
✨~[I/20]~✨
Tome I : Chapitre 20
Tais-toi, réveil stupide, tais-toiii...
Lym grogna et tâtonna sur sa table de chevet pour éteindre son téléphone qui laissait échapper une sonnerie stridente totalement insupportable. Parvenant à la désactiver, elle se rendormit immédiatement en lâchant un nouveau grognement, de satisfaction, cette fois. Elle eut l'impression que le téléphone sonnait de nouveau trois secondes plus tard au grand maximum et se redressa en geignant de mécontentement. En regardant autour d'elle, elle comprit qu'elle était dans son nid de l'Académie, qui tanguait légèrement, accroché à l'épaisse branche de l'arbre. Il lui faudrait sans doute du temps pour s'habituer à ce réveil, qu'elle était habituée à entendre dans sa chambre chez elle, dans cet endroit-ci, si différent.
Dans un état de demi-sommeil, elle attrapa ses vêtements entassés dans un coin et son démêlant, puis alla jusqu'aux douches communes où elle se fit un vigoureux shampooing qui lui envoya de la mousse pleins les yeux mais qui eut au moins le mérite de la réveiller. Puis elle parvint, inexplicablement, à rendre ses cheveux lisses et soyeux, pour une fois, cassant de nombreuses dents de sa brosse, et, satisfaite, de manière exceptionnelle, de sa tignasse, elle enfila les vêtements qu'elle avait pris. Elle constata avec agacement que, dans son semi-somnambulisme, elle en avait prit totalement au hasard et qu'il s'agissait d'un pantalon trop ample qu'on ne voyait presque plus sous les multiples taches de peinture et d'un vieux t-shirt rayé immonde. Avec un soupir, elle décida de le mettre et de retourner jusqu'à sa chambre en priant pour ne croiser le chemin de personne.
Bien évidemment, vue sa chance, elle tomba nez-à-nez avec Shay dès qu'elle sortit sur la branche. Génial.
De manière totalement inexplicable, il avait déjà les cheveux ébouriffés avec soin, un regard pétillant de malice et une bouille d'ange, et, lui, il était habillé parfaitement. Dès qu'il la vit, son visage s'illumina et il lui sourit – elle rougit un peu sous ses taches de rousseur flamboyantes, sachant qu'elle devait avoir piteux état. Shay n'avait pas l'air d'être quelqu'un de superficiel, mais absolument n'importe qui l'aurait jugée en voyant sa tenue.
- Salut ! s'écria-t-il joyeusement en s'approchant d'elle.
- Salut, marmonna-t-elle en s'avançant vers sa chambre, mais il la rattrapa par le bras.
- Eh ! Pourquoi tu pars comme ça ?
- Il faut que je me change, j'étais tellement fatiguée que j'ai prit ce que j'avais sous la main. Il y a de la peinture partout et ce truc me va pas du tout. Tu me laisses passer, maintenant, Lake ?
Il haussa les épaules et la lâcha.
- Les taches de peinture, c'est apparemment ton style, et, franchement, ça te va.
Sans faire attention à ses mots, elle descendit l'échelle pour aller changer son haut contre une chemise blanche qui avait dû appartenir à Mar car les manches étaient bouffantes et il lui dénudait un peu les épaules, mais, lorsqu'elle fut sur le point de changer de jean, elle décida que c'était inutile. Peut-être qu'elle avait inconsciemment prit en compte la remarque de Shay ; la peinture partout et le style débraillé, ça décrivait bien sa personnalité. Alors qu'elle allait sortir, Shay toqua à la porte – ou plutôt à la trappe – et entra lorsqu'elle lui répondit.
Entrant dans la chambre d'un bond souple, il sourit en voyant qu'elle avait presque gardé le même accoutrement peu apprêté.
- Quoi ? dit-elle avec défi.
- J'ai rien dit ! répondit-il immédiatement. La peinture partout, ça te correspond bien. T'es une artiste, je parie ! Je peux voir... ?
Sans attendre sa réponse, qui allait, et il le savait sans doute, être négative, il alla retourner les nombreux chevalets entassés au fond qui prenaient la moitié de l'espace. Il regarda avec stupeur l'Ange, la Selkie, et elle allait l'arrêter lorsqu'il retourna un énième tableau. Trop tard. Il avait vu les portraits.
Il regarda longtemps le visage de Larrow et son propre portrait, et elle se sentit rougir furieusement en les lui arrachant des mains. Le regard qu'il lui adressa était emprunt d'une curiosité nouvelle.
