40.
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Gabriel.
De la techno résonnait lorsque moi et le groupe passons l'entrée de la foire. Il était à peu près vingt heures, le ciel s'était assombri pour faire place à un début de nuit. Les attractions étaient illuminées de multiples guirlandes et d'ampoules de toutes les couleurs. Il y avait pas mal de monde. Je marchais en silence les mains dans les poches en écoutant Lucas et Martin bavarder joyeusement sur quelle attraction ils allaient faire en premier. Arsène avait rapporté une poupée Barbie et il ne faisait que la peloter en arrière du groupe dans son coin. J'observais Kate et Léa discuter entre elles : elles parlaient de demander à un des garçons de leur faire gagner une peluche. Je levais les yeux au ciel en me disant à quel point c'est niais et que je ne ferai jamais ça. Claire marchait à côté de moi en gigotant pour que je lui raconte les détails de la soirée de samedi. A vrai dire, elle ne me lâche pas les baskets depuis samedi avec cette histoire. Elle veut absolument savoir si j'ai craqué pour Cathy. Je ne comptais pas cracher le morceau et heureusement que les gars se sont arrêtés devant une attraction. C'était une attraction qui ressemblait à un marteau géant et cela tourne de manière interminable au point d'en vouloir vomir. Les filles blêmirent en voyant le manège et je me moquai :
« Allez, ne faites pas vos chochottes.
-Je ne fais pas ça, scanda Léa en pointant l'attraction où les gens hurlaient à l'intérieur.
-Moi non plus, répondit Kate sur la même longueur d'onde que Léa. »
Je soupirai et jetai un œil vers les garçons. Ils étaient tous chaud pour y aller, même l'espèce de sachet plastique qui accompagne Arsène. Claire rejoint les filles sur les bancs et je râlai :
« Vous n'êtes pas drôles.
-Fais-le toi qui est si malin, me lance Cathy avec un air de défi.
-Pas de problème. »
A vrai dire, je regrettai déjà cette décision au moment où le mec du manège avec sa vieille casquette bleue et ses cheveux gras, referma la barrière de sécurité sur nous. Je ne laissai rien paraître alors qu'au fond de moi, je flippais ! Je me répétais intérieurement : « Ne ferme pas les yeux, ne ferme pas les yeux, ne ferme pas les yeux. » suivi d'un « ne crie pas, ne crie pas, ne crie pas. » En plus de faire un manège avec une bonne dose d'adrénaline, il faut en plus que ce gros con fasse un compte à rebours à partir de dix. Je serrai les jambes alors que Lucas semblait plutôt serein tout comme Martin. Je jetai un œil vers Arsène dans ma diagonale à côté de Lucas et je fus surpris qu'il soit moins confiant d'un seul coup. Sans donner d'impulsion, le manège décolla d'un coup à plus de cent mètres de hauteur nous faisant crier de surprise. De cette hauteur, tout me semblait petit : les immeubles n'étaient que des pavés, les arbres étaient des mauvaises herbes vu du ciel et les filles assises sur le banc étaient des petits points noirs. En quelques instants, le marteau descendit à nouveau vers le sol faisant plusieurs cercles. Des gens criaient autour de nous et je peux entendre les cris aigus d'Arsène lorsque le manège se mit à nous mettre la tête en bas. Je n'étais pas tellement rassuré de me savoir dans un manège pareil mais cela me faisait marrer de le voir gueuler comme une fillette.
Au bout de quelques minutes, le calvaire s'arrêta enfin et je regagnai la terre ferme. Je titubai légèrement aux premiers pas dû au tournis avant de pouvoir marcher correctement et rejoindre les filles sur leur banc accompagné des garçons. Cathy se moqua :
« Tu es tout pâle Gaby, tu as vu un fantôme ?
-Ne te la ramène pas, tu n'as pas eu les couilles de le faire, lâchai-je avec un petit rictus.
-Peut-être parce que je n'ai pas de couilles, sourit-elle en posant ses mains sur ses hanches avec dédain.
