— Je n'ai pas la garde robe d'une star du show-bizz, mais je dois retrouver une ou deux robes qui pourrait t'aller.

Julia fouille dans sa penderie, alors que j'attends patiemment assise sur son lit. Isaac m'avait confiée à cette dernière pour me trouver une tenue, avant de me donner rendez-vous directement à la fête.

A vrai dire, je ne sais pas vraiment à quoi m'attendre, concernant cette soirée. Je suis surtout curieuse. Un flot de questions m'assaille.

— Qu'est-ce qu'il faut porter à une fête de la Nouvelle Lune ? Je demande alors.

— Pour les filles, une robe de couleur sombre ainsi que des bijoux dorées, sans oublier des fleurs sombres dans les cheveux.

— Des fleurs sombres ? Je m'interroge.

Julia mets plus en évidence un vase qui était posé sur une étagère un peu cachée. Dans ce dernier ont été déposées de magnifiques roses noires.

— Je les ai cueillie ce matin. Tu verras, ce sera magnifique.

— J'aime bien celle-là, j'interpelle Julia, alors qu'elle est en train de faire défiler ses pièces dans la penderie.

— Oh, bon choix. Très bon choix, même Malheureusement, à cause de mon ventre de grossesse je ne peux plus la mettre, comme elle est serrée. Mais, je te la prête volontiers. Elle t'ira bien. Essaie-là, me propose-t-elle, en me tendant la pièce.

Je me déshabille et l'enfile de ce pas, avant de me poser devant un miroir vertical accroché au mur. La robe est à bretelle, assez courte, avec une partie transparente et à dentelles au niveau du ventre, dévoilant une partie ma peau claire.

— Qu'est-ce que tu en penses ? Je lui demande alors, un peu sceptique.

— Qu'elle te va mieux à toi qu'à moi, me sourit-elle en découpant quelques fleurs. Elle me tresse alors une partie de mes cheveux roux, autour de ma tête, d'un mouvement visiblement habitué et y glisse au centre trois roses qu'elle attache ensemble.

Puis, elle sort une espèce de crayon-feutre noir et me fait signe de m'asseoir sur son lit.

— Qu'est-ce que c'est ? Je questionne, intriguée.

— Les filles portent un maquillage traditionnel, pour ce genre de soirée. Un peu comme du henné, mais autour des yeux et sur le front.

Elle commence alors à dessiner sur mon visage. Je la laisse faire, confiante. Je suis curieuse de voir le résultat.

— C'est intéressant de pouvoir participer à vos traditions. J'ignore sans doute tellement de chose à propos des loups-garous, je déclare, un peu rêveuse.

— C'est aussi une fierté pour nous de pouvoir t'initier. La culture des loups-garous ne ressemblent en rien à celle des autres espèces. Nous avons gardé des pratiques et des rites ancestraux afin de remercier l'Univers et la Nature, de ce qu'ils nous offrent.

— C'est donc cela que vous fêtez à la Nouvelle Lune ?

Julia hoche la tête.

— C'est exact. Tu peux te lever et te regarder, j'ai terminé, renchérit-elle en rebouchant son feutre.

Je m'exécute et me dirige vers le miroir. Le maquillage est magnifique. Il a quelque chose de celtique, presque de nordique. Je tombe tout de suite amoureuse de ce style, que je ne connaissais pourtant pas jusque-là.

— Merci pour ton travail, Julia. J'aime vraiment beaucoup, je lui souris.

— J'espère que tu vas t'amuser en tout cas ce soir, réplique-t-elle en me rendant mon sourire.

Je la laisse alors se préparer et décide de sortir pour rejoindre Isaac. Apparemment, la soirée se déroule au niveau de la place centrale. Je sais que ce n'est qu'à quelques pas d'ici. Le cœur battant, je me dirige vers cette dernière. Le crépuscule a déjà pointé le bout de son nez. Les lueurs rouges du soleil, semblent peu à peu disparaître vers l'horizon. De la musique folklorique s'élève alors un peu plus loin, à mesure que je me rapproche de la place.

Je croise alors des habitants, vêtus d'une tenue suivant le même code que la mienne, se diriger eux aussi gaiement vers la fête. J'arrive au niveau de la place central. Intimidée, je n'ose pas plus avancer, et cherche Isaac du regard.

