Je le dévisage de haut en bas. Je ne comprends pas. Ou plutôt, il ne comprend pas. Je ne veux pas le voir, c'est difficile à comprendre ça ?!

Je préfère éviter tout sujet de conversation avec lui et me lève. Dommage mon émission préférée venait de commencer...

- Pourquoi tu pars ? me demande-t-il alors que je viens à peine de faire trois pas.

J'ignore sa remarque et continue ma route vers l'escalier. Mais c'était sans compter sur Julian qui a décidé de me pousser à bout alors que je suis loin d'être bien en ce moment et tout particulièrement aujourd'hui !

- Alors, Elsa ? Pourquoi tu pars ? T'as peur de moi ? Ou peut être que je te fais encore trop d'effet, qui sait... !

Oh. Mon. Dieu. C'est la phrase de trop, celle qu'il ne devait pas dire.

Je me retourne derechef et m'avance à grandes enjambées vers lui. Je lui attrape le col et l'enfonce un peu plus dans le sofa. Heureusement qu'il est assis et moi debout, je suis plus haute comme ça !

- Alors Julian, en disant ça tu viens de signer ton arrêt de mort ! Alors maintenant mets-toi bien ça dans la tête ok ? Je ne t'aime plus, plus du tout ! Quand je te vois, je vois seulement un traître, quelqu'un d'infidèle et quelqu'un qui ne sait rien faire d'autre que faire du mal aux gens ! Parce que oui, Ducon, tu m'as fait du mal. Tu pensais que j'allais le prendre comment le fait que tu me trompes avec ma propre soeur, hein ?! Et puis t'as été assez con pour prendre ma soeur et non une fille que je ne connaissais pas, pour que je sois vraiment au fond du gouffre... !

Je relâche la pression mais continue mon hystérie :

- Je te hais Julian, je te hais ! Tu es là personne que je déteste le plus au monde, compris ? Tu as fait de ma vie un enfer ! J'ai perdu beaucoup de choses par ta faute mais ça, ça tu t'en fous. Tu t'en fous de tout ce que j'ai pu ressentir, tu t'en tapes de comment j'ai souffert ! Tu ne sais rien, tu ne sais pas ce qui s'est passé alors maintenant dégage, sors de ma vie ! T'as déjà fait assez de dégâts comme ça...

Voilà. J'avais besoin que ça sorte. J'avais besoin de lui dire tout ça. Je tenais plus, vraiment.

Je ne m'étais pas rendue compte que les larmes avaient commencé à dévaler mes joues, que Laura était à présent dans l'entrée et que Maddie nous regardait.

Je suis tellement chamboulée que je ne vois rien. Je les regarde tous une dernière fois et monte dans ma chambre en courant et en pleurant toutes les larmes de mon corps. Je tombe sur mon lit après avoir claqué fortement la porte. Et c'est parti pour une heure de pleurs...

***

Il est à présent dix-sept heures dix. J'ai des crampes au ventre à force de pleurer, mes yeux me piquent, j'ai froid et j'ai envie de défoncer un mur. Mais je n'ai pas envie d'aller au sous sol taper dans mon pushing ball. D'ailleurs, je n'ai pas envie de me lever mais je dois le faire. Parce que si je reste à me morfondre dans mon lit, mes idées les plus noires vont refaire surface et je veux tout faire pour éviter ça...

Alors je me lève. J'enfile mon sweat et prends mon portable en me dirigeant vers la sortie. Mais mon cellulaire vibre et lorsque je vois la petite tête de Sarah, je n'ai pas d'autre choix que de décrocher. Alors je ravale mes larmes et renifle un bon coup pour qu'elle ne se doute de rien.

- Oui, allô ?

- Elsa ! Oh, j'ai cru que tu ne répondrais pas au premier appel.

- Et pourquoi ça ? Je te réponds toujours non ?

Un petit rire sort de l'autre côté du combiné. Je souris. Je souris parce que cette fille elle me rend la vie un peu plus facile sans le savoir. Ce sont ses petites mimiques, ses petits tics qui font son charme.

- Sinon, ça va mieux ma belle ? je lui demande inquiète.

- Nan... Ça va pas du tout. J'ai fait que de pleurer depuis que je suis rentrée... J'y crois pas Elsa ! Putain mais pourquoi il est parti ce con, pourquoi ? Putain je le déteste tellement de me faire subir ça !

J'ai l'impression de me retrouver, il y a un an et demi, lorsque Julian m'avait trompé. Je sais ce que ça fait et... J'ai souhaité que jamais un de mes proches n'ait à subir ça.

- Pleure pas ma belle, pleure pas. Il n'a pas dû prendre cette décision à la légère, je le connais... Ça a dû lui briser le coeur à lui aussi, j'en suis sûr.

Un blanc s'installe avant qu'elle me crie :

- Tu te fiches de moi, Elsa ? Depuis quand tu prends sa défense ? Tu n'essaies même pas de me rassurer ou quoique ce soit ! T'es vraiment qu'une égoïste, une putain d'égoïste... !

J'attends qu'elle est fini son petit discours, je la connais depuis le temps. Dès qu'elle finit je lui réponds doucement :

- Sarah ? Je te connais, tu ne penses aucun mot de ce que tu viens de me dire, pas vrai ? Tu dois être fatiguée, cette histoire ne va pas s'arranger si tu n'es pas mieux. Vas dormir, repose-toi et, attention, pas de déprime, hein ma belle ?!

- Je suis vraiment désolée... Je ne sais pas ce qui m'a pris... Oui, tu as raison, je suis à bout.

- Je t'ai aussi sorti les pires injures mais bon, tant qu'on ne les pense pas, c'est bon ! Bonne nuit ma Saranou d'amour...

Elle me souhaite elle aussi une bonne nuit et je raccroche. Au même moment je reçois un message de Mathias qui me propose de se voir dans deux jours, dimanche, car demain il ne pouvait pas. Ça tombe bien, moi non plus. J'ai hâte qu'il m'explique tout.

En attendant, je retourne finalement dans mon lit. J'allais mettre mes écouteurs quand j'entends les pas de Julian dans le couloir. Le problème c'est qu'il n'a rien à faire là, pas à cet étage.

Les pas s'arrêtent devant ma chambre et je fourre tout sous ma couette et ferme les yeux. La porte s'ouvre puis se referme. Lorsque les pas deviennent lointain je craque. Je pleure sans relâche pour tout le mal que j'ai subi, pour tout ce que je vis et pour tout ce qu'il me reste à subir...