45.
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Cathy.
Nous venions de rentrer dans l'appartement. J'avais indiqué à Gabriel que de l'aspirine l'attendait sur le plan de travail de la cuisine et je retirai lentement mes baskets. Lorsque j'arrivais dans la pièce principale, Gabriel fut soudainement étrange. Il marchait de manière pas très nette et il se tenait les tempes. Je le vis tanguer plusieurs fois avant qu'il se rattrape au plan de travail. Ses jambes se mirent soudainement à trembler comme si elles n'avaient plus de force pour le tenir debout. Le visage grave d'inquiétude, je m'approchai de Gabriel et lui demandai :
« Gabriel ? Est-ce que ça va ? »
Pas de réponse. A vrai dire, je ne suis même pas sûre qu'il m'ait entendu. Je répétai plus fortement :
« Gabriel ? Est-ce que ça va ? »
Sans que je m'y attende, Gabriel bascula sur ses genoux et son corps se mit à tomber brutalement. Etant assez proche, je plongeai sur lui pour pouvoir le rattraper avant que sa tête percute le sol. Il transpirait énormément et je posais ma main sur son front brûlant. Je criais en même temps :
« Mais tu es brûlant ! Lucas ! »
Un grognement se fit entendre de la chambre de Lucas puis des pas vinrent soudainement me rejoindre en voyant Gabriel au sol. Mon meilleur ami me demande inquiet :
« Putain, qu'est-ce qu'il s'est passé ?
-Je n'en sais rien, il s'est écroulé d'un coup, je n'ai pas compris. Et son front est brûlant, je ne serai même pas étonnée qu'il fasse de la température.
-Qu'est-ce qu'on fait ?
-Il faut qu'on le relève et qu'on l'allonge. On va le mettre dans ma chambre, je pourrai le surveiller.
-Ok. »
Lucas me dicta de prendre Gaby sous l'aisselle et de passer on bras dans mon dos. Il plaça le bras de Gabriel autour de mes épaules et il fit pareil de son côté. Dans un compte à rebours, nous le soulevons avec difficulté. Après plusieurs pas maladroits, nous franchissions les murs de ma chambre. Nous étions assez coordonnés et bientôt Gabriel fut posé dans mon lit. J'allai chercher un thermomètre dans la trousse de secours qui se situait dans le placard de la salle de bain pendant que Lucas lui retirait ses chaussures. Je posai le thermomètre sous ses aisselles et attendit impatiemment le résultat. Lucas s'assit quelques instants sur le lit observant Gabriel inconscient sur mon lit. Un « bip bip » retentit et je m'exclamai brutalement :
« Il est presque à 40°, il faut le découvrir pour faire baisser sa fièvre. Je vais chercher une poche de glace. »
Lucas m'indiqua qu'il allait le déshabiller pendant que je prépare ce qu'il faut pour faire baisser la fièvre de Gabriel. Si j'avais su qu'il serait dans cet état-là, je ne me serai jamais emportée de cette façon sur lui. J'ai honte. Des larmes jaillirent sans que je m'en rende compte et je les frottai furieusement pour ne pas craquer maintenant. Je fouillai le congélateur et je choppai une dizaine de glaçons pour les mettre dans un sachet plastique. J'allai prendre un gant de toilette dans la salle de bain pour y glisser les glaçons. Je regagnai ensuite ma chambre. Lucas venait de terminer d'installer Gabriel dans mon lit. Il l'avait recouvert jusqu'au milieu de son torse à présent nu. Je vins déposer la poche de glace sur son crâne bouillant et je dis à Lucas :
« Il faut qu'on prévienne Martin et que l'on appelle un médecin.
-Il n'y a pas de médecin le dimanche. »
Je jurai entre mes dents et Lucas me rassura en disant qu'il allait appeler sa mère pour qu'elle puisse nous dire la conduite à suivre pour nous occuper du mieux que l'on peut de Gabriel. Je préparai une bouteille d'eau fraîche et j'apportai un verre et des comprimés de paracétamol en espérant que la poche fasse effet et qu'il puisse se réveiller pour prendre les cachets. Je me rongeais les ongles d'inquiétude. J'avais pris place à côté du jeune garçon assoupi et fiévreux. Je m'en voulais à mort. J'ignorai ce qu'il s'est passé cette nuit mais il n'a clairement pas dormi au campus ou la fraternité pour que je vienne le chercher dans un parc.