Il est là, un peu loin discutant dans la foule avec d'autres loups-garous, et lève son regard vers moi. Un sourire illumine alors son visage quand il me voit. Il quitte ses amis et zigzague à travers la foule pour me rejoindre.

Mon cœur se soulève un peu.

— Tu es...époustouflante, souffle-t-il, sans pouvoir détacher une seul seconde ses yeux de moi.

Touchée par son regard admiratif, je rougis un peu, détourne quelques secondes le regard avant de finalement porter attention à sa tenue.

Il est habillé d'une tenue similaire à celles des autres hommes. Il porte haut noir sans manche mettant en avant ses bras nus et musclés et d'un pantalon en lin de la même couleur. Quelques signes semblables à ceux que Julia m'a dessinés, orne d'une manière presque similaire ses bras et son visage. Ça lui va à merveille.

Je le trouve très séduisant.

J'ai du mal à soutenir son regard, qui lui, n'a visiblement pas de mal à maintenir sur moi. On échange pourtant un regard envoûtant et silencieux, plongeant l'un et l'autre ses yeux dans ceux de l'autre.

— Tu n'es pas mal non plus, je souris à mon tour.

— Vous êtes accompagnée par quelqu'un, Mademoiselle Prior, ou je peux me permettre de prendre votre bras ?

Je lui souris alors et lui tends ma main qu'il saisit délicatement.

— Je suis tout à vous, Monsieur Peterson.

Isaac m'emmène alors dans la foule afin de s'y mêler. Pour le moment les loups-garous ne dansent pas encore. Ils discutent, en grignotant des mets cuisinés par leurs soins. Le jeune homme continue de me présenter à ses confrères. Je me rends compte que leur attitude à mon égard s'est adoucie. La lueur de doute qui logeait jusqu'alors dans leurs yeux semble disparaître peu à peu qu'Isaac m'intègre. Et puis, je sais qu'il y a autre chose. Mon regard croise celui de Steven, un peu plus loin, il lève son verre, inclinant légèrement la tête vers l'avant. Je comprends qu'il commence déjà à remplir sa part du marché. Je lui adresse un signe discret de remerciement.

Une chose est évidente, c'est qu'Isaac est dans son élément. Quand il est à l'Enclave, il est tout le temps nerveux, voire parfois agressif dans ses paroles. Je suis étonnée de le voir si calme, souriant et posé. Cette version de lui n'est pas déplaisante.

Alors, que je le quitte quelques instants pour me prendre de quoi grignoter, Je tombe sur Julia et Jack qui m'interpelle.

— Est-ce que tu veux venir discuter un peu avec nous ? Me propose Julia.

— Bien-sûr. Je vous suis.

Le couple m'emmène alors un peu à l'écart, là où c'est plus calme. On est accompagné de leur petit garçon, qui sautille partout autour de nous. On s'assoit alors autour d'un feu. Jack prend le petit sur les genoux.

— Comment se passe ton premier jour ? Me demande-t-il.

— Parfaitement. Je ne pensais pas être accueillie aussi bien, je souris alors.

— Les loups-garous sont de bons hôtes, contrairement à ce qu'on voudrait nous faire croire, me sourit à son tour Julia.

— J'aime l'énergie qui se dégage de chez vous. Vous avez l'air tellement soudé. C'est si rare...Je déclare alors.

— La famille et les amis sont pour nous quelque chose d'extrêmement important, réplique Jack, en passant sa main sur la tête de son petit garçon.

Je hoche doucement la tête.

— Vous formez une jolie famille.

— C'est gentil, me sourit à nouveau Julia.

— Est-ce que tu connais le sexe du bébé ? Je lui demande curieuse.

Julia pose sa main sur son ventre, alternant son regard entre lui et moi.

— C'est une petite fille. Je le sens.

— Sam va être content. Il est pressé d'être grand-frère. N'est-ce pas Sam ? L'interpelle son père.

Le petit garçon hoche la tête en le serrant de ses petits bras contre lui.

— Pardonnez-moi si ma question est un peu indiscrète, mais, c'est vrai que je me suis aperçue que les parents d'Isaac faisaient très jeunes. Est-ce que c'est dans vos coutumes de fonder votre famille tôt ?

