Bonus Woosan : première rencontre
Quatre ans avant les événements de Down World
Wooyoung soupira en rangeant un astrolabe dans la grande étagère de bois en jetant pour la cinquième fois en une minute un regard à la grande horloge murale. Dix-huit heure trente. La vie après sa fugue n'était pas celle qu'il avait secrètement espéré. Depuis six mois, il croupissait dans le magasin d'antiquité de Monsieur Wang. Il aimait beaucoup le vieil homme mais il n'avait pas fui de palais de Solas pour rester toute sa vie dans son ombre.
Mais que pouvait-il bien faire ? Personne d'autre n'avait voulu de lui. La marine marchande de l'île recrutait uniquement des marins expérimentés et Wooyoung était loin d'en être un. Le seul bateau sur lequel il était jamais monté était une barque sur le Lac d'émeraude, pas très loin du palais. Même ses connaissances et sa passion pour la cartographie ne lui avaient pas ouvert de portes. Il s'adossa contre l'étagère et se laissa glisser au sol en soupirant exagérément fort. Pour l'instant, il économisait. Il tentera sa chance ailleurs dans l'empire une fois qu'il aura assez d'argent pour se payer un voyage le plus loin possible de Solas.
Alors qu'il rêvait d'un futur où la liberté et la connaissance lui tendait les bras, la petite cloche au dessus de la porte de la boutique résonna. Il hésita à se jeter sous le comptoir pour échapper au client. Mais quand il vit la quantité de poussière et d'huile, il se résigna. Sa chemise était toute neuve.
Il se leva en soupirant. La boutique était vide. Wooyoung resta interloqué quelques secondes. Avait-il rêvé ? Autour de lui, les étagères croulaient sous les cartes en tout genre et les instruments de navigations. Les planches de bois étaient incurvées à cause du poids des compas, boussoles, oscillomètres ou encore sextants. Certains étaient neufs et brillaient de mile feu en renvoyant la lumière tandis de d'autres étaient rouillés et témoins d'années de vie sur l'Air. Les lampes à huile pendaient depuis le plafond, éclairant de leur lumière spectrale le minuscule magasin. Wooyoung se mit sur la pointe des pieds, à la recherche de son mystérieux client entre les étagères.
- Bonsoir, fit une voix suave à sa droite et Wooyoung sursauta.
Il se tourna d'un bond vers le nouveau venu qui le regardait avec un sourire en coin. Le jeune homme resta figé sur place. Le client était... magnifique. Une cape dégoulinante de pluie était posée sur ses cheveux fuschia qui gouttaient le long de ses tempes. La gorge soudain sèche, Wooyoung suivit la course des gouttes sur la peau tannée du client. Un Kerchien, sans doute. Son regard se perdit sur son visage sculpté au couteau, son nez droit et marqué et... la courbe délicate de ses lèvres rose charnues. Des gouttelettes étaient posés dessus et Wooyoung suivit des yeux la langue du client les faire disparaître dans sa bouche.
Par Byeol.
- Bonsoir, répéta l'inconnu sans se départir de son sourire amusé et un brin charmeur.
Wooyoung s'empourpra.
- Bonsoir, dit-il enfin en s'inclinant plusieurs fois rapidement pour s'excuser.
Enfin, son regard croisa celui du client. Le vendeur aurait pu se noyer dans ses yeux brun en amande. Il y lisait un brin de malice mais aussi une noirceur qui le déstabilisa encore plus qu'il ne l'était déjà.
- Que... que puis-je faire pour vous aider ?
- Je cherche une carte. Un plan extérieur du château du Vicomte Lee de Shonga pour être précis.
- C'est comme si c'était fait !
Au fil du temps, il avait appris à ne plus poser de questions. D'après Monsieur Wang, rien de ce qu'ils vendaient n'était illégal, et ce que faisaient les clients de ce qu'ils avaient acheté ne les regardaient plus. C'était une philosophie qui avait tout de suite plu à Wooyoung. Il fouilla quelques minutes dans les étagères croulantes de veilles cartes jaunies par le temps avant de sortir l'objet de ses désirs. Le cartographe soupesa la carte et jeta un regard en biais vers le client.
Le jeune homme l'observait toujours, ses yeux de chats suivant chacun de ses mouvements. Wooyoung esquissa un sourire, ce client était tout à fait à son goût. Une aura intimidante s'échappait de lui et l'attirait irrésistiblement. Wooyoung avait toujours aimé les mauvais garçons. Et celui-là, il le voulait.
