Chapitre 6 : Une survie nostalgique
C'est étrange . . . J'espère voir Basil sortir des broussailles, mais aussi je n'en ai pas du tout envie. Quel drôle de paradoxe. Peut être est-ce la moi du passé qui me fait ressentir ça. C'est à la fois chiant et agréable.
Un sanglier sort d'un buisson et s'abreuve à la source sans pour autant faire attention à moi. Je ne bouge pas pour ne pas l'effrayer et l'observer boire tranquillement. Il lève soudain la tête et s'éloigne à toute vitesse. Je regarde autour de moi et aperçois Basil dégager une branche d'arbre de son passage. Je plonge dans l'eau pour cacher mon corps et ne manque pas de dissimuler ma poitrine avec mes mains.
Je suis gênée et embarrassée. Il m'a déjà vu ainsi, je n'ai vraiment pas envie que cela se reproduise. Avec un air pas du tout désolé, il s'assoit sur le bord de la source, faisant tremper ses jambes, bien sur il avait remonté son pantalon pour ne pas le mouiller.
- Tu as mis autant de temps à me rejoindre alors que tu me suivais ? demandé-je sceptique.
- Je me suis perdu entretemps.
Le sens de l'orientation de notre petit prince ne serait-il pas mauvais ? Je rigole intérieurement. Je m'apprête à sortir de l'eau mais m'arrête dans mon élan quand je vois qu'il ne se retourne toujours pas. Je lui fait signe de se retourner, il ne comprend pas.
- Parle avec des mots. dit-il à l'imbécile que je suis, du moins qu'il pense que je suis.
- Retourne-toi Abruti.
Il hausse les épaules et s'exécute docilement. Je ne sais pas pourquoi il a obéis aussi facilement, mais ça m'arrange. Je sors de l'eau rapidement, comment je me sèche bonne questions, je ne me sèche pas. J'enfile mes habits qui sont maintenant trempés à cause de moi- même, douée Louisa, bravo.
- C'est bon ? me lance-t-il impatient.
Je roule les yeux ne voyant pas d'autres moyens de me sortir de cette situation pour le moins mouillée.
- Oui. je grommelle en me rapprochant de lui.
Il se retourne et lève les yeux sur moi. Il soupir un bon coup, expirant des ondes négatives. Ça nous aidera bien car s'il devient dépressif je vais finir seule sur cette île. Et j'ai tout sauf envie de finir seule.
Mon ventre se creuse m'indiquant ce qui été le plus urgent. Je me rappelle à peut près où j'avais vu des arbres fruitiers dont j'étais sur qu'ils étaient comestibles.
- On fait quoi maintenant ?
- Allons chercher à manger.
Il acquiesce et se relève pour ensuite me suivre. Nous nous aventurons dans la forêt, sur le chemin que j'avais déjà franchis une première, du moins, je pense. Tout se ressemble. Nous arrivons rapidement au pied d'un arbre assez grand. Ces fruits verts avec des sortes de piquants me semblent comestibles, peut être. J'ai l'impression d'avoir déjà vu ce fruit dans un livre, le truc, c'est que j'ai très peu de livres chez moi, la bibliothèque aussi, et qu'à la base je ne suis pas très main verte pour m'y intéresser. Donc comment ai-je pu m'en souvenir ? Une bribe du passé que j'ai oublié ? Possible, ce n'est pas une option que je peux écarter aisément tant elle est plausible. Des « souvenirs » me reviendront-ils comme ça au fur et à mesure ?
- Tu penses pouvoir l'attraper ? je lui demande en évaluant sa taille et la hauteur du fruit le plus bas.
- Je peux essayer.
Il lève le bras sans pour autant l'attraper, se met sur la pointe des pieds, et voyant qu'il ne l'atteint toujours pas, il se met à faire plusieurs bons. Certes il saute très haut. Cependant, le fruit reste accroché à l'arbre. Je hausse les épaules déçue de son manque d'utilité.
- Laisse, je vais m'en occuper.
