*Modifié le 06.05.22*

— La voie des airs ? Il veut dire qu'ils... vont se transformer en oies ? demanda Allistaire au bout d'une minutes ou deux, brisant le silence oppressant de l'habitacle.

Malgré moi j'éclatai d'un rire bref et sonore alors qu'un sourire narquois étirait les lèvres de Worth, malgré tout très concentré sur la route et surtout sur le rétroviseur.

— Je lui raconterai que tu as dit ça, il va adorer, ne pus-je m'empêcher de lui sortir avec un rictus sardonique, mon regard également rivé sur l'extérieur.

Une lueur blafarde apparaissait à l'horizon, signe que l'aube approchait. Derrière nous, le ruban d'asphalte luisant de rosé était, pour le moment, toujours désert. Allistaire partit d'un petit rire nerveux mais s'abstint de poser plus de question, même si visiblement il en mourrait d'envie. Durant quelques minutes, le trajet se poursuivit dans un silence tendu, nos yeux scrutant âprement la nuit à la recherche de la moindre lueur de phares ou ombres suspectes.

— On y sera dans combien de temps ? demanda soudain Monroe.

— Je te le dirais quand je saurais où nous allons, lui répondit Worth d'un ton sec, la fatigue durcissant ses traits dans la pénombre nimbée de la lueur rouge des voyants luminescents de l'habitacle.

— Comment ça ? Je pensais que nous retournions au commissariat !

— Ce sera certainement le premier endroit où ils vont nous attendre ! Réfléchissez un peu ! lui sortis-je.

— Devant un bâtiment bourré de flics ?! Il faudrait vraiment qu'ils soient idiots !

— C'est toi qui es idiote ! lui balança Allistaire, coupant la réplique cinglante qui me brulait les lèvres. Tu as vu de quoi ils sont capables ? Tu crois vraiment que la perspective de se confronter à un groupe de mecs armés de flingues, va les arrêter ? Ils n'ont pas peur de nous et ils ne sont pas humains. Les dommages collatéraux, ils s'en foutent pas mal. On est passé de l'autre côté du miroir là, ma vieille, il faut te faire une raison !

— Tu as raison dans le fond, mais fait quand même attention à ce que tu dis ! commenta Worth d'une voix tendue. Ils sont inhumains car ce sont des criminels et non parce qu'ils font partie d'une autre espèce que la tienne... n'oublie jamais ça ! Nous aussi nous avons notre lot de dégénérés et de sociopathes dangereux.

— Vous avez raison, chef, désolé.

— Oui il a raison, à une exception près ! Vous êtes quoi au juste ? lui demanda Monroe de sa voix agressive qui commençait à me taper sur les nerfs.

À cet instant, des phares apparurent dans les rétroviseurs. La lueur grossissait vite, très vite. Worth commença à accélérer. La tension grimpait dans l'habitacle au même rythme que l'aiguille du compteur. L'écart entre nos deux véhicules s'était stabilisé lorsque Gabriel commença à ralentir.

— Vous êtes fou ! Pourquoi vous ralentissez ?

— Pour économiser la batterie. Leurs phares sont allumés, ils ne cherchent pas à nous rattraper... je ne pense pas que ce soit eux.

— Et si vous vous trompez ?

— Il sera toujours temps d'appuyer sur le champignon.

A l'instant de sa réponse l'autre véhicule nous rattrapa et nous doubla sans effort. La tension chuta subitement d'un cran, tandis que nous continuions à rouler, les premiers rayons d'un soleil pâle affleurant derrière la ligne d'horizon. Durant de longues minutes, je m'abimai dans la contemplation du paysage morne qui défilait derrière la vitre légèrement teintée. J'avais la désagréable impression de passer mon temps dans des voitures inconnues sans savoir où j'allais, ces derniers temps et ce constat triste et alarmant ne me plaisait pas du tout. Alors que je me forçais à détacher mon regard du paysage hypnotique, je surpris Worth en train de se passer une main sur les yeux. Maintenant que la luminosité augmentait, son visage hâve et ses cernes violacées montraient toute l'étendue de sa fatigue.

— Tu veux que je te remplace ? Tu as l'air exténué.

— Je le suis, mais ça ira, me répondit-il en ouvrant brièvement la vitre pour se donner un coup de fouet. Je n'ose pas m'arrêter, me murmura-t-il ensuite. Je suis certain qu'ils nous surveillent.

