𝙲𝚑𝚊𝚙𝚒𝚝𝚛𝚎 ₂₇
➠ ❛Pendant ce temps, dans le noir...❜
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« Mon effacement ne me sert qu'à être un boulet pour les autres... C'est tout ce dont je suis capable, je ne peux aider personne, expliqua Shōta tout en regardant le ciel bleu qui surplombait leurs têtes, assis sur le toit du lycée. Alors quand on me demande comment j'envisage de tirer le meilleur parti de mon alter... Je ne vois vraiment pas quoi répondre au prof.
- Ouais, bah, t'as qu'à être un boulet pour les vilains alors, proposa Oboro comme si cela était évident.
- Shō-chan ? Se spécialiser dans la bagarre ? Hard time picturing it, dit Hizashi entre deux bouchés de son hot-dog.
- C'est sûr que tu n'es pas fait pour les combats d'alters, approuva le plus âgé des trois tout en mastiquant son repas. Mais avec ton effacement, tu peux forcer n'importe quel vilain de se battre à mains nues ! C'est un talent à inscrire sur ton CV !
- Sauf que je ne suis pas doué non plus pour la baston, objecta le noiraud avec agacement. Face à une armoire à glace, je n'ai aucune chance. Vous avez bien vu Sensoji. Oi, attends voir... Oboro, ne lui donne pas ta nourriture, ce n'est pas bon pour sa santé. »
Il attrapa le chaton qui suivit les baguettes de Shirakumo du regard en salivant, et le posa sur ses genoux. La petite bête sembla autant déboussolée que frustrée, elle lécha l'air et finit par trouver la tétine que lui présentait son nouvel hôte.
« Heureusement que je suis allé chercher du lait pour chaton ce matin, grogna-t-il en lui donnant le biberon. Tu ne devrais vraiment pas l'emmener chaque jour au lycée.
- T'es marrant toi ! Tu voudrais que je laisse cette pauvre bête toute seule chez moi ?
- Et puis dis-toi que chez Oboro, il n'y a pas tonton Shō-chan pour s'occuper de lui ! argumenta le bilingue.
- Mais où est-ce qu'il fait ses besoins ?
- Sur mes fringues, la plupart du temps !
- AHAHAH ! C'EST DEGUEU !
- Il faut lui apprendre la propreté. »
C'est alors que, coupant court à leurs conversations, une voix s'imposa sur le sommet de la petite tour contre laquelle étaient adossés les trois meilleurs amis, leur faisant relever la tête avec surprise.
« C'est donc vous trois qui déjeunez illégalement sur le toit depuis tout ce temps ? »
Visiblement, Shirakumo fut le seul à mettre une identité à cette jolie jeune femme qui les dévisageait avec un certain amusement. Il s'était promptement levé, et souriait de toutes ses dents.
« C'est Kayama de terminale ! Elle est grave cool !
- Vous savez très bien qu'on n'a pas le droit de monter ici, continua-t-elle en réponse, ignorant cette crise de fanboyisme. Aucun respect pour les règles... Ça c'est la jeunesse comme je les aime !
- Qu'est-ce qui t'amène ici, Kayama-senpai ? demanda Oboro avec l'excitation de pouvoir échanger avec une troisième année aussi jolie qu'elle, sans perdre la perspective qu'elle puisse s'intéresser à lui.
- Je reviens de l'agence où je suis en stage, j'avais de la paperasse à remplir au lycée alors... Me voilà ! J'en ai profité pour passer ici, c'est mon coin préféré, à moi aussi.
- Madame est récidiviste, plaisanta Hizashi avec un de ses éternels finger gun, pointant la jeune femme qui venait de bondir jusqu'à être à la même hauteur qu'eux. »
Nemuri Kayama était une belle jeune femme, élancée, avec des formes généreuses et une magnifique chevelure bleu nuit. Lorgnant l'accoutrement de la terminale, Shōta ne put s'empêcher une remarque :
« C'est moi, où tu ne portes rien sous ton manteau ? »
Car en effet, l'apprentie ne portait qu'un manteau ouvert, une ceinture, des bottes et une paire de lunettes fantaisies, ce qui le déstabilisait un tantinet. Il n'avait pas l'habitude de voir autant de chair à l'air libre, il en rougirait presque. Oboro, en revanche, ne se cachait pas pour l'apprivoiser du regard.