- Tu peins incroyablement bien, c'est fou. Mais, si je peux me permettre, tu as fait Larrow en plus beau qu'il ne l'est vraiment. Moi, en revanche...
Elle rougit de plus belle et il lui reprit son propre tableau des mains avec un petit air suffisant parfaitement insupportable.
- Eh ! protesta-t-elle.
- Droit à l'image, répondit-il en inspectant le portrait, son pli soucieux lui barrant le front.
- Je ne crois pas que ça s'applique dans ce cas-là ! C'est quand-même moi qui l'ai peint !
- De toute façon, je l'ai déjà vu.
Il le lui rendit.
- Je suis mignon, dessus, hein ? sourit-il.
- Vraiment ? Alors je dois rendre mes tableaux plus beaux que nature, rétorqua-t-elle du tac au tac, furieuse, en essayant de cacher la rougeur de ses joues derrière ses longues mèches rousses.
Il prit un air faussement vexé qui était délibérément comique.
- Je ne pense pas, tes dessins sont incroyablement bien faits et d'un réalisme saisissant. En revanche, je remarque que tu as vraiment détaillé mes cheveux !
- Tu ne penses donc qu'à tes stupides cheveux ? s'agaça-t-elle, bien qu'un peu flattée par les commentaires qu'il faisait sur sa façon de peindre.
Shay secoua la tête avec un petit sourire qui ne présageait rien de bon, tout en passant une main dans les mèches blondes de sa chevelure.
- Bon, c'était l'insulte de trop. Je t'avais prévenue que je me vengerais !
- Essaie toujours, pour voir...
Il fit passer son sac de son dos à devant lui, fouilla un peu dedans puis en sortit une espèce de terrarium bizarre et mit la main à l'intérieur. Lorsqu'il l'en ressortit, il tenait dans sa paume ouverte aux longs doigts fins une immense araignée aux pattes velues et aux yeux multiples et globuleux, à l'éclat froid, qui toisaient d'un air glacial le décor autour d'eux.
En la voyant, Lym paniqua et poussa un petit cri qu'elle avait conscience d'être ridicule ; elle s'imaginait avec une clarté effrayante la bestiole courir sur sa peau en traçant des toiles partout, et elle sentit des frissons incontrôlables la parcourir. Shay, heureusement, ne l'approcha pas d'elle mais lui sourit avec un air vengeur.
- Ne dis pas que je ne t'avais pas prévenue !
- D... Dégage ce truc d'ici ! siffla Lym d'une voix suraiguë en reculant, les mains tendues devant elle. Sors... Sors-le !
- Du calme, ma belle, elle est inoffensive. J'ai vérifié.
- Tu m'excuseras, mais je ne te fais pas vraiment confiance pour être responsable.
- Eh ! Bon, d'accord, j'avais la flemme de vérifier, mais Kosh l'a fait. C'est ma nouvelle mascotte, et j'ai décidé que je la ramènerais dès que tu critiqueras mes cheveux jusqu'à ce que tu aies vaincu ta phobie. Je l'ai appelée Choucroute. Elle est gentille, promis.
Lym ne savait pas si elle devait rire ou continuer de se tasser dans un coin avec un air horrifié. Conscient de son trouble, il remit l'araignée dans le petit terrarium en haussant les épaules, puis lui sourit de l'autre bout de la pièce en s'approchant d'elle, le bac en verre à la main.
- Tu veux pas prendre Choucroute ?
- Mais t'es un grand malade ! s'écria Lym d'une voix un peu plus maîtrisée. C'est dégueulasse, ces machins !
- Je crois que tu l'as vexée, répondit-il d'un air de reproche, mais il rangea néanmoins Choucroute – non mais vraiment, quel nom ridicule – dans son sac puis se tourna vers la sortie. Tu viens ? On va être en retard.
- Tu ressors plus jamais ce truc de ton sac.
- Mais non. Du moment que t'insultes pas mes cheveux.
- Que veux-tu ? Ils sont insupportables.
Il haussa un sourcil si haut qu'il se perdit sous ses mèches folles.
- Non, non ! capitula Lym en le voyant un amorcer un geste pour prendre le terrarium. Tu ressors cette araignée stupide et je lui envoie une chaise en pleine face. Je l'ai déjà fait.
- Je sais pas pourquoi, je trouve ça adorable quand tu menaces d'envoyer des chaises à la tête des gens. Et des araignées.
