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La Souveraine (7)

À la lueur vacillante de la chandelle, les mots semblaient danser sur le parchemin. Une plume en main, les yeux dans le vague, Eliane réfléchissait au problème que son père lui avait soumis par écrit, essayant de tout faire pour détourner son esprit des souvenirs de la veille. Elle n'avait pas pu dormir, tant à cause du choc que des saignements qui se poursuivaient, et s'était jetée à corps perdu dans le travail de la journée pour essayer d'oublier L'automne approchait, et les paysans d'Ombre étaient sur le point de faire leurs dernières récoltes avant les saisons mortes, mais les silos à grain étaient infestés par les rats, et une vague de froid imprévisible, descendue des montagnes telle une brusque avalanche, avait gelé une partie des cultures moissonnées mais pas encore stockées. Si une solution n'était pas trouvée au plus vite, Ombre connaîtrait la famine cet hiver. Pour le moment, Zerrhus, devenu le principal conseiller du nouvellement nommé Sire Alzen d'Ombre, suggérait un dispositif alchimique répulsif pour maintenir les rats à distance, mais sa fabrication était onéreuse, et les cultivateurs les plus pauvres ne pourraient certainement pas se permettre de l'acheter.

— Eliane ? appela soudain Astryd, la tirant de ses pensées. Le Général Sethardi est là.

Eliane poussa un long soupir, plongea sa plume dans le pot d'encre, posa ses doigts contre ses tempes, inspira profondément. Consciente de son trouble, Astryd lui adressa un regard compatissant, recula vers la petite commode placée à côté de la table de travail, et en sortit une boîte de thé. Pour sa part, la Dame d'Ombre se leva, lissa machinalement le haut de son pantalon vert sombre évasé, typique de sa province, replaça une mèche folle échappée de sa natte derrière son oreille. Un bref rictus las lui échappa, mais elle alla ouvrir.

La haute stature du Général apparut dans l'embrasure. Voyant sa Reine, il se courba, respectueux.

— Eliane, salua-t-il.

— Sethardi, l'accueillit-elle avec un semblant de politesse.

Elle s'effaça pour le laisser passer, fit un bref signe de tête au garde planté devant sa porte, qui acquiesça puis ferma tandis qu'elle se détournait. Il ne fit aucune remarque, mais cela ne voulait pas dire qu'il ne savait pas. Déjà, la Cour bruissait de rumeurs.

— Comment va Sire Zerrhus ? s'enquit Sethardi lorsqu'il fut installé sur une chaise en face de la maîtresse des lieux.

— Il lutte pour trouver une solution à une invasion de rats.

Astryd s'approcha avec deux tasses d'infusion de fleurs de feu, les déposa sur la table basse et recula. Le Général s'empara immédiatement de la sienne, souffla longuement sur le liquide couleur sang, teinté des éclats dorés d'une flamme tremblotante. Eliane nota ses épaules imperceptiblement crispées, sa posture affalée dans le siège droit qu'il occupait. La tristesse lui étreignit le cœur.

— Ah... marmonna-t-il. Mon frère a mentionné le problème dans l'une de ses lettres... Y a-t-il une solution ?

Dans le dos de l'homme qui prenait une gorgée de thé brûlant, Astryd haussa brièvement les sourcils en direction d'Eliane, qui battit des paupières.

— Mon père a proposé l'altrioxène d'arsenic, mais je ne suis pas sûre que cela éradique ces sales bêtes partout.

Sethardi fronça le nez, considéra sa tasse d'un air songeur.

— Effectivement, le processus est coûteux... grommela-t-il, réfléchissant à haute voix, et je ne suis pas sûr que nous disposions des ressources humaines nécessaires pour miner suffisamment d'arsenic en un si court laps de temps. Vous, que proposeriez-vous ?

Le regard d'Eliane se perdit brièvement dans les profondeurs écarlates de son thé fumant. Lorsqu'elle le releva, il y avait une pointe d'amusement dans ses pupilles dilatées par la pénombre.

— Je suggèrerais de déléguer la tâche à des créatures bien plus compétentes que nous. Des chats, ajouta-t-elle en voyant le regard interloqué de son interlocuteur. Il suffirait d'en faire importer une centaine depuis la province de Terre, de les installer dans les granges des plus démunis. Ceux qui ont les moyens de s'acheter de l'altrioxène le feront mais ceux qui ne pourraient pas le faire auront les chats.