Il arrête et dirige son regard vers moi qui commence à grimper à l'arbre comme un petit singe. La branche que je veux atteindre est trop fine pour que je puisse monter dessus, d'ailleurs, l'arbre qui a un tronc relativement mince commence déjà à se courber sous mon poids. Ça sent mauvais tout ça ... J'arrête de grimper et tends la main pour attraper le fruit. Il a quand même poussé relativement loin de là où je me situe. Basil me voyant en difficulté se positionne en- dessous de moi par précaution. À force de tendre le bras je sens le bout de mes doigts picoter, comme si j'essayais de les agrandir mais en vain. C'est sur qu'ils ne vont pas s'allonger juste parce que je le souhaite. J'arrête puis essayer de m'avancer un peu plus sur l'arbre, voire même sur cette branche fébrile. Je re-tente ma chance mais comme toujours je n'y arrive pas. Je plisse les lèvres et une mauvaise idée me travers l'esprit. Je baisse la tête vers Basil.
- Tu me rattrapes, hein ?
- Quoi ? Euh, oui.
Je décide de lui faire confiance pour une fois et me propulse depuis le tronc vers le fruit pour l'attraper. Dans ma chute j'arrive à le décrocher sans pour autant l'attraper. Il tombe en même temps que moi et je prie très fort intérieurement pour que Basil me réceptionne. La réponse me vient rapidement, ses bras s'enroulent autour de moi et il tombe a la renverse avec moi. Je me retrouve plaquée contre lui. Il avait prit le choc à ma place. Je ne sais pas trop quoi faire, il fronce longuement les sourcils, les yeux fermés puis les ouvre et se rend compte tout comme moi que la proximité de nos deux visages est très proche. Il bug pendant quelques secondes puis reprend ses esprits en me décalant sur le côté. Pas très entreprenant cet homme.
- Ah... Euh... Excuse-moi... bégayé-je. Merci de m'avoir rattrapé.
- Pouah ! s'exclame-t-il en se cambrant. En rentrant je vais devoir prendre un rendez-vous chez un bon kiné.
Même pas de « Je t'en prie ». Pff. Je le laisse derrière moi, ramasse le fruit que je viens de cueillir et m'en vais vers la plage. Malheureusement, le fruit n'avait pas eu la même chance que moi lors de ma chute. Un côté du fruit a fait un bon gros splash. Bon une partie est safe, c'est déjà ça. Il me suit les bras baillants tandis que je regarde autours de moi à la recherche de fruits. En continuant ma marche, je tombe sur un bananier qui a une bonne main de bananes mures avec quelques taches brune. Je la cueille sans me préoccuper de l'écosystème de cette île et ne me fait pas prier pour en déguster une. Mes papilles savourent cette saveur que tout le monde connait et je souris heureuse de pouvoir me nourrir.
Basil tend la main pour en prendre une dans mes bras, mais je fais volte-face pour l'empêcher de me voler mon précieux. Il hausse les sourcils, désappointé qu'on ne lui donne pas ce qu'il veut quand il veut et croise les bras.
- Je n'en ai pas le droit ?
- Si tu imites le singe, si. dis-je pour m'amuser.
Il se précipite pour se mettre devant moi, me contraignant à arrêter ma marche. Il ne va quand même pas le faire ? Sérieusement ? Non... C'est un prince trop fier pour ce genre de choses.
Il lève les mains pour les diriger vers ses aisselles et se met à sautiller bêtement en faisant « Hou Hou Ha Ha » comme un singe. C'était la pire imitation que j'ai pu voir de ma vie, mais aussi la plus drôle. Je me plie en deux, tordue de rire. Je ne pouvais plus m'arrêter de rire. M'imaginer un prince faire ce genre de chose est tellement satisfaisant ! Et encore plus si c'est le prince stoïque.
- Eh ! Arrête de rire !
Je lui tends le régime de banane, toujours en train de rire aux éclats.
- Je ne pensais vraiment pas que tu allais le faire.
- La fin justifie les moyens. boude-t-il en prenant deux bananes pour en manger une dans la foulée.
Je reprends mon souffle difficilement et continue de marcher sans destination pré-définie. Finalement, il n'est pas si ennuyant que ça ce prince.
C'est après avoir longuement marché à travers la jungle et fini notre régime de bananes que nous trouvons une grotte qui nous permettra de passer la nuit à l'abri d'une potentielle dépression tropicale. Heureusement que nous l'avons trouvé avant que le soleil ne se couche, j'ai du mal à imaginer Basil dormir à la belle étoile. Imaginez, un prince, passant du lit King size haute gamme au sol rugueux et boueux. Là c'est certain qu'il aura des courbatures pour trois bonnes semaines.
