31.
31.
Cathy
« Vous reviendrez vite, j'espère, me supplie ma mère lorsque je la pris dans mes bras.
-Evidemment, maman ! »
J'essayai de la rassurer même si je ne sais pas dans combien de temps, je vais pouvoir revenir à Villette. Ma mère nous avait ramené moi et Lucas à la gare pour que nous puissions prendre le train à 14 heures pétantes direction Grenoble. Lucas fit une dernière étreinte à ma mère avant de prendre ma valise dans sa main pour la porter jusqu'au quai. Je suivis mon meilleur ami après un dernier au revoir à ma mère. Un sourire triste s'afficha sur mon visage terne. J'étais inquiète pour elle. Malgré notre dispute, nous avons bien ri hier soir mais vendredi nous sommes plusieurs témoins à l'avoir vu boire bien plus qu'elle ne le devrait. Malgré la charge de travail, je repasserai à Villette pour surveiller qu'elle ne fasse pas de débordements avec l'alcool.
Le TGV arriva sur le quai et nous grimpons à l'intérieur. Je m'installe à côté de la fenêtre et Lucas plaça nos bagages sous nos pieds avant de s'assoir à mes côtés. C'est parti pour trois heures de train. Mon meilleur ami partagea un de ses écouteurs avec moi pour partager un peu de musique ensemble. Nous bavardons sur le week-end. Il me parle d'Amandine :
« Tu sais, je ne suis pas dupe. Je vois bien que je lui plais mais ce n'est pas réciproque. »
Je ne dis rien. Je ne vois pas ce que je peux répondre. J'aurai du savoir qu'Amandine n'était pas le genre de Lucas. Je soupire et il continue :
« J'ai du mal avec les filles timides. »
Je déglutis avant de répondre :
« Je comprends. Elle sera déçue.
-Elle trouvera mieux, je ne suis pas celui qui lui faut. Je ne suis pas sérieux dans les relations amoureuses.
-A ma connaissance, ta seule ex, c'est Faustine. »
Faustine et Lucas sont restés quelques mois ensemble au collège mais il l'a quitté car il ne l'aimait plus. Lucas n'a jamais su avoir de sentiments amoureux pour elle. Le blond me regarde quelques instants avant de rire et de me raconter :
« J'ai perdu ma virginité avec une troisième année en septembre. C'était il y a un an, première soirée, première cuite. »
Je vous avoue, son parcours sexuel ne m'intéressait guère mais j'étais curieuse de voir comment il avait pu dégénérer pendant mon absence. Je l'écoutais silencieusement :
« C'est à cette soirée que moi et Arsène avons rencontré Gabriel et Martin. Tu dois commencer à le connaître, il s'est battu avec un deuxième année pour une histoire de clopes. On a aidé à Martin à le retenir sinon il faisait un carnage.
-Je vois. Après vous êtes devenus amis.
-On peut dire ça, on a passé plusieurs soirées ensemble avant de se fréquenter réellement à la fac. Il avait déjà pas mal de problèmes dans sa vie, me confia Lucas. »
Soudainement, je fus attirée par la conversation et quémandai :
« Quels genres de problèmes ?
-Histoire de famille mais il nous en a jamais dit un mot. Il est...très renfermé.
-J'avais remarqué. »
Je fis semblant de ne rien savoir, Gabriel m'a avoué de ne plus avoir de mère mais je veux garder son secret. Lucas continue son récit. Il m'avoue :
« J'ai besoin de te raconter ce que j'ai fait sans toi. »
J'écoutais ses récits de l'année passée sans parler. J'avais du mal à entendre son changement d'attitude, le fait qu'il veuille s'amuser tout d'un coup. Lucas me raconte qu'avant son entrée à la fac, Arsène restait dans sa chambre d'université pour travailler puis il a pris un appartement lorsque Lucas a entamé sa première année de licence de droit et il s'est mis à l'accompagner à toutes les soirées.
Sur le reste du trajet, Lucas et moi avons bien bavardé et ça m'a fait du bien ce petit week-end où nous avons pu nous retrouver. Ça m'avait manqué.
**
Vers dix-huit heures, nous sommes enfin rentrés à l'appartement. Je souffle un bon coup et dépose mes affaires sales dans le panier à linge sale dans la salle de bain. Remarquant qu'il est plein, j'avertis Lucas :
« Demain après-midi en revenant des cours, j'irai faire la lessive.