Julia hoche la tête.

— Bonne remarque. Les loups-garous se marient tôt et de ce fait, on des enfants tôt. Quand j'ai eu Sam j'avais dix-huit ans. La mère d'Isaac l'a eu vers vingt ans je crois. Son père était un peu plus âgés.

— En fait, chez nous, les loups-garous, la famille est le pilier de la meute. Les enfants occupent une place très importante, beaucoup plus que pour les humains. Ce n'est pas une critique, mais, ils deviennent de plus en plus individualistes et ils désirent de moins en moins d'enfant. C'est pour ça que leur population vieillit poursuit Jack.

— Il y a une autre raison pour laquelle nous faisons des enfants tôt. Notre espérance de vie est beaucoup plus limitée que celle des humains. Les loups-garous sont traqués et tués s'ils sortent de leur territoire, même si officiellement l'Enclave punit ces meurtres. Mais, en réalité, ils sont trop occupés à s'assurer de la sécurité des humains que de la nôtre. Ainsi, si on veut espérer voir grandir nos enfants, ils faut les faire tôt pour en profiter, réplique Julia.

Mon cœur de serre dans ma poitrine. La réalité est dure à entendre. La phrase « les enfants sont l'avenir » n'a jamais pris autant de sens.

Sam se lève et se met de nouveau à sautiller autour de son papa.

— Qu'est-ce qu'il y a, Sam ? Tu veux jouer ? L'interpelle-t-il.

Le petit garçon hoche la tête, enthousiaste, s'ennuyant déjà de rester assis.

Jack se lève alors et attrape son fils comme un sac à patates, le faisant hurler de rire.

— Je vous laisse entre filles, le devoir m'appelle ! Sifflote-t-il en emmenant Sam plus loin.

Je me retrouve alors seule avec Julia.

— Jack est un père merveilleux. Je n'aurais pas pu rêver mieux, déclare la jeune femme en regardant amoureusement son compagnon s'éloigner.

— Il a l'air, je lui souris alors.

Un petit silence s'en suit alors. Il commence à faire un peu frais, même si la chaleur agréable du feu de bois devant nous reste suffisante pour nous réchauffer.

Mon regard est attiré par Isaac, qui discute au loin avec d'autres loups-garous. Je suis happée par tout un flot de pensées.

— Isaac est génial, hein ? Me souffle Julia, un sourire aux lèvres, comme si elle cherchait à lire dans mes pensées.

— Il a beaucoup de qualités humaines, j'acquiesce alors, simplement.

— ...Et il est célibataire, réplique-t-elle en plongeant son regard espiègle dans mes yeux pour guetter ma réaction.

Je détourne mon regard, un peu gênée.

— Oh...Isaac est juste un ami.

— Vraiment ? Me sourit-elle. Je ne l'avais jamais vu regarder une fille comme cela depuis...

Julia ne finit pas sa phrase.

— ...Bella ? Je poursuis alors, ayant deviné le fond de sa pensée.

La jeune femme hoche doucement la tête.

— C'est la seule fille dont il est véritablement tombé amoureux. Ils étaient jeune, c'est vrai, mais, c'était il l'aimait vraiment. Elle a tout gâché. C'est dommage, parce qu'Isaac est vraiment quelqu'un de bien.

— Oui, on m'a raconté cette histoire.

— S'il t'intéresse, tu devrais y aller, Linda. J'ai vu comment il se comporte avec toi. Je ne pense pas qu'il te repousserait. Isaac est le genre d'homme qui ne restera pas célibataire très longtemps. Beaucoup de filles le veulent.

Je me redresse alors un peu. Le sourire sur mon visage s'atténue. Je me plonge alors un peu plus dans mes pensées.

— En fait, je me dis que comme je ne suis pas loup-garou, je ne pense pas qu'il voudrait véritablement construire quelque chose. Et, je ne suis pas intéressée par les relations sans lendemain.

Je ne m'étais donc jamais imaginé aller plus loin avec lui. Oui, je le trouve attirant, mais pour des raisons évidentes, je n'avais pas voulu tenter quelque chose. Mais, je sais que sans me mentir, Isaac m'obsède un peu trop. Je suis constamment en train de le chercher du regard. Ce n'est pas « juste un ami », et je le sais très bien.