Le quadragénaire aux tempes grisonnantes esquissa un sourire en écoutant l'explication.

— Une solution combinée, en quelque sorte, marmonna-t-il. Cela me semble être une excellente idée.

Elle accepta le compliment d'un hochement de tête gracieux, tandis qu'il vidait sa tasse au mépris de la brûlure du liquide. Détaillant avec attention sa haute stature, ses cheveux qui devenaient de plus en plus sel, et de moins en moins poivre, les fines ridules qui commençaient à creuser son visage, elle ne put s'empêcher de songer à l'étrange ressemblance entre le Général et son père. Ils avaient tous deux cette même carrure qui leur permettait de dominer l'espace, et ce même port de tête altier, quoiqu'il fût désormais alourdi du côté de Sethardi.

— Sethardi, comment voudriez-vous mourir ? interrogea-t-elle à brûle-pourpoint, incapable de réfréner la question plus longtemps.

Il se tendit, figé, cilla, la considéra avec attention.

— Qu'entendez-vous par là ?

Un sourire amer étira les lèvres de la jeune femme lorsque ses yeux azurins étincelants croisèrent le bleu délavé de l'homme.

— Laissez-moi reformuler, siffla-t-elle, laissant cette fois-ci le venin couler dans la voix. Préférez-vous mourir comme l'homme d'honneur que vous étiez, ou le rat que vous êtes devenu ?

L'espace d'un instant, les yeux du Général demeurèrent fixes, écarquillés de stupeur. Puis, le choc et la terreur se peignirent sur son visage, il baissa la tête vers la tasse vide devant lui, fixa celle d'Eliane, toujours remplie. Voyant son expression, un rire rauque, mauvais, échappa à la souveraine, et elle vida la sienne en quelques longues gorgées avec un petit rictus provocateur. Sethardi se dressa brusquement, fila vers la porte, mais la poignée tourna dans le vide. Il pivota à nouveau, les yeux fous, porta la main à sa veste et dégaina une dague aiguisée, au manche orné d'une tête de chauve-souris. Avant même qu'Eliane n'ait le temps de bouger, il avait immobilisé Astryd, et menaçait sa gorge du fil aiguisé.

La Reine se figea, et tout semblant de sympathie déserta son visage. Son arcane se mit à pulser sous sa peau, mais elle maîtrisa difficilement son premier instinct, qui aurait été d'intervenir immédiatement et brutalement. En outre, le calme d'Astryd, qui ne se débattait pas, apaisa ses impulsions primitives et meurtrières.

— Lâchez-la, commanda-t-elle d'un ton péremptoire, menaçant.

Sethardi, habitué à recevoir des ordres d'Eliane, presque conditionné à y obéir, frémit, mais ne broncha pas.

— Ou quoi ? provoqua-t-il. De toute manière, je suis déjà mort.

Eliane se contenta de hausser un sourcil, et une intense lumière blanche, glacée, nimba ses paumes, éclipsant la flamme vacillante de la chandelle. Le Général blêmit.

— Il n'y avait pas de poison dans le thé, énonça-t-elle calmement. Relâchez-la.

Dérouté, il laissa quelque peu décroître la pression sur la jugulaire de la servante, mais ne la libéra pas pour autant. Son souffle court, haché, ses yeux écarquillés qui sondaient la pièce sommairement meublée, sa posture raide et crispée, étaient ceux d'un animal aux abois. Un rat, songea Eliane avec une profonde tristesse, mêlée d'amertume. Sethardi avait sombré dans la déchéance, bien plus profondément qu'elle n'aurait pu l'imaginer. Probablement parce que, puisqu'elle l'avait fréquenté au quotidien, elle avait vu les changements s'opérer au fur et à mesure dans l'attitude de l'homme, et ne s'en était jamais étonnée. Il n'y avait jamais eu de point de rupture pour lui, seulement la lente agonie de son honneur.

Elle inspira profondément.

— Tu as le choix, lança-t-elle, et ce tutoiement soudain fut comme un coup physique pour l'ancien soldat. La mort ou l'exil.