-Pas de soucis. »
Il dépose ses affaires sales dans le bac et range le reste de ses affaires dans sa chambre. Je profite rapidement pour envoyer un message à ma mère pour lui signaler notre arrivée à l'appartement. Je m'assis sur ma chaise de bureau et démarrai les devoirs que je n'aie pas pu faire la veille en attendant l'arrivée de Gabriel. Il a dit qu'il passerait mais nous n'avons pas convenu d'heure. Je commençais par le TD d'écriture du XVIème siècle. Je mordillais mon stylo bleu en lisant l'intitulé. C'était un extrait de Rabelais avec comme titre « Gargantua ». Il faut que je fasse un travail d'analyse sur cet extrait. Je l'ai brièvement lu au collège, c'est la vie de Gargantua, un géant assez gourmand si mes souvenirs sont bons. Je ne pus m'attarder plus longtemps sur le sujet que la musique de l'interphone se mit en route. Lucas resta dans sa chambre lorsque je me levai. Je décroche :
« Oui ?
-C'est moi clocharde. »
Je levai les yeux au ciel. En effet, c'est bien Gabriel. J'appuyai sur le bouton pour le laisser rentrer et raccrochai. Lucas me crie de sa chambre :
« Qui c'était ?
-Gabriel. »
J'entendis un grincement de chaise et la porte de la chambre de Lucas s'ouvrit grandement. Il était derrière en train de boire un jus de fruit, le casque sur ses oreilles. Il est sûrement en train de jouer. Le blond me demande :
« Qu'est-ce qu'il fout là ?
-Il m'a dit qu'il passerait à l'appartement ce soir.
-Quand est-ce qu'il te l'a dit ?
-Hier, dis-je en sortant une bière du frigidaire.
-Depuis quand est-ce qu'il a ton numéro lui ? Et depuis quand est-ce qu'il te parle ? »
Lucas était dans la totale incompréhension. J'haussai les épaules et il ajoute :
« Je ne lui ai pas donné ton numéro pourtant. »
Il réfléchissait et reprend encore une fois :
« Merde, je ne pige rien.
-Laisse tomber, Lucas, il a trouvé mon numéro dans le téléphone d'Arsène.
-Ca encore je m'en fiche mais ce n'est pas dans ses habitudes de parler aux filles.
-Il a peut-être changé, lui dis-je au moment où Gabriel sonne dans le couloir.
-Pas à ce point. »
La conversation s'arrêta là lorsque j'ouvris la porte à son ami. Ce dernier apparut de mauvaise humeur. Il avait de longues cernes, ses cheveux étaient décoiffés. Il avait mauvaise mine, c'est le cas de le dire. Un silence malaisant apparut dans l'appartement et Gabriel devina :
« Je vois que j'aie interrompu quelque chose mais continuez, ne vous gênez pas pour moi. »
Son ton cynique traduit bel et bien sa mauvaise humeur. Je croisai les bras et le salua sans m'attarder sur sa réflexion :
« Bonjour Gaby.
-Il est tard pour se dire bonjour, remarqua-t'il avec mauvaise foi.
-Bonsoir. »
Je décidai de ne pas le contrarier et partis chercher la bière que j'avais préparé sur le plan de travail et lui amena. Il garde cette expression neutre et sans émotions sur son visage. Lucas essaye de lui faire la conversation mais Gaby reste sur sa position et refuse de verbaliser. Mon meilleur ami, vexé lui balance :
« Si tu es venu pour nous mettre de mauvaise humeur, tu peux te casser.
-Je ne suis pas là pour toi, cracha durement Gabriel en ouvrant sa bière. »
Mon cœur rata un battement lorsqu'il annonce qu'il est venu ici pour me voir. Lucas, blessé, s'isole dans sa chambre en claquant fortement la porte. Gabriel leva les yeux au ciel et d'un air sadique et toujours aussi cynique, il marmonna :
« Décidément, le clan Hermenz a décidé de me casser les couilles. »
Mes yeux s'arrondissent : De quoi est-ce qu'il parle ?
« Qu'est-ce que tu veux dire, lui demandai-je peu confiante.
-Rien. »
Son regard est fuyant, il est de mauvaise humeur. Gabriel est en train de mentir et ça me tue. Je souffle, énervée et répète :
« Qu'est-ce qu'il se passe avec Arsène et Lucas ? »
Aucune réponse de sa part. Très bien Gabriel, si tu veux te la jouer comme ça. Je claque fortement mes pieds contre le parquet et me dirige vers ma chambre en criant presque :
« Bois ta bière tout seul alors. »
Je claque la porte derrière moi. Celle-ci s'ouvre quasiment aussi vite que je l'aie refermée. Gabriel est dans ma chambre :
« Tu es bouché ou quoi, lui criai-je en m'asseyant sur ma chaise de bureau.
-Tu ne me parles pas comme ça, scande-t-il en s'approchant de moi de manière menaçante.
-Je parle comme je veux aux menteurs.
-Je ne vois pas en quoi je suis en train de mentir, déclare-t'il en buvant une longue gorgée de bière.
-Arrête. Tu es en train de mentir ! Tu ne me regardes pas, tu me fuis et tu es très mauvais menteur, lui remarquai-je le faisant sourciller.