Il avait sans doute raison, réalisai-je. Cette absence de poursuite était, à tous le moins étrange, au pire inquiétante. Je ne savais pas dans quoi exactement nous avions embarqués Jude et Christina, mais j'espérai vraiment qu'ils allaient bien. Certainement un signe du destin, mais à l'instant où je pensai à eux, mon téléphone vibra brièvement dans ma poche. Je m'empressai de m'en saisir et ce que j'y lu me rassura mais confirma aussi les craintes de l'inspecteur.

« Il doivent vous suivre à la trace ! Dès que vous êtes partis, ils ont cessé de s'en prendre au portail. Maison sécurisée. Trouvez comment ils vous pistent et rejoignez un endroit sûr. Une fois là-bas faites-nous signe, on vous y retrouvera. »

— Merde ! jurai-je à voix basse tandis que je réfléchissais à toute vitesse.

— Quoi ? Qu'est-ce qui se passe ? s'inquiéta Worth en risquant un coup d'œil dans ma direction.

— Tu avais raison. Ils nous suivent certainement à distance depuis le début, lui répondis-je sans me soucier qu'Allistaire et Monroe m'entendent. Après-tout, ils avaient le droit de savoir.

— Comment pouvez-vous en être certaine ?

— Jude vient de me le confirmer, répondis-je à Allistaire tandis que je montrai brièvement le sms à Worth.

— Merde ! répéta-t-il à son tour en donnant un coup sur le volant. Comment ils font ?

— Comment ils font, quoi ? répéta Monroe d'un ton inquiet et exaspéré à la fois.

— Ils nous suivent à la trace. Certainement un mouchard sur l'un d'entre nous. Nous devons nous arrêter et nous débarrasser de tous ce que nous avons sur nous.

— Vous voulez qu'on se mette à poil ?! s'esclaffa Allistaire, espérant sans doute détendre l'atmosphère, mais nous étions tous trop tendus et inquiets pour cela.

— Je connais un refuge métamorphe pas très loin d'ici. Il n'est plus utilisé depuis longtemps mais la barrière protectrice devrait encore être active et suffisante pour les retarder le temps que nous nous débarrassions du traceur, expliquai-je à Worth à voix basse.

— Si tu penses que c'est sûr, je te fais confiance, me répondit-il avec un soupir las. Je dois aller où ?

— Dès que tu pourras, tourne à droite.

— Ok, me dit-il en ralentissant pour emprunter la première route secondaire qui croisa notre chemin.

— Pourquoi ils ne nous tombent pas dessus tout de suite, s'ils savent où nous sommes ? demanda Monroe.

— Ils attendent que l'on s'arrête. Ils ne savent pas que l'on a compris leur manège. Du moins je l'espère, terminai-je pour moi-même d'un ton sinistre. Là, tourne à gauche ! indiquai-je à Worth tandis que nous longions une petite forêt.

La berline, non conçue pour les chemins forestiers, se mit à cahoter et à tanguer malgré la vitesse plus que réduite que Worth avait été obligé d'adopter. Nous avançâmes de longues minutes, les branches et les ronces griffant la carrosserie tellement le sentier était étroit, pour finir par déboucher dans un cul-de-sac.

— Maintenant, on fait quoi ? me demanda l'inspecteur perplexe.

— Maintenant, tu continus, lui répondis-je avec un petit sourire.

— Pardon ! Je vous signale qu'il y a des arbres droit devant nous ! paniqua Monroe en s'agrippant à mon siège.

— Faites-moi confiance. Ce n'est qu'une illusion.

Worth, qui commençait às'habituer à nos bizarreries, n'hésita qu'une seconde avant d'appuyer surl'accélérateur. A l'instant où le nez de la voiture frôla l'écorce rugueuse, jevis Gabriel fermer les yeux, pendant qu'Allistaire marmonnait dans sa barbe etque Monroe criait « Attention ! ». Pourtant, comme je le leur avais assuré, noustraversâmes l'illusion sans le moindre heurt, disparaissant momentanémentderrière le sort de protection s'étendant là. 

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Désolée pour cet affreuuuuux retard O_o Mais la période des fêtes n'est pas très propice à la concentration ='D Tout devrait rentrer dans l'ordre prochainement ^.^ 

Je vous souhaite un bon réveillon et une très bonne année 2019 avec quelques heures d'avances ^.^ 

Des bisous et à l'année prochaine pour de nouvelles histoires ;-) 

Kisssss <3