La température de la pièce décrut, l'homme se mit à frissonner convulsivement. Toujours prisonnière de sa lame, Astryd ne bronchait pas. Le calme qu'elle lisait dans les yeux d'Eliane, ainsi que la froideur du givre qui s'étendait de manière presque imperceptible sur sa gorge, l'assuraient que son amie n'avait aucune intention de la laisser périr ainsi. Sethardi pour sa part respirait difficilement, empli d'une peur terrifiante et primitive.

— L'exil, décida-t-il finalement.

Sa voix, auparavant si ferme, n'était qu'un filet, son courage et son assurance l'avaient déserté. Il n'était plus qu'un traître pris sur le fait, et son âme de guerrier se rebellait contre son instinct, qui l'incitait à la survie, quel qu'en soit le coût.

— Alors, relâche Astryd, intima Eliane, et la dure inflexion de sa voix assura l'homme qu'elle ne se répèterait pas une quatrième fois.

Il s'exécuta. La dague piqua vers le sol, son manche cogna le premier contre le parquet verni. La tête de chauve-souris sembla fixer ses yeux aveugles sur le plafond orné. L'homme recula en vacillant, Astryd s'avança pour se placer derrière Eliane, en sécurité.

— En tant que souveraine d'Helvethras, moi, Eliane d'Ombre, première du nom, te bannis de notre contrée pour trahison envers ta Dame, ta Couronne et ton royaume. À partir de ce jour, tu n'es plus l'un des nôtres, et quiconque te trouvera sur les terres d'Helvethras pourra te tuer sans sommation, et sans que crime cela ne soit considéré. Cette sentence est définitive et irrévocable.

— Comment avez-vous su ? souffla-t-il, désemparé et désespéré.

Elle esquissa un aigre sourire.

— Nous ne sommes que peu à connaître l'enchantement d'Esiletran. Trois, en fait. Lewuen m'a assuré ne l'avoir enseigné à personne d'autre que moi, puisque c'était un secret familial jalousement gardé.

Sethardi, toujours pâle, hocha la tête. Qui d'autre aurait en effet pu connaître un tel secret, si ce n'était le frère de l'alchimiste ?

— Tu peux y aller, le congédia Eliane froidement.

Las, il acquiesça, se détourna. Soudain, l'univers lui paraissait bien vide. Démis d'une fonction qu'il avait occupée durant de longs étés, exilé, il n'était plus qu'un vagabond sans âme ni racines, privé de tout ce qui lui avait un jour été cher. La souffrance insidieuse de cette dégradation comprimait sa poitrine dans un étau de fer, lui coupait la respiration. Il poursuivit sa route en direction de la porte, pantelant, le cœur battant de plus en plus vite. La sueur envahit ses paumes, ses doigts se mirent à trembler, ses pas se firent hésitants. Il étendit la main vers la poignée, ses ongles effleurèrent le métal, et soudain, ses genoux flageolants cédèrent. Il s'affala de tout son long, sa tête cogna durement contre le plancher, ses yeux se révulsèrent. Son dernier souffle, il l'expira dans le doux linceul de l'inconscience, sans même se douter que jamais il ne rouvrirait les yeux. Mais, alors que son esprit sombrait, il eut tout juste le temps de capter les mots d'Eliane, proférés d'une voix basse, chargée d'une sincère peine.

— Que ton âme rejoigne les arcanes.

Astryd poussa un long soupir.

— Tu lui as menti.

— Non, rétorqua la jeune reine en s'asseyant à nouveau dans sa chaise. Le poison était sur la faïence de la tasse, pas dans le thé.

Elles considérèrent toutes les deux le corps inerte, tenaillées par de douloureux souvenirs.

— C'était un grand homme, murmura la servante, attristée.

— Il avait suggéré la première offensive des Chauves-Souris durant la bataille d'Ombre, renchérit Eliane. Mon père lui faisait confiance.

Le silence les enveloppa, lourd de réminiscences. Elles échangèrent un regard, déçu pour Astryd, dépité mais fataliste pour Eliane.

— C'est malheureux de voir à quel point Ciel l'a changé. Astryd, si tu me vois un jour devenir comme lui, rappelle-moi son sort.

Son amie acquiesça.

— C'était un grand homme... répéta Eliane, l'air absent, une main posée sur son ventre.

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