Est-ce que Mme. Church venait juste de parler d'Eros? Des M. Trinez qui sont professeur de musique ici, je n'en connais pas 36.

-Oh, c'est le professeur qui me remplace dans le lycée ou j'exerce d'habitude. Il aurait du venir ici, au début. D'ailleurs ils paient plus cher ici que dans mon ancien lycée ! Mais étrangement il a refusé de venir dans ce lycée presque un mois avant les vacances, m'expliqua-t-elle en souriant, pourquoi, tu le connais ?

J'hochais la tête négativement, perturbé.

Eros devait venir travailler ici ? Pourquoi il a refusé ? Et son refus concorde avec la période où nous nous sommes avoués nos sentiments.

Il ne voulait pas que l'on nous voit ensemble à mon lycée ? Il a honte de sortir avec moi ? Il a peur ?

Non... mais quel imbécile je fais de penser ça ! Si on apprenait qu'il est en couple avec l'un des élèves de sa classe, sa carrière serait ruinée, il pourrait encourir des procès encore plus lourd de conséquences que si on apprenait qu'il est en couple avec un mineur -moi- étant donné que j'ai la majorité sexuelle !

Et puis il sait que j'ai peur de la réaction de mes amis. Il se protège, et il me protège.

Tout ça pour nous ? Il aurait pu avoir un excellent poste, dans un excellent lycée, payé plus cher que la moyenne, mais il a refusé. Il a inversé avec une autre collègue... par ce que nous sommes ensemble ? Et si ça avait été l'occasion de sa vie ?

-Galileo, j'accepte que tu viennes quand tu veux pour jouer du piano. Je te laisserai même les clés ! Mais là tu vois, j'ai cours, et je crois que toi aussi.

Me réveillant enfin de ma transe, je la remerciais et repartais vers mon prochain cours.

Après tous les cours de la matinée, je rejoignais mes amis à la cafétéria, et sortais mon téléphone portable.

Moi : la nouvelle prof de musique est sympa. Elle me laisse utiliser la salle comme Mme. Rall.

Eros: je suis content pour toi ! Et ses cours, ils sont comment ?

Moi : presque aussi bien que ceux de Mme. Rall. (Enfin presque unh, faut pas abuser non plus). Elle s'est même énervée contre Loïc, le petit con qui me faisait chier en 5eme.

Eros: Y a un petit con qui te faisait chier en 5eme ? C'est quoi son nom de famille ?

Moi : non mais Eros, il me fait plus rien depuis longtemps... Même si je l'aime toujours pas, et qu'il m'aime toujours pas non plus, c'est pas pour autant qu'on va aller se taper dessus.

Moi : on est mature.

-Galileo, lâche un peu ton tél, on mange ensemble, la ! S'exclame Yelena en m'arrachant mon portable des mains.

-Il parlait à sa petite amie mystère, surenchérit Evan en se penchant vers mon téléphone.

Depuis avant les vacances, nous n'avions pas eu l'occasion de reparler de qui je voyais presque tous les soirs, dans cet appartement. Et je me demande s'ils pensent toujours que j'ai une liaison avec Mme. Rall.

-Je n'ai pas de petite amie, je soupire en lorgnant mon téléphone pris en otage dans les mains de Yelena.

-Ah oui ? Et tu parlais à qui, alors ? Demanda la tacheté en faisant pendre mon téléphone devant moi.

Mathilda me regardait avec un sourire espiègle.

-Et c'est chez qui que tu passes tout ce temps aussi ? Demanda la noiraude à son tour.

Même elle s'y met ! C'est que quand ils veulent, ils sont chiants mes amis.

C'est à ce moment qu'Eros décida de me répondre. Mon téléphone vibra dans les mains de Yelena, et je l'attrapais de justesse avant qu'elle ne voit le message de mon petit copain.

On ne sait jamais avec lui, ce qu'il peut envoyer.

Pendant les vacances par exemple, lorsque j'étais chez mes parents, et que je révisais ma philo, il m'avait submergé de messages et de photos de lui.

Eros: t'es drôle parfois. Mature, toi ? Qui « oublie » toujours son pyjama pour finir soit dans mon pyjama, soit à moitié à poil ? Et qui aime me faire peur quand je suis concentré sur quelque chose ? Ou encore, qui passe ses mains autour de ma taille pendant que je joue, alors que je ne sais même pas que cette personne est rentrée des cours ?

Eros: je continue ?

Je soupirais de soulagement. Je n'imagine pas les idées que mes amis auraient pu se faire, s'ils avaient vu ce message.

Plus jamais une peur comme ça. J'aime bien les montagnes russes, certes, mais pas celles de mon cœur !

Quand je relevais la tête de mon téléphone, les autres avaient repris une conversation différente et normal. Seul Nathan, en face de moi, me regardait toujours.

Il avait attaché ses cheveux blonds mi-long derrière ses oreilles pour le repas, et ses sourcils étaient froncés. Ses yeux me fixaient dans un mélange d'incompréhension et de tristesse. « Je suis ton meilleur ami, alors pourquoi tu ne me dis rien ? » c'est ça Nathan?

Gêné, je baisse les yeux sur mon assiette, et reprend une poignée d'haricots vers. Ne m'en veut pas Nathan, je ne sais juste pas quoi faire... surtout avec toi.

Eros: tu viens ce soir ?

Moi : je ne sais pas... mon prof de piano a décalé les leçons, j'ai moins de temps libre les lundis soirs.

Et pourtant, j'aimerai bien. Rien que pour régler cette histoire de travail, de Mme. Rall et de Mme. Church.

En y repensant plus longuement, et la tête moins encombré, je me dis que cette chose, qu'Eros me cachait, c'était peut être ça. Et mon hypothèse se tient : Mme. Rall rendait visite à Eros pour parler de son futur travail, jusqu'à ce qu'il lui annonce qu'il était dans l'incapacité de le faire. Et c'est lui même qui aurait conseillé Mme. Church, vu qu'elle avait l'air de le connaître personnellement.

Mais alors, pourquoi me demander comment elle était en professeur, avec si peu d'énergie envers elle ? Il n'aurait pas eu envie de me dire « oh fait, je connais ta nouvelle prof de musique ? »

C'est la tête remplie d'encore plus de questions, et sous le regard chargé de reproches de mon meilleur ami, que je partais débarrasser mon plateau repas.