- Je travaille dans la marine marchande, expliqua le client en interprétant ses pensées pour de la méfiance.
Wooyoung hocha la tête sans en croire un seul mot. Le jeune homme n'avait pas l'allure d'un marin, plutôt d'un pirate. Le vendeur se dirigea vers le bureau de vente, caché du client. D'un geste habile, Wooyoung attrapa une grande feuille vierge de la même taille, texture et couleur que la carte de Shonga. Il pris de l'encre, griffonna sur le papier son adresse et enroula la carte sur elle-même avant de l'attacher avec une fil en cuir. Il laissa la véritable carte sur le bureau avant de sortir de l'arrière boutique.
- Et voilà ! s'exclama-t-il en s'approchant du jeune homme en lui tendant la fausse carte. Cela vous fait quinze Wan, s'il vous plaît.
Le client déposa les pièces d'argent dans sa main ouverte. Wooyoung frissonna quand les doigts du jeune homme frolèrent sa paume. Le contact dura trop peu de temps à son goûts. Déjà, le client avait ramené ses mains dans sa cape. Ils se fixèrent quelques secondes en silence. Wooyoung déglutit.
— Je vais vous raccompagner ! proposa-t-il d'une voix qui se voulait enjouée.
Ils marchèrent côte à côte jusqu'à la sortie de la boutique. Le client rangea précieusement la fausse carte sous les plis de sa cape pour éviter qu'elle s'abîme sous la pluie. Il rajusta sa capuche avant de pousser la porte. Le fracas de la pluie tombant sur les pavés droits de Solas bourdonna aux oreilles de Wooyoung. La ville était déserte, prisonnière de la pluie et du brouillard. Ils aurait pu se croire seuls au monde.
— Au plaisir de vous revoir, lança Wooyoung avec un grand sourire.
Le client planta ses yeux de chat dans les siens. Ses orbes chocolats semblaient étudier jusqu'à son âme. Wooyoung frisonna.
— Au plaisir, finit par répondre le jeune homme en laissant échapper un sourire.
Un cri au loin fit tourner la tête de Wooyoung une brève seconde. Quand il revint vers le client, celui-ci avait déjà disparu. Wooyoung aurait dit qu'il s'était tout simplement évanoui dans la nuit. La pluie le contraint à rentrer tout aussi vite dans le magasin, l'esprit encore occupé à repasser en boucle son interaction avec le client.
Rapidement, ses yeux se remirent à fixer l'horloge murale. Il était censé fermer la boutique dans un quart d'heure. Wooyoung sourit en saisissant la clé de la porte. S'il mettait fin à sa journée de travail maintenant, le vieux Wang n'en sera jamais rien. Les clés tintèrent dans sa main alors qu'il se dirigeait résolument vers la porte du magasin. Il attrapa la carte volée au client, sa cape de pluie, glissa la capuche sur sa tête, tourna l'écriteau "fermé" sur la vitre de l'entrée, ferma la boutique à double tour et disparut dans la nuit.
Sans savoir pourquoi, Wooyoung avait la certitude qu'il viendrait. Pas seulement pour récupérer la carte, mais aussi pour lui.
☁️☁️☁️
San sortit des Ombres une fois sur le pont de l'Ateez, effrayant au passage Minjae qui montait la garde malgré la pluie battante. Le cuisinier tendit un doigt menaçant vers lui avant de rire.
— J'ai le cœur fragile, petite Ombre. Maintenant va à la cuisine, j'ai gardé un plat rien que pour toi. Je ne t'ai pas vu manger de la journée.
San le remercia d'un hochement de tête et d'un petit sourire. Dès que Minjae l'avait vu, recouvert de bandages et de cicatrices dans l'infirmerie du navire trois mois plus tôt, le cuisinier s'était donné pour mission de le remettre sur pieds. San l'aimait bien, il était gentil et toujours prêt à rire. Mais surtout, il lui laissait les plus grosses portions de nourriture. A son arrivée sur l'Ateez, San n'avait plus que la peau sur les os. A présent, sa musculature était revenue et il se sentait bien dans sa peau.
