Chapitre 122
— « Elle a été hypnotisée », vient de déclarer Vildred.
La jeune femme nous fixe, complètement troublée et désorientée. Elle se met alors à trembler.
— Laura, de quoi tu te souviens ? lui demande Isaac.
Elle tente de réfléchir, mais en vain. Elle secoue la tête impuissante.
— De rien...je ne me souviens de rien...murmure-t-elle au bord des sanglots, face au trou noir qui s'impose à elle.
Le loup-garou la saisit par le bras pour la faire asseoir sur la canapé du salon, et lui amène un vers de sang. Elle est dans un état de choc, il est évident qu'il s'est passé quelque chose.
— Et concernant cet après-midi, est-ce que tu arrives à te rappeler de ce que tu as fait ? poursuit le loup-garou.
— Je suis allée vers des courses, et puis...
Laura s'arrête, complètement déboussolée, le regard hagard, essayant de repasser sans succès sa journée dans sa tête.
— Tu ne te souviens pas ? demande calmement Isaac, d'une voix qui se veut rassurante.
La jeune femme, entrouvre la bouche, complètement perdue, et bute sur ses débuts de phrases sans aller plus loin, avant de finalement répliquer.
— Je sais juste que je suis allée faire des courses. Mais, il y a quelque chose qu'il me manque...c'est trouble, presque opaque...
La jeune femme semble décidément complètement perdue.
— Ils ont utilisé un sorcier pour l'ensorcelée quand elle faisait les courses, et lui demander de trouver un prétexte pour sortir Linda de la maison, de toute évidence. Ils savaient que le domicile la protégeait. Et, en voulant faire une pierre deux coups, ils ont dû demander à Laura de se tuer une fois Linda écartée de la maison, devine Vildred, les bras croisés.
Ce qu'il avance tient la route. Et c'en est terrifiant.
— Ça veut dire qu'on n'est plus en sécurité ici, lâche Isaac avec inquiétude.
Vildred ne semble pas de cet avis.
— Si, au contraire. Ça veut dire que Linda est intouchable dans cette maison, et que c'est pour cette raison qu'ils essaient de trouver des stratagèmes pour l'attirer en dehors. Il faudra se montrer plus prudent par la suite, rétorque-t-il.
Laura s'effondre davantage sur le sofa. Elle prend sa tête entre ses mains tremblantes, très déstabilisée par ce qu'il vient de lui arriver.
— Je suis désolée. J'aurais dû ne pas vous apporter des ennuis...Linda aurait pu se faire enlever par ma faute, déplore-t-elle.
— Mais, ce n'est pas le cas. Bella a tué le ravisseur, tranche Vildred.
La jeune femme fronce les sourcils, et se tourne vers le Chasseur, se redressant subitement.
— Bella était là ? demande-t-elle incrédule.
— Peu importe. On ne devrait pas perdre du temps à parler d'elle, tranche Isaac.
— Non, pas « peu importe ». S'ils ont Bella, il leur sera plus facile de récupérer Linda. Et s'ils ont les deux, on ne pourra plus les arrêter. Voilà pourquoi il fallait tuer Bella quand on en avait l'occasion, réplique le Chasseur, en m'accordant un regard rempli de reproches et de provocation.
Je fais volte-face et le transperce d'un regard hostile. J'en ai plus qu'assez de ses remarques désapprobatrice. Si je l'avais autorisé à tuer Bella, elle n'aurait pas pu me sauver la vie, aujourd'hui.
— Si tu tentes quoique ce soit contre elle, c'est moi qui tu tuerais de mes propres mains, je rétorque sèchement et froidement, avec une agressivité et une hostilité certaine dans le regard.
— Essaie pour voir, tu ne tiendras pas deux secondes face à moi, articule Vildred en avançant dangereusement vers moi.
Isaac l'attrape par l'épaule pour l'éloigner de moi.
— Ça suffit, Vildred. On laisse Bella en dehors de ça, on a déjà assez bien assez à faire. Et, c'est la dernière fois que je te vois la menacer devant moi, tranche-t-il, en me désignant du doigt.
Le Chasseur lève les yeux au ciel avec désinvolture, nous toisant d'un regard provocant qui me donne envie d'hurler d'agacement. Je déteste quand il est comme ça. C'est cette partie de son absence d'émotion que je hais au plus au point.
— Je ne vois pas pourquoi vous vous efforcez à vouloir l'épargner. C'est un obstacle à abattre. C'est tout ce qu'elle est, rétorque-il.
— Bella m'a sauvé la vie, je m'exclame, sèchement.
— Et moi aussi, je lui ai sauvé sa vie, en l'épargnant et en l'aidant à s'enfuir du Mexique. Sa dette est payée, maintenant on est quitte, lâche Vildred.
