Mémoires d'un londonien: nouvelles impressions
Plus qu'un coin de rue, et me voilà de retour dans ma ville natale. Londres... Je connais toutes ses avenues et alcôves par cœur. Et pourtant, quand je pénètre dans ce qui a été le décor de mon enfance, à la suite du garçon qui porte mes bagages, je ne reconnais plus rien...
La nuit commence à tomber, et les allumeurs de réverbères entament leur service. Les grands immeubles prennent alors des airs de parrains rassurants, épais et inébranlables. Leur silhouette m'est familière et je me sens protégé sous leur ombre, eux qui n'ont jamais failli à leur mission, même sous l'assaut des terribles Zeppelins. Derrière ces gardiens efficaces, la première reine de mon cœur brille doucement dans l'obscurité croissante, roulant placidement ses flots noirs et gonflés qui nourrissent inlassablement le cœur de la cité.
Tout cela n'a pas changé. Mais à l'instant même où je détache mon regard des hauteurs et du lointain, une odeur de fumée me picote les narines. Mes yeux plongent alors, comme mus par une inexplicable attirance, dans un immense chaos. La rue, autrefois si calme et paisible, regorge maintenant d'effervescence.
Des voitures aux longues lignes fines et gracieuses passent près de moi en cahotant, si proches que je pourrais toucher du bout des doigts ces merveilles de la technologie moderne. Des bicyclettes zigzaguent entres elles, tentant de se frayer un chemin dans la ville surpeuplée. Les trottoirs, eux, disparaissent sous la marée mouvante de chapeaux et de gavroches qui se presse à l'entrée des jazz clubs qui ont fleuri un peu partout. Dandys élégants, riches mondains ou jeunes femmes en robes de soie droites, personne n'est en reste lorsqu'il s'agit d'aller danser le Charleston.
Une jeune citadine attire particulièrement mon attention. Grande, les cheveux noirs et courts coupés à la garçonne, elle fume une cigarette, nonchalamment appuyée contre un petit muret. Ah... J'aime la nouvelle liberté et surtout l'insolence des femmes londoniennes. Leur impertinence est semblable à une gorgée de whisky frais, après les dures et ternes années de la guerre. On pourrait presque croire qu'elle n'a jamais atteint cet endroit.
Des musiciens installés au bord de la rue jouent partout une musique joyeuse et entraînante. Violoniste, trompettiste ou troupe de jazz, il y en a pour tous les goûts. La ville tout entière semble être enveloppée d'un parfum exquis d'allégresse et de légèreté. Ici, tous les tourments s'effacent. Ici, plus de pleurs ni de larmes. Rien qu'une inaltérable et contagieuse gaieté.
J'aime la nouvelle Londres. J'aime son regain de vie et d'animation. Son énergie nouvelle semble se déverser en moi, agissant comme un prodigieux filtre sur mon cœur meurtri. La chaleureuse effervescence qui y règne ni ne me fatigue ni ne m'écrase, mais au contraire, me donne la force et l'envie de me reconstruire.
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