Chapitre 128
Avertissement :
Ce chapitre évoque dans de court passage et indirectement des épisodes de torture sur mineur. Si vous êtes sensible à ce genre de contenu, je vous déconseille la lecture.
*
Le diner se situe à côté de marécages, dans un coin tranquille et reculé. Il a l'air assez désert, mais c'est pas plus mal. Je suis un petit peu en avance, Bella n'est pas encore arrivée. Je m'assois à une table dans le coin de la pièce près des fenêtres, et commence à attendre.
Je suis partagée entre l'appréhension et l'excitation. J'attends une vraie confrontation avec Bella depuis si longtemps. Je sais qu'au delà de tout, je n'aurais qu'une seule chance pour la convaincre. Si je ne me montre pas assez persuasive ce soir, je peux faire une croix sur la jeune fille.
Trouvant le temps un peu long, j'en profite pour répondre au message d'Isaac et le rassurer. Je suis concentrée sur mon téléphone quand je sens une présence s'asseoir en face de moi. Mon cœur se soulève. Je range mon appareil et lève les yeux.
Bella est là. Elle porte un sweat large et une capuche sur sa tête, qu'elle ne prend pas la peine de retirer. Son visage est très pâle. Aucun maquillage contrairement aux photos que j'ai pu voir d'elle, des cernes creusées en dessous de ses yeux verts, et elle me parait tout de suite très amaigrie. Ce sont donc les effets d'une cavale infernale ? Ça me fait tout de suite très bizarre de me retrouver devant mon parfait sosie. C'est extrêmement troublant. Je ne détache pas une seconde mon regard d'elle. C'est la première fois que je peux la voir d'aussi près.
Elle fait directement signe au serveur pour commander les plats, et qui nous amène une salade de bienvenue. Bella se jette directement dessus comme si elle n'avait pas mangé depuis des années. Voyant que je ne touche pas à mon assiette, et que je continue de la fixer, elle lève les yeux vers moi, alternant son regard entre ma salade et mon visage.
— Tu ne la mangeras pas ? me demande-t-elle, sans émotion dans la voix.
Je secoue la tête, silencieusement.
Elle saisit alors mon assiette et verse machinalement son contenu dans la sienne, sous mon regard un peu intrigué. Je continue d'analyser attentivement toutes ses réactions.
— Ils ne t'ont pas nourrie les vampires ? je demande alors, sur le ton de l'ironie.
— C'est plutôt moi qui les nourrissait, si tu vois ce que je veux dire.
—...
Je ne réponds, sentant déjà un petit dérangement de me retrouver face à elle. Je n'arrive pas à la cerner pour le moment. C'est pour cela que j'essaie de l'analyser au maximum.
— Mais, on n'est pas là pour parler de ça, n'est-ce pas ? rétorque-t-elle froidement.
Je secoue la tête, croise les bras sur ma poitrine et m'adosse contre la banquette, continuant d'analyser toutes ses réactions.
— En effet. On est là pour parler de cette flèche que tu as planté dans le cœur du Chasseur qui s'apprêtait à me kidnapper.
—...
La jeune fille ne répond pas. Elle ne me regarde pas, toujours autant concentrée sur son assiette dont elle vide le contenu d'une rapidité fulgurante.
— ...Tu pouvais partir de la Nouvelle Orléans. Les Chasseurs ont retiré au Mexique la bague que l'Enclave t'avait obligé à porter et qui t'empêchait de franchir les frontières de la ville. Mais, tu es restée ici, sachant que tu étais durement recherchée. Pourquoi ?
—...
Bella ne répond toujours pas. Elle continue d'engloutir le contenu de son assiette déjà bientôt vide. Elle semble presque dénier ma présence. C'est très perturbant. Je ne sais pas comment me comporter avec elle pour qu'elle me parle.
— Est-ce que tu as encore des contacts avec l'Enclave ?
Bella termine son assiette et lève enfin les yeux vers moi pour me répondre.
— Je répondrai à tes questions qu'à partir du moment où j'aurais la certitude que tu peux m'aider à retrouver Jonas.