— Bella est une mine d'informations. Si j'ai exactement la même volonté que toi de vouloir la voir morte, je suis assez malin pour comprendre que si on parvient à lui soutirer ce qu'elle sait, on aura la fameuse preuve qu'il nous faut concernant l'identité de Linda. Il nous la faut vivante.
— Oh, et qu'est-ce que tu veux faire ? Poster des affiches dans la Nouvelle Orléans, « recherche petite rousse qui accepterait bien gentiment de nous révéler ce qu'elle sait à propos d'une organisation criminelle qui prévoit d'éradiquer une race toute entière ? Brillant, Isaac, rétorque froidement le Chasseur, sur un ton ironique.
Le loup-garou secoue la tête et garde son sérieux.
— Non. On va se débrouiller pour lui tendre un piège pour mettre la main dessus et la forcer à nous révéler tout ce qu'elle sait.
— Et tu m'expliques comment tu vas parvenir à mettre la main sur une fille qui nous a échappé pendant des mois ? s'exclame avec condescendance son interlocuteur.
— C'est toi le Chasseur, pas moi. C'est ton métier, tes compétences, tranche sèchement Isaac.
— Mon métier, c'est surtout de tuer des gens. Un sort qu'elle mérite tout simplement. Tu fais le pari qu'on arrivera à mettre la main sur elle avant l'Enclave. C'est un pari risqué, Isaac. Un pari dont l'issue sera de toute évidence mortelle pour ta gentille petite copine, rétorque Vildred en me désignant du menton.
— On va faire les choses comme je l'entends. On accepte avec plaisir ton aide, Vildred, et on t'en remercie. Mais, cette histoire concerne Linda et les loups-garous. Elle aura le dernier mot, tranche Isaac.
— Dans ce cas-là, je vais vous laisser entre loups-garous ce soir. Bien que je n'ai pas d'émotion, j'ai besoin d'une pause avant de devoir me concentrer sur un plan aussi minable que celui que vous prevoyez, rétorque-t-il avec condescendance, en s'en allant en claquant la porte.
***
L'atmosphère est tendue, ce soir. Vildred est parti et je ne sais même pas s'il va revenir avant la fin de la nuit. Il est vraiment compliqué à vivre en ce moment. Il se montre véritablement rigide et intransigeant. Je crois qu'on ne se comprend pas, lui et moi, en fin de compte. Mais, je comprends aussi pourquoi il veut à ce point tuer Bella. Quelque part, c'est une honte pour lui que la fille qu'il a traquée pendant des mois est toujours en liberté. La tuer laverait son honneur auprès des autres Chasseurs. Vildred ne vit que pour l'honneur et l'argent. Rien d'autre ne compte quand on n'a pas d'émotion, et les deux concepts demeurent intimement liés.
Mais, j'ai besoin de Bella. Elle est la clé de tout cela. De toute évidence, je ne suis pas insensible au geste qu'elle a eu ce soir envers moi. Elle m'a sauvé la vie. Et puis, si elle est restée à La Nouvelle Orléans, c'est bien pour une raison, et je veux la découvrir. Je dois trouver un moyen d'entrer en contact avec elle, mais je sais très bien que ce n'est pas une démarche qui plaira à Isaac et Vildred. L'un veut la tuer, l'autre la séquestrer. Moi, je ne veux rien de tout cela. Je veux gagner sa confiance pour qu'elle me révèle ce qu'elle sait sur l'Enclave.
Laura, quant à elle, n'était pas bien à cause de l'hypnose qu'elle a subi. Elle est partie se coucher, sans manger.
De mon côté, je vais bien. Le coup que j'ai reçu à la tête était brutal, mais de toute évidence sans véritable incidence. J'ai eu de la chance. Je range alors quelques affaires dans ma chambre, pensive. Je ne fais que de me repasser la soirée en boucle dans ma tête. Bella ne quitte pas mes pensées. J'essaie de comprendre les raisons de tous ses agissements qui semblent si paradoxales. Être encore dans l'incertitude la concernant m'est insupportable. Il faut rapidement que je trouve un moyen pour rentrer en contact avec elle.
Je range quelques affaires dans ma penderie après avoir fait une machine à laver. Je suis interrompu quand Isaac frappe à ma porte déjà entrouverte. Je me tourne rapidement vers lui.
— Vas-y rentre.
— Je ne te dérange pas trop ? me demande-t-il.
— Non, pas du tout. Je rangeais quelques trucs.
Isaac hoche brièvement la tête et va s'asseoir sur mon lit, m'adressant un regard légèrement préoccupé.
— Est-ce que ça va ?
je hausse légèrement mes épaules.
— Ça va. Vildred me fait juste tourner en bourrique. Je me dis que la cohabitation tous ensemble va être riche en rebondissements, je rétorque, le visage un peu fermé, sur un ton qui manifeste mon agacement envers le Chasseur.
Rien que d'évoquer son nom me donne des poussées d'urticaire.
