##14
Adja n'eut pas à attendre le lendemain avec effroi car sa nuit fut trop agitée pour faire semblant de dormir. Plus les minutes passaient, plus Sylvana ressemblait à un ectoplasme sans identité. Ses traits s'effaçaient, sa main n'était plus qu'une masse informe dans la sienne. Adja attendit des heures sans bouger, inquiète que la jeune femme ne redevienne plus jamais comme avant. Et si c'était irréversible ? Pour ne pas passer le reste de la nuit à angoisser, Adja discuta à sens unique avec Sylvana.
« J'ai très bien compris que ton père t'a assassinée avec l'aide de son frère et de sa sœur. Je n'arrive pas à m'expliquer une décision aussi horrible, par contre... Quelle que soit la raison pour laquelle ils te croyaient possédée, je n'y accorde aucune valeur et je veux que tu le saches. Je te fais confiance, comme toujours... Je pensais avoir tort et te croire aveuglément, mais aujourd'hui je m'en moque. Tu n'as rien fait de mal, Sylvana, et je le prouverai. »
Quelques heures supplémentaires passèrent. Adja était étonnée de vivre en continu, sans ressentir de faim ni de sommeil. Elle se demandait comment Sylvana avait pu rester seule sans devenir folle à lier, car elle-même s'ennuyait déjà. Sans conversation, sans rien à visiter, elle ne voyait pas l'intérêt de rester ici. Adja sentit la main de son amie reprendre forme dans la sienne.
« Sylvana, est-ce que tu es en train de revenir ? s'enquit-elle en regardant ses yeux vides. J'aimerais bien que tu te réveilles...
— A... »
Adja se pencha sur son visage qui retrouvait lentement son apparence. En un clin d'œil, Sylvana sembla parfaitement présente et prête à continuer sa journée. Elle lui sourit et murmura :
« Adja... Désolée, j'ai eu une absence, mais tu sais pourquoi.
— Est-ce que tu m'entendais, quand je te parlais ?
— Assez mal, uniquement sur la fin, mais j'ai compris le principal. Merci de me faire confiance. »
Adja sourit et lui lâcha la main pour sortir du lit et marcher un peu, mais Sylvana l'attrapa par le bras pour la forcer à rester auprès d'elle.
« C'est plus confortable, lui chuchota-t-elle à l'oreille. Il n'y a rien à faire, dehors.
— Mais il faudr–
— On lui parlera plus tard, répliqua Sylvana, qui avait bien saisi qu'elle voulait discuter avec Alphonse Dormeaux. En attendant, profite un peu de ta nouvelle vie. »
À ces mots, Adja se sentit aussi mal que lorsqu'elle avait pris conscience qu'elle avait quitté le monde des vivants. Elle pleura sans larmes, le corps secoué de frissons.
« Mes parents... ma grand-mère..., sanglota-t-elle.
— Shhhh, la réconforta maladroitement Sylvana, viens ici. »
Elle la serra contre ce qui avait été son cœur, et qui aurait dû être sa robe.
« Sylvana..., marmonna Adja, toujours triste mais légèrement amusée.
— Qu'est-ce qu'il y a ? dit-elle d'un ton ironique.
— Tu n'as vraiment pas l'intention de t'habiller ?
— Je ne suis pas assez en forme pour me faire des vêtements.
— Menteuse. »
Sylvana lui adressa un sourire narquois.
« Eh bien, sache que c'est toi qui nous fais tenir sur ce lit. Si tu n'avais pas envie que nous soyons bien installées, nous passerions toutes les deux à travers le matelas. Tu es la seule personne en charge ici, alors n'hésite pas à m'inventer des vêtements si ça te manque tant ! »
C'est évidemment une provocation... Adja sentait la poitrine de Sylvana à travers son t-shirt et un faux cœur battre derrière sa peau, preuve qu'elle était assez concentrée pour créer ce qu'elle voulait. Curieuse, Adja lui caressa l'épaule du bout des doigts. Son pouls s'accéléra en même temps que sa respiration, et elle craignait de perdre la raison si tout cela ne s'arrêtait pas rapidement. Je ne peux pas... Elle voyait le visage de sa grand-mère en larmes, apprenant la mort sordide de son unique petite-fille, ses parents se précipiter dans la Maison Dormeaux pour trouver son cadavre en voie de décomposition... Non, non non. Adja imagina un pyjama très épais pour Sylvana.