Lucas arriva au bout de dix minutes, sa mère avait sûrement monopolisé la conversation. Le blond passa sa tête dans l'embrasure de ma chambre :
« On ne peut rien faire de plus, faut attendre qu'il se réveille pour en savoir plus sur son état. »
J'hochai lentement la tête et me blottis au plus près de Gabriel pendant une vingtaine de minutes. Pour me vider l'esprit de mes angoisses, je lis un de mes nombreux livres. J'optai pour « Phèdre » de Racine. J'ignorai en quoi une tragédie me réconforterait mais je voulais m'occuper l'esprit.
Au bout d'une dizaine de pages, je me décidai à appeler Martin pour le prévenir de l'état de Gabriel. J'empruntai le téléphone de Lucas et l'appelai. Martin décrocha au bout de deux tonalités. Sa voix était pleine de surprise :
« Lucas ? Tu ne m'appelles jamais d'habitude, que me vaut cet appel ?
-C'est Kate, répondis-je d'une voix détruite.
-Cathy ? Je suis étonné de t'avoir au téléphone, on ne s'est jamais vraiment parlé.
-Martin...C'est Gabriel...
-Gabriel ?
-Gabriel est dans un sale état à l'appart', il faut que tu viennes tout de suite.
-Quoi ? Qu'est-ce qu'il lui est arrivé ? Il est blessé ?
-Non, je n'en sais rien de ce qu'il s'est passé. Tout ce que je suppose, c'est qu'au contraire de nous, il n'est pas rentré. Je l'ai récupéré dans un parc il y a une heure. A présent, il est inconscient dans mon lit frôlant les quarante de fièvre.
-Oh putain de merde. On arrive. »
Je l'entendis se lever brusquement d'une chaise et je pouvais l'entendre paniquer en demandant à Claire de se grouiller. Je tremblai de frousse sur place. J'avais tellement peur. Martin tenta de me rassurer :
« Ne t'en fais pas, on arrive, on ne va pas vous laisser le gérer tout seul. »
Je raccrochai ensuite. Lorsque je tournai mon regard vers Gabriel, je pouvais le voir entrouvrir les yeux en regardant un peu partout où il est. Il gigota un peu et l'incitai à se rallonger en lui disant :
« Reste allongé, tu es fiévreux. Prends juste tes cachets et repose-toi.
-Qu'est-ce qu'il s'est passé ?
-Chut, je t'en prie, repose-toi. »
Je ne sais pas ce qu'il me prit mais pour l'empêcher de rétorquer, je posai délicatement quelques secondes mes lèvres sur les siennes. Il ne s'y attendait pas mais il me chuchota tout de même :
« Tu es mon meilleur remède Kate. »
Après avoir avalé les deux comprimés posés sur la table de chevet et but quelques gorgées d'eau, Gabriel tomba à nouveau endormi.
**
Lucas alla ouvrir au moment où Martin et Claire sonnèrent à l'entrée. Ils débarquèrent rapidement dans le salon en me quémandant :
« Comment il va ?
-Pas très bien. Il est confus, il a beaucoup de température et il ne fait que dormir, annonçai-je à l'entrée de ma chambre.
-Est-ce que je peux le voir, me demanda Martin très inquiet.
-Oui, bien sûr. »
Je lui laissai une place pour qu'il se glisse dans ma chambre. Il découvrit son meilleur ami endormi dans mes draps. Il avait l'air paisible malgré la fièvre qui le rongeait. Son corps suintait toujours autant et je pris l'initiative de contrôler à nouveau sa température. Martin en profita pour entamer une discussion privée entre lui et moi pendant que Claire était au salon avec Lucas :
« Je suis désolé pour hier. Je me suis rendu compte que je t'ai mal parlé.
-Ce n'est grave, c'est oublié, le rassurai-je avec un sourire franc.
-Je pense sincèrement que tu lui fais du bien. Je n'ai jamais vu mon meilleur comme ça. Hier, il m'a surpris. Je ne pensais pas qu'il pouvait être jaloux, qu'il baisse sa garde face à une fille et qu'il soit aussi protecteur. Je ne l'avais jamais vu aussi énervé hier soir.