« C'est mon costume de super-héroïne en temps que Midnight !
- Il est fait dans un nouveau matériau invisible pour les imbéciles ? ironisa le noiraud avec une grimace. Tu as trop lu 'Les habits neufs de l'empereur'...
- Tu viens de t'auto-casser, dude ! rigola le blond, dont les yeux ne faisaient que jongler entre l'introverti et la nudiste.
- J'ai jamais été aussi content d'être un idiot ! s'écria le nuageux sans s'empêcher de faire savoir au monde entier son amour pour l'anatomie féminin, pleurant presque au simple rappel de pouvoir regarder sans contrôle parental l'essence même de ses fantasmes d'adolescent curieux.
- Vous n'y comprenez pas, soupira la terminale, lasse de faire face à trois jeunes, l'un trop pur, l'autre pas assez, accompagné d'un troisième qui se contentait de fixer la scène derrière ses lunettes triangulaires. Mon costume est à la fois osé et pratique, il représente toute la beauté du fonctionnel ! J'ai réfléchi à quelque chose qui n'entraverait ni mes mouvements, ni mon alter, et j'ai abouti à ce design ! Je n'ai absolument aucune honte à le porter !
- Peut-être que tu devrais, non ? s'enquit Shōta avec une petite moue, serrant le petit chat contre son torse.
- Ne l'écoute pas, Kayama-senpai ! s'interposa le nuageux en poussant le moins sujet à l'attraction féminin. S'il voit de la perversion là où il n'y a que du charme, c'est parce qu'il a un regard lubrique ! »
Aizawa grimaça et Yamada explosa de rire. Venait-il sérieusement d'employer le terme 'lubrique' ? Nemuri eut un petit sourire.
« Bah, ses réflexions ne m'atteignent pas, les précurseurs sont toujours des incompris ! expliqua fièrement Midnight. Mais vous allez voir, d'ici un an les mœurs japonaises auront changées !
- J'espère que non, marmonna l'introverti plus pour lui-même que pour elle.
- Bon, assez parlé de moi ! D'où vient ce petit chat ? Il est à qui ?
- En fait, on... commença le marmonneur avec incertitude.
- C'est moi et tonton Shōta qui nous occupons de lui, expliqua Oboro avec fierté. On l'a recueilli il y a quelques jours ! Mais je ne peux pas le laisser seul, déjà que mes parents ne veulent pas d'un animal...
- Ce n'est pas une raison pour l'amener au lycée, passez-le-moi ! »
La jeune femme intercepta la boule de poils dans ses bras et fondit littéralement sur place au simple contact avec le pelage de la créature féline.
« Awwww, il est tout douuux !... D'où viens-tu, mon petit chou ? On a bien mangé ? On a envie de faire un gros dodo ?
- Le veinard, ne s'empêcha de dire Shirakumo avec quelques rougissements qui attirèrent de légères chez Aizawa, qui trouvait juste la situation plus gênante qu'adorable, plaignant presque le pauvre animal qui n'avait rien demandé.
- Il s'appelle comment ? demanda-t-elle alors, reprenant sa voix normale.
- Erm, euh... commença le nuageux en se grattant la nuque.
- Sans nom, déclara Shōta.
- Okay, quelle est votre nourriture favorite ?
- Les sushis, affirma celui aux yeux bleus.
- LE POULET FRIT ! s'écria l'énergique qui avait enfin une bonne raison de l'ouvrir.
- Je n'en ai pas...