Évidemment.
— Monica Aguilar. Cette sorcière a la capacité de te mener jusqu'à lui. J'ai décliné sa proposition quand elle m'a mise en garde contre lui. Ses énergies sont très noires, m'a-t-elle dit. Mais, peut-être que tu seras plus téméraire que moi, je déclare alors.
Bella fronce les sourcils, et secoue la tête, semblant me témoigner une certaine hostilité. Elle est sur la défensive, et je comprends que je vais devoir choisir avec grande précaution mes mots.
— Qu'est-ce que tu connais de Jonas ? rétorque-t-elle.
— Que sa mère a été tuée par un loup-garou de ma famille, le père de Parker. Sa tante, Rose Williams a survécu au drame, et apparemment lui aussi, malgré ce que le certificat de décès veut nous faire croire. Je suis allée lui rendre visite, avec Isaac. Il y avait une photo d'un petit garçon d'environ cinq ans avec elle dans sa salle à manger.
— Et tu crois que ce petit garçon, c'est Jonas ?
— Je pense que le bébé qui est mort dans cet accident n'était pas Jonas, mais son cousin, le fils de Rose. Je crois qu'elle a élevé Jonas comme son fils en mentant à tout le monde sur son identité.
Bella ne semble pas réellement convaincue de ce que je lui raconte, mais elle se montre tout de même attentive.
— Qu'a-t-elle eut à gagner ?
Je hausse les épaules.
— Je ne sais pas, pour se l'approprier. Peut-être éviter que ton père biologique qui était le sien le récupère. Mais ce qui est sûr, c'est qu'il y a eu ce soir-là la mort d'un bébé et de l'une des deux sœurs. Monica a senti sa présence, quand elle a voulu faire une séance de spiritisme. Donc s'il n'est pas mort, c'est que le fils de Rose l'est et qu'elle a échangé l'identité des deux bébés.
— Ça me paraît tordu comme situation, réplique Bella, peut convaincue, les bras croisés sur sa poitrine.
Je lève un sourcil.
— Vraiment ? Pourtant cela ne devrait pas quand on sait que toi aussi tu as été échangée.
Silence.
La jeune fille plante ses yeux dans les miens.
— Qu'est-ce que tu veux savoir ? articule-t-elle, avec un semblant d'hostilité dans son regard.
Elle ne semble pour le moment ne montrer aucune émotion, aucune vulnérabilité, aucune faille. Mais, je sais que ce n'est qu'une carapace.
— Tout. Raconte-moi ton enfance, comment tu en es arrivé là, les relations que tu entretenais avec l'homme qui m'a élevée et qui était en réalité ton père. Je veux comprendre.
Bella retire sa capuche et s'adosse contre son fauteuil en croisant les bras sur sa poitrine.
— Très bien. Je peux commencer par te parler de Zachary Prior, finit-elle par déclarer.
— Ton père, donc.
...Et celui que je pensais miens pendant des années.
— Biologique. Zachary Prior a été un temps qu'un simple policier. Ce n'était qu'un humain qui n'avait jamais croisé le chemin du Surnaturel, jusqu'à ce qu'il rencontre Sofia Williams, une sorcière de La Nouvelle Orléans. D'après ce que j'ai compris, il en était très amoureux. Ils ont eu tous les deux un fils, Jonas, qui, comme tu sais, à été à officiellement assassiné par l'un des loups-garous de ta famille. Zachary est devenu encore plus fou après avoir perdu sa femme et son fils. Il n'était désormais plus qu'animé par un désir de vengeance contre les loups-garous.
Jusqu'alors, rien que j'ignorais. Je suis au courant de la haine de Zachary pour les loups-garous. On ne prévoit un plan pour exterminer une race si on n'a rien contre elle.
— Il s'est donc allié avec l'Enclave ?
Bella poursuit.