-Tu es chiante Lincoln, soupirai-je avant de suivre les autres. »
Cathy ricana et nous marchions vers une nouvelle attraction. C'était le train fantôme. Arsène bécotait sa bombasse pour la nuit devant Cathy qui le regardait incrédule. Je fronçai les sourcils, qu'est-ce qu'elle a sérieux ? Je décidai de faire abstraction et de rejoindre Lucas et Martin pendant que Claire, Léa et Cathy sont à l'arrière en train de bavarder. Nous arrivons face à la file et une ambiance malsaine se faisait déjà ressentir avec la musique du film d'horreur « Dead silence ». C'est une histoire glauque d'un mec qui fait une enquête sur un meurtre commis par une ventriloque décédée à l'aide de ses marionnettes. Lucas commanda les places et je regardai les filles. Elles n'avaient pas l'air enchantées de faire cette attraction et un sourire narquois se plaça sur mon visage et je proposai à Cathy :
« Est-ce qu'on se met ensemble ? Tu as l'air d'avoir les chocottes. »
Elle ne répondit pas à mes moqueries et ne fit seulement que placer son bras autour du mien pour pouvoir se sentir en sécurité. Je levai les yeux au ciel : je n'étais pas habitué à ce genre de contact en public et devant mes amis. Je ne la repoussai pas mais je restais tout de même silencieux. Léa se mit avec Lucas et Martin avec sa copine. Arsène se mit bien évidemment avec sa poupée gonflable et nous nous installâmes sur les sièges des wagons. Le responsable du manège vérifia nos sécurités et le wagonnet de moi et Cathy démarra lentement. Nous passons le rideau et une voix démoniaque rit de manière diabolique avant de nous parler :
« Vous êtes à moi. Vous ne ressortirez jamais d'ici, soyez prêt à me donner votre âme. »
Je roulai des yeux face à cette voix que je trouvais plutôt crécelle. Cathy empoigna mon bras pour se serrer contre mon épaule droite. Une tête coupée apparut soudainement au-dessus de notre tête la faisant hurler de peur et j'éclatai de rire face à sa petite vulnérabilité que je trouvais ridicule : rien n'est réel dans ce manège. Je me moquai :
« Ouh, on va se faire bouffer !
-Putain mais ta gueule Gaby, pleurnicha-t 'elle en cachant sa tête dans mon torse. Je déteste ces attractions. »
J'étais d'humeur exécrable et taquine. Je voulais m'amuser et ne pas jouer au prince charmant avec elle, je n'étais pas prêt à arrêter de faire le connard. Le wagon continuait son chemin sur les rails et nous arrivâmes sur une scène de crime avec des pantins flippants aux yeux de la brune. Derrière, j'entendis Lucas et Léa crier comme des chochottes et je me retournai rapidement pour les observer flipper avant de me reconcentrer sur le manège. Cathy gueula dans mon pull à capuche :
« Je te déteste, plus jamais je me mets avec toi. »
Je me durcis un peu face à ces mots, je sais qu'elle a peur et qu'elle ne pense pas ce qu'elle dit mais j'étais beaucoup trop susceptible : on ne peut rien me dire sans que je le prenne mal. Je soufflai et finit par la prendre dans mes bras pour qu'elle change ses mots. Au contact de mes bras contre elle, elle se détendit et je me surpris à voir le bien que je lui procurais. Pour une fois dans ma vie, j'avais l'air de finalement bien trouver ce qui plaisait à une fille. L'attraction se terminait par un Michael Meyers avec son couteau de boucher et le bonheur de Cathy se révéla de courte durée...
En sortant de l'attraction, Claire eut soudain l'idée de demander à Martin de lui gagner une peluche en jouant au tir à la carabine. Evidemment, ce dernier canard ne peut rien refuser à sa copine. Nous voilà donc devant le stand de tir. Martin était en train de charger la carabine lorsque Kate qui ne m'avait lâché les semelles jusqu'à présent me réclama :
« Je peux en avoir une aussi ? »
Je levai les yeux au ciel. Pour qui, me prend-elle ? Je répondis avec mauvaise foi :
« Même pas en rêves. »
Je pensais qu'elle allait se taire et ne plus rien demander mais elle haussa les épaules et dégagea sa main de mon bras avant de s'éloigner et dire :
« Tant pis, je demanderai à Arsène. »
Quoi ? Elle n'est pas sérieuse ? Mon sourire en coin précédent se dissipa lorsqu'elle s'approcha du bouclé pour lui demander tel une enfant :
« Est-ce que tu peux jouer pour moi s'il te plaît ? Je veux trop la peluche Stitch. Il pourra tenir compagnie à Teddy ! »
Quoi ? Elle se fiche de moi ? Elle veut une peluche juste pour tenir compagnie à son putain de raton-laveur en doudou ? Je pestai sur place et répondis à la place d'Arsène, mort de jalousie :
« Non, c'est bon, je vais te la gagner.