- Sushi fonctionne mieux que poulet frit. (Elle reprit sa voix bizarre.) C'est qui le plus beau des Sushi ? C'est toi ! J'ai envie de te manger tout cru ! chantonna-t-elle en embrassant le pelage du petit chat qui miaulait de découragement.
- On cherche quelqu'un pour l'adopter, en fait ! affirma Shirakumo, pensant peut-être que Nemuri serait capable d'en prendre l'entière responsabilité.
- Désolée, mais une fois diplômée je prévois emménager dans mon propre appartement, je n'aurais peut-être pas le temps de m'occuper de ce petit cœur. Et puis on dit que les célibataires avec un chat se marient plus tard ! »
Shōta n'aurait pas cru qu'elle s'inquiéterait sur ce genre de détail. Hizashi, en revanche, fut compréhensif. Lui non plus ne savait pas s'il aurait le temps de s'occuper d'un animal après la fin du lycée, en fait, il ne se voyait pas trop avoir un quelconque animal de compagnie avant plusieurs années. Il n'aura connu que les deux chiens de ses grands-parents, ainsi que Koko, le perroquet qu'il possédait étant petit. Le départ de son précieux ami l'avait affecté pas mal d'années, il ne voulait plus s'attacher à un animal pour ensuite s'en séparer aussi douloureusement. La mort d'un être cher s'oubliait difficilement.
« Je ne pourrai pas le garder trop longtemps, alors dépêchez-vous de lui trouver un vrai foyer ! clama-t-elle en s'éloignant avec Sushi contre son cœur.
- À tous les coups elle ne voudra plus s'en séparer, plaisanta Oboro en la regardant partir par la porte du toit. »
[...]
Hizashi s'était déjà changé et installé dans le bus qui devait les mener jusqu'à leur lieu d'entraînement. En attendant ses deux meilleurs amis qui prenaient leur temps aux vestiaires, il parcourait ses messages avec un certain intérêt, notamment quelques commentaires laissés sur son site où il animait sa propre webradio, ainsi qu'un don de la part d'un de ses Listeners, comme il aimait bien les appeler. Il a commencé ce nouvel hobby juste avant la rentrée scolaire, en mois d'avril, sous les conseils de son père qui s'en voulait de ne pas être financièrement capable de lui offrir une nouvelle année des cours de trompette déjà très cher à l'époque où il s'entraînait activement. Ouvrir sa propre webradio, au moins, n'avait rien de plus compliqué ; il leur suffisait d'avoir un ordinateur portable et quelques autres accessoires que possédait préalablement le paternel. De plus, les quelques dons qu'il recevait lui servait d'argent de poche qu'il économisait méticuleusement pour financer une partie de ses futures dépenses post-lycée. Pour marquer son départ dans sa vie d'indépendant, il avait projeté séjourner une année ou deux aux USA pour travailler dans une agence étrangère et obtenir un diplôme universitaire pour perfectionner son anglais, il espérait ainsi pouvoir se payer de lui-même son vol et un petit studio. Pour cela, il lui faudrait peut-être plus que des dons, et un colocataire pour se soulager des futurs impôts de loyer...
Mais pour le moment, cette activité ludique ne servait que de passe-temps, et elle les avait davantage rapprochés, son père et lui ; Hizashi ne pouvait qu'en être reconnaissant. De plus, déchaînant son trop plein d'énergie pendant la nuit de vendredi à samedi le défoulait, et ses insomnies s'amoindrissaient en semaine.
« On est là !! s'exclama Oboro qui se laissa tomber sur le siège de devant, à côté d'Ikuto, suivi de Shōta qui prit place juste à côté du jeune Yamada, faisant d'ailleurs sursauter celui-ci qui s'était perdu dans ses pensées. »
Ravi de voir enfin les deux tiers restant de leur trio, le blond rangea son portable.
« Pourquoi vous avez fait si long ?
- Oboro ne trouvait plus ses lunettes de protection.
- Elles étaient dans mon sac de cours, va savoir pourquoi !