« Pourquoi ? lui demanda cette dernière. Je te proposais quelque chose de mieux... »
Incapable de mettre des mots sur sa souffrance et de s'entendre les prononcer, Adja se blottit contre Sylvana et ferma les yeux, espérant qu'elle puisse comprendre l'étendue de son désespoir.
« Raconte-moi..., murmura Adja. Raconte-moi quand tu as quitté ton corps. Je veux savoir si tu étais aussi malheureuse que moi. »
Un silence s'installa. Adja crut qu'elle avait franchi une limite inacceptable, mais Sylvana finit par parler.
« Je n'y avais pas repensé depuis plus d'un siècle.
— Dis-moi tout, lui demanda-t-elle gentiment.
— J'ai continué de me défendre contre mon père jusqu'à ce qu'il sorte de ma chambre. Je crois que mes mains passaient à travers son torse, mais je ne le voyais pas. C'est à ce moment, et pas avant, que je me suis rendue compte que je n'étais plus en vie.
— Tu as eu peur ?
— Je me suis sentie en sécurité et je suis restée dans ma chambre jusqu'à ce qu'ils viennent chercher mon corps pour m'enterrer dans la forêt. Je les ai suivis, et puis... »
Sylvana fit une pause et serra Adja contre elle.
« On ne peut pas aller très loin de la maison sans suivre quelqu'un avec une planche de ouija, mais je ne le savais pas encore avant ta visite. Je me suis sentie complètement épuisée et je me suis réveillée là où j'avais perdu la vie. »
Sur un ton monocorde et sans émotion, Sylvana lui raconta qu'elle avait erré dans la maison en écoutant le reste de sa famille agoniser.
« Ils souffraient tous d'un mal mystérieux et se vidaient de leurs entrailles jour après jour, expliqua-t-elle froidement. Mon père répétait que tout était de ma faute, et ma vieille tante aussi...
— Quelle vieille tante ?
— La sœur de mon grand-père Alphonse, Sidonie. Elle ne s'est jamais mariée, tu sais... »
Adja essaya de deviner les implications de cette remarque. Sylvana avait vécu à une époque où les femmes devaient se marier pour survivre, n'ayant aucune indépendance financière. Sidonie Dormeaux devait donc être dérangée psychologiquement, courageusement indépendante, défigurée ou... préférant les femmes.
« Une vieille folle, poursuivit Sylvana, répondant à sa question silencieuse. Toujours en train de faire brûler de l'encens ou d'appeler les esprits à table avec un verre... Maintenant que j'y pense, elle avait peut-être raison ! Sidonie est venue chez nous à la mort de mon grand-père pour lui rendre un dernier hommage, ce qui est bien normal, mais elle a mis ses idées vénéneuses dans la tête de tout le monde... »
Sylvana soupira.
« Elle leur disait que c'était de ma faute si Grand-Père était tombé malade et qu'il n'avait pas survécu, que j'avais des pouvoirs occultes qui tuaient mes victimes à petit feu... Je n'ai rien fait de tout cela ! Mais le pire, c'est que juste après cette explication de ma grand-tante... »
Adja devinait déjà la suite. Elle se racla la gorge discrètement et demanda :
« Georges, Jules et Elisa sont tombés malades à leur tour ?
— Exactement. Et Sidonie aussi, d'ailleurs.
— Ça ressemble à une épidémie de je ne sais quelle maladie, rien de plus ! Tu devais être immunisée !
— Sidonie pensait que je maudissais tout le monde pour récupérer l'héritage de mon grand-père. »
Adja se tut, ne sachant que dire.
« Tu ne me crois pas non plus ? l'interrogea Sylvana d'un ton sévère.
— Si, bien sûr, mais je me pose une question. Est-ce que c'est possible de jeter des malédictions sur des gens ? Est-ce que ça existe ? »
Sylvana se redressa brusquement, faisant rouler Adja sur le côté. Elle ferma les yeux, remplaça son horrible pyjama par sa robe en dentelle et croisa les bras.
« Je n'ai pas tué ma famille, Adja, tu n'as pas le droit de le penser !
— Mais... Je ne le pense pas, c'était une vraie question...
— Tu te moques de moi ! attaqua Sylvana. Je passe pour une f–
— SILENCE ! »
Adja avait haussé le ton, fatiguée de son comportement.