-Ce n'est pas à toi que je parle Gabriel, répondit-elle sèchement avant de se tourner à nouveau vers Arsène qui accepta. »
Alors là...Va te faire foutre Catherine Lincoln. Je détestais être remballé et encore plus quand c'est devant mes amis. Lucas pouffa de rire au fait qu'elle me calma instantanément avec ces mots secs et je me mis à faire la gueule : elle avait réussi à me foutre de très mauvaise humeur et je comptais bien lui montrer.
Evidemment, Arsène avait gagné haut la main la peluche Stitch de merde. Le bouclé avait toujours été fort au tir à la carabine et ça me foutait la rage qu'il lui ait fait gagné une peluche. Ça aurait dû être moi. Je traînai des pieds pour montrer à Cathy que j'avais les nerfs et...Putain, elle ne fit même pas attention. Elle n'était pas intéressée par mon changement d'humeur et ça commençait à me gaver. Je marmonnai dans mon coin à son insu:
« De toute façon, elle est moche ta peluche. »
Cathy fit la sourde d'oreille. Elle est invivable cette meuf. Les garçons payèrent un tour dans la grande roue. Les cabines étaient faites pour accueillir huit personnes. Je montais avec le groupe sans grande envie. Je me mis à l'opposé de Kate pour lui montrer encore une fois que je lui faisais la gueule et...elle continuait de parler avec cette pétasse de Léa. Les deux brunes ne se quittaient plus et je n'étais plus d'humeur à rire. La cabine se mit à monter lentement et je tournai la tête vers le paysage d'à côté. La ville était beaucoup plus appréciable à regarder maintenant que tout à l'heure dans l'attraction à sensation forte. Les gars discutaient et ils me demandèrent :
« Gaby, tu t'es pas branlé de la semaine ou quoi ? Tu tires la gueule depuis tout à l'heure.
-Non, répliquai-je froidement.
-J'ai deviné, déclara Arsène en souriant narquoisement. Tu n'as pas supporté que Kate te remballe tout à l'heure. »
Oui.
« J'en ai totalement rien à branler de sa peluche de merde. »
J'avais décidé de pourrir l'ambiance et c'était réussi. Plus personne ne parlait. Kate disait même à Lucas :
« Après cette attraction, on rentre ? Je suis crevée, j'ai cours à huit heures demain. »
Décidant d'être un peu méchant dans mes paroles, je disais à Cathy d'un ton cynique :
« Personne ne se couche à vingt-deux heures.
-Je me couche à l'heure que je veux et je ne t'ai pas demandé ton avis Gabriel, répondit-elle sur le même ton que moi pour me provoquer. »
C'est à ce moment-là que je regrette d'être monté dans cette grande roue de merde : je ne peux pas fuir. Sa provocation avait fonctionné, j'y ai pataugé les pieds en plein dedans. Je charbonnais :
« Tu casses les couilles.
-Et toi alors ? Tu nous casses pas les couilles aussi comme tu dis ? Tu pourris l'ambiance depuis tout à l'heure pour n'importe quoi. »
Je quittai son regard pour ne plus l'écouter et ça la met en rogne. Elle se mit à parler plus fort pour me faire comprendre que mon comportement la dérangeait :
« Très bien, joue au petit con dans ton coin. »
Je t'emmerde, lui répondis-je intérieurement en posant mon coude sur la rambarde de la cabine. Je laissai mon esprit divaguer dans la nuit noire de novembre. Je me calmais un peu à l'aide d'une musique techno dans ma playlist de téléphone. « Trentemoller – Moan » était un vieux morceau que je m'étais surpris à Shazam en boîte il y a un an. Je n'entendis que des lointaines voix et je ne serai même pas étonné qu'il parle de mon comportement.
