Chapitre 2
La pluie battait sur la fenêtre comme son cœur le faisait dans sa poitrine. Elle était debout, s'étirant après plusieurs heures assise à travailler tandis que le jeune homme l'observait, avachi sur le moelleux tapis. Elle aurait aimé lui dire de détourner son regard, d'arrêter de lui faire ressentir de telles choses mais elle aimait trop ça pour le lui demander.
La jeune fille laissait ses doigts effleurer les étagères et leurs objets, tentant de faire oublier à son esprit les battements incessants de son cœur et son trop plein de joie qui lui donnait envie de sourire sans la moindre raison, juste parce qu'il était là. Il était d'ailleurs étonnement silencieux, les dernières heures avaient beau avoir été consacrées à leur travail, ils n'avaient pourtant pas gardé leur légères et douces conversations pour eux. Mais il y avait comme une drôle de sensation qui flottait dans l'air et la jeune fille n'aurait su dire si c'était agréable ou non.
Ses doigts s'arrêtèrent sur un objet. Elle s'en saisit et cet habituel doux trop plein d'émotions l'envahît. Elle ne savait que faire. La jeune fille se tourna vers son ami et lui montra l'objet qu'elle tenait entre les mains. Un caillou. Mais pas n'importe lequel. Celui qu'elle lui avait offert des années auparavant. Qui aurait cru qu'après tout ce temps il ne s'en serait pas débarrassé ?
— Pourquoi est-ce que tu l'as gardé ? demanda-t-elle, la voix légèrement tremblante
Le jeune homme se leva pour lui faire face et, avec son doux sourire habituel, le yeux passant de l'objet à ceux de son interlocutrice, répondit :
— Pourquoi ne l'aurais-je pas fait ?
— C'est juste un caillou, je veux dire, il y en a plein des comme ça
— Il n'y a pas plein de cailloux qui ont la couleur de mes yeux, et, plus important encore, il n'y en a pas beaucoup qui m'ont été offerts, encore moins par toi
Le visage de la jeune fille s'empourpra légèrement, se rendait-il au moins compte des dégâts qu'il faisait chez elle ?
— Et en quoi cela change-t-il quelque chose ? C'est juste moi, rien d'exceptionnel
— Justement, c'est parce que c'est toi qu'il est important
— Quoi ? Qu'est-ce que tu veux dire par là ?
Ce fut au tour du jeune homme de rougir. Il chercha ses mots tandis que son interlocutrice arrivait à peine à contrôler son corps et ses émotions et tentait de calmer l'affluence assourdissante de ses pensées. Pourtant, tout ce doux chaos fut réduit au silence quand son ami reprit la parole. Il s'était rapproché et tout ce qu'il se passait dans la tête de la jeune fille avait été comme court-circuité.
— Écoute, je ne sais pas vraiment par où commencer. Je... je n'avais pas prévu de te le dire comme ça, et d'ailleurs, même pas du tout depuis peu. Mais ça fait des années que j'ai juste peur de tout gâcher, le truc c'est que, je t'aime et–
— Tu quoi ? Et tu ne pouvais pas le dire avant ?! s'exclama la jeune fille
Elle était assommée par toutes ses émotions, plus rien n'avait de sens, c'était juste un amas de bonheur à l'état pur. Pourtant, elle voyait bien que quelque chose n'allait pas, alors elle continua :
— Ça a l'air d'être un problème, n'est-ce pas ?
— Non ! s'exclama-t-il, surpris, Enfin pas dans ce sens là. D'ailleurs, je crois que ça va faire bien plus mal maintenant.
Son amie fronça les sourcils, perplexe, l'incitant à continuer.
— Tu sais que mon père travaille pour le gouvernement. Eh bien, récemment, il a été violemment menacé et du fait du danger, je vais devoir partir d'ici un ou deux mois, le temps que tout soit mis en place.
— Je ne vois toujours pas le problème, on a des télépho-
— Non, la coupa-t-il, je vais devoir couper tous les ponts avec chaque personne que je connais, je vais peut-être même avoir un nom d'emprunt. On ne se reverra plus jamais.
Crac
C'était le son de son cœur qui venait de se déchirer. Elle apprenait qu'il l'aimait avant de savoir qu'elle allait le perdre à jamais. La jeune fille se sentait vide. Elle qui était si heureuse quelques instants auparavant ne ressentait absolument plus rien. Elle croisa le regard gris embué de larmes du jeune homme qui tenta de s'excuser d'une voix étranglée.
Aucun des deux n'avait envie de parler. Aussi s'assirent-ils sur le sol, face à la fenêtre, observant la pluie qui s'écrasait sur le sol telle leurs larmes et l'orage qui déchirait le ciel comme la vie déchirait leurs cœurs. La seule chose qui réchauffait leurs émotions gelées était ce léger contact entre leurs épaules. Ils ne bougeaient pas de peur de le perdre et d'avoir cette sensation affreuse de pure solitude.
Ils contemplèrent l'averse des heures durant, dans un silence qui sonnait bien, tel le calme qui régnait avant une tempête.
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