Chapitre 33
Il fait déjà nuit.
On quitte alors la Forêts des Recluses Brunes pour rejoindre le Quartier Français. Notre entraînement touche à sa fin. Vildred a pris l'habitude de terminer nos joggings devant mon immeuble, pour que je n'ai pas à rentrer seule de l'Enclave, lorsqu'il fait nuit.
Voyant que je suis plus qu'à quelques rues de chez moi, je le supplie qu'on ralentisse. Le Chasseur finit par accepter et on repasse au pas. Je suis exténuée et j'ai bien besoin d'un grand verre d'eau.
— C'est déjà mieux, Sosie. Les progrès sont là, mais tu manques encore d'endurance pour les combats, déclare Vildred.
Je m'apprête à répliquer quand on croise à un carrefour Isaac.
Il marche, des écouteurs dans les oreilles, nous accordant un regard étonné, surpris visiblement de nous voir hors de l'Enclave, ensemble, et à cette heure-ci.
— On se fait une balade nocturne? Nous lance-t-il.
— On est jaloux, Monsieur le directeur? Réplique directement le Chasseur, d'un air malicieux et presque prétentieux.
— Jaloux de ne pas avoir autant de temps libre que vous, ça oui, rétorque le loup-garou, en levant les yeux au ciel, et en retirant ses écouteurs.
— Ce n'est pas du temps libre. Je la fais travailler et assure sa sécurité, chose dont tu sembles ne pas t'attribuer la responsabilité.
La discussion devient houleuse, dissimulant un certain nombre de sous-entendus, dont je cherche à percevoir le sens.
Isaac semble irrité. Vildred lui est parfaitement a l'aise comme à son habitude, et semble tirer un certain plaisir à provoquer son interlocuteur qui s'exaspère très rapidement.
— D'accord, alors quand tu auras finis de jouer les professeurs protecteurs, tu pourras venir? J'ai un truc à te montrer, rétorque Isaac un peu agacé par le comportement de son ami qui semble visiblement chercher à le déstabiliser et l'énerver en se servant de moi.
— En tant que grand gentleman que je suis, je vais la déposer chez elle et s'il me reste du temps sur mes heures de travail, peut-être que je te rejoindrais, poursuit Vildred, continuant de narguer le loup-garou, pour je ne sais quelle raison.
Isaac empoigne son interlocuteur par le haut du bras et l'emmène un peu à l'écart.
— Je peux savoir à quoi tu joues? Lui souffle-t-il, plus bas, les pupilles commençant à se dilater d'énervement.
Un peu mal à l'aise par la situation je décide de prendre moi-même l'initiative d'arranger les choses.
— Ne vous prenez pas la tête. Je vais faire le reste du chemin seule. J'en ai pour même pas trois cents mètres de toute façon, je réplique, ne voulant qu'une chose c'est de me retrouver dans mon lit après avoir pris une bonne douche.
Les deux hommes se retournent vers moi.
— Tu es sure, Sosie? Me demande Vildred.
— Je devrais survivre pendant quelques mètres, j'affirme alors.
— Parfait. Alors, on y va? Commence très sérieusement à s'impatienter Isaac, visiblement très content que je décide de me séparer d'eux.
Je commence déjà à m'éloigner des deux Surnaturels, voyant encore une fois que ma présence importune Isaac.
— Bonne soirée, je lâche, avant même que Vildred ne réponde.
Tout devient alors silencieux. Seul le bruit du vent se fait entendre. Il ne fait pas très chaud ce soir. Je me mets un peu à frissonner, pas très à l'aise à cause de cette ambiance lugubre qui traîne dans les rues vides de la Nouvelle Orléans. J'essaie d'accélérer mon pas pour être au plus vite chez moi. Je tourne alors à Carrefour dans une ruelle très étroite, que je suis obligée d'emprunter pour atteindre mon immeuble.
Me vient alors un mauvais pressentiment. Je me retourne et aperçois une silhouette masculine un peu floue se dessiner un peu plus loin derrière moi, dans l'obscurité.
