𓊃𓏏𓎛 L'observateur
La douleur humaine est fascinante.
Je la regarde s'effondrer au milieu de l'église, ses mains tremblantes pressées contre la pierre froide, son visage baigné de larmes. Son cri, ce hurlement désespéré qu'elle a lancé pour ce misérable Nox, résonne encore dans l'air stagnant. Un écho déchiré, perdu dans le vide.
Un sourire étire mes lèvres. Pathétique.
Chaque détail de la scène est parfait : ses genoux écorchés contre le sol, le tremblement de ses épaules, la manière désespérée dont elle frappe la pierre dans une tentative futile de repousser la réalité. Tout cela est si... exquis. Une symphonie de douleur soigneusement orchestrée. Et je suis le seul à pouvoir l'apprécier pleinement.
Oh, Dawn. Si seulement tu avais accepté ta place dès le départ.
Mais non. Elle a voulu résister, jouer à l'héroïne tragique, s'accrocher à ses illusions. Et où cela l'a-t-il menée ? À genoux. Exactement là où elle aurait toujours dû être.
Je savoure cet instant. Sa souffrance est à la fois un triomphe et une nécessité. Elle a toujours eu une lumière en elle, une force brute qui refusait de plier. Mais la lumière vacille, et cette force s'effrite. Ses cris me parviennent encore, portés par une douleur qui me nourrit.
Elle appelle son nom. Nox. Comme si ce pauvre pantin pouvait entendre, comme s'il pouvait répondre. Mais il est parti. Disparu dans les ombres qu'il chérit tant. Son prétendu sauveur n'a jamais été qu'un fardeau pour elle.
Je ris doucement, un son qui se perd dans les vastes murs de l'église.
— Tu ne vois pas, Dawn ? Ton Nox t'a abandonnée. Il t'a laissée seule face à ton destin. Mais moi... moi, je suis toujours là.
Ma voix, imperceptible pour elle, glisse dans l'éther. Je ressens ses émotions, sa détresse, son désespoir qui tourbillonnent dans l'air comme une tempête que je contrôle. Tout cela m'appartient. Chaque larme, chaque gémissement, chaque battement de son cœur brisé.
Je me délecte de ce moment, mais une part de moi bouillonne d'impatience. Pourquoi résiste-t-elle encore ? Nox n'est plus. Pas pour elle, pas pour ce monde. Et même s'il revenait, il serait déjà trop tard.
Je me redresse, ma forme éthérée se mouvant à travers l'espace comme une ombre vivante.
— Tu sais que je t'avais prévenue, murmuré-je dans un souffle qu'elle ne peut entendre mais qu'elle ressentira peut-être. Le bonheur ne tient qu'à un fil. Et ce fil, Dawn, il te ramène toujours à moi.
Mes pensées se fixent sur ses souvenirs, ces fragments qu'elle s'accroche à préserver. Je pourrais les briser, les réduire en poussière. Mais je préfère les manipuler, tordre leur signification pour qu'ils la conduisent où je le désire.
Un rire amer échappe à mes lèvres lorsque je pense à Nox. L'idiot. Il a cru qu'il pouvait la protéger. Mais tout ce qu'il a fait, c'est l'enchaîner à ses propres démons. Chaque geste qu'il a fait pour elle l'a tirée un peu plus profondément dans l'abîme.
Je l'avais prévenu. Tu ne peux pas la sauver, Nox. Elle n'a pas besoin de toi. Pas vraiment. Et pourtant, il s'accrochait à ses illusions, incapable de voir la vérité.
Dawn s'agite, ses doigts crispés sur la pierre comme si elle cherchait un ancrage dans cette tempête qu'est devenue sa vie. Je souris. Elle lutte encore, mais cette lutte est vaine. Elle le sait. Je le sais.
Je m'approche, invisible, et tends une main spectrale vers elle.
— Pourquoi luttes-tu, Dawn ? murmuré-je, presque avec tendresse. Abandonne. Laisse-toi aller.
Ses pensées sont un chaos magnifique – un enchevêtrement d'images, de sons et de souvenirs qui s'effacent. Je les vois toutes. Des visages flous, des rires oubliés, des fragments de bonheur qui se dissolvent dans l'éther. Et au centre de tout cela, une lumière dorée vacillante. Sa lumière.
Je souris à nouveau. Cette lumière est à moi.
Elle croit qu'elle peut encore s'en sortir, qu'elle peut échapper à ce qui l'attend. Mais chaque larme, chaque cri, chaque moment de désespoir la rapproche de moi. Je suis sa destination. Je suis sa réponse.
Mais quelque chose en elle me frustre. Une étincelle, une force que je ne contrôle pas encore. Une résistance inexplicable qui scintille sous la surface. Je veux l'éteindre, mais je veux aussi la modeler. Parce que cette force, cette lumière, ne peut être libérée que par moi.
Je recule légèrement, observant ses épaules s'affaisser. Elle est à genoux dans cette église, appelant un nom qui ne viendra pas. Je sens le moment approcher. Ce moment où elle n'aura plus d'autre choix que de me tendre la main.
Pas parce qu'elle sera contrainte. Mais parce qu'elle le voudra.
Je tends une dernière fois ma main, une silhouette d'ombre et de lumière, prête à attraper ce qui m'appartient déjà. Une pensée froide et tranchante traverse mon esprit alors que je me fond à nouveau dans les ombres :
Tout ce que tu es, Dawn, tout ce que tu seras... m'appartient déjà.
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