- Yamada ? fit une voix qui n'appartenait à aucun des trois. »
Mettant un terme à leurs échangent, le professeur principal avait interpelé celui à l'alter vocal depuis le devant du bus. Curieux, mais pas moins surpris, Hizashi se leva sur son siège.
« Yes, teach' ?
- Tu peux venir deux secondes ? J'ai à te parler. »
Après un rapide coup d'œil au noiraud, celui-ci se décala pour le laisser passer et Hizashi traversa le bus pour rejoindre le titulaire à l'extérieur.
« Quelque chose ne va pas ?
- Tu sais que les stages commencent demain, pas vrai ?
- Yes !
- Est-ce que tu aurais eu une demande d'agence dont je n'ai pas été mis au courant ?
- Non, monsieur ! »
Le professeur sembla embêté.
« Tu sais que si tu n'as rien trouvé, je serai obligé de vous éparpiller dans les classes d'autres filières jusqu'à ce que je vous trouve quelque chose.
- Oui !
- N'as-tu donc aucun contact ? De la famille, des amis, quelqu'un qui pourrait te prendre en stage sur une décision immédiate ? »
Hizashi réfléchit un instant, et seul le nom de Kane Ajairu lui vint en tête.
« Hé, quand tu chercheras un stage, l'an prochain, je pourrais proposer ta candidature chez mon père. »
« Et pourquoi tu dis que le fils du voisin te déteste alors qu'il t'apprécie complétement ?
- Il a été violent avec moi, c'est la raison number one. »
« Il voulait qu'on sorte ensemble, j'ai refusé, et depuis je n'arrive pas à l'accepter comme un simple ami. »
« Peut-être.
- Contacte cette personne, par pitié Yamada ! Je vais en toucher deux mots à tes amis, je veux une réponse avant demain midi. »
Le jeune blond hocha la tête et retourna à sa place, au fond du bus. Shōta l'interrogea du regard, et Oboro verbalement.
« Qu'est-ce qu'il voulait, le prof ?
- Me parler à propos des stages. Il va d'ailleurs vous en parler, à vous aussi !
- Shirakumo ? Tu peux venir un instant ? interpela alors l'adulte.
- Ah, d'accord ! Je reviens alors !
- Aizawa, tu viendras me voir lorsque nous arriverons sur la place d'entraînement, compris ?
- Hm hm...
- Je n'ai pas bien entendu !
- Oui, monsieur... »
Le nuageux s'éclipsa et quelques élèves retardataires purent prendre place. Le noiraud se serra contre Hizashi.
« C'est parce que nous n'avons pas trouvé de stage ?
- Yep, exactement ! »
Le cadet soupira. Cette histoire de stage l'énervait. À l'identique de l'année précédente, le tournoi de Yuei ne les avait pas mis en avant. Si Shōta eut réussi de se qualifier pour la seconde étape, l'équipe des trois mousquetaires n'avait pas fait long feu, ayant perdu tous les bandeaux de points qu'ils avaient récoltés durant la chasse quelques secondes seulement avant la fin du chronomètre. Il fallait croire qu'utiliser un nuage pour se donner de la vitesse n'était pas mesurable face à un alter éolien qui s'était inopportunément dressé sur leur route... Pas étonnant qu'aucune agence ne leur avait fait d'offre, ils étaient loin d'être aussi bon que ce qu'ils pensaient.
Sentant qu'il était légèrement tendu, le bilingue attrapa sa main dans la sienne et la pressa légèrement d'une manière rassurante. Celui à l'alter effaceur se dégagea presque vivement, et lui chuchota sévèrement :
« Je t'ai dit de ne pas faire ça en dehors du privé. »
Le blond lui tira la langue et tourna la tête, faussement vexé, et posa son regard trop vert en direction de la fenêtre, laquelle dévoilait un soleil un peu trop ardent pour cette été.
[...]