« Arrête de me prendre pour une menteuse ! Ta jalousie, tes accusations... stop ! Je suis restée ici pendant une semaine, tu occupais mes pensées jour et nuit ! Je suis presque contente de passer l'éternité avec toi alors que je laisse toute ma famille désespérée derrière moi, et tu penses encore que je te déteste ? Les gens ne sont pas tous méchants, Sylvana, je ne suis pas comme ces fous qui t'ont assassinée ! »
Sylvana fit passer ses jambes à travers le lit pour rejoindre Adja sans prendre la peine de le contourner.
« Je vais arrêter, murmura-t-elle. Mais j'ai peur que tu sois déçue, et après toutes ces années à ne parler à personne...
— Ce n'est pas grave, Sylvana...
— Je suis devenue bizarre. »
Adja la prit dans ses bras. Chacun son tour...
« Tu vas te réhabituer à vivre avec quelqu'un, tu verras.
— Je voudrais réparer mes erreurs et comprendre si j'ai fait quelque chose de mal... Est-ce que j'aurais pu être possédée par un esprit malfaisant ? Quelque chose qui vivait ici avant nous et qui m'a protégée tout en tuant les autres ?
— Je m'y connais très mal en malédictions, admit Adja. Je sais juste qu'il ne faut pas faire n'importe quoi avec une planche de ouija, rien de plus.
— Demande à... Léon... de faire des recherches sur ce sujet. »
Adja sentait que cet effort avait dû lui coûter des centaines de points de force vitale.
« On lui demandera, acquiesça-t-elle. Peut-être demain, s'il revient. »
Mon cadavre est toujours dans un lit au premier étage, se souvint-elle derechef. Heureusement que je n'ai plus d'organes, sinon j'aurais vomi. Sylvana dut voir son malaise et l'interpréter autrement que par son angle habituel de jalousie excessive, car elle lui caressa gentiment le bras.
« C'est normal que ce soit difficile, au début, mais je serai toujours là pour t'aider.
— Tu as découvert l'au-delà toute seule, je m'en veux de me sentir si mal et de... »
... et de réduire à néant tes fantasmes en pensant à des choses sordides au lieu d'en profiter ? Je fais ce que je peux, je ne suis pas là pour ça ! Sa honte était très mal placée.
« Nous avons l'éternité pour vivre en harmonie, si l'on peut appeler cela une vie. De toute façon, a-t-on le choix ? Je resterai ici jusqu'à ce que mon âme trouve la paix, et ce n'est pas près d'arriver.
— Est-ce que je vais disparaître, maintenant que je sais pourquoi je suis morte ? s'affola Adja en touchant ses joues pour se rassurer. Je ne veux pas partir, pas avant d'avoir pu communiquer avec ma famille pour leur dire que je ne suis pas malheureuse et que je les aime !
— Tu es toujours consciente parce que tu désires le rester, sans doute. J'ai besoin de réponses, tu as besoin de parler, Dieu sait ce qui nous arrivera par la suite. »
Adja hocha la tête et osa embrasser Sylvana sur la joue pour la remercier.
« C'est gentil de me rassurer. Tu aurais pu me faire taire à chaque jérémiade par la seule force de ta volonté, mais tu as préféré me réconforter et me raconter des choses tristes et intimes...
— Je n'ai pas envie de me servir de mes petits tours de magie pour t'utiliser comme bon me semble, tu sais. »
Elle lui adressa un sourire impénétrable qui la fit frissonner. Adja voyait très bien ce à quoi elle devait penser. Toujours la tête à ça, pas vrai...
« Je voudrais parler à Alphonse, ton grand-père, demanda-t-elle pour changer de sujet. Est-ce que c'est trop tôt ?
— J'ai terriblement envie de le voir, pour être honnête, mais j'ai peur qu'il nous fuie. Si je l'effraie, cela risque d'être compliqué.
— Je vais faire le premier pas, dans ce cas.
— Ce ne sera pas la peine. » déclara soudain Alphonse Dormeaux en entrant dans la chambre sans un bruit, ses pieds de fantôme ne pesant rien sur le parquet.
Le vieil homme semblait déterminé, habillé comme sur une photographie qu'Adja avait vue : un costume sévère, gris foncé. Il se tenait bien droit.
