Les jours qui suivirent, Ash resta recroquevillée sur elle-même. Elle ne se souvenait pas avoir déjà vécu une telle affliction. Les chaînes enserrant ses poignets, elle faiblissait à vue d'œil. Sa flamme n'était plus là pour la maintenir en vie. Elle n'était plus qu'un corps, une coquille vide. Ses yeux étaient ternes, son regard éteint. Elle avait tellement maigri en si peu de temps qu'elle ne parvenait plus à tenir debout. Indubitablement, elle se laissait mourir. La disparition de sa mutation l'avait plus affectée que ce qu'elle aurait cru.

Doucement, elle ferma les yeux, incapable de lutter plus longtemps.

Non loin de là, Logan suivait son odeur à la trace. Ses effluves se faisaient faibles, mais toujours suffisantes pour qu'il puisse la retrouver. Bientôt, néanmoins, les pistes se brouillèrent. D'autres odeurs recouvraient celle de sa compagne, et la frustration prit place dans son esprit. Mais malgré ça, il ne perdit pas espoir. Il savait qu'elle n'était pas loin. Il le sentait dans ses tripes.

Comme il l'avait prévu, il rencontra quelques obstacles en chemin, prêts à le mettre hors-jeu. Mais sa rage et sa faculté de guérison lui assurèrent la victoire sur les adelphes mutant•es qui s'étaient mis•es en travers de sa route. Il tomba alors sur le campement de la Confrérie et s'empara d'une veste laissée là, en évidence. Il remonta la capuche pour dissimuler les traits de son visage et se fondit dans la masse. L'odeur d'Ash persistait, bien que confondue avec celles des autres mutant•es présent•es. Il se joignit à la foule rassemblée devant Magneto, qui s'apprêtait à prononcer un discours. Il remarqua Jean à côté de lui, et se mit à chercher sa compagne des yeux.

— Iels veulent nous guérir ! commença le mutant. Mais je vous le dis, nous sommes le remède ! Le remède à cette condition infirme et imparfaite qu'est l'homo sapiens. Ils ont leurs armes... Nous avons les nôtres ! Nous allons les frapper avec une fureur dont ce monde n'a jamais été témoin ! s'exclama-t-il.

Concentré sur l'odeur lointaine de la brune, Logan ne prêta pas une attention particulière aux paroles du mutant. Cependant, une phrase inquiétante se démarqua du reste, l'obligeant à poser ses yeux sur le maître du magnétisme.

— Nous nous rendrons à Alcatraz, prendrons contrôle du sérum, et nous en détruirons la source ! Et pour tout•e mutant•e qui se dressera sur notre chemin, nous utiliserons ce poison contre ellui ! Voyez par vous-même ce que ce 'remède' est capable de causer ! Redscales était une alliée de taille, mais a choisi le mauvais camp. Qu'elle serve d'exemple à tous•tes celleux qui souhaiteront nous trahir !

La silhouette familière de la dragonne s'éleva dans les airs à ses côtés. Logan sentit sa gorge se serrer et son visage se crisper de colère.

— NON ! hurla-t-il, anéanti.

Il était prêt à tous•tes les étriper là, sur place. À les vider de leurs entrailles, et les regarder lentement mourir. Il s'avança vers Magneto, dont le visage montrait sa satisfaction.

— Tu es venu contempler notre œuvre ? fit ce dernier, désignant le corps sans vie de la brune.

— Qu'est-ce que tu as fait, connard ?? s'écria-t-il entre ses dents serrées.

Iels avaient osé la tuer. Iels avaient ôté sa vie comme si elle n'était qu'un pantin, qu'une expérience à leur disposition. Les imaginer poser leurs mains sur elle de cette manière lui donner envie de hurler. Il ne sentit pas tout de suite les larmes rouler sur ses joues, et lorsqu'il s'en rendit compte, sa rage doubla d'intensité. Iels avaient tué la femme qu'il aimait. Toute sa souffrance n'avait pas suffi, il fallait qu'elle soit détruite par ses semblables.

— Elle a décidé toute seule de son sort, répliqua Magneto.

Il n'en fallut pas plus à Logan pour sortir de ses gonds. Il savait qu'il n'avait aucune chance face à tous ces adversaires, mais sa fureur était telle qu'il se jeta dans la mêlée dans hésiter.

Comme il s'y attendait, iels répliquèrent aussitôt. Le mutant n'avait jamais mis autant de rage dans ses coups. Mais malgré sa détermination, il fut rapidement mis hors de combat. Les dons divers et variés de ses ennemi•es eurent raison de ses griffes d'adamantium. Et surtout, celles-ci n'avaient aucune chance face aux pouvoirs du maître du magnétisme, qui pouvait contrôler son squelette à sa guise, d'un simple geste de ses doigts.