Hizashi était allongé sur son matelas, ses écouteurs enfoncés dans ses cavités auditives avec une bonne musique anglophone qui rythmait ses battements de cœur. Il termina son message et l'envoya à Ajairu pour qu'il demande à son père de le prendre en stage dans son agence spécialisé dans les interventions musclées. Cela ne le tentait pas du tout, mais il n'avait pas le choix... Quand bien même il aurait préféré passer les stages dans une classe d'une autre filière plutôt que de devoir se confronter à cette famille, il aurait été obligé de rattraper ce séjour pratique un autre moment. Autant le faire immédiatement et avoir la conscience tranquille par la suite. Et dire qu'il avait hâte de ce stage... Savoir qu'aucune agence n'a jugé bon de prendre un jeune qui ne tenait pas en place et qui avait de la peine à se spécialiser lui plombait le moral déjà si précaire à force de s'inquiéter pour Shōta.
Son téléphone vibra entre ses mains, et son sourire refit surface. C'était un message venant de leur groupe.
🗨☁️
【Demain vous êtes transférés en quelle classe ?】
💬🎧
【La première D ! Et toi ?】
🗨☁️
【Mon ancienne classe, la C :D】
【Il dort le petit Shōta ?】
【Il n'a pas l'air d'être connecté】
💬🎧
【Vue l'heure, maybe】
【Viens on le spam】
🗨☁️
【Nez】
【J'ai écrit nez avec mon nez :D】
💬🎧
【Coude】
🗨☁️
【Langue】
💬🎧
【DEGUEU XD】
【Menton】
【Houlà il était compliqué celui-là !】
🗨🐱
【Poumon】
🗨☁️
【Tiens il est réveillé !】
【...】
【OH MON DIEU SHOTA TOUT VA BIEN ?!】
💬🎧
【IL DOIT PISSER LE SANG】
【SHO-CHAN RÉPONDS】
🗨☁️
【Il s'est redéconnecté !】
💬🎧
【IL EST MORT TU VEUX DIRE】
【Viens on le spam encore】
🗨☁️
【Jusqu'à combien peut-on compter avant qu'il ne pète un câble ?!】
La seule chose qui fit lever le nez de son écran fut quelques coups donnés contre sa porte. Il éteignit son portable, qui vibrait en discontinuité à cause du spam que générait Shirakumo à lui tout seul, et l'étouffa sous sa couverture. Il invita la personne à entrer. C'était sa mère, elle affichait une mine soucieuse.
« Something's wrong, mom ? »
Elle referma derrière elle et s'assit doucement sur le matelas, sur lequel était allongé son fils. Ce dernier se redressa, une jambe pliée sur l'autre, pour la regarder de face.
« Hiza, mon chéri, je sais que tu as travaillé dur pour entrer à Yuei et que tu te démènes sans relâche pour arriver à avoir ton diplôme... Ton père et moi sommes très fiers de toi, mais je m'inquiète. »
Chōko lia ses doigts sur ses genoux, cherchant ses mots.
« M'man, de quoi tu parles ? Pourquoi vous vous inquiétez ? ricana-t-il nerveusement, passant sa main dans ses cheveux blonds légèrement humides à cause de sa précédente douche. Vous ne voulez plus que je fasse Yuei ?!
- Non, bien sûr que non ! Je veux sincèrement que tu deviennes le super-héros que tu clamais vouloir être, étant petit, je serais une mère affreuse si je n'encourageais pas mon propre fils ! »
Elle posa sa main sur la joue de son enfant, et le regarda tendrement.
« Je voulais te parler de... Eh bien de toi, tout simplement...
- De moi ? Pourquoi ? Je vais super bien !
- Non ! cria-t-elle alors, faisant glisser sa main sur le matelas. Non, tu ne vas pas bien, et j'en ai bien peur ! Tu es un adolescent et tu ne fais aucune crise, tu es d'un optimisme contagieux et pourtant, je vois bien que tu t'agites étrangement lorsque l'on évoque certains sujets. Je suis ta mère, je vois bien que tu souffres. Pourquoi ne m'en parles-tu pas ?