Il passa par la cuisine et récupéra une assiette dans le sellier avant de se diriger vers les appartements du capitaine. Sa cape dégoulinante de pluie laissait des gouttes sur les sols partout où il passait. Il croisa dans les coursives quelques marins qui l'observaient de loin avec une terreur mêlé de respect. San s'y était habitué. Il était une Ombre après tout, il était vu partout comme monstrueux. Il faudrait encore quelques temps aux marins pour s'adapter à sa présence et accepter que San les commande. Le capitaine Hongjoong et les deux autres lieutenants, Mingi et Jongho, n'avaient jamais eu peur de lui.
Il toqua avant d'entrée dans la cabine du capitaine. La voix de Hongjoong l'invita à entrer et il s'exécuta. Il trouva les trois chefs du navire assis autour d'un table d'ébène en fin de repas. La pièce était éclairée par les lumières chaudes des lampes à huile. Des livres et des objets par centaines traînaient partout dans la pièce ou étaient posés sur des étagères. L'épaisse cape de pluie du capitaine était posée par dessus le grand paravent qui délimitait la cabine du lit.
Mingi leva les yeux de sa chope et lui fit un clin d'œil. Il portait de beaux habits neufs aujourd'hui, sûrement acheté au marché de Solas. Jongho avala son dernier morceau de poulet et repoussa l'assiette pour faire de la place à San près de lui. Hongjoong jouait avec ses légumes, l'esprit ailleurs. Ses baguettes frappaient le chou napa à un rythme régulier. Ses mèches bleus se balançaient au-dessus de son front.
— Bonsoir San, ta mission s'est bien passé ? s'enquit Jongho quand il comprit que Hongjoong ne lancerait pas la conversation.
Il hocha la tête, sortit la carte des plis de sa cape et la posa sur la table. Hongjoong releva la tête et gratifia San d'un sourire.
— Félicitations. Tu n'as pas rencontré de soldats ? Solas n'est plus très sûre pour les Ombres.
— Je les ai évité mais les garnisons sont de plus en plus nombreuses. Bientôt, je ne pourrais plus mettre les pieds sur l'île sans être repéré.
Hongjoong hocha la tête en se frottant le menton. Les nouvelles mesures de l'empire se mettaient petit à petit en place. Interdiction pour tous les mages non membres de l'armée ou de la noblesse de pénétrer sur Solas sous peine de mort. San passait aujourd'hui dans les mailles du filet, plus pour longtemps.
Il s'assit et commença à manger en silence, écoutant attentivement les autres raconter leur journée. Comme il s'était douté, Mingi avait flané dans les marchés de la ville avant de rentrer quand la pluie s'était mise à frapper l'île. Jongho avait été de garde et Hongjoong étudiait le Nouveau Monde à la recherche des livres de Tanian. Il espérait mettre la main sur un d'entre eux dans la demeure du régent Lee. San était mitigé quant à la quête du capitaine. Certes, l'idée de réussir à mettre la main sur l'origine de la magie était plus que tentant mais ce trésor était perdu depuis la Fracture, autant dire que les chances de le trouver étaient minces.
Finalement, Hongjoong tendit la main pour saisir la carte. A mesure qu'il la déroulait, son regard se faisait plus perdu.
— Un plan du château du Vicomte Lee, n'est-ce pas ? finit-il par demander avec un rictus.
San fronça les sourcils devant l'air plus qu'amusé de Hongjoong. Il avait bien vu le vendeur mignon lui emballer cette carte.
— Oui, quoi d'autre ?
Mingi se pencha par-dessus l'épaule de Hongjoong et éclata de rire. Agacé, San arracha la carte des mains du capitaine et écarquilla les yeux en découvrant le mot griffonné par leur vendeur sur un papier vierge. Sa réaction fit d'autant plus rire les trois autres.
— Tu devrais y aller, sourit Jongho. Rencontrer de nouvelles personnes te fera du bien.
San était bien seul et il avait l'intention de le rester.
— Tu devrais y aller pour récupérer cette carte surtout, ricana Mingi.
San jeta un regard noir au second qui lui fit un clin d'œil. Il laissa tomber le papier jaunis sur la table. Ce vendeur l'avait pris pour le dernier des imbéciles. Plus jamais il ne paierait quelque chose avant de vérifier que tout était en ordre.
— De préférence sans lui faire la peau, tempéra Hongjoong.
Le capitaine s'était habitué à ses crises de colère à son arrivé sur le navire. San n'en faisait presque plus. Sur l'Ateez, les moments où il devait tuer pour sa survie étaient assez rare. Les pirates ne jouaient pas au gros bras des Airs. Ils préféraient être des petites souris qui venaient récupérer les butins après la bataille.
