'était transformé en rumeur d'infidélité.
Bien évidemment, aussitôt qu'il avait eu vent du fameux article, Michel lui avait téléphoné pour entendre sa version. Il avait été rassurant et compréhensif, il connaissait le monde de la mode, il savait comment chaque détail était scruté à la loupe, comment un simple petit geste prenait des proportions inimaginables. Par contre, il était aussi conscient que les rumeurs véhiculées par ce genre de magazine cachaient souvent un fond de vérité et il voulait entendre les faits de la bouche de sa copine. Marinette avait refusé de discuter de tout cela au téléphone, elle voulait avoir cette conversation en personne.
Tikki la regardait d'un air anxieux teinté d'espoir et d'une pointe de culpabilité. Peut-être cette situation était-elle l'opportunité pour enfin mettre un terme à sa relation avec Michel. Évidemment, ce n'était pas un souhait bien honorable mais en même temps, c'était pour le bien de sa protégée. Adrien était sa moitié, son yin, la contrepartie nécessaire à son équilibre. Malheureusement, la principale concernée ne le voyait pas du tout du même œil et elle l'exprimait avec conviction alors qu'elle maugréait en arpentant la pièce.
« C'est pire qu'une malédiction Tikki. Est-ce que je dois vraiment vivre avec le fantôme de notre relation toute ma vie? C'est quoi cette façon d'agir... de penser... de.... de.... enfin, je veux dire, ils n'ont rien de mieux à faire. »
« De qui est-ce que tu parles Marinette? »
« Les journalistes Tikki... les journalistes. Ils ont vraiment aucun respect pour la vie privée des autres. Depuis quand un baiser sur le front est-il considéré comme un geste amoureux de toute façon? Est-ce qu'ils le savent qu'ils peuvent carrément foutre ma vie amoureuse en l'air? Adrien Agreste par ci, Adrien Agreste par-là. Est-ce qu'il y a vraiment qu'un seul homme sur toute la terre? Non mais! »
Tikki ne répondit pas à cette question. Bien sûr qu'il n'y avait pas qu'Adrien Agreste sur terre... Mais dans le petit monde gravitant autour de Marinette, il était primordial qu'elle le considère comme le souverain de son royaume. La petite kwami ne savait plus vers qui se tourner. La bonne nouvelle était qu'Alya arriverait en renfort dans une semaine. Elle ne serait pas de trop pour remettre Marinette sur la bonne voie, lui faire comprendre la vraie nature de la gente masculine et la rassurer par rapport à son exclusivité dans le cœur d'Adrien. Elle devait comprendre que le corps d'un garçon agissait indépendamment de son cœur. Adrien n'avait qu'une seule fille dans la peau, peu importe le nombre de candidates qui étaient passées dans son lit. Alya comprenait tout ça, elle connaissait Adrien, elle connaissait la portée de leur relation et il fallait espérer qu'elle trouverait les bons arguments.
« Ok Marinette, ça sert à rien de se mettre dans un état pareil. Attends un peu de voir ce que Michel en pense. Peut-être que ce n'est pas si pire que ça. »
« Pas si pire que ça. Mais Tikki, mets-toi à sa place, comment est-ce que tu penses qu'il se sent. La presse insinue que je l'ai trahi, pour lui c'est la honte totale. »
« Il est toujours possible de démentir les rumeurs. Nathalie peut surement t'aider avec tout ça. Tu vois les choses pires qu'elles le sont vraiment, tu devrais... »
Marinette ne sut pas ce qu'elle devrait faire puisqu'on cognait maintenant à la porte et que Tikki s'était réfugiée hors de vue. C'est d'une main tremblante qu'elle ouvrit la porte à son copain et elle lui jetât un regard désolé auquel il répondit avec un sourire.
« Michel, je... »
Il lui posa un doigt sur les lèvres pour la faire taire.
« Hey, on s'assoit et on en discute tranquillement d'accord? »
Elle hochât la tête. Michel était vraiment un amour. C'est blotti dans les bras de son copain qu'elle lui fit le récit de cette fameuse journée où elle avait confié ses craintes à Adrien. Elle ne jugea pas bon de mentionner l'élément déclencheur à son angoisse, elle ne pouvait certainement pas lui avouer sa rancœur envers Vanessa et la requête d'Adrien à ce sujet. Cela serait trop compromettant pour elle et blessant pour le jeune homme. Pourtant, ce dernier avait tout de même l'air un peu chagriné au moment où elle termina son récit.
"Donc, si je résume, vous étiez dans ce café ensemble simplement parce que tu avais le mal du pays et que tu avais besoin d'une oreille attentive."
"Exactement."
"Il n'y a rien de bien compromettant là-dedans."
"Non... bien sûr que non."