— Tu ne le sauras pas, si tu ne le lui demandes pas, me sourit-elle.

Elle a raison en soit.

— Bella, tu l'as connue, n'est-ce pas ? Je lui demande, alors que certaines questions fusent parallèlement dans mon esprit.

Son visage se ferme alors un peu.

— On était très proche quand on était jeune. Mais, je n'ai pas aimé comment elle évoluait. Elle avait des fréquentations à l'extérieur de la meute, pas forcément des bonnes. C'est le genre de fille qui tourne mal, à l'adolescence. D'ailleurs, je suis parmi celles qui ne suis pas étonnées si elle est partie et qui ne donne pas pour cause de son départ un potentiel enlèvement.

— Tu penses qu'elle est partie de son plein gré ?

Julia hoche la tête.

— J'ai appris qu'elle trafique actuellement avec les vampires. Ça ne m'étonne pas vraiment. Elle traînait pas mal avec Straze, l'un de leurs leaders, depuis la fin de son adolescence. Je sais ce que les vampires te font subir. Je suis une des seules qui ne suis pas dans le déni. Bella est peut-être manipulée, mais, quoiqu'il en soit, pour moi elle est responsable de ses actes. Je ne sais pas pourquoi elle fait tout ça. Elle avait pourtant tout pour être heureuse.

— C'est ce que les deux meutes pensent ? Qu'elle a été enlevée et manipulée par les vampires ?

La jeune femme acquiesce.

— C'est plus facile à imaginer que de s'avouer qu'elle les a abandonnés.

Je hoche la tête et laisse mon regard se perdre dans les flammes ardentes qui dansent devant moi.

— Tu penses que c'est quoi leur but, aux vampires ?

— Honnêtement ? De semer le trouble. Ce sont des mauvaises personnes. Dès qu'ils peuvent déstabiliser une autre espèce, ils le font.

Mais pourquoi s'attaquer à moi ? S'il le font, c'est que je représente forcément quelque chose pour eux.

Julia poursuit.

— ... Ils savent que s'ils jouent avec une héritière, la tension va monter au sein des meutes. Et si les loups-garous garous s'insurgent, on aura l'Enclave sur notre dos. Je pense que c'est ce qu'ils veulent. Focaliser l'Enclave sur les loups-garous pour faire en quelques sortes diversion.

Je fronce les sourcils.

— Diversion ? Mais faire diversion de quoi ? Je murmure.

— Je ne sais pas. Mais, je pense qu'il prépare un mauvais coup. Et, il est plus facile de le faire si l'Enclave est focalisée sur les loups-garous.

Je hoche la tête silencieusement, comprenant le fond de sa pensées. Je n'avais jamais imaginé les choses comme ça, mais c'était plausible.

Alors que mes pensées continuent de fuser dans mon esprit, mon regard se pose un peu plus loin.

Maddie est seule, à l'écart.

Je me rends compte que c'est le parfait moment pour aller lui parler.

De nombreuses questions à son égard demeurent encore sans réponse.

Notamment concernant le fait qu'elle m'ait sauvé la vie, cette fameuse nuit où des vampires me traquaient. Elle avait tiré une flèche en pieu de bois dans le cœur de l'un des deux vampires, et l'avait tué, avant de me faire signe de ne pas parler de ce que j'avais vu, quand elle a entendu Isaac et Vildred accourir.

Je n'ai pas compris pourquoi elle ne voulait pas que je leur en parle. La principale hypothèse que j'ai, c'est qu'elle est hémophile. Je sais qu'elle n'a pas le droit de remplir des fonctions de défense au sein de la meute, parce que si elle se blesse, elle peut mourrir. C'est la raison pour laquelle elle ne pourra pas récupérer le titre d'héritière si Bella est défaillante, et qu'il reviendra à Jayden, qui est deuxième sur la liste. Ainsi, comme elle est défendue de parcourir le terrain, j'imagine qu'elle aurait des ennuis si sa meute m'apprenait. Néanmoins, je sais que je dois lui parler.

Je profite donc de ce moment où elle est toute seule isolée pour aller la voir. Je me lève alors et prétexte à Julia que je vais aux toilettes.