En descendant de la cabine, je m'étais un peu calmé. Lucas aidait Léa à descendre de la cabine pendant que je pianotai sur mon téléphone pour répondre à quelques gars de ma promo sur les horaires de cours de demain. Arsène embrassa la blondasse avant de conclure cette soirée :
« Bon, on y va ?
-Ouais, répondit Cathy en baillant.
-Je la ramène Arsène, répondis-je en désignant Cathy pendant que les autres se dirent au revoir. »
Cathy se tourna vers moi d'un mauvais œil et en soutenant mon regard, elle me cracha :
« Je ne rentrerai pas avec toi Gabriel.
-Tu rentres avec moi. »
Ma réponse sonnait comme un ordre et je lui empoignai son bras pour qu'elle me suive mais elle se dégage violemment de ma prise en criant :
« Je n'ai pas envie de rentrer avec toi ce soir Gabriel.
-Putain mais pourquoi ?
-Tu me demandes vraiment pourquoi ? Ton petit jeu de petit con, ça sera sans moi. Je suis fatiguée, je n'ai pas envie de me prendre la tête avec toi en réagissant à tes réactions de gamin-
-Mes réactions de gamin, la coupai-je brutalement en haussant le ton.
-Oui tes réactions de gamin, affirma t'elle en n'abaissant pas son regard pour me montrer que je ne dominerai pas la conversation.
-Je ne vois pas de quoi tu parles, dis-je en croisant les bras tout en détournant le regard vaincu.
-Je suis sûre que si. Tu te comportes comme un con avec moi. Tu n'as pas voulu me faire gagner une peluche, tant pis pour toi.
-J'ai changé d'avis, lui répondis-je en faisant de grands gestes des bras.
-Parce que j'ai demandé à Arsène de le faire à ta place. Je n'aurai rien fait, tu n'aurais pas bougé le seul petit doigt. Tu as été jaloux. »
Putain de merde, elle a raison. Je suis hyper jaloux mais je ne l'admettrai jamais. J'affichai une mine renfrognée et scandai :
« Putain de merde, je suis pas ton mec. J'en ai rien à foutre.
-Très bien. On se revoit en athlétisme. Bonne soirée Gabriel. »
Elle termina cette conversation me laissant stoïque. Elle n'a pas répondu à mon énième attaque et ça m'énervait qu'elle reste aussi calme. Je m'avouai complètement con et vaincu. Nos amis nous fixèrent et Kate se dirigea vers Arsène. Je franchis un pas et la rappelai :
« Kate, sincèrement. Samedi ?
-Ouais, samedi. Va te calmer, me dit Kate en se tournant une dernière fois vers moi. »
Une moue triste apparut sur mon visage et je la laissai partir. Je me retrouvai seul avec Martin et Claire. Evidemment, je la vois venir cette casse-bonbons. Elle souriait en croisant ses bras sur sa poitrine et je voulais effacer son sourire de rat. Claire sautilla et devina :
« Tu craques vraiment sur elle !
-Je pense bien, répondit Martin en lui souriant me faisant pester.
-Putain Martin, tu ne vas pas recommencer.
-Tu ne t'es jamais comporté comme ça avec une fille Gaby, me répond Martin avec un clin d'œil.
-Lâche-moi. »
Je marchais en avant pour éviter de subir à nouveau leur interrogatoire. Maintenant que Martin et Claire sont ensembles, ces deux sorciers vont pouvoir comploter sur moi pour que je crache le morceau. Je n'arrivais déjà pas très bien à encaisser le fait que je puisse apprécier un peu plus cette fille que je ne le devrais, je n'ai surtout pas envie de dire à Martin qu'elle me plait réellement et que c'est ambigu entre nous. Je suis le Gabriel Hood au cœur de pierre.
**
J'espère que vous avez aimé le chapitre et que vous aimez toujours autant l'histoire que je vous présente. A la semaine prochaine
-Elo
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