Trois coups contre la porte leur fit tourner la tête. Minjae se tenait debout, encore trempé, l'air fâché.
— Désolé de vous déranger, capitaine. C'est cette saloperie de tempête, le gréement ne tiens pas. Ce rafiot tombe en ruine.
Hongjoong grogna. Quoi qu'on puisse bien penser de l'Ateez, personne ne l'insultait devant son capitaine. San devait bien avouer qu'il serait temps de finir les réparations, le bâtiment n'était plus tout jeune et certaines manœuvres devenaient dangereuses.
— Nous prendrons chez le Vicomte Lee de quoi finir nos réparations, soupira Hongjoong en se levant, sa chaise traînant sur le bois dans un bruit désagréable. Jongho, viens avec moi pour voir ce qu'il se passe. San, récupère cette carte.
L'Ombre hocha la tête et regarda les trois hommes partir puis grimaça. Il se retourna vers Mingi quand celui-ci claqua sa chope contre la table.
— Le vendeur, est-il est mignon ?
San s'enfuit dans les Ombres à cette simple question. Il était à bord de l'Ateez depuis à peine trois mois mais Hongjoong lui avait fait confiance au point de lui donner un poste de lieutenant. Malgré cela, il continuait de garder ses distances avec l'équipage. Une partie de lui se méfiait toujours, il avait bien trop connu la haine et la violence pour espérer naïvement que les hommes de l'Ateez soient tous bons.
Mingi ne vit pas les choses de la même manière. Il attrapa San par le poignet mais tout en douceur. Le second avait réussi à anticiper ses mouvements, c'était vraiment un redoutable guerrier. Mingi le guida vers le canapé de Hongjoong et le fit s'assoir dessus.
— San, reviens s'il te plaît.
Il obéit et sortit des Ombres. Mingi sourit avec douceur en voyant son air inquiet. Même s'il détestait ce sentiment, San se sentait redevable auprès de Mingi pour lui avoir sauvé la vie. Il avait du mal à refuser des choses au second.
— Tu as plus peur de retourner voir ce vendeur que d'aller te battre. Pourquoi ?
San se mordit la lèvre. La trivialité des sentiments qui l'avaient saisis devant le vendeur lui paraissaient stupides. C'était bien la première fois de sa vie que la vue d'un inconnu provoquait ce genre de choses en lui. Il avait eu envie d'éterniser sa visite à la boutique, poser des milliers de questions au jeune homme, le regarder, indéfiniment.
— J'ai promis de ne plus jamais aimer.
— Tu as promis ou tu te l'es promis ? interrogea Mingi d'une voix douce.
— Quelle différence y a-t-il ?
— Tu le sais très bien.
San ne répondit rien. Il se l'était promis. Plus jamais. Plus jamais après Kerch, plus jamais après les quelques mois d'esclavage et de violence avec les Sang-In.
— Le monde entier ne te veut pas du mal, continua tranquillement Mingi.
— Ceux qui me veulent du mal sont déjà suffisamment nombreux.
Il se crispa quand Mingi glissa ses longs doigts dans ses cheveux fuchsia. Les contacts physiques étaient toujours aussi difficiles à appréhender pour lui.
— Alors fais toi plus d'alliés.
Le raisonnement du second le fit sourire. Mingi était quelqu'un de particulier, c'était ce qui le rendait aussi charismatique et intéressant. Pourtant il ne comprenait pas pourquoi Mingi semblait autant s'être attaché à lui. Le second était très protecteur envers San alors même que les rumeurs de la haine qu'il entretenait à l'égard des mages étaient tout de suite venues à ses oreilles. Alors même que Mingi était un Guérisseur, même s'il n'était qu'un Entre-Deux.
— Jongho m'a dit que tu détestais les mages, pourquoi ?
— Histoire familiale compliquée, soupira Mingi. Mais toi c'est différent. Tu... tu n'es pas comme eux.
— Je ne suis pas comme eux ?
— Tu n'es pas un monstre.
Pour une fois, le second avait tort. San observa longuement Mingi. Sous l'apparence froide du fier et puissant guerrier se cachait un jeune homme sensible et attentif aux autres. San l'appréciait beaucoup pour cela. La haute stature du pirate semblait plus voûtée qu'à l'accoutumé, comme si un poids invisible était posé sur ses épaules.
— Tu devrais aller à cette adresse, pas pour la carte mais pour lui.