Sans pouvoir y résister, Logan se sentit soulevé du sol. Il tendit ses muscles et serra sa mâchoire. En face, le corps de sa compagne flottait, inerte. Il essaya tant qu'il put pour la rejoindre, en vain. Magneto se plaisait à jouer avec ses nerfs. Il s'épuisa à la tâche, hurlant le nom de Ash, espérant qu'elle ouvre les yeux et le voit en train lutter pour la sauver. Qu'elle lui donne un signe, une infime preuve qu'elle était toujours en vie. Mais rien. Sournoisement, l'idée qu'iels étaient parvenu•es à bout de la dragonne s'insinua dans son esprit, le noircissant de deuil.

Il tourna le visage vers son ancienne collègue. Celle-ci était concentrée sur la silhouette amorphe de la brune. Son regard était teinté d'un mélange d'angoisse et d'impassibilité, ces deux sentiments se mélangeant de manière hétérogène.

— JEAN ! hurla-t-il pour attirer son attention.

La rousse sortit de ses pensées pour lever les yeux vers lui. Un nuage de brume semblait flotter devant ses yeux.

— C'est moi, Logan ! reprit-il. Aide-moi !

— Elle ne t'écoute pas, ricana Magneto. Jean n'est plus des vôtres désormais !

Logan fronça les sourcils, ignorant ses diffamations.

— Jean, tu ne peux pas laisser Ash comme ça ! Tu dois l'aider ! Tu ne peux pas la laisser mourir !!

Une vive douleur traversa sa colonne vertébrale. Il laissa échapper un grognement de souffrance, et se sentit partir le temps d'une seconde.

— Tu ne peux plus rien pour elle !! s'exclama Magneto. Redscales a disparu ! Je l'ai vaincue !!

Le maître du magnétisme serra le poing, et Logan ne sut résister plus longtemps à la douleur. Il sombra lentement dans l'inconscience.

Lorsqu'il rouvrit les yeux, il était seul. La Confrérie avait levé le camp. Les arbres se dressaient autour de lui, gigantesques, semblant prêts à l'avaler. Il se redressa lentement, grimaçant à cause de la douleur saisissant ses muscles. Lorsqu'il reprit ses esprits, il flaira une odeur familière qui l'interpella. Fronçant les sourcils, il regarda autour de lui. Soudain, la silhouette immobile de son ancienne coéquipière apparut dans son champ de vision.

— Jean ? appela-t-il, confus.

Celle-ci, impassible, tourna les talons et s'enfonça dans la forêt. Logan se releva sur ses jambes, et se lança à sa poursuite sans réfléchir. Il retrouva rapidement sa trace, mais ne fut pas au bout de ses surprises en découvrant qu'elle n'était pas seule. Flottant dans les airs, le corps amorphe de sa compagne lui faisait face. Il crispa la mâchoire sans oser s'approcher. Jean le fixait sans rien dire.

— Vous lui avez fait quoi, putain ?! gronda-t-il, serrant les poings.

— Elle a reçu une dose du sérum, expliqua la rousse d'une voix lointaine. Il a annihilé ses cellules mutantes.

Logan sentit sa mâchoire se décrocher.

— ... Quoi ?

Jean se tourna lentement vers sa vieille amie, toujours inconsciente.

— Elle a baissé les bras. Perdre sa mutation l'a entièrement détruite.

— Non, contredit l'homme aux griffes de métal en s'approchant de la femme qu'il aimait. Non, ce n'est pas Ash. C'est impossible.

Le regard que le Phénix lui adressa força le doute dans son esprit. Le regard embrumé, il leva les mains et les posa sur les joues de la brune. Elles étaient glacées. Il les retira soudainement, brusqué par cette température inhabituelle. Sans qu'il ne le voit venir, une rage sourde s'éleva en lui. Ses griffes d'adamantium émergèrent de ses phalanges, et il se tourna vers Jean avec un cri de fureur. Mais celle-ci avait disparu. La respiration saccadée, il regarda autour de lui, bandant ses muscles. Mais il était seul. Ash non plus n'était plus là. Logan se mit à rugir, frappant bestialement dans un épais tronc d'arbre pour évacuer sa frustration. Puis, il tomba à genoux, les poings ensanglantés, son torse se soulevant au rythme de ses lourdes inspirations.

— Il n'est pas trop tard, Logan, lui murmura une voix venue de nulle part.

Il sut la reconnaître comme étant celle de Jean. Mais il n'avait plus la force de se lever. Comme soudainement victime de la gravité, il s'écroula, posant le front sur le sol.

Aussitôt, il eut l'impression de basculer. Il se réveilla en un sursaut. Autour de lui, la forêt était plongée dans le noir. La nuit était tombée depuis quelques heures déjà, et tout semblait apaisé. Déstabilisé, il se demanda si tout ça n'avait été qu'un rêve. Il sentait toujours la peau gelée d'Ash sous ses doigts. En baissant les yeux vers ceux-ci, il put observer les ecchymoses sur ses poings se résorber progressivement. Ainsi, il comprit que son rêve était plus réel qu'il n'y paraissait.

Cela signifiait probablement que tout espoir n'était pas perdu. Ash pouvait encore revenir. Déterminé, il se répéta cette phrase sur tout le chemin du retour.