Chapitre VIII
— Et donc tu as déjà réussi à trouver tu lait ici ? Interrogeai-je, suspicieux.
— Oui, tu sais bien que j'ai été guéri depuis.
— Où tu l'as trouvé ? On ne nous donne que de la soupe. »
Il se tut devant ma curiosité, peut-être mal placée, mais curiosité tout de même. Ce 'médicament' n'avait aucun sens, et qu'il ait réussi à en trouver non plus.
« Ils ont une vache ? Tentai-je de deviner face à son silence. Tu es allé la traire ?
— Arrête de demander, lâcha-t-il après un soupir, se relevant. »
Il tangua sur ses pieds, subitement pâle, mais me demanda immédiatement de le lâcher. Je ne m'étais même pas rendu compte que je l'avais retenu par le bras.
« L'endroit où ils t'ont piqué a gonflé, constatai-je en voyant les marbrures violettes sur sa peau. Ça te fait mal de plier ton coude ?
— Ça me fait mal même sans plier, ricana-t-il en se rapprochant de la porte, son bras pendant mollement à côté de lui. Tu viens ? Ça va être l'heure de la soupe.
=|=|=
Le lendemain matin, les travaux furent distribués, et ce fut sans surprise que moi et Corentin fûmes envoyés aux usines de métaux, soit la tâche la plus ingrate du camp. L'intérêt de ces usines était de polir des pièces de métal usagées auprès de machines énormes et très dangereuses, inutile d'être un grand savant pour le savoir. Ce qui faisait que ces usines étaient l'endroit redouté des prisonniers, était que les polisseuses tournaient très vite, les pièces brûlant vivement les doigts si l'on ne trouvait pas une technique pour les couvrir car elles étaient très chaudes très vite, et les roues de la machine envoyaient toute la poussière de métal dans les yeux et la bouche, provoquant de belles brûlures respiratoires qui restaient une bonne semaine si ce n'était davantage.
Corentin m'a dit une fois que certaines pièces portaient une maladie, le tétanos je crois, qui fait mourir la personne au bout d'une durée que j'ai oubliée. Apparemment, le tétanos vient dans le corps avec les plaies, et c'est pour ça qu'il ne faut pas se couper avec les pièces — tâche difficile, elles sont pointues et glissent souvent des mains.
Je ne sais plus comment fait mourir le tétanos tiens, je demanderai à Corentin.
D'ailleurs, celui-ci mettait un soin incroyable à me fuir ce matin, s'éloignant de moi même dans l'usine, ce qui après tout valait mieux pour nous deux, je savais être une vraie pipelette parfois. Aux ordres des gardes, chaque prisonnier se plaça devant sa machine, un bac de métaux devant lui, avec l'obligation de commencer le travail immédiatement. Ma côte blessée, loin d'être remise du spectacle d'hier, me lança terriblement, me faisant vaciller. Heureusement que les gardes ne m'avaient pas vu, ils auraient pensé que je traînais et m'auraient puni.
Je saisis ma pièce et la déposai sous la roue de la polisseuse, l'enclenchant. Le bruit émis me fit grimacer, ce grincement terrible s'activant bientôt partout dans l'usine. Quel travail ingrat.
On prend, on polit, on se brûle, on pose, on prend, on polit, on se brûle, on pose, on prend-
Longtemps après le début de l'activité, un bruit strident retentit dans la grande pièce, celui d'une pièce tombée au sol. Or, l'ordre ultime était de ne rien faire tomber. Les gardes se dirigèrent en ricanant vers le vieillard fautif, doté d'une barbe sale et démuni d'une partie de sa vue à cause des poussières métalliques qu'il avait reçues dans ses yeux depuis des années. Oui, je le connaissais lui aussi. Il s'appelait Hans.
Comme moi, les autres prisonniers ne faisaient plus leur travail, focalisés sur la scène qui se passait dans le fond de l'usine, qui pour moi était juste quelques rangées plus loin. Je vis d'ailleurs Corentin au plan de travail voisin de celui d'Hans, ce qui me fit grimacer. Si les gardes n'en avaient pas assez du vieillard, ils s'en prendraient à ses voisins.