Isaac me saisie par les deux épaules pour m'obliger à m'asseoir à mon tour sur le lit.
— Tu devrais te reposer et arrêtez de te prendre la tête, me répond-il.
Je lâche un petit soupir et exécute des rotations des épaules pour essayer de me détendre.
— Tu crois qu'il va la tuer, s'il tombe dessus ?
Isaac réfléchit quelques secondes avant de secouer la tête.
— Il ne peut pas prendre le risque de se brouiller avec toi. Ce serait bien trop handicapant pour lui : il veut que tu le vendes en héros aux deux meutes de loups-garous. Il en a besoin pour augmenter ses tarifs. Il ne peut pas se permettre de te mettre à dos.
Il a raison.
Je m'allonge alors dans ses bras, ma tête posée sur son torse. Il passe délicatement sa main dans mes cheveux pour m'apaiser. Ça me fait un peu de bien.
— Pourquoi Bella est restée ici ? Tu crois qu'elle prévoit quelque chose ? je finis par lui demander, perdue dans mes pensées.
— Je pense que tu devrais arrêter de trop penser à Bella. N'oublie pas qu'elle a à plusieurs reprises tenter de t'éliminer.
— Mais, tu aurais vu son regard ce soir...Elle avait l'air si seule et désespérée...je souffle, décontenancée.
Isaac me sert un peu plus fort dans ses bras, continuant ses caresses sur mes cheveux.
— Je t'assure qu'elle ne mérite pas ta pitié. Elle est mauvaise.
Je me redresse alors, me détachant de son étreinte.
— Peut-être pas tant que ça finalement. Elle a eu une enfance et une adolescence si chaotique...
— Toi aussi, tu as eu une adolescence désastreuse. Et pourtant, tu ne fais pas le mal autour de toi. Elle ne se contente pas juste de faire le mal, elle est le mal, rétorque Isaac, avec une certaine hostilité dans le regard.
Je secoue la tête
— Je te trouve dur. Tu penses cela parce que tu lui en veux. Mais, je comprends.
En soit, je sais qu'il est légitime de penser cela. Je peux comprendre qu'il éprouve autant de haine à son égard.
— Ce n'est pas ton cas ? Tu ne lui en veux pas d'avoir briser sa vie ? me questionne le loup-garou, en fronçant légèrement les sourcils.
Je hausse les épaules, plongée dans mes pensées.
— Je ne pense pas qu'elle en soit la fautive. L'Enclave a brisé ma vie. Elle, elle n'a été qu'un dommage collatéral.
Isaac secoue la tête.
— Non, elle n'a pas été que ça. Je te rappelle qu'elle s'est alliée aux vampires pour t'éliminer.
— Peut-être. Mais, elle m'a sauvé la vie, ce soir. Je ne peux pas négliger ce détail.
— C'est vrai, mais tu ne peux pas non plus en déduire qu'elle est de ton côté. Bella ne défendra que ses intérêts. Et les siens ne sont pas les tiens.
Je hoche succinctement la tête et me laisse retomber dans ses bras si apaisants. J'aime de plus en plus être près de lui. Tout cela me semble si naturel, comme si cela coulait de source, comme si on avait toujours été ensemble. Je n'en ai aucun souvenir, mais quelque chose d'étrange en moi me fait sentir subtilement que tout cela n'est pas nouveau. Mais, en dépit de tout, je me sens bien.
— Est-ce que tu veux rester ici, ce soir ? je lui propose alors.
— Rien ne me ferait plus plaisir, me répond-il en entremêlant délicatement ses doigts dans mes cheveux.
Ensorcelée par ses caresses si douces, je ferme les yeux, et commence à me laisser partir. Je suis si bien, je n'ai besoin de rien d'autre à ce moment donné. Je suis à deux doigts de m'endormir quand une image soudaine traverse mes pensées.
L'image d'un vampire.
Mes yeux s'ouvrent subitement et mon cœur fait un seul tour dans mes veines. Mes pensées se mettent à fuser.
La voilà, la solution que je cherchais.
Les vampires sont la clé de tout cela.
Ils ont collaboré pendant des semaines avec Bella. Ils savent donc sûrement comment rentrer en contact avec elle.
Je me tourne doucement vers Isaac. Il somnole, les yeux fermés, continuant d'une manière endormie de me caresser les cheveux.
Un pincement au cœur me fait frémir.
Je sais qu'il n'acceptera jamais d'aller parler avec les vampires, comme ils les détestent.
Pourtant, je sais que c'est la seule solution dont je dispose actuellement, si je veux avancer.
Je ne peux donc pas lui en parler.
Je vais devoir agir seule, dans cette situation. C'est aussi l'occasion de me prouver que je suis capable d'accomplir quelque chose par moi-même. Mais, je culpabilise déjà de devoir le cacher à Isaac.
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