— Et pourquoi ?
— Parce qu'une vie sans amour n'en vaut pas la peine, murmura Mingi tout bas.
San retient son côté provocateur. S'il demandait au second où était donc l'amour de sa vie, Mingi cesserait sur le champ de bien le traiter. On ne plaisantait pas avec les affaires personnelles du second, c'était une des premières choses que San avait appris en arrivant ici.
— Je m'en sors plutôt bien, se força-t-il à répondre.
— Vraiment ?
San ne saurait pas dire si la question lui était concernée. Il serra le fin poignet de Mingi dans entre ses doigts. Le second sembla reprendre vie et un sourire espiègle conquit de nouveau ses lèvres.
— Vas-y. Si ce n'est pas pour lui, fais le au moins pour la carte.
☁️☁️☁️
Quand trois tocs à sa porte retentirent, Wooyoung senti son estomac se contracter de stress et d'excitation. Il traversa la seule pièce de son minuscule appartement, coincé au rez-de-chaussée entre deux échoppes, et saisit la poignée. Son corps était parcourus de milliers de frissons. Il l'ouvrit et tomba nez à nez avec le client de la boutique. Celui-ci avait déroulé la carte, de manière à ce que Wooyoung puisse voir son adresse. Le jeune inconnu avait un sourire énigmatique aux lèvres. Wooyoung ricana intérieurement, cela allait être une très bonne soirée.
— Bonsoir, lança le vendeur en s'appuyant contre le chambranle de la porte.
— Bonsoir, je crains qu'il y ait eu un malentendu avec la carte.
Le sourire du client n'avait pas atteint ses yeux. Wooyoung se crispa. Si il voulait plaire au client, il allait devoir sortir le grand jeu.
— Je ne crois pas, répondit-il avec un grand sourire. Je vous propose une soirée en mon illustre compagnie.
Les épaules du client tressautèrent quand il contint son rire.
— Et la carte ?
— Tout dépendra de mon appréciation de la soirée, sourit malicieusement Wooyoung.
— Et bien dans ce cas là, acceptez-vous de passer la soirée avec moi ?
La voix était posée, un brin suave. Wooyoung su qu'il avait gagné. Il jeta un œil par-dessus l'épaule de San. Le vent et la pluie s'étaient calmées, ne laissant derrière elles qu'une lune presque pleine qui éclairait les rues d'un halo blanc. Byeol était avec lui ce soir.
— A l'endroit que vous voudrez, pirate.
Le client tendit la main vers lui et Wooyoung la saisit. La peau était chaude contre la sienne et il se surprit à sourire. Il ferma la porte de chez lui et se laissa entraîner dans les grandes rues pavées de la capitale de l'empire. San lui faisait effleurer les murs et prendre les ruelles les plus étroites, fuyant une menace invisible.
Ils déambulèrent en silence dans le dédale de la ville, les mains toujours accrochées ensembles. Le silence les accompagnait mais Wooyoung l'appréciait. Il ne sentait pas le besoin d'y mettre fin pour parler pendant des heures. Il comprit bien vite où le client l'emmenait.
L'ancien poste de garde abandonné donnait une vue imprenable sur la ville en contre bas. L'imposante tour avait cessé d'être utile des décennies plus tôt, quand la ville s'était agrandie et que les remparts avaient reculés. Elle n'avait jamais été démolie, cela aurait coûté trop cher à l'empire. Une fois tout en haut, Wooyoung fit comme San et laissa ses jambes se balancer dans le vide. Le vent froid s'infiltrait sous sa chemise et le faisait frissonner. Solas était illuminée de milliers de points lumineux, autant de bougies et de lampes à huiles pour autant d'âmes qui vivaient là.
— Je ne connais même pas ton nom, lança-t-il au vide devant lui. Je m'appelle Wooyoung.
— San, pour te servir.
Wooyoung esquissa un sourire. Montagne... ce nom allait parfaitement bien au pirate. Il se dégageait de lui quelque chose de puissant, sans que le vendeur ne puisse exactement mettre le doigt dessus.
— La vue te plaît ? demanda San.
— Bien plus que cela, sourit Wooyoung en plantant ses yeux dans ceux du marin.
Il vit San rougir, ce qui l'amusa d'autant plus.
— Je te remercie de m'avoir laissé une chance et de ne pas m'avoir tranché la gorge pour récupérer la carte, continua-t-il sur un ton gai qui contrastait avec ses paroles.
