Je m'approche alors de Maddie.

Elle est assise, un peu à l'écart, en train de tailler des pieux en bois. Une activité assez étrange dans le contexte actuel festif. La jeune adolescente semble ailleurs, préoccupée.

Je m'accroupis à son niveau.

— Salut Maddie.

—...

Pas de réponse.

La jeune fille lève les yeux vers moi, m'accordant un bref et maigre sourire, le temps d'une seconde, avant de se reconcentrer sur son travail.

Je laisse s'écouler un petit instant avant de poursuivre. Elle ne semble pas vraiment loquace, et je ne sais si c'est parce que ma présence l'importune.

— En fait, si tu es ok, j'aimerais parler de certaines choses avec toi.

— ...

Maddie reste plongée dans un silence déconcertant.
Elle ne semble pourtant pas indifférente face à ma présence, je le sens. Elle est troublée. Beaucoup d'émotions semblent se contenir en elle. Et c'est compréhensible, comme je suis la copie conforme de sa sœur de qui elle était très proche.

— Je voulais d'abord te remercier de m'avoir sauver la vie, ce fameux soir où tu as tiré sur le vampire qui m'attaquait. Et je voulais aussi savoir pourquoi tu avais décidé de m'aider et pourquoi tu m'avais fait signe de ne parler à personne de ce que tu avais fait.

Maddie lève brusquement sa tête vers moi, le regard subitement inquiet, comme si elle avait peur que je n'ai pas respecté sa demande.

— ...Non, Non ! Ne t'inquiète pas ! Je n'ai rien dit à personne. Mais, j'ai besoin de comprendre ce qu'il s'est passé, je poursuis alors.

— ...

Elle semble alors se calmer, et repose ses jolis yeux verts sur le morceau de bois, continuant méticuleusement la tâche à laquelle elle s'est adonnée.

— Est-ce que tu comprends ?

— ...

Son silence reste toujours de marbre.

— Maddie...Est-ce que tu es courant de quelque chose à propos de Bella ? Je murmure alors.

Les yeux de la toute jeune fille se voilent alors. Elle se met à donner des coups de lames plus agressifs sur le pieu de bois qu'elle est en train de tailler. Je ressens alors sa peine. Plus que ça, sa douleur. Des larmes de colère discrètes se mettent à perler au coin de ses yeux. Je pose alors ma main sur son bras pour lui apporter mon soutien et mon écoute.

Elle a quand même perdu sa sœur. Sa douleur et sa colère sont malheureusement compréhensibles.

À ce moment-là, trop concentrée à interpréter les signaux non verbaux de la petite sœur de Bella, je ne vois pas surgir Parker.

— Je dérange ? Articule-t-il en m'adressant un regard partagé entre le doute et le mépris.

Il fait signe à Maddie de se lever. La jeune fille s'exécute dans un silence toujours aussi marquant, essuie une larme discrète qui commençait à s'échouer sur sa joue pâle et nous laisse seuls.

Je lance à Parker un regard mauvais.

— Qu'est-ce que tu veux ? Je tonne, presque agressivement, en me relevant, pour lui signifier que je ne suis pas ouverte à la discussion.

Le cousin de Bella continue de me transpercer de son regard accusateur.

— Qu'est-ce que tu disais à Maddie ?

— Ça te regarde ?

— C'est ma cousine et elle n'a que quatorze ans. Donc oui, ça me regarde, tranche-t-il en m'attrapant fermement le bras, sûrement pour m'intimider.

Je le repousse alors brusquement, et me met à chercher quelqu'un du regard, dans le cas où j'aurais besoin d'aide. On est assez isolé, je ne sais pas ce que Parker pourrait tenter de faire.

Il guette mes regards de détresse et devine le fond de mes pensées.

— Isaac est occupé, si c'est lui que tu cherches. Et ça tombe bien parce que je ne souhaite que personne d'autre participe à cette petite entrevue.

— Va te faire foutre, je crache agressivement, refusant explicitement sa demande.

Parker hausse un sourcil et incline légèrement la tête, me toisant d'un regard insupportable.

— Ouh. Pourquoi tant de vulgarité dans tes mots, Linda ?

Dans mes yeux se mettent à loger une haine évidente à son égard. Je serre les poings.

— Je sais ce que tu as fait. Je suis au courant de toutes les infos que tu as balancées sur moi, je grince, les dents serrées.

Parker hausse un sourcil en prenant un air faussement innocent.

— Pourquoi tu sembles me le reprocher ? Toutes ces informations étaient vraies, à ce que je sache.

— Tu joues sur les mots. Tu les utilises à ton escient. Tu manipules l'information pour monter les loups-garous contre moi.

Parker baisse sa tête à mon niveau, pour plonger son regard avec plus d'intensité dans mes yeux.

— Il n'y a que les coupables qui peuvent tenir un tel discours de paranoïa, Linda. Tu le sais ?