-Je vois que tu me mates. »
Qu'est-ce que ? Un sourire carnassier orne son visage qui semble soudainement angélique et j'ai juste envie de lui égorger son sourire. Il me fait tourner en bourrique et il adore ça. Je pestai :
« Ce n'est pas drôle Gaby !
-Ouh...Gaby. »
Il s'approche un peu plus dangereusement et se baisse un petit peu. Sa main trouve mon visage et ses doigts vinrent se placer sous le menton pour m'obliger à le regarder en face.
« C'est plutôt sexy quand tu susurres mon surnom.
-Arrête ça, le repoussai-je en posant ma main sur son avant-bras, qu'est-ce qu'il s'est passé ? »
Gabriel remit son dos droit et partit s'assoir derrière moi sur le lit, toujours sa bière à la main. Il s'étira et me répond avec un peu plus d'honnêteté :
« J'ai frappé Arsène.
-Tu as quoi ? »
Je me retourne furieusement vers lui. Qu'est-ce qu'il lui a pris de frapper Arsène ? Je pensais qu'il allait se calmer au niveau de la violence. Je lui crie :
« Je pensais que tu allais te contrôler, faire des efforts pour ne plus frapper personne.
-J'ai essayé ! Crois-moi, je me suis retenu du mieux que je pouvais, se défendit-il en haussant la voix.
-Mais ce n'est pas assez putain.
-Merde ! »
Il claque la bouteille de bière sur ma table de nuit et se lève brusquement avant de reprendre de manière ingrate :
« Ce n'est pas parce que je t'aie avoué que je n'ai plus de mère que tu dois commencer à te comporter comme telle. »
Ses mots me blessent. Je ne cherche pas à l'enfoncer, j'essaye de comprendre, de le raisonner. Ma voix craque et je crie :
« Je ne serai jamais ta mère Gabriel. Je ne dirai jamais rien à personne d'ailleurs mais je me fais du soucis pour toi.
-Pourquoi est-ce que tu te ferais du soucis pour moi ? »
Il est toujours aussi froid dans ses paroles. Sa mauvaise humeur joue beaucoup dans le ton de sa voix. J'essaye de me calmer en adoptant une voix douce :
« Tu es quelqu'un de bien Gab, j'en suis persuadée.
-Tu te trompes, murmure-t-il en serrant les dents pour ne pas exploser. »
Devant moi, j'ai un homme brisé, vulnérable et poursuivi par les fantômes de son passé. J'essaie de l'apaiser en posant une main sur son bras. Je m'étais levée également. Je continue d'une voix gracile :
« Je te le promets, il y a du bon en toi. »
Ma phrase eut l'air de le calmer puisque sa respiration fut plus spontanée, plus lente. Il finit par me raconter les évènements :
« J'étais en boîte et j'ai revu la fille qui a porté plainte contre moi... »
Je me rappelle très bien cette histoire datant d'il y a quelques semaines. J'appréhende un peu le fait qu'il soit allé en boîte mais je le laisse poursuivre :
« Elle m'a pris la tête cette folle mais je n'ai pas été violent. J'étais juste en colère et je ne voulais plus rester dans cette discothèque de merde donc je suis allé demander à Arsène de partir d'ici pendant qu'il galochait une de ses conquêtes. »
Une grimace de dégoût s'afficha sur mon visage et un mauvais frisson traversa mon échine pour se répandre jusqu'à la pointe de ma colonne vertébrale. Arsène n'était plus le Arsène calme, sérieux et drôle que j'aie connu il y a à peine un an. Gabriel continua son récit :
« Il a mal pris le fait qu'il perde son plan cul. »
Je n'aime pas cette façon qu'il a de parler des femmes mais je ne dis toujours rien :
« Il m'a crié dessus. Il a dit que je gâchais toujours les soirées avec mon attitude de petit con, que je n'avais qu'à rentrer tout seul et il a fini par m'insulter de tapette alors je l'ai frappé. »
Je ne peux pas croire ce que j'entends. Arsène a clairement pété les plombs. Je ne sais pas qui est ce jeune homme aux cheveux bouclés mais il ne ressemble en rien à l'homme que je considère comme mon grand frère. Où est passé l'Arsène respectueux ? Je vais finir par croire que cette université est bourrée de mauvaises fréquentations. Je finis par dire :
« C'est un con. C'était mérité.
-Quoi ? »
Gabriel fut surpris de ma réponse et je rétorquai avec un sourire moqueur :
« Un jour ou l'autre c'est moi qui lui aurais flanqué une droite pour son comportement de merde. Il utilise les filles comme un bout de chair à saucisse. »
Gabriel rit et je continue de sourire. Sa mauvaise humeur s'est envolée d'un coup de baguette magique. Il reprend sa bière et but quelques gorgées avant de fixer étrangement mon secrétaire. Une paperasse est posée le long de mon bureau avec une multitude de stylos. Le garçon posa sa bière sur la table en verre me faisant râler :
« Tu vas en mettre partout !