— Zachary voulait trouver un moyen d'anéantir la meute qui avait brisé sa vie. Et l'Enclave a compris bien aisément ses désirs. Il faut savoir qu'elle cherchait secrètement depuis quelques temps déjà de rendre les loups-garous inoffensifs. Tu n'es pas sans savoir les massacres qu'ils ont pu commettre dans le passé. L'Enclave a donc mis en place tout un nombre de règles restrictives contre eux. Ils doivent résider hors des zones urbaines, et ne peuvent pas travailler à La Nouvelle Orléans, à moins que leur malédiction n'ait pas été encore enclenchée. Mais, l'Enclave voulait toujours plus. Elle se sentait menacée par les meutes de loup qui grandissaient de jour en jour.
— Les membres de la direction se sont servi de lui...
Zachary Prior était donc qu'un pion dans cette histoire ?
— Ils ont vu en Zachary Prior une opportunité, parce que pour mettre leur plan à exécution, il leur fallait un humain avec un désir immense de vengeance envers les loups-garous, pour pouvoir engendrer et élever pendant quatorze ans un enfant. Ce genre de profil n'est pas forcément aisé à trouver quand on sait que peu d'entre eux sont au courant du surnaturel. Tu connais le reste du plan.
— ...Échanger un loup-garou et une humaine identique pour qu'elle y diffuse un virus qui les rendrait stériles. Ils n'auront pas pu se reproduire après cela et perpétuer l'espèce, je déclare.
— Pas que. Ils voulaient aussi faire une expérience.
Je fronce les sourcils.
— Laquelle ?
— Il voulait savoir si en plaçant un loup-garou qui n'avait pas encore déclenché sa malédiction dans un monde d'humain, en lui imposant des règles restrictives, il aurait pu vivre comme les humains et oublier sa véritable nature. Parce que tu sais qu'un loup-garou qui n'a pas déclenché encore sa malédiction peut avoir des accès de violence. Sa nature le pousse à devenir ce qu'il est au fond de lui.
Ça fait déjà beaucoup d'informations. Mes pensées fusent dans ma tête.
— Zachary a donc été jusqu'à avoir recours à une mère porteuse, puis donner son véritable enfant à l'Enclave pour un simple désir de vengeance ? je réplique, presque incrédule.
Quel genre de père ferait ça ?
Sûrement quelqu'un d'aussi mauvais que désespéré.
— Oh tu sais, les gens sont prêts à faire n'importe quoi quand tu accrois leur motivation par l'argent, me répond-elle, le regard sombre.
La manière dont elle a pu se construire en tant qu'enfant a dû être déplorable. Je n'arrive même pas à imaginer. Bella n'est pas un enfant non désiré. C'est encore pire. C'est un objet qu'on a commandé pour faire du mal aux autres. Bella est une arme, rien de plus pour son père, et c'en est terrifiant.
— A quoi a ressemblé ton enfance, Bella ?
Ses yeux s'emplissent d'une lueur obscure de haine, qui se mêle à une onde intense de douleur. Pendant une seconde, je pense qu'elle ne va pas se livrer, mais finalement, la colère qui semble l'animer alors la pousse à exprimer ses sentiments.
— Tu veux savoir ? Un véritable calvaire.
Mon cœur se serre dans ma poitrine. Je ressens alors toute sa peine, toute son animosité et sa haine, dans le ton de sa voix qui semble se briser.
— Qu'est-ce qu'ils t'ont fait ? je murmure.
—...
Pas de réponse.
Un petit silence s'en suit alors. Son regard se trouble face à ses souvenirs qui remontent à la surface, et des larmes de rancoeur perlent aux coins de ses yeux.
Ses poings se serrent si fort que ses ongles transpercent la peau de ses paumes. De véritables désirs meurtriers habillent ses yeux humides. Elle tremble.
— Stan m'a dit que tu avais été torturée enfant. Est-ce que c'est vrai ?
Une larme coule de ses yeux remplis de rage et de fureur. Elle sort alors de sa poche un petit bocal de pilules, qu'elle balance sur la table.
— Pourquoi crois-tu que je suis obligée de me gaver d'anxiolytiques tous les jours ? articule-t-elle avec une certaine agressivité dans la voix.
— ...