J'essaie de chasser les craintes qui naissent alors aux creux de mes entrailles, me rassurant en me disant que ce n'est seulement qu'un passant. Je dois devenir un peu trop paranoïaque, à croire que tout le monde me veut du mal.
Sauf, qu'au même moment, je sens un petit choc impulsif au niveau du haut de mon dos. Quelque chose vient de me piquer.
Je me retourne de nouveau et je vois l'homme un peu plus loin derrière qui se rapproche, une espèce de petit arc dans les mains. Je comprends qu'il vient de me lancer à distance quelque chose au niveau de mon dos.
Ma tête commence alors à tourner, et le sol a tanguer. Ma vision devient de plus en plus flou. Je commence alors à crier, à mesure que l'homme se rapproche de moi, impuissante, me sentant subitement trop fébrile pour courir. Je sens que je ne vais pas tarder à perdre connaissance. Je crains alors le pire.
Alors que je fais face à mon agresseur qui se dirige d'un bon pas vers moi, une flèche soudaine venant de derrière moi le transperce subitement au niveau du cœur. Le type s'écrase au sol, dans un cri bref mais intense. Il devient alors tout gris, comme s'il se transformait en un bloc de pierre.
Je me retourne alors, bouche bée, le cœur battant à mille à l'heure et sur mes gardes, pour identifier la personne qui vient de me sauver la vie.
Je ne vois rien, dans un premier temps. Puis, à mesure de balader frénétiquement les yeux sur le paysage, aperçois en haut, sur le toit d'un immeuble une toute jeune fille, qui ne doit pas avoir plus de quinze ans. Je parviens à distinguer que ses cheveux longs et blonds vénitiens sont tressés en deux, parties, à partir du haut de son crâne. Elle porte à sa main un arc de tir, et sur son visage un masque étrange de brebis. Je distingue alors à travers deux grands yeux jaunes et lumineux. Elle remonte son masque sur sa tête, dévoilant un joli visage juvénile, éclairé par la lumière de ses yeux. Ces derniers s'éteignent alors, redevenant normaux. Sans un mot, elle pose son index tendu sur ses lèvres pour me faire signe de ne pas parler d'elle, puis remets son masque avant de disparaître sur les toits, dans l'obscurité grandissante de la nuit.
Tout redevient calme. Je fixe le cadavre de mon ravisseur gisant au sol. Du sang coule de sa plaie avec abondance, semblant que le corps se vide de tout ce qu'il contient.
Soudain un cri me fait sursauter.
— Baisse-toi!
Je reconnais la voix de Vildred.
Je m'exécute en me recroquevillant subitement sur moi. Deux coups de feux déchirants retentissent. Quand les déflagrations sont terminées, je me retourne prudemment pour porter attention à ce qui vient de se passer. Un homme se tenait visiblement derrière moi sans que je m'en aperçoive, et viens de s'écraser au sol, non loin du premier, deux balles au niveau de ses entrailles et du sang coulant abondamment de sa plaie.
Vildred et Isaac accourent vers la scène. Je fixe les deux corps qui gisent au sol, alors que ma tête tourne.
— Des vampires? Je murmure alors.
Tout se met à tanguer. Mes jambes se mettent à vaciller et je m'apprête à tomber quand Vildred me rattrape par derrière, ses deux mains me tenant sous les bras. Il me maintient contre lui d'une seule main pour pas que je tombe et retire d'un coup sec le contenant encore planté dans mon dos de la chose que mon agresseur m'a injectée. Il s'empresse de sortir une seringue de je-ne-sais-où, et me la plante dans le haut du bras après avoir créer à l'aide de ses doigts un garrot pour faire ressortir mes veines. Je me sens partir.
— Ils t'ont injecté un puissant sédatif. Dans quelques secondes tu seras endormie, sauf si le contre-poison que je viens de t'injecter fait effet avant, réplique-t-il.
Isaac s'accroupît à côté du vampire tué par l'inconnu.
— Je croyais qu'un vampire ne pouvait mourir qu'avec un pieu de bois dans le cœur? Je relève faiblement, en fermant les yeux, toujours dans les bras de Vildred qui me pince le bras me maintenir éveillée.
Le loup-garou retire d'un geste sec et habitué la flèche qui a porté le coup fatal.