- Maman, je gère la situation, vraiment. »
Il prit les mains de sa mère entre les siennes et les pressa doucement. Elle ne semblait pas convaincue.
« Est-ce que tu as des problèmes à l'école ? insista-t-elle pour percer à jour son fils. Tu arrives à gérer les entraînements, les cours, ta webradio et tes sorties ? Est-ce que tu dors vraiment assez ? Et tes blessures, alors ? J'en peux plus de te voir chaque semaine avec des bleus et des bandages aux bras et prétendre que mon fils va bien, tu es sûr que tu ne veux pas que je t'emmène voir un médecin pour un suivi auditif ? Tu-...
- Mom ! »
Elle s'arrêta alors et retint sa respiration.
« Je suis un grand garçon, à la moindre perte de contrôle, je te promets que tu seras la première personne vers qui je me tournerai.
- J-je veux tellement te protéger, j'ai peur de te laisser grandir...
- C'est normal, tu es ma maman, souffla-t-il tout en la prenant dans ses bras. »
L'étreinte dura une dizaine de secondes, et pourtant, Chōko en désirait davantage. Elle s'éloigna toutefois à contre-cœur lorsqu'Hizashi le rompit de lui-même, jugeant cela suffisant pour la rassurer, quand bien même cela n'était pas le cas. Sa mère se leva et fit quelques pas dans la pièce, jusqu'à pouvoir poser sa main sur la poignée de la porte.
« Bon, bonne nuit, Hiza...
- Bonne nuit m'man. »
Elle hésita encore un instant, avant d'abaisser l'ouverture et quitter la chambre du jeune apprenti. Si ce dernier se retourna à ses occupations, remarquant qu'Oboro n'avait pas cessé de les spammer, lui et Aizawa, Chōko Yamada, quant à elle, se dirigea vers la chambre parentale où elle retrouva son époux.
« Alors ? Tu as réussi à lui parler ? interrogea Tōya qui venait de refermer son livre pour le poser sur la table de chevet de son côté de lit.
- Hm, oui, plus ou moins... Je n'en ai simplement rien tiré... »
Elle se laissa glisser sous le duvet, et se lova contre lui.
« On devrait le laisser se débrouiller, il a besoin d'apprendre à gérer ses problèmes sans nous.
- Qu'en adviendra-t-il de nous lorsqu'il terminera le lycée ?
- La même chose que pour tous les autres parents, j'imagine, lui susurra-t-il en l'embrassant sur la joue. »
[...]
Pendant ce temps, dans le noir, Shōta avait mis son téléphone sous silencieux pour rester le plus discret possible, insultant mentalement ses deux crétins d'amis qui ne faisaient qu'envoyer des messages depuis tout à l'heure. Recroquevillé sur lui-même dans le placard sous les escaliers de sa maison, il attendait. Quelques fois, un trait d'ombre venait s'immiscer par-dessous la petite porte, à cause de la silhouette de ses parents qui traversaient sans cesse le couloir en hurlant et en se balançant des objets en pleine figure. Difficile d'imaginer qu'un être aussi doux que Kiyo et aussi détachée mais borné que Makura puisse se disputer autant, après toutes ces années de mariage. Ils étaient la preuve vivante que les personnes différentes s'entendaient difficilement bien. Les parents d'Hizashi étaient les exceptions qui confirmaient la règle, mais les Yamada étaient parfaits, aussi !!...
Sa tête entre les mains, ses genoux contre sa poitrine, il tremblait. Il aurait voulu s'emparer de son téléphone pour se changer les idées, ou peut-être appeler à l'aide, mais il en était incapable. Il était tétanisé, et la simple pensée de quitter sa cachette pour venir se confronter à ses parents une seule seconde l'effrayait. Ils n'allaient rien lui faire, bon sang, Shōta était la raison pour laquelle ils acceptaient de ne pas divorcer. Parce qu'ils l'aimaient plus que tout au monde, et parfois, les deux adultes se retrouvaient et tout allait pour le mieux sans jamais durer, hélas... Mais cette fois, il y avait quelque chose de différent. Cette fois, différent de toutes les autres, Shōta était la raison de leurs disputes. Non pas qu'il se reprochait quelque chose spécialement, mais disons, Makura avait cédé, et la demande de divorce n'avait pas tardé. Leur fils rentrait tout juste de l'école, il n'avait pas à entendre cela. Mais alors, quelle était le problème ?