« Je suis heureuse de vous voir si bien marcher, Grand-Père, déclara Sylvana avec un sourire poli. Vous souffriez tant de votre dos...
— J'ai écouté toute votre conversation, dit Alphonse sans même la regarder. Comment se fait-il que cette jeune fille puisse vous voir, Sylvana ?
— Je suis morte, répondit Adja sans fioritures. Je suis aussi un fantôme. »
Alphonse Dormeaux sembla frappé par la foudre.
« Quelle horreur ! Sylvana, qu'avez-vous fait ?!
— J'étais de santé fragile, intervint Adja. Mon cœur n'a pas supporté mon manque de sommeil, tout est de ma faute. »
Heureusement, Sylvana ne la regarda pas avec un air de poisson mort qui aurait immédiatement révélé son mensonge.
« Je suis désolé pour vous, jeune fille, dit le vieil homme d'un air solennel. J'espère que vous ne vous ennuierez pas dans votre nouvelle vie. »
Adja pencha la tête sur le côté et acquiesça en silence. Alphonse semblait être quelqu'un de bon, de compréhensif, et peut-être un peu naïf pour croire les élucubrations de sa sœur après sa mort. Ça... et mon explication complètement inventée. Elle attendit que Sylvana dise quelque chose, qu'elle fasse au moins semblant de lancer une discussion, mais rien ne vint. Je ne vais pas le supporter longtemps, le malaise est palpable... Adja se redressa et prit les devants.
« Vous avez sans doute beaucoup de choses à vous dire, n'est-ce pas ? lança-t-elle avec un sourire gêné. Je peux m'éloigner, si vous voulez.
— Reste, l'implora soudain Sylvana, je ne suis plus capable de tenir une conversation sans faire de bêtises... Tu dois m'aider, cela fait trop longtemps...
— Et moi donc, soupira Alphonse Dormeaux. Et moi donc, Sylvana... »
Ils échangèrent un regard et restèrent chacun de leur côté, embarrassés. C'est horrible... Je n'imagine pas ne pas oser m'approcher de Mamie comme ils le font ! Ils sont censés être de la même famille, c'est ridicule !
« Rapprochez-vous, marmonna-t-elle sans réfléchir.
— Pardon ? dirent-ils de concert.
— Mais rapprochez-vous, faites-vous un câlin ! J'en sais rien, moi ! s'exclama Adja. Si je n'avais pas vu ma grand-mère depuis des siècles, je tomberais dans ses bras ! Faites-le, c'est vraiment triste à voir ! »
Adja devait avoir l'air terriblement sévère car Alphonse Dormeaux, un vieil homme de plus de quatre-vingts ans qui avait dirigé sa famille au doigt et à l'œil pendant des années, lui obéit sans broncher. Il marcha vers Sylvana et écarta maladroitement les bras. La jeune femme jeta un coup d'œil à Adja puis se laissa aller, les yeux brillants de larmes. Elle serra son grand-père dans ses bras, le visage enfoui dans son épaule gauche tant il était grand.
Adja s'installa confortablement sur le lit de Sylvana et les écouta discuter pendant des heures de tout et de rien. Ils enchaînèrent des dizaines d'anecdotes toutes plus incompréhensibles et banales les unes que les autres, mais Adja ne pouvait s'empêcher d'être fascinée.
« Vous souvenez-vous du petit chat qui venait voler notre lait durement ramené de Toulon ?
— Bien sûr, Sylvana, je me souviens de tout.
— Il était si mignon ! Tout blanc, adorable, même s'il nous a rendu la vie impossible pendant des semaines... Et ce vieil homme qui nous apportait le courrier !
— Je lui donnais toujours quelques pièces pour qu'il puisse s'occuper de son petit-fils, dans l'espoir vain qu'il vienne nous remercier... et peut-être se lier d'amitié avec vous. J'imaginais même plus. »
Sylvana éclata de rire, mais Adja ne trouvait pas cette histoire amusante du tout.
« Vous donniez de l'argent à un jeune homme pour que Sylvana le rencontre et l'épouse ?
— Comment ? s'étonna Alphonse en fonçant les sourcils. Il s'agit d'un procédé comme un autre pour assurer la pérennité de ma famille, enfin. Bien sûr, tout ceci a échoué car nous sommes décédés.