Les surveillants s'arrêtèrent face à Hans, rigolant bruyamment. Le pauvre vieux tremblait, tête baissée. Aussi bien qu'il avait souvent vu des camarades faire tomber leurs pièces, il ne l'avait jamais fait. Et il connaissait la finalité de l'entrevue avec les gardes, qui l'emmèneraient en dehors de l'usine pour l'exécuter. Pas de justice au camp, que des prisonniers en trop. Pourtant, ils ne le déplacèrent pas, jouant presque avec, l'appelant 'Santa Claus' — allez savoir ce que ça veut dire — en lui tapant l'épaule, ce qui le fit trembler de plus belle. Un second garde le frappa à la tempe avec la crosse de son revolver de ceinture, faisant couler un filet de sang le long de son visage. Hans vacilla, mais se reprit. Montrer un signe de faiblesse le ferait mourir.
Mais le troisième garde dut l'avoir vu, sortant une petite arme d'une de ses poches. Il tira droit sur la tête d'Hans, qui tomba à terre la cervelle en bouillie, laissant les balles tirées par la petite mitraillette du garde toucher les machines derrière lui. Celle-ci explosa, provoquant un incendie qui prit les autres machines et les prisonniers derrière elle. Je vis Corentin courir vers les sorties, aucun garde ne pouvant stopper la marée de prisonniers qui découla de l'accident, les trois surveillants tombés avec le souffle meurtrier. Les cris qui retentissaient dans l'espace étaient assourdissants, mêlés au son des polisseuses en marche ou en train d'exploser à leur tour. L'air libre me fit un bien fou aussitôt sorti, tellement plus léger que celui de l'usine, rempli de poussière de métaux et de fumée.
Sans s'émouvoir, les gardes présents dans la cour nous firent nous asseoir, laissant pour l'instant l'usine brûler et leurs camarades avec. Je retrouvai Corentin avec soulagement, prostré dans une position souffrante.
« Tout va bien ? M'enquis-je à voix basse, le son de ma voix couvert par ceux des autres prisonniers qui chuchotaient entre eux.
— J'ai pris un morceau de métal dans la cuisse, marmonna mon ami en me désignant le débris pointu qui dépassait de sa jambe. Il n'était pas poli, probable qu'il va me mettre malade.
— Tétanos ? »
Il me regarda sans rien dire.
Les gardes qui nous avaient reçus nous dirent que nous serions tous privés de pain le soir, ce qui ne changea pas ma situation, mais contraria Corentin, qui jura en français à voix basse. Bientôt, ils nous firent nous relever, nous plaçant à bonne distance les uns des autres et interdiction de s'asseoir et de bouger. Le temps passa lentement, encore plus quand un vent gelé se leva. Au loin, Corentin grelottait, se tenant son bras blessé et tenant à cloche-pied sur sa jambe valide.
Quand le soleil, ou ce qu'on en voyait, se coucha, les autres prisonniers revinrent et les gardes proclamèrent après le repas que l'usine était restaurée.
Notre groupe se dirigea d'un pas fatigué à la baraque pour dormir, Corentin profitant du fait que le chef de baraque parle avec un garde pour m'accoster.
« Dis-moi, est-ce qu'Elisa a prévu de venir nous apporter de la nourriture ? Je ne me sens vraiment pas bien.
— C'est vrai que tu es pâle, mais pourquoi- »
Je marquai un arrêt dans ma marche, m'attirant brièvement les regards des gardes autour de nous.
« Qui t'a parlé d'Elisa ? »
=_=_=
Bien le bonjour, chères pommes de terre historiennes.
Votre week end est-il agréable ? Paniquez-vous un tantinet pour tous ces contrôles à venir, que vous n'avez ni le temps ni la patience de réviser ?
Moi légèrement, il ne faut pas se le cacher.
Je vous pose la question Chères pommes de terre, comment l'ami de notre jeune héros a-t-il eu connaissance de la présence d'Elisa au sein du camp ?
Une très bonne question que Luc fait bien de se poser, si vous voulez mon avis.
Enfin, je ne vous en dis pas plus, mis à part...
A bientôt chères pommes de terre historiennes.
*ferme son livre, retire ses lunettes et vous adresse un signe de la main*
Date de la NDA : 29/01/2021
Date de réécriture : 22/08/2022
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