Aucun mot ne sort de ma bouche. Il n'y avait surement pas de réponse attendue. Bella poursuit.
— Ils ont brisé ma vie. Ils m'ont brisée.
Je sais qu'elle n'exagère pas ses mots. Ils ne sont que des euphémismes pour décrire ce qu'elle a vécu. Je le vois dans ses yeux. La peine semble omniprésente
Je fronce les sourcils et secoue la tête, troublée par sa douleur que je ressens alors. Se servir d'un enfant pour servir ses propres intérêts est déjà inimaginable, alors pourquoi l'avoir torturée ?
— Pourquoi ont-ils été jusque-là ? je demande.
La haine s'intensifie dans ses yeux. Elle ne me regarde plus vraiment. Ses yeux fixent le vide.
— Pourquoi ? Parce que plus l'enfant est jeune, plus son cerveau est encore malléable. On te bourre le crâne, on utilise la douleur pour te programmer par des techniques conditionnement pour que tu ne puisses pas te révolter contre tes créateurs et que tu adhères à leurs idées. C'est un endoctrinement qui se fait dès le plus jeune âge, une emprise totale pour que tu puisses après cela exécuter à la perfection leurs ordres et éternellement leur prêter allégeance.
—...
Mon cœur se soulève. Je reste sans voix face à ce que j'entends. Je suis sidérée. J'ai l'impression qu'en me racontant tout cela, elle revit toutes les atrocités qu'ils lui ont fait subir. C'est inimaginable.
— Tu connais la torture par simulation de noyade ? Eh bien c'est surtout ce qu'ils ont utilisé sur moi. Tu es allongée sur un plan légèrement incliné qui place ta tête plus basse que tes poumons, ils te mettent une serviette sur la bouche et te verse de l'eau. Tu ne peux pas te noyer parce que l'eau ne peut pas rester piégée dans tes poumons, mais par les réflexes que cela réveille, tu as la sensation que tu vas mourrir.
Je suis complètement choquée par ce qu'elle déclare. Je me sens alors très mal à l'aise quand j'ose imaginer la dureté de ce qu'elle a vécu. Les faits sont d'une gravité absolue : on parle de crimes répétés sur mineur.
— Bella...c'est de la pédocriminalité...Ils risques la peine de mort ! je souffle alors, complètement troublée et décontenancée.
La jeune fille secoue la tête, impuissante, le regard animé par un mélange de haine et de dégoût.
— Les gens influents ne sont pas punis. C'est injuste, mais c'est la réalité des choses. L'argent et la réputation achète bien plus que tu ne le penses, articule-t-elle, le regard hostile.
— Mais, personne n'est au dessus des lois.
— Zachary Prior est un membre au placé de la police. Ce n'est pas un hasard s'ils l'ont choisi, répond-elle sombrement.
Je fixe alors la boîte d'anxiolytiques, complètement troublée. Je n'avais pas imaginé qu'elle avait pu vivre une telle violence.
Se multiplie dans ma tête un nombre incalculable de questions.
— Qui t'infligé ça, exactement ? Ton père ? Les membres de l'Enclave ?
— Jusqu'à mes quatorze ans, j'étais maintenue dans mon domicile familiale. Le formatage ont commencé très tôt. Plus tu commences tôt, plus tes chances de réussite sont élevées. Mon père ne participait pas directement aux rites de tortures. Ils faisait venir tout un groupe de l'Enclave présidé par l'un des leurs, et qui dirigeait les séances. Si on peut appeler cela comme ça.
— Présidé par qui ?
— Tu le connais. L'un des leaders les plus influents de l'Enclave.
Je comprends alors de qui il s'agit.
— Alhorn Griffins...je souffle décontenancée.
Bella hoche silencieusement la tête, des larmes de haine et de colère extrême dans ses yeux verts. Elle sert les poings avec une agressivité folle, témoignant une hostilité immense qui se comprend, de toute évidence.
Je ne l'ai jamais senti celui-là. Il m'a toujours fait froid dans le dos.