-Je ne sais pas, lui dis-je en observant Gabriel se reposer.
-Je suis sérieux Kate. Je côtois Gaby depuis tout petit et tu es la première à lui faire un effet comme ça.
-Je ne sais pas trop quoi en penser. Gaby est compliqué, lui dis-je en posant ma main sur le visage de Gabriel qui sourit inconsciemment à mon toucher.
-J'en suis sûr. Regarde-le. Il est en paix. Tu arrives à le canaliser. Je connais ses colères et crois-moi que si tu ne lui avais pas tapé dans l'œil, il ne se serait pas autant retenu pour ne pas frapper cette fille. »
Je tournai mon regard vers les yeux bleus profonds de Martin. On ne s'était jamais réellement parlé mais j'étais contente de pouvoir partager mon opinion avec lui sur Gabriel. C'est à mon tour de lui dire :
« J'arrive à voir du bon en lui. Je suis persuadée que c'est un garçon avec un grand cœur malgré l'apparence qu'il donne. Gabriel est loin d'être un monstre.
-Personne ne le connaît réellement. Pas même moi malgré nos treize ans d'amitié. Il a toujours su préserver ses secrets.
-Comment était-il plus jeune ?
-Eh bien... »
Martin avait l'air de réfléchir à sa façon de décrire son ami. Finalement, il me décrivit :
« C'était un enfant capricieux, bagarreur et mauvais à l'école. Il n'a jamais vraiment eu d'amis et se faisait énormément d'ennemis. Il brutalisait les filles, il aimait faire des bêtises. En grandissant, son caractère s'est affirmé et il est devenu très colérique. Il détestait le monde qui l'entourait mais je suis le seul à être resté auprès de lui. Gabriel ne laisse pas rentrer n'importe qui dans sa vie.
-Ses secrets doivent le ronger... »
Gabriel était un enfant difficile et j'arrivais à le comprendre : sa vraie mère l'a abandonné lorsqu'il avait cinq ans et c'est insupportable pour un enfant de grandir sans sa mère. J'ignorai si Martin le savait mais je préférais me taire pour éviter de gaffer. Martin continua en me demandant :
« Tu l'aimes pas vrai ?
-Je pense bien, lui avouai-je en baissant les yeux vers mes chaussettes.
-Je ne peux pas te promettre que Gabriel te traitera comme une princesse mais je pense que tu seras l'exception. Tu es la seule qu'il sait à peu près respecter et je ne pense pas que ton amitié avec Lucas ait quelque chose à voir avec ça.
-Au début, je le détestais, tu y crois ça ? »
Je ricanai presque et Martin s'esclaffa en me taquinant :
« Tout le monde ressent ça la première fois. »
Je souris et il posa sa main sur mon épaule en me rassurant :
« Ne t'inquiète pas pour Gaby, je vais passer quelques coups de fil. Je vais faire jouer ma classe sociale pour qu'un médecin se déplace aujourd'hui ainsi qu'une infirmière. »
J'hochai la tête timidement. J'ignorai que Martin était un gosse de riche et qu'il profitait parfois de sa situation pour être privilégier par rapport aux autres. Le grand blond baraqué sortit de la chambre et Claire fit à son tour son apparition pour rendre visite à Gabriel. Elle s'assit sur ma chaise de bureau en me disant :
« On va le sortir de là et on s'occupera tour à tour de lui. Tu ne seras pas toute seule.
-Merci, c'est gentil. »
J'émis un sourire triste avant de regarder le résultat du thermomètre : 39.3. Sa fièvre commençait à baisser mais mon inquiétude était toujours présente. J'annonçai à Claire :
« Je ne viendrai pas en cours demain. Je préfère rester ici pour m'occuper de lui. Je serai aux petits soins pour lui jusqu'à ce qu'il guérisse. »
Claire secoua la tête en me grondant légèrement :
« Tu es folle toi, on va se relayer, on ne va pas te laisser t'occuper de Gabriel toute seule. »
**
Bonsoir,
Voici la suite d'Emprise! J'espère que vous aimez le rapprochement entre Gabriel, Kate et les amitiés qui se créent.
J'essaye de faire intervenir chaque personnage. Ils ont chacun une histoire et je vous en dirai plus sur eux au fur et à mesure.
-Elo
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