Nous entrons et remarquons malgré l'obscurité que la grotte avait été habitée. Un drap usé et bien abîmé traînait dans un coin, pas loin d'une sorte de sac troué et noir à cause de l'âge et de la crasse. Je m'empresse de le fouiller à la recherche de quelque chose qui pourrait aider à notre survie. C'est vide. Du moins c'est ce que je pensais avant de le secouer à l'envers. Un petit briquet probablement vide tombe à terre. Je le ramasse et tente de l'allumer pleine d'espoir à l'idée qu'une flammèches jaillisse. Premières étincelles... Rien. Deuxièmes étincelles... toujours pas. Troisièmes étincelles... Une flamme fébrile réchauffe mes doigts tremblant d'excitation. Je lève les yeux vers Basil qui est aussi émerveillé que moi. Je souris bêtement joyeuse pour ma découverte et me fait une petite danse de la joie mentalement. Quelle satisfaction.
En plus, comme si le destin avait tout fait pour qu'on passe une bonne nuit, le précédent hôte de cette grotte avait conservé un peu de bois sec. C'est génial.
- On se fait un feu ? Je lui propose sans vraiment attendre sa réponse.
Je réunis le bois nécessaire pour au moins une grande partie de la nuit tandis qu'il me regarde faire avec comme seule réponse un simple « oui ». Je vais brûler un groupe de brindilles et le dépose au milieu du tas de bois. Celui-ci s'embrase doucement et je m'installe à côté pour le contempler. Ce crépitement de bois, cette odeur de brûlé, cette chaleur qui me réchauffe que de face et qui je sais m'enveloppera bientôt entièrement.
Basil s'installe à côté de moi de moi et entame la discussion :
- Au moins, je suis sûre de ne pas mourir de froid et de faim avec toi. dit-il avec un faible rire.
- C'est sûr que la famille royale n'est pas éduquée pour survivre avec presque rien. Il hausse les épaules, signe qu'il me donne raison.
- On nous éduque surtout pour faire vivre le pays.
- Ça a l'air beaucoup plus compliqué. Politique, économie, etc. Trop complexe pour quelqu'un comme moi.
- Crois-moi, survivre en pleine nature l'est beaucoup plus. C'est toi qui a l'avantage du terrain.
Je ris, du moins un peu coupable en repensant à ma chute récente. Je ne suis pas sûre que ce genre d'accident l'aide à vivre longtemps. Imaginer qu'il aurait pu se briser la nuque me donne des frissons désagréable, on aurait retrouvé sur cette tige seul et j'aurai fini au final en prison pour régicide. En plus je n'aurais même pas pu justifier c'est mort, ou prouver mon innocence, car tout simplement il n'y aurait aucun témoins pour m'aider. Peut être qu'être la future reine jouera en ma faveur ? Non, je ne pense pas. Arrêtons de penser à un Basil mort et restons dans l'instant présent.
- J'ai tout de même failli nous tuer quand je suis tombée de l'arbre tout à l'heure.
- Peut-être mais grâce à ça, je me suis rappelé de quelque chose.
Il capture mon attention et je lance mon regard dans sa direction. Basil sourit en me
voyant me tourner vers lui, sans doute satisfait de l'effet que produit sa déclaration soudaine et insoupçonnées.
- Un souvenir ?
Il acquiesce en hochant la tête et se lance dans sa courte histoire nostalgique.
- Il y avait une énormément de similitudes avec ce qu'il vient de se passer. Je me baladais dans les jardins du château et c'est là que je t'ai remarqué, perchée sur la branche du plus vieux cerisier du pays. Je me souviens qu'à ce moment-là, j'était déjà attiré par ton exotisme étrangé à la stricte vie du château. Taquin, je t'ai reproché cette pause que tu t'étais permise. Et prise de panique, tu t'es agitée et es tombée de ton perchoir. Je me suis donc précipité pour te rattraper et au final tu m'es tombée dessus et nous nous sommes tous les deux retrouvés à terre. Après le reste je ne m'en souviens plus.
Même si je ne me souvenais pas de ça j'arrivais à me visualiser. J'aimerais bien me souvenir moi aussi. Je me demande comment l'ancienne moi est tombée amoureuse de lui. Quand est-ce qu'elle a commencé à penser à lui, à rêver de lui, à s'imaginer avec lui. Cela m'arrivera-t-il à nouveau ?