— Alors, non, Linda, je n'ai pas eu une enfance normale. On m'a formatée, on m'a obligée à devenir toi toi, à me comporter comme toi, à penser comme toi, à parler, à me mouvoir comme toi. Je n'ai jamais pu être moi-même. Je ne sais même pas qui je suis, au fond. Ils ne m'ont pas seulement privé de mon enfance, ils m'ont privé de mon identité. Le but était que les loups-garous ne puissent percevoir aucune différence entre toi et moi.
— Voilà où interviennent de nouveau Jayden et son père, je déclare plus bas.
Bella nous avait révélé quand on était emprisonnés chez les Chasseurs que son père, mon oncle donc, avait participé au programme.
— Le père de Jayden voulait secrètement prendre la direction de sa famille, comme il détestait éperdument ses deux frères. Pour cela, il fallait que son fils en devienne l'héritier. Et, toi seule était sur la liste avant Jayden. L'Enclave avait promis à ton oncle que dans leur plan je finirais par mourir, après avoir pris sa place. Jayden serait devenu l'héritier. Mais, ça n'a jamais arrivé. Ils lui ont menti, ils se sont servis de son père et de lui, parce qu'ils en avaient besoin. Ton sang et le mien leur permet de reproduire l'expérience sur d'autres surnaturels : il n'allait donc pas éliminer leur unique source de pouvoir. Ton oncle est mort avant même avoir pu voir son fils à la place qu'il avait espéré.
Je reste déconcertée par tout ce qu'elle me raconte. Une question subsiste : comment peut-on aller aussi loin sans se faire arrêter ? Comment un réseau criminel peut à se point passer inaperçu ?
— Tu ne sortais jamais ? Tu n'allais pas à l'école ? Personne n'aurait pu s'apercevoir que tu étais en danger ? je demande alors.
Bella lâche un petit ricanement hostile, comme si ma question était stupide.
— C'est de l'Enclave dont on parle, Linda. Ils ont pris toutes les précautions pour mettre à exécution leur plan. Ainsi, je ne sortais pas, je n'avais pas d'ami. Le seul enfant que je côtoyais était Jayden. Le contrat voulait que je m'entraîne avec lui pour gagner en technique de combat de loup-garou. Et puis, on me faisait l'école à la maison. J'avais un précepteur Mexicain, Luis Jimenez. Il a été la seule personne qui m'a témoigné d'un semblant d'amour. Je crois que c'est ça qui m'a aidée à tenir.
J'ai alors une illumination.
— Petit, trapus, bruns, avec un accent hispanique et des lunettes ?
Bella hausse un sourcil, surprise de la description que je lui fais.
— Tu le connais ? s'étonne-t-elle.
— Je l'ai croisé un jour dans la rue. Il m'a prise pour toi. La discussion a été interrompue par Vildred. Je me suis toujours dit qu'il était bizarre.
— Il a été payé gracieusement par l'Enclave pour ses services. Mais, au fond de lui, il a toujours été dérangé par ce que je subissais. Mais, que veux-tu. Il avait besoin comme tous d'argent. Se retourner contre l'Enclave aurait été une alternative mortelle pour lui.
— Tu crois que si j'arrivais à le retrouver, il accepterait de témoigner ce qu'il sait de l'Enclave ?
Bella secoue la tête, sûre d'elle.
— Luis Jimenez est sorti du système une fois son job fait. Quand j'ai eu quatorze ans et que mon père m'a confiée à l'Enclave pour m'échanger avec toi, ils n'avaient plus besoin de lui. Il ne reviendra pas sur cette partie de sa vie. Il n'en gagnera aucun bénéfice.
— Pourtant, j'ai vu l'émotion dans son regard quand il a cru que j'étais toi. Il semblait rempli de culpabilité. Il y a peut-être quelque chose à en tirer.
Bella hausse les épaules.
— Si tu as du temps à perdre, vas-y. Visiblement tu aimes ça, perdre ton temps.
Je hausse mon sourcil, n'appréciant pas vraiment sa dernière réplique. Elle semble rester hostile face à moi.
Je croise les bras sur ma poitrine, la dévisageant du regard.