La garde, tout simplement.
Les deux parents souhaitaient avoir leur fils à part entière de leur côté, et Shōta, lui, se refusait l'idée de devoir choisir ou bien laisser le choix à un juge. Il n'était pas un objet qu'on pouvait facilement disputer, il était un être humain, et il voulait ses deux parents à part égale.
Un temps passa. Il entendit une sirène s'immobiliser devant chez eux. Est-ce qu'un voisin aurait eu le courage d'appeler la police ? Il ne bougea pas d'un seul foutu iota, ayant peur pour la suite des événements. Il attrapa son téléphone pour envoyer un message à Oboro ou Hizashi, au premier qui répondra, mais toute action fut stoppée par la voix sévère d'un policer ou deux qui mirent un terme au chaos Aizawa. Les cris avaient cessés. Shōta avait fait tomber son téléphone dans le noir, mais avait trop peur de remuer le moindre muscle pour le repêcher. Il avait l'impression que le moindre mouvement pouvait le trahir.
Un temps encore. Cela faisait un moment que la maison n'avait pas paru aussi silencieuse, si l'on ne comptait pas les appels de deux agents de sexes opposés qui remuaient chaque pièce à la recherche de l'adolescent, toujours roulé en boule dans sa cachette. Ce fut l'homme qui le trouva le premier, ayant finalement eu la merveilleuse idée d'ouvrir la porte sous l'escalier, une mine grave sur le visage.
« Tu ne nous facilites pas la tâche, gamin. Lève-toi. »
Shōta ne s'activa pas.
« Tu as quel âge ?
- ... Seize ans... Je suis lycéen.
- Nous allons amener tes parents au poste pour... quelques affaires, rien de bien grave. Ils seront rentrés avant même que tu ne rentres du lycée. Tu te sens capable de dormir tout seul pour une nuit ? »
Vexé d'être considéré comme un enfant, il opina néanmoins du chef avec une mine sombre.
« ... Bon. Bonne nuit, gamin. (Il recula, et appela sa collègue.) C'est bon, il est dans la maison, nous pouvons y aller !
- On le laisse ici ?
- Il n'a pas besoin d'une nounou, ça devrait aller. On remballe. »
Le policer s'éloigna alors, laissant s'entrebâiller la porte du petit placard. Shōta attendit que la voiture s'en aille avant de sortir de sa cachette. La maison étant étonnamment vide, et nombreuses étaient les choses qui jonchaient le sol. Il passa l'heure suivante à remettre en semblant d'ordre chaque pièce ciblée, et ce ne fut qu'aux alentours de minuit qu'il put retrouver son lit. Il fixa le plafond un moment d'hésitation, avant de repartir pour l'étage inférieure et fermer la porte d'entrée à double tour. Il fixa le vide, cogita, et finit par se déplacer jusqu'à sa chambre, non sans oublier de ramasser son portable qui jusque lors avait été oublié sous l'escalier. Il l'alluma, et découvrit une centaine de messages laissés par Oboro et Hizashi. Ne se sentant pas capable de leur répondre, il se contenta d'enclencher le réveil-matin, et ferma yeux. Et l'instant de quelques heures, il en oublia ses parents.
Le silence était si agréable...
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Pour ceux qui l'auraient loupé, j'ai publié une partie avec les fiches des personnages !
N.B. : Une partie de ce chapitre est basé sur le manga
À mardi prochain ! ♡
Oh, et n'hésitez pas à voter, je vois pas mal de lecteurs-fantômes là ! :'0 x)
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