"Et ce baiser était un innocent geste d'amitié"
"C'est ça."
"Inutile d'en faire toute une histoire alors."
"Heu Michel?"
"Oui."
"C'est moi ou tu sembles pas convaincu de ce que tu dis."
"Non pas du tout, c'est juste que..."
"Que..."
"Et bien, c'est pas grand-chose en fait, mais je pensais que, étant ton copain, si tu avais besoin de quelqu'un à qui parler, tu te serais tourné vers moi. Tu sais que tu peux tout me dire non?"
"Oh Michel, bien sûr que je le sais. Mais il faut que tu comprennes que Adrien et moi, enfin, ça remonte à tellement loin... et aussi, et bien, il représente un peu de la France pour moi. Puis, lui et moi, tu vois, sans que nous soyons de nouveau un couple, et bien, il y aura toujours une espèce de complicité entre nous deux..."
"Une complicité? À vie? Je veux dire, tu es hyper talentueuse Marinette. La collection d'automne c'est tout toi. Tu n'as pas à t'accrocher à la marque Agreste toute ta vie, tu es capable de tout cela par toi-même."
"C'est plus compliqué que ça Michel..."
"Alors explique-moi."
"T'expliquer... c'est que..."
"Oui, explique-moi sous quel prétexte Adrien Agreste peut-il espérer faire partie de ta vie inconditionnellement."
"Je... je peux pas."
"Tu ne peux pas."
"Non, désolé."
Il se leva brusquement et elle lui attrapa la main pour le retenir.
"Michel, toi et moi, je veux vraiment mais vraiment que ça marche. Je... je t'... apprécie vraiment mais vraiment beaucoup. Il faut cependant que tu acceptes cet espèce de... lien... disons entre Adrien et moi. Lui et moi, c'est du passé question vie amoureuse. Mais je ne vois pas le jour où il sortira définitivement de ma vie. J'espère simplement que tu comprends et que tu tiennes assez à moi pour passer par-dessus tout ça."
Il se tourna lentement vers elle et, voyant les larmes qui coulaient lentement sur ses joues, son regard s'adoucit; elle était sincère.
"Je... j'ai juste besoin d'un peu de temps pour penser à tout ça. Je te rappelle ce soir, tu veux?"
Elle ne put qu'hocher la tête avant qu'il ne se retourne et sorte de l'appartement. Dès que la porte fut refermée derrière lui, elle enfonça la tête dans un coussin pour y pleurer une bonne dizaine de minutes. En ce moment même, elle était épuisée, écœurée, impuissante. Elle était dans cet état d'esprit où tout semblait noir et sans issu. Sa relation avec Adrien était devenu un vrai cauchemar. Elle envisageait même la possibilité de démissionner pour enfin retrouver un semblant de liberté. Mais il resterait toujours Chat Noir... et elle était Ladybug... Pour la première fois de sa vie, elle se surprit à regretter son statut de superhéroïne.
Malgré que la journée fût à peine commencé, malgré qu'elle aurait dû présentement être en route vers le travail, elle était trop épuisée pour se battre contre quoi que ce soit. Elle se laissa gagné par le sommeil.
Chez lui, Adrien sortait à peine de la douche lorsqu'un agréable malaise le prit. Il fit quelques pas pour atteindre son lit et s'y assit, la tête dans les mains pour se calmer. Puis il l'entendit. Au début, il fût un peu effrayé mais rapidement, il comprit ce qui se passait. Il l'avait vécu auparavant. Il se souvenait des premiers jours suivants leur rupture; il lui arrivait alors d'entendre Marinette pleurer de désespoir, murmurer péniblement son nom. Plus le temps passait, plus les manifestations s'espaçaient jusqu'à ce qu'il y en ait plus du tout.
Mais là c'était différent, c'était de la frustration qu'il ressentait. Marinette avait besoin de lui... enfin inconsciemment. Mais il savait très bien qu'elle refuserait toutes manifestations physiques de réconfort. Au lieu de lutter contre l'invasion, comme il l'aurait fait il y a plus d'un an, alors qu'il essayait de l'oublier, il se laissa aller à la sensation. Il s'étendit doucement sur le dos et accueillit le phénomène avec sérénité. Il ferma les yeux et se laissa emporter par le rêve.
Il se rassit tranquillement et elle était là, devant lui, le visage barbouillé de larme.
"Ah, vient là Bugginette. Ça va aller."
Il l'attira dans ses bras et l'enferma dans une étreinte douce mais puissante. Il y faisait circuler tout ce qu'il avait d'amour pour cette jeune femme extraordinaire.
"Tu sais ma Lady, tu essaies tellement que tout et tout le monde soit parfait autour de toi que tu oublies souvent que toi aussi tu as droit au bonheur."
En sécurité dans ses bras, elle s'était remise à pleurer.