— La flèche a un embout en bois, me répond-il succinctement en analysant méticuleusement l'objet.
Il se relève et se dirige vers nous montrant à Vildred l'arme.
— Qui a tiré cette flèche? Me demande-t-il.
— Je ne sais pas, je ne connaissais pas la personne, je réponds vaseuse, essayant de reprendre mes esprits.
Le contre-poison de Vildred commence visiblement fait effet.
Le chasseur me pousse sur Isaac pour qu'il me tienne à son tour et récupère la flèche pour l'analyser à son tour.
— Ça ne peut pas être celle d'un Chasseur? Demande le loup-garou à son interlocuteur.
Vildred secoue la tête.
— Non. On ne les montes pas comme ça, les nôtres. Le travail fait amateur.
Isaac pose de nouveau ses yeux ambrés sur le cadavre.
— En tout cas le tir de l'est pas. Il a visé pile poil dans le cœur, renchérit calmement, en me tenant contre lui.
Voyant que je parviens à tenir maintenant toute seule, je me détache du loup-garou.
— C'est bon, merci, je déclare succinctement, un peu embarrassée d'être traitée comme une petite chose fragile.
Isaac me lâche et fait le tour du cadavre.
Vildred s'approche alors de l'autre ravisseur, qui ne s'est visiblement pas transformé en pierre comme le premier.
— Saletés de vampire, articule-t-il avec du dédain dans la voix.
— Il n'est pas mort? Je demande alors.
— C'est voulu, réplique Vildred, qui tire le corps inconscient sur le côté.
Isaac sort de sa veste un petit flacon mauve dont il injecte la substance à l'aide d'une seringue dans le cœur du vampire mort. Ce dernier se réduit instantanément en cendre, disparaissant de notre vue. Je fixe bouche bée la scène.
— C'est très probablement signé Stan, déclare Isaac, mentionnant l'ex de Laura, l'un des leaders des vampires.
— Si tu veux mon avis, ils ne vont pas la lâcher, rétorque Vildred, en me pointant du menton.
— Il ne faut plus la laisser seule la nuit, et cela même dans son appartement, s'inquiète Isaac qui se met à fixer les alentours.
— Comme c'est gentil à toi. Tu proposes de la prendre dans le tien? Ironise le Chasseur, visiblement toujours sur sa lancée de provoquer Isaac.
J'avoue que c'est légèrement amusant, même si ça me met un peu mal à l'aise de les voir se disputer.
— Tu sais que je ne peux pas...Lâche le loup-garou, restant évasif.
J'ai compris, ça le saoule de devoir me baby-sitter.
— Ça ne me dérange pas, au contraire. Je vais la prendre avec moi, se propose directement le Chasseur qui semble très content de me récupérer chez lui.
— Je ne pense pas que ce soit une bonne idée. On devrait voir avec Laura, réplique Isaac, visiblement pas enchanté de me savoir chez Vildred.
— Elle qui passe son temps à fricoter avec des mecs dans son appart ou qui n'y passe même pas toutes ses nuits? Très bonne idée, Isaac, elle sera très attentive s'il se passe quelque chose.
Son interlocuteur lève les yeux au ciel.
— Parce que toi, c'est vrai que tu ne ramènes jamais aucune fille au tien, rétorque Isaac agacé et commençant à perdre patience.
Un petit sourire espiègle se dessine sur les lèvres du Chasseur.
— Sauf que tu oublies que mes sens sont hyper développés. S'il se passe quelque chose, je pourrais l'entendre. Et, mon appartement est bien plus grand et sécurisé que le sien. Personne n'osera s'y aventurer. Mais, c'est vous qui prenez la décision finale, Monsieur le Directeur.
Isaac relève à nouveau ses yeux au ciel de façon désinvolte.
— C'est bon, on fait comme ça, lâche-t-il.
— Je vais chercher ma voiture pour ramener Sosie et la chauve-souris chez moi. Attendez-moi là, j'en ai pour dix minutes, réplique le chasseur, prêt à repartir.
On ne l'arrête plus, lui.
Isaac finis par accepter, et le Chasseur est déjà parti.
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