— Je trouve ça un peu... un peu trop paternaliste, en fait, admit Adja. Nous ne venons pas de la même époque, je ne trouve pas ça normal de vouloir organiser la vie sentimentale de sa propre petite-fille, c'est tout.
— En seulement quelques heures ici, tu seras devenue comme moi. » intervint Sylvana avec un sourire narquois.
Adja se redressa pour ne pas avoir l'air de subir la conversation.
« Comme toi ?
— Jalouse. »
Adja jeta un regard en biais à Alphonse, ne sachant pas ce qu'elle devait dire. Est-ce que son époque acceptait l'homosexualité ? Non, sûrement pas, c'était à peine dépénalisé quand des touristes venaient ici un siècle après sa mort... Sylvana n'avait peur de rien, à aborder ce sujet devant lui !
« Grand-père ne sera pas surpris, dit simplement Sylvana en haussant les épaules. Je n'aurais sans doute pas épousé le petit-fils de Monsieur Tourdieux.
— J'étais le seul de cette famille à accepter votre... préférence, leur apprit Alphonse. Votre père Georges était fou de rage en permanence à ce propos et n'hésitait pas à m'en parler tous les jours. Il espérait que vous changiez d'avis.
— Sylvana... Sylvana fréquentait des femmes ? demanda Adja, la bouche artificiellement sèche. Ouvertement ?
— Je ne tiens pas à savoir ce qu'elle faisait avec l'une de ses cousines à l'âge de treize ans, ma tolérance ne va pas jusque-là, dit Alphonse en secouant la tête.
— Ta cousine ? s'étouffa Adja.
— Je n'ai jamais rien fait avec Édith ! se défendit Sylvana. Vous avez mal interprété mon comportement ! Elle était... elle était très malheureuse avec Tante Sidonie. »
Sylvana raconta alors comment sa cousine Édith, qui vivait avec Sidonie Dormeaux après la mort de ses parents bien connus de la famille, subissait un enfer constant en sa compagnie. La vieille dame la forçait à prendre part à des séances de spiritisme qui la terrorisaient. Elle l'utilisait même comme appât pour attirer des esprits mal intentionnés qui la privaient de sommeil.
« J'ai dû passer des heures avec Édith pour qu'elle ne mette pas fin à ses jours, et tout ce que vous en avez déduit était... cela ? Une simple histoire sentimentale ?
— Sidonie n'était pas indigne de confiance, protesta calmement Alphonse. Elle était simplement différente, hors normes.
— Elle vous a tous conduits à la mort ! » s'exclama Adja, oubliant toute notion de tact.
Alphonse Dormeaux resta comme paralysé sur place, figé dans une torpeur qui n'annonçait rien de bon. Sylvana, quant à elle, ne semblait pas spécialement terrifiée par ce que venait de dire son amie.
« Adja est encore pire que moi, Grand-Père, s'amusa-t-elle. Ce qu'elle voulait vous faire comprendre, c'est que Tante Sidonie lui paraît mystérieuse. »
Adja décida de poursuivre la conversation plus posément, en réfléchissant à ses paroles. Ce serait bien de ne pas recréer la guerre familiale qui vient à peine de se calmer.
« Sidonie a accusé votre petite-fille d'avoir provoqué votre mort. Elle la croyait possédée par un démon ! Est-ce que... est-ce que vous êtes au courant de ce qu'il s'est passé dans votre maison après votre disparition ?
— Durant quelques jours, raconta Alphonse d'un air pensif, j'ai erré dans la forêt jusqu'à ce que je perde connaissance. Vous savez qu'il n'est pas possible d'aller très loin sans revenir à son point de départ... Lorsque je suis enfin revenu et que j'ai accepté mon nouveau statut de fantôme, ma sœur Sidonie était déjà arrivée pour rendre hommage à mon corps défunt. Je suis resté en état de choc devant mon cadavre jusqu'à ce qu'il soit emmené par des médecins qui ont promis à ma famille de revenir avec plus d'informations sur mon décès.
— Ils ne l'ont jamais fait, personne ne les a revus, dit Sylvana en regardant le sol. D'autres médecins sont venus à la mort de mon père, de mon oncle et de ma tante, mais comme je n'étais plus en vie... ils n'ont évidemment rien expliqué. Tout ce que j'ai entendu de leur part, c'était qu'ils savaient de quoi il s'agissait. »
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