Je baille bruyamment signe que la fatigue commence à se faire sentir :
- Tes souvenirs sont tout de même assez précis. Remarqué-je.
- Oui. D'ailleurs, toi tu ne m'as toujours pas dit de quoi tu t'étais souvenu.
Mince, ce fameux mensonge. Bon, à l'heure actuelle, c'est inutile de continuer de mentir.
Je m'allonge sur le drap troué est abîmé çà et là, laissé par son ex m-propriétaire :
- J'ai menti. Avoué-je quelque peu embêtée.
- Vraiment ? Et pourquoi t'as fait ça ?
- Je ne sais plus. Pour t'embêter peut-être...
Il hausse les épaules et s'allonge à côté de moi. La moitié de son dos était sur le drap, l'autre, à même le sol. Je me décale pour qu'il ait plus d'espace. Cependant, à ce même moment, il m'attrape par derrière, m'enlaçant comme un doudou. Je sursaute surprise de cette initiative et je me mets à rougir.
- Mais, qu'est-ce que tu fais ?
- Au moins comme ça on est tous les deux à par égale sur la couverture.
- Mais... Euh... Tu n'as pas besoin de me prendre dans tes bras.
- Shhh...Tu me réchauffes plus efficacement que le feu. Laisse-moi au moins ce caprice.
Je me tais et ferme les yeux en me laissant attendrir par cette étreinte. Est-ce qu'ils m'enlaçait comme ça avant ? Est-ce qu'il appréciait ? Est-ce que j'appréciais autant que maintenant ? Je peux sentir son odeur même dos à lui. C'est tellement agréable. Ses épaules sont si larges comparées aux miennes qu'il arrive presque à m'envelopper intégralement. Je peux sentir sont souffle chaud dans mon dos. Je n'avais jamais remarqué qu'il respirait aussi vite. Se retrouver ainsi me rappelle la nuit où il m'a enlaçait quand je ne comprenne pourquoi ni comment. C'est comme si ce que nous étions ressortait sans crier garde et agissait sans qu'on ne s'en rende compte, agissant à notre place pendant une fraction de seconde. Cela est-il signe qu'il y a une chance entre Basil et moi ?
* * *
Je me réveille dans un très grand lit à baldaquin, enfoui sous des draps épais et prisonnière de bras musclés qui m'étreints. Je les reconnais bien et je souris en ressentant leur chaleur. Je me sent très bien là où je suis, mais je me retourne quand même pour embrasser mon prince qui sommeil encore, du moins, jusqu'à ce que je le dérange dans sa rêverie. Celui-ci se réveille doucement et m'embrasse à son tour les yeux entrouverts. Le soleil peine à traverser les rideaux de la fenêtre, seul un filet de lumière éclaire le coin du lit, nous permettant de ne pas être dans le noir complet.
- Bonjour mon amour. Me dit-il avec sa douce voix grave.
- Bonjour mon prince. Bien dormi ?
Je me penche dessus de lui et lui caresse le visage du bout des doigts en n'oubliant pas de poser mes lèvres sur les siennes une nouvelle fois.
- Pour un homme qui va épouser la femme qu'il aime avant le coucher du soleil, extrêmement bien.
Je repense à ce que je rêvais juste avant, assez confuse de tout ce qu'il s'était passé.
- Eh bien figure-toi que je viens de faire un drôle de rêve où nous avions oublié que nous nous aimions, ainsi de qui était l'autre et ensuite nous sommes retrouvés perdu sur une île déserte.
Il se met à rigoler et m'a fait un bisou sur la joue. Il est tellement adorable, et son rire et tellement agréable à entendre. Je l'aime.
- Ah ah ah, dommage pour toi ce n'était pas un rêve.
Je le regarde bizarrement, je sens un courant d'air frais caresser mes épaules. Quelle est cette sensation bizarre de vertige ? Perdue dans ses paroles, je l'interroge ne comprenant pas trop ce qu'il se passe.
- Hein ? Mais qu'est-ce que tu racontes ?
- Eh Louisa, réveille-toi et arrête de me baver dessus. Dit-il en me secouant.
Je me réveil étalée sur Basil qui prend un air mécontent. Je me redresse avec un regard perdu et je fini par observer autour de nous. Je constate que nous sommes toujours dans la grotte que nous avions trouvé sur l'île, dans laquelle nous nous étions posés autour d'un feu.
Ah... Dur réveil pour les naufragés de l'île.
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