Elle leva les yeux au ciel tandis qu'il affichait son éternel sourire en coin et ils montèrent les escaliers pour arriver sur la large branche à laquelle étaient accrochées leurs cabanes. Kosh et Elyra étaient déjà réveillés, ainsi que la moitié de l'Académie, probablement, car il commençait à se faire tard ; les quatre amis descendirent l'échelle dans le tronc de l'arbre pour arriver dans la cafétéria, où chacun alla se poster devant le Distributeur pour demander ce qu'ils voulaient. Au passage, Lym demanda à Elyra comment fonctionnait cette étrange machine, et elle entreprit de lui expliquer ses complexes propriétés de téléportation et de duplication de nourriture, mais elle perdit le fil à la moitié et finit par abandonner.
Tous les quatre allèrent s'asseoir à une table et mangèrent en discutant leur petit déjeuner ; comme d'habitude, Lym n'avait pas pu s'empêcher de prendre un gâteau, ce qui lui rappela les conseils et les inquiétudes incessantes de sa sœur qui était sans arrêt en train de s'inquiéter de telle ou telle chose. « Si je mange ça, je vais prendre plein de kilos, si je mange ça, je vais devenir grosse, et blablabla... » avec un sourire, la jeune fille rousse inspecta son énorme fondant au chocolat en songeant qu'elle se serait indignée si elle avait été là, puis elle en prit une grosse bouchée.
- Vous avez fini ? gémit Elyra, qui avait liquidé sa salade de fruits en moins d'un instant et les attendait maintenant avec impatience en tapant du pied avec nervosité.
- NON, répondit Shay en levant sa propre assiette pour lui montrer qu'elle était encore à moitié pleine.
- Bon, ben dépêche-toi, on va être en retard pour les cours de Contrôle et c'est ma classe préférée.
- S'il se dépêche, il risque d'avoir une indigestion et il ne pourra plus dire un mot sans se sentir mal, lâcha Kosh, avant de réfléchir un instant et d'enchaîner ; mange très vite Shay, VITE.
- Oui, peut-être que tu tairas enfin, ajouta Lym en finissant son gâteau d'un coup de fourchette.
- Je trouve que vous êtes très injustes avec moi, répondit Shay en prenant un air misérable de chien battu. Je ne parle pas tant que ça, même Lym parle deux fois plus que moi.
- Oui, mais Lym, on l'aime bien parce qu'elle t'a balancé du Sprite sur la tête.
Shay prit cette fois un air boudeur de petit garçon fâché, ce qui fit inévitablement sourire Lym.
Lorsqu'enfin Shay eut terminé son petit-déjeuner, tous montèrent au premier étage où étaient trois des cinq salles de classe (elle continuait de se demander où donc pouvaient être les deux autres) et attendirent devant la porte qu'arrive le professeur. Comme leurs deux enseignants d'Étude et d'Histoire étaient Riks et Amel, les professeurs de Contrôle, Soin et Combat devaient forcément être les trois auctors, Luis, Cave et Zale, puisqu'ils faisaient aussi office d'enseignants en plus d'être les « directeurs » de l'Académie.
Apparemment, si elle avait bien compris, chaque adulte ici avait deux rôles précis. Les trois auctors étaient aussi professeurs, Amel n'était pas seulement celle d'Étude, mais aussi celle qui gérait la bibliothèque, et Riks avait pour deuxième fonction de s'occuper de l'infirmerie. Même si apparemment Amel aimait bien aider Riks à gérer les patients. De plus, des sortilèges maintenaient l'arbre en vie malgré son tronc et ses branches creux, lui insufflant de la vie pour qu'il puisse toujours faire croître les feuilles vertes qui formaient son impressionnante ramure. Le nettoyage et la lumière étaient visiblement supervisés par des magies étranges comme les petites bulles voletantes qui parcouraient l'arbre pour l'illuminer, et la saleté disparaissait inexplicablement, tout comme toutes les feuilles froissées qui traînaient, la poussière et la nourriture par terre à la cafétéria.
En parlant de cafétéria, Lym constata avec agacement qu'elle avait, oui, encore, oublié de prendre quelque chose à manger pour les trois heures de cours qui suivaient. Si seulement elle pouvait être moins distraite et désordonnée...
- Tiens, fit une voix pleine de malice derrière elle.
Elle pivota et se trouva face à Larrow, qui haussait les sourcils d'un air amusé, un paquet de cerises qu'il tenait à bout de bras tendu vers elle. Il la connaissait déjà assez bien pour savoir qu'elle allait encore oublier. Lym le prit en souriant.