Je ne bronche pas. Je sais qu'il attend que je craque, qu'un coup de ma part parte. Il veut m'afficher. Il cherche à me piéger, pour prouver à ses semblables que ce qu'il dit sur moi est vrai. Je ne dois pas rentrer dans son jeu.

— Étonnant toute cette peur que tu éprouves à mon égard. Tu pourrais pourtant investir cette énergie dans tellement de projet, je réplique alors, en adoptant un ton provocant.

Parker laisse échapper un rire jaune.

— Je trouverais bien assez rapidement ce que tu caches, Linda Prior.

— Ce que je cache ? Ce n'est pas plutôt toi qui cache certaines choses ?

— Ne joue pas à ce petit jeu là, Linda.

— Je sais que c'est ton père qui est à l'origine du meurtre de deux membres de ma famille.

Il se fige alors. Un petit silence résonne alors. Il me fixe soudainement avec encore plus d'intensité.

— C'est donc ça ce que tu prévois ? Une vengeance ? C'est ton père qui tire les ficelles ? Questionne-t-il.

Je secoue la tête.

— Tu es tellement à côté de la plaque. J'ai fui mon père parce qu'il était violent avec moi. Alors quoiqu'il ait prévu de faire à ta meute, je n'y suis pas mêlée.

— L'audace avec laquelle tu parviens à mentir est impressionnante.

Je tente de garder mon calme face à son impassibilité.

— Quand je suis arrivée à la Nouvelle Orléans, je n'étais même pas au courant que j'avais eu un grand frère, décédé à un an. Je l'ai appris très récemment. Mais, toi tu le savais, n'est-ce pas ? C'est pour ça que tu as monté les loups-garous contre moi. Parce que tu penses que si je suis ici c'est pour venger ma famille. Mais, tu te trompes.

— Vraiment, Linda ? Je me trompe ? Articule-t-il sur de lui, sur un ton condescendant.

— Isaac te le confirmera. C'est grâce à lui que j'ai découvert le lien qui unit funestement nos deux familles. Demande-lui et tu verras que je dis vrai.

Parker continue de me contempler d'un regard suspicieux et accusateur, décidant de ne prêter visiblement pas attention à ce que je dis.

— C'est fou comme une simple ressemblance avec l'amour de jeunesse d'un homme peux te permettre de réussir le manipuler aisément.

— Que...quoi ? Je ne manipule...

Je n'ai pas le temps de me défendre qu'il me coupe.

— Ne te fatigue pas à avancer des arguments, Linda Prior. J'ai grandi avec Isaac. Je le connais assez bien pour reconnaître quand son jugement est altéré.

— Tu nages en plein délire...Je souffle alors, commençant véritablement à me demander s'il est en crise de paranoïa.

— Mais, la vérité, c'est que tu n'es pas Bella. Tu cherches à adopter sa vie pour te fondre parmi les loups-garous, mais, les gens ne sont pas dupes. Ils voient ton petit stratagème.

— C'est totalement absurde.

— Ah oui ? Alors pourquoi tu t'es coupé les cheveux d'une manière identique à Bella depuis la dernière fois que je t'ai vue ? Pourquoi tu adoptes certaines mimiques ? Pourquoi tu occupes actuellement son poste auprès de Vildred à l'Enclave ? Pourquoi tu poses autant de questions sur elle, à des membres de sa famille comme Jayden ou même Maddie ? Tu es obsédée par elle. Tu veux devenir elle.

Je secoue la tête, complètement débectée par ce qu'il avance. Je n'ai même plus les mots pour le contredire, tellement ses accusations partent loin.

— Arrête.

— Mais, peut-être qu'Isaac est charmé par la ressemblance que tu as avec Bella, parce que cette dernière est et restera à jamais l'amour de sa vie. Mais, il est aussi intelligent. Il se rendra compte bien assez rapidement quelle genre de pourriture tu es. Et quand ce sera le cas, il n'y aura plus personne pour te protéger ou bien croire à tes petits mensonges.

Je déglutis.

Je me rends compte que quoique je dise, c'est peine perdue. Je ne pourrais jamais le convaincre de mon innocence.

— Si tu savais comment tu fais erreur sur toute la route, je lâche alors, en secouant la tête.

— Alors en effet, pour le moment je n'ai pas de preuve tangible contre toi. Mais, ce n'est qu'une question de temps, avant que je prouve que tu es soit une petite usurpatrice, soit à l'origine d'un plan de vengeance.

— Eh bien tu vas chercher encore longtemps, Parker.

— On verra ça. Hâte de voir Isaac se retourner contre toi, quand je lui aurais balancé toutes les preuves.

— Tu fais pitié, je grince alors, les dents et les poings serrés.

— Je ne vais pas perdre plus mon temps. J'espère que tu profites de ce petit week-end, parce qu'après ça, ce sera terminé pour toi, crois-moi. Bon retour à New-York, me murmure-t-il à l'oreille avant de clôturer la conversation et disparaître juste après.