— Je me remercie de t'avoir laissé une chance.
Ce San l'intriguait au plus haut point.
— Qui es-tu ? Un pirate ?
— Un pirate oui, mais mon capitaine aime aussi nous appeler chasseurs de trésors.
— Ma mère m'a toujours dit que je valais tous les trésors.
Le marin esquissa un sourire.
— Elle n'a pas tort.
Wooyoung pouvait presque sentir la tension entre eux. San et son mystérieux équipage représentaient ce qu'il avait toujours cherché, de l'aventure et un soupçon de danger. Tout le contraire de sa vie actuelle, monotone au possible et terriblement ennuyeuse.
— J'ai toujours rêvé d'explorer le monde, en percer chacun de ses mystères... à commencé par ce qu'il se cache sous nos pieds.
La Mer de Nuages était calme loin sous l'île. Wooyoung s'était déjà demandé plusieurs fois ce qu'il se passerait s'il se laissait tomber dans le vide. Son instinct de survie l'avait empêcher de tenter l'expérience.
— Pourquoi es-tu encore là ? demanda San.
— Les rêves coûtent cher. Une place sur un navire marchand pour être exact. Mes rêves d'exploration se résument à cette île. Au moins, j'en connais les moindres recoins. Même mes compétences de cartographie n'ont pas pu acheter une place sur un de ces maudit rafiots.
— Le monde ne se borne pas à Solas. Mais il peut être aussi beau qu'hideux, fascinant comme terrifiant. Calme puis violent.
— Tu ne parles pas du monde mais des personnes qui le peuple, je me trompe ?
San lui jeta un regard en biais et Wooyoung comprit qu'il avait tapé dans le mille. Les ombres et les fantômes dansaient toujours dans ses yeux. Ses orbes chocolats attiraient Wooyoung comme des aimants. Ses lèvres claires lui donnait envie de les dévorer, de le dévorer.
Il secoua la tête pour chasser ses pensées. San n'avait pas l'air d'être amateur des nuits sans lendemain.
— Certaines personnes valent le coup d'essayer d'explorer le monde, sourit malgré tout San en lui jetant un regard en biais.
Wooyoung se doutait que la vie du pirate n'avait pas du être simple, loin de là.
— Alors nous nous reverrons si tu reviens ici, tenta Wooyoung.
San secoua négativement la tête.
— Je crains que c'est la dernière fois que je mets les pieds à Solas.
— Pourquoi ? la voix de Wooyoung résonna plus affectée par la nouvelle qu'il ne l'aurait voulu.
Le pirate disparut soudain. Wooyoung écarquilla les yeux de surprise et entrouvrit la bouche. Une Ombre. San était un mage.
— L'empire te pourchase, n'est-ce pas ?
— Il n'a pas connaissance de mon existence mais ce n'est pas le seul à me vouloir du mal, admit le mage en réapparaissant.
Les yeux de Wooyoung tombèrent sur les cicatrices sur la peau dorée de San. Éclairées par la lune, les fines lignes blanches brillaient presque sur sa peau. Le mage avait dû tomber entre les griffes des Sang-In. Le cœur de Wooyoung se serra en imaginant San souffrir entre leurs ignobles mains.
— Une soirée sans lendemain donc... murmura Wooyoung.
— Viens avec moi. L'Ateez cherche un cartographe depuis des mois, tu y auras parfaitement ta place. Tu pourras accomplir ton rêve de découvrir le monde.
— Avec des pirates ? ironisa-t-il.
— Avec des hommes libres.
Une flamme brillait dans les yeux de San, chassant au loin les ombres. Wooyoung se sentit réchauffé par ce simple regard. L'Ombre attrapa sa main entre les siennes et il se sentit rougir. San était de loin le plus bel homme avait qui il avait passé du temps loin des regards. Wooyoung se pencha instinctivement en avant, ses lèvres se rapprochant de celles du mage. Il frissonna de tout son saoul quand San entrouvrit les lèvres et que son chuchotement caressa sa peau.
— Avec moi.
☁️☁️☁️
Et voilà le premier bonus ! Je suis un peu submergé de travail depuis la reprise de la fac donc les publications risquent d'être un peu aléatoires... surtout que j'ai commencé d'écrire en parallèle ma nouvelle histoire 🤭
J'espère que ce bonus vous a plus et je vous dit à bientôt pour le prochain !
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