18*
18.
Cathy.
Et l'appel fatidique de la réanimation était enfin arrivée :
« Votre mère est sortie du coma. Vous pouvez venir la voir dans l'après-midi quelques minutes après ces examens pour qu'elle puisse se reposer et nous discuterons ensemble des résultats. »
J'avais retrouvé un sourire. Ce qui comptait pour moi était que le plus dur soit derrière nous : ma mère était sortie du coma. Ce que je n'avais pas encore imaginé, c'étaient les éventuelles séquelles qu'elle aurait de sa tentative de suicide. Je n'étais pas prête à les entendre ou même les voir.
La journée avait semblé interminable. J'avais eu l'appel vers dix heures et demie. Pour passer le temps, Gabriel était resté avec moi chez Carmen. Malgré la situation, elle avait continué de travailler. En tant qu'avocate, elle ne pouvait pas se permettre de reporter ses rendez-vous avec les clients et la cour. Lucas avait pris une après-midi pour appeler Léa et tenter une nouvelle discussion avec elle tandis que Gabriel et moi discutions à propos de mon comportement de la veille :
« Gabriel. Je n'aurai pas du m'emporter de cette façon avec toi. »
Mon petit ami expira une longue fumée avant de se tourner vers moi et me souffler brusquement :
« Je sais que je suis un salopard la plupart du temps mais j'essaie de faire des efforts. C'est bien la première fois dans ma vie que je décide d'être plus cordial avec les gens, d'être un minimum respectable. »
Quant il utilisait ce langage, je savais qu'il était cynique. Il se moquait de la situation.
« J'ai fait le choix de te suivre jusque ici pour t'aider. Je pense que le mec est censé faire ça quand sa meuf est face à des problèmes. Mais clairement, parle-moi encore une fois comme ça et je rentre à Grenoble. »
Il était dur dans ses mots et je fis le choix de ne pas le contrarier. Les discussions calmes étaient encore impossibles avec lui. Il ne se remettait pas en question. Ou bien, il revenait par intérêt, ou il faisait culpabiliser. Léa avait raison de me dire de m'éloigner de lui mais je n'y arriverai jamais. J'étais amoureuse, j'étais piégée. Et puis même si je trouvais le courage de le quitter, je connaissais très bien Gabriel : il me ferait vivre un enfer à la fac comme les premiers jours.
Me voyant muette, il passa son bras autour de ma taille pour me coller contre lui de manière possessive. Je le fixais. Il avait tout du mauvais garçon à ne pas fréquenter. Ses yeux bruns n'étaient pas de tout confort. Parfois, je me sentais bien, en sécurité et quand il se mettait en colère, je pouvais percevoir toute sa noirceur dans les yeux. Ses cheveux noirs étaient toujours en bataille. Il était le gars typique des dark romance. Il faisait pas mal de conneries, il buvait facilement et se laissait facilement aller dans les bagarres. Il avait le style du mauvais garçon. Gabriel balança les restes de clope dans le cendrier sur la table avant de changer de sujet :
« Bon, faut qu'on aille voir ta mère. »
Je soupirai et le suivis lentement. Gabriel n'était pas la meilleure personne pour m'aider à sourire et je repensais à l'ensemble des paroles de Léa lors de notre dispute au téléphone : Gabriel était égoïste et se préoccupait de son propre nombril avant celui des autres.
**
Arrivé à l'hôpital, les réanimateurs nous prirent dans une salle réservée aux familles. J'étais accompagnée de Carmen, Lucas et Gabriel. Nous étions en face d'eux. Leurs visages graves ne me signalaient rien de bon. Le premier médecin, un homme d'une cinquantaine d'année, se racla la gorge bruyamment avant de présenter l'ensemble de l'équipe. Il y avait deux médecins, un interne et l'infirmière qui s'occupait de ma maman aujourd'hui. Dans un premier, ils m'expliquèrent l'ensemble de la journée d'examens puis le fait qu'ils retiraient petit à petit les médicaments qui l'endormaient. Ils expliquèrent également que ma mère avait présenté des signes d'éveil. Elle bougeait ses membres, ouvrait les yeux mais ne répondaient pas aux autres ordres.
« L'hospitalisation sera très longue. Il faudra du temps avant de déterminer les séquelles exactes de votre maman. A ce jour, nous pouvons uniquement parler d'hypotonie des membres inférieurs. C'est-à-dire que ses muscles n'ont plus cette capacité à interagir correctement et induire une perte moteur et d'équilibre. »
De manière plus simple, les docteurs exprimaient que ma mère ne saurait plus se déplacer autrement que par un fauteuil roulant. J'encaissais chaque mot sans pleurer. A dix neuf ans, c'était difficile d'apprendre que notre mère était devenue handicapée à cause d'une tentative de suicide.
Après l'entretien familial, ils me laissèrent lui rendre visite quelques minutes seule. L'infirmière m'accompagna jusqu'à sa chambre en essayant de me rassurer mais je n'écoutais rien. J'étais obnubilée par les dires des médecins. Plus on parlait de séquelles et plus j'en voulais à ma mère d'avoir essayé de foutre sa vie en l'air tout en bousillant la mienne. Quand je fus seule avec ma mère, je prononçai durement :
« Salut maman, je sais que tu es là donc ouvre tes yeux. »
Et contre toute attente, elle affronta mon regard et sembla me reconnaître puisque son respirateur alarma quelques secondes et sa fréquence cardiaque augmenta tout comme sa tension. Elle savait qui j'étais et ce que j'allais dire. Même dans un état pareil, elle me connaissait très bien. Je continuai :
« Tu croyais quoi en essayant de mettre fin à tes jours et en me laissant une lettre d'adieu ? Tu as essayé de me laisser toute seule ? Donc alors, c'est ça ? Je vais être orpheline à dix-neuf ans ? Pas de père et pas de mère ? C'est un miracle que tu sois parmi nous mais regarde où tu es ! Cloué dans un lit en réanimation. Qu'est-ce que je fous-là ? Je ne pouvais pas faire ma vie tranquille à la fac en sachant que ma mère a essayé de mourir. Mais, j'ai dit ce que j'avais à dire. Je ne veux pas assister à ta dégradation. Je sais ce qu'il va se passer et je ne veux pas assister à ça. Je rentre. »
Laissant toutes les machines alarmer, je quittai sa chambre déterminée. Je refusais d'assister à ça. Je savais qu'aucun progrès n'était possible. Les médecins avaient été formels, le cerveau n'avait pas réussi toutes ses facultés dû à l'hypoxie trop importante.
En sortant du service de réanimation, je rejoignis ma seconde famille à l'accueil. Carmen et Lucas buvaient un café tandis que Gabriel attendait dehors avec sa cigarette. La mère de mon meilleur ami me demanda :
« Comment va ta mère ?
-Ça va, répondis-je évasive. »
Lorsque nous sortions de l'hôpital, je prévins tout le monde de ma décision :
« Demain, on reprend le train pour Grenoble. Je ne veux pas rester une minute de plus dans cet hôpital parisien. »
**
Voilà la suite, je vous laisse patienter encore pour la suite ;)
-Elo
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