— Peut-être que j'en perdrais moins, si tu me disais tout ce que tu sais sur l'Enclave, je rétorque froidement.
— C'est ce que je suis en train de faire. Mais, désolée de te décevoir, je ne dirige pas le plan Doppelgänger. Certaines choses demeurent à ce jour encore floues pour moi. Je ne suis pas médium, Linda, ni omnipotente. Ce n'est pas moi qui t'aidera à te venger de l'Enclave.
— Tu ne m'as pas encore tout raconté. Que s'est-il passé à tes quatorze ans ?
Bella hausse un sourcil.
— Ce qu'il s'est passé ? Ils t'ont kidnappée, retiré tous tes souvenirs et nous ont échangées. L'expérience est devenue double : que je propage le virus à la meute, et du côté de mon père qu'il parvienne à changer la nature d'un futur loup-garou pour qu'il ne se transforme jamais. Choses à laquelle il a visiblement échoué, quand on sait que tu t'es montrée incapable de résister à tes pulsions meurtrières.
— Le vampire que j'ai tué allait le faire. Je n'ai pas eux le choix.
Bella lève un sourcil, et me dévisage d'un regard que je n'apprécie pas trop. Elle semble presque manifester du dédain pour moi.
Pourquoi ?
Sûrement parce que c'est mon existence-même qui est à la cause de tous ses maux. C'est parce que j'existe, qu'elle a été formée pour me remplacer.
— Tu aurais pu décider de ne pas céder à tes pulsions. On a toujours le choix, rétorque-t-elle.
— On a toujours le choix ? C'est ce que tu t'aies dit quand l'Enclave t'a ordonné de prendre ma place ?
Bella m'adresse un sourire totalement ironique.
— Alhorn Griffins s'est montré très persuasif. Quand ton abuseur principal, celui qui t'a formatée pendant des années par la torture, te demande de faire quelque chose, crois-moi, tu le fais.
— Et donc ? Ensuite ? Tu t'es retrouvée dans la meute et tu t'es fait passer pour moi ?
— J'ai été élevée pour te ressembler. Ça n'a pas été difficile. Ils sont tous tombés dans la panneau. Sauf Isaac. Au fond de lui, je pense qu'il sentait que la Bella qui se trouvait dorénavant en face de lui n'était plus réellement la même. Il n'avait plus de sentiment pour moi. Hors, l'Enclave trouvait ça assez problématique parce que, tu comprends, je devais lui transmettre le virus de stérilité.
— C'est donc pour cela que tu l'as suivi à l'Enclave ? Tu ne l'as pas lâché parce que selon leur plan, il devait vouloir de nouveau sortir avec toi, pour que tu lui transmettes sexuellement ce virus...
Bella lève un sourcil me témoigner de son mépris.
— Oh tiens, tu n'es pas si stupide que tu en as l'air finalement, ironise-t-elle.
Je ne relève même plus son dédain. Ce qu'elle vient de me révéler m'angoisse au plus au point.
— Et alors...est-ce qu'il a été...?
Je ne finis pas ma phrase.
— Tu veux savoir si il a été contaminé ?
—...
Je ne parviens pas à renchérir. Je reste là, figée sur mon siège, à attendre qu'elle réponde elle-même à sa question. L'angoisse est à son paroxysme.
— ...Eh bien non, félicitations ! Toi et ton cher et tendre allait pouvoir avoir plein de bébés loups-garous ! rétorque-t-elle en levant les yeux au ciel.
Je peux souffler un peu. C'est déjà ça. Il n'est pas stérile, et donc moi non plus.
— Et concernant mes souvenirs, qui me les a retiré ?
Bella fronce les sourcils.
— Tu l'ignores encore ? Pourtant, il n'en a pas quinze des sorciers ou des sorcières spécialisées dans les souvenirs qui ont collaboré avec l'Enclave. Tu lui as même rendu visite. Étonnant de voir que toi et tes chers coéquipiers n'aient même pas remarqué l'évidence sous vos yeux.
— Destiny Silva...je murmure alors.
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