- Merci...
- Il n'y a pas de quoi me remercier. C'était juste pour ne pas avoir à supporter les grondements de tonnerre que laisse échapper ton ventre quand tu as faim.
- Ouais, disons ça.
Elle hésita, puis demanda ;
- Tu veux qu'on déjeune ensemble ?
- Bien sûr ! répondit-il aussitôt. On pourrait aller dehors, c'est tellement beau à cette période de l'année. Quoique, c'est toujours beau, sur Eleuth.
Elle hocha la tête et allait recommencer à lui parler quand le professeur arriva pour déverrouiller la salle ; comme elle s'y était attendue, il s'agissait de Cave, avec sa barbe coupée court, l'octogramme tracé sur son front et son regard insondable, vêtu d'un costume noir et sévère ; à sa taille, elle crut apercevoir un enchanteur, la longue baguette de pierre torsadée qu'ils utilisaient pour se téléporter, ainsi qu'une petite dague de métal ornementé de motifs floraux.
Ouvrant la porte de la salle de Contrôle, il leur fit signe d'entrer, et Lym resta un instant immobile en découvrant le décor de l'intérieur. L'endroit était immense, comme toutes les salles de l'Académie, avec une voûte de branchages s'entrecroisant, de laquelle pendaient des sortes de lianes étranges. Il n'y avait, cette fois, ni tableaux, ni tables, ni bureaux, ni craies ; les fenêtres par où s'engouffraient à flots la lumière du soleil étaient faites d'une mosaïque de petites tesselles de verre coloré, formant un sublime vitrail qui envoyait un caléidoscope de lumières en permanent mouvement qui mouchetaient le sol de leur lueur. D'épais rideaux étaient tirés et attachés par des lacets de fil d'argent et encadraient les vitraux avec magnificence.
Des poufs, fauteuils et tapis étaient éparpillés un peu partout, ne laissant voir que de minuscules parcelles du parquet de chêne ; les murs étaient couverts de tapisseries grandioses aux couleurs et motifs qui impressionnèrent Lym par leur beauté et leurs détails d'une précision à couper le souffle. Les petites bulles de lumière, ici, étaient bien plus nombreuses et voletaient en essaims silencieux dans les lianes étranges qui pendaient du haut plafond, ajoutant aux lueurs colorées du soleil leur propre lumière, rendant le lieu plein de vie et de luminosité. Alors qu'il n'était même pas encore midi, les coloris des vitraux donnaient l'impression de se retrouver au cœur d'un coucher de soleil grandiose.
- Allez donc vous asseoir, proposa Cave en prenant place sur un vieux fauteuil d'époque au tissu élimé mais qui avait gardé de jolies couleurs malgré les âges qui l'avaient délavé.
Ils obéirent et allèrent se trouver une place en se disputant tel ou tel pouf plus confortable que les autres ; finalement, Lym se retrouva coincée sur un coussin vert mousse entre Elyra et Shay. Elle posa son sac sur ses genoux et eut du mal à arracher son regard du décor autour d'elle pour se concentrer sur les paroles du professeur.
- Je pense que vous me connaissez déjà tous, reprit l'homme en passant une main dans sa barbe brune et coupée court. Cependant, pour les nouveaux, je dois expliquer en quoi consistera la classe de Contrôle. Eh bien, vous l'aurez probablement remarqué, les Dragomirs et même les videntis en général sont dotés de capacités surnaturelles et incroyables, que nous apprendrons ici à maîtriser. Par exemple, vous serez rapidement capables de télékinésie, de télépathie, d'enflammer quelque chose seulement avec la force de votre pensée, ou encore d'insuffler une douleur à une personne, bien que tous ces pouvoirs soient fortement supervisés. Mais vous apprendrez aussi à essayer de trouver votre véritable apparence. Vous êtes effectivement des Êtres qui descendent d'Anges, d'Egnas, de Stryges, de Nyx, de Selkies, de Neuris ou encore de Fés, alors il arrivera peut-être qu'un jour vous ayez l'incroyable capacité de dévoiler votre véritable apparence physique, mais aussi vos véritables pouvoirs.
BANZAÏ !
MERCI POUR LES 1k! C'EST OUUUUUUUUUUUF
JE
VOUS
AIME
BYZOUHS
(chapitre corrigé ✔)
Bạn đang đọc truyện trên: Truyen247.Pro