-Qu'est-ce que tu bosses ? »
Il fixa le TD de Gargantua. J'haussai les épaules et répondit maussade :
« Un TD sur Rabelais.
-Gargantua ?
-Oui, c'est ça, tu le connais ?
-Je suis en deuxième année. Ce maudit professeur a encore gardé le même sujet. »
Gabriel râla et attrapa la feuille pour lire les consignes. Il pouffa en levant les yeux au ciel et maugréa :
« Et il a gardé les mêmes questions. Gargantua est un glouton, c'est tout et les gens gros n'étaient pas bien vu à l'époque.
-C'est toujours le cas aujourd'hui, lui rappelai-je en repensant à plusieurs histoires d'harcèlement qui avait eu lieu dans mon collège il y a quelques années.
-Pas faux. »
Gabriel s'en foutait royalement de ces personnes en surpoids et de ce qu'elles vivaient. Je ne supportais pas son manque d'empathie. Je croisai les bras de manière sévère contre ma poitrine et lui fis une réflexion :
« Tu n'es pas très compréhensif.
-Je ne me sens pas concerné, je ne pèse pas cent vingt kilos.
-Tu es cruel. »
Gabriel m'observa longuement avant de reprendre sa bière et de la terminer. Il rota bruyamment me faisant réagir :
« Tu es vraiment dégoûtant.
-C'est naturel de roter.
-Pas en public.
-Nous ne sommes pas en public... »
Il m'attira dans ses bras musclés pour pencher un peu plus son visage vers moi. Il jubilait de satisfaction, cela se voyait comme le nez au milieu de la figure :
« Il n'y a que toi et moi dans cette pièce, reprit-il en se penchant un peu plus vers mes lèvres.
-Il y a Lucas à côté.
-Tais-toi. »
Gabriel posa ses lèvres avec moins de douceur que les autres fois sur les miennes. Ses bras musclés me serrèrent. J'étais totalement sous son emprise. Je me laissai guider par ses lèvres et son corps qui se mit à se mouvoir au mien. Je plaçai une de mes mains sur son tee-shirt blanc et la deuxième remontait un peu plus pour atteindre la racine de ses cheveux noirs. Je sentais ses jambes avancer vers mon lit et je perdis confiance à mesure que mon corps s'écrasait sur mon grand lit. Gabriel me dominait, il avait toujours cette emprise sur mes lèvres et je m'en défis avec difficulté. Ce dernier ne comprenait pas mon geste. Il fronça les sourcils et susurra d'une voix grave et enroué :
« Quoi ?
Je déglutis difficilement. Je ne peux pas le laisser continuer cette mascarade. Il s'en fiche de moi, il ne ressent rien pour moi. Je ne veux pas qu'il me manipule. Je chuchote :
« On ne peut pas continuer à faire ça Gabriel.
-Faire quoi ?
-S'em-s'embrasser, bégayai-je peu sûre de moi.
-Nous ne faisons rien de mal. Nous sommes deux amis qui s'embrassent. »
Gabriel ne comprend pas que je puisse souffrir de ses baisers. Que si je l'embrasse, c'est parce que je veux bien plus que ça. Gabriel me plait et je sais que s'il continue comme ça, je vais envisager d'avoir une vraie relation avec lui. Il va me briser le cœur.
« Justement, des amis ne sont pas censés s'embrasser. »
Gabriel souffla et se releva immédiatement. Il se dirigea vers la porte mécontent : je l'ai braqué. J'essayai de le retenir :
« Si tu veux continuer de m'embrasser, il faudra te mettre avec moi.
-Me mettre avec toi, s'indigne-t-il brusquement, je pensais que tu allais comprendre que je ne sors avec personne.
-Qu'est-ce qu'il te fait peur dans ce mot sérieusement ? »
Je me relevai et essayai d'avancer mais il rajoutait de la distance en ouvrant la porte. Gabriel me repousse lorsque j'attrape son bras et il crie :
« Putain de merde ! Ne te rentre pas cette idée que j'aie peur. Je ne veux juste pas me caser, c'est tout ne me fais pas chier. »
Sa mauvaise humeur est de retour et je soupirai, vaincue. Je le laisse quitter la pièce furieusement. Je déposai sa bouteille dans la poubelle et l'informai :
« Tu ne pourras pas m'éviter longtemps, nous sommes ensemble pour le partiel de littérature. »
Aucune réponse, Gabriel me claque la porte au nez.
**
On se retrouve la semaine prochaine pour un nouveau chapitre!
-Elo
Bạn đang đọc truyện trên: Truyen247.Pro