"Je sais que je ne suis pas parfait, j'ai des défauts comme tout le monde. Mais si tu pouvais m'expliquer ce que je dois faire pour me laisser une autre chance."
Il passa la main dans ses cheveux. Il était toujours vêtu que de sa simple serviette et Marinette était debout entre ses genoux, en tenue légère. Il concentrait tous ses efforts à ne pas se laisser distraire par cela. Ce n'était définitivement pas le bon moment.
"Il n'y a jamais eu que toi dans ma vie Mari... je ne suis même pas capable de concevoir que je pourrais aimer quelqu'un d'autre. Et je ne comprends pas comment tu peux accueillir un autre homme dans ton cœur."
Elle devait le dire, il le savait peut-être déjà, mais elle devait se libérer de se poison qui la torturait. Elle se détacha légèrement pour le regarder dans les yeux.
"Tu oublies Vanessa."
"Allez ma Lady, tu n'es pas sérieuse. Vanessa ce n'est qu'une passade non?"
Et il avait le culot de lui affirmer qu'il y avait bien quelque chose entre eux deux.
"Je ne sais pas, à toi de me le dire."
"Hein?"
"Si toi et Vanessa ce n'est qu'une passade."
"Moi et Vanessa... mais je croyais que c'était toi et Vanessa."
Ce coup-ci elle se défit carrément et recula de quelques pas avec un regard effrayé.
"Quoi?"
"Toi et Vanessa... bon sang, on a discuté l'autre jour des sentiments que tu avais pour elle."
Elle n'avait toujours pas l'air de comprendre mais pour lui les choses commençaient à s'éclaircir.
"Mari... Vanessa... tu sais qu'elle est gaie hein?"
Elle écarquillât les yeux d'horreur. « QUOI! »
"J'en conclue que non, tu ne le savais pas."
Elle tomba en mode panique. Elle se mit à marcher de long en large dans la chambre du garçon qui s'était maintenant levé pour la réconforter. Mais elle ne se laissât pas approcher.
"Et moi tout ce temps, je croyais que toi... que Vanessa... que vous."
"Mari, ne me dis pas que tu croyais qu'on couchait ensemble."
Elle s'arrêta net de marcher et se tourna en sa direction.
"OUI, BIEN SUR QUE OUI. Je veux dire, elle a tout le temps les mains sur toi et ces baisers tout le temps..."
Malgré le côté dramatique de l'histoire, Adrien ne put s'empêcher d'éclater de rire. Sa réaction déstabilisa Marinette au point où elle leva sa garde et il put s'en approcher aisément pour la reprendre dans ses bras.
"Définitivement ma Lady, tu ne cesseras jamais de me surprendre."
Sous le choc, elle posa la tête sur son épaule.
"Au moment d'engager Vanessa, je cherchais surtout une fille avec qui, justement, je n'aurais pas ce genre de conflit. Elle est devenue ma plus grande amie ici... jusqu'à ce que tu arrives et que je me mette à espérer que tout redevienne comme avant entre nous. Je t'aime Mari, je n'ai jamais aimé que toi."
Il la décolla et passa un doigt sous son menton. Il se rapprocha doucement d'elle.
"Je n'aimerai jamais personne d'autre."
Et il l'embrassa. Cette fois-ci, elle ne le repoussa pas et ils purent profiter de l'instant pendant de longues secondes. Mais une sonnerie vint tout de même mettre fin à leur moment.
Alors que son téléphone sonnait pour la deuxième fois, Marinette se réveilla en sursaut. C'était Michel. Se sentant un peu coupable du rêve qu'elle venait de quitter, elle décida de répondre pour avoir meilleure conscience.
"Allo."
"Mari... c'est moi. Tu... tu avais raison. Je tiens beaucoup à toi et... enfin, on a tous notre passé, on a tous notre réalité. Alors, si tu es d'accord aussi, je veux bien qu'on se donne la chance d'être heureux ensemble... avec ou sans Adrien Agreste dans le décor."
"Oh...Euh, oui bien sûr. Parfait." Pourquoi ne se sentait-elle pas aussi heureuse qu'elle ne l'aurait dû.
"Tu es certaine? Tu as l'air un peu étrange."
"OUI...oui, je viens de me réveiller. Désolé. Je suis contente, très contente. Je... je suis en retard... pour le bureau. Je me suis endormie. Je dois me préparer et y aller. On se voit là-bas, d'accord."
"Oui d'accord, à plus."
"À plus."
Elle regarda longuement son téléphone après avoir raccroché. C'était exactement ce qu'elle avait espéré non? Alors pourquoi le souvenir des lèvres d'Adrien lui paraissait plus satisfaisant que ce coup de fil? Et merde...
Bạn đang đọc truyện trên: Truyen247.Pro