Chapitre vingt-neuf
Bonne lecture !
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Octavius se figea au milieu du sentier. Derrière lui, le soleil continuait de se coucher tandis quril avançait en direction de la plage, les pieds douloureux à force de marcher.
Il avait décidé de retourner se promener un peu avant de retourner à l'hôtel, simplement pour chercher son courage. Il avait pris sa décision, son téléphone et le ticket de caisse numéroté étaient dans sa poche, et il attendait simplement le bon moment.
Mais il s'était arrêté, juste avant d'arriver à la plage. Devant lui, alors qu'Athy avançait joyeusement, bien plus en forme qu'au matin, il voyait des choses. Ce n'était pas inquiétant, ce n'était même pas une mauvaise chose : il voyait à nouveau. Des formes, des personnages, des morceaux de phrases des idées. Là, il imaginait un homme qui se baladait sur une plage. Un paysage nuageux, une mélancolie sincère, des traces de pas sur le sable.
Octavius voyait des choses, son imagination revenait petit à petit.
Quand la page blanche s'était imposée à lui, il avait cessé de penser à toutes ces possibilités, toutes ces idées qu'il pourrait coucher sur le papier, toutes ces histoires qui semblaient s'imposer d'elles-mêmes, tous ces endroits qui l'inspiraient.
Il avait perdu son inspiration en même temps que l'utilité de ses doigts, et il en aurait pleuré de soulagement.
Athy aboya au loin, et Octavius s'avança vers le bord de la falaise avec une respiration si claire qu'elle lui donnait le tournis. Son esprit était plein, et pas d'idées noires comme au début. Il était revenu en pensant que rien ne pouvait le sauver, que sa vie était tout simplement derrière lui et qu'en vérité il n'avait besoin de rien, simplement d'attendre que le temps passe.
Il n'avait pas fait le deuil de sa mère. Il n'avait pas réussi à se faire à la fuite de son père. Et son dernier support avait disparu avec l'appel qui lui avait donné la date des funérailles.
Mais à présent, là tout de suite, il respirait. Parce qu'il pouvait recommencer. Il pouvait continuer d'écrire, et s'il fallait le faire sous un faux nom, alors ce n'était un problème. William Gauthier était prêt à lui redonner une chance – qu'il ne méritait sûrement pas, mais il s'en fichait pas mal –, et même si rien ne lui disait qu'après tout ce temps cela marcherait, qu'après des années leurs sentiments pourraient revenir, qu'après une vie entière ils pourraient se retrouver réellement ; et bien c'était tout de même une chance.
Il imagina un titre, des couleurs, des dialogues, et ça lui fit du bien.
Derrière lui, Athy aboya de plus en plus fort, jusqu'à même venir mordre son pantalon pour le tirer vers elle. Il fronça les sourcils, soudain bien conscient, et s'écarta naturellement du bord pour aller vers le banc le plus proche. Quand elle se calma un peu, il s'accroupit à sa hauteur.
– Qu'est-ce qui se passe ? T'as mangé avant de partir pourtant et –
Un bruit attira son attention, et quand il se retourna ses yeux s'écarquillèrent. À l'endroit exact où il se tenait quelques secondes plus tôt, la terre était en train de s'effondrer dans la mer et son perchoir disparut bientôt en un instant.
Il regarda le trou comme s'il n'y croyait pas, et finit par s'asseoir sur le sol en clignant des yeux.
– Je crois...., souffla-t-il en baissant le regard le regard vers sa chienne. Je crois que tu viens de me sauver.
Il resta ainsi sans bouger, en se demandant sans pouvoir s'en empêcher ce qui se serait passé s'il avait été seul. S'il ne s'était pas déplacé.
Il respira un grand coup.
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– Octavius ?
La voix d'Alexandre sonnait surprise. Il avait dû rester bloqué quelques secondes devant l'écran avant de décrocher.
– Alex. Je.. t'es occupé, là ?
Il l'entendit poser quelque chose, puis plusieurs bruits de papiers froissés suivirent.
– Non. Non, pas vraiment. Pourquoi, il y a un problème ? Tu as, je veux dire, tu as besoin de –
Il avait l'air de ne pas savoir quoi dire. Alexandre était ainsi, il s'était proposé le premier pour éditer son livre, et à présent il était encore là, à se demander si Octavius avait besoin d'aide. Avait besoin de soutien.
– Ça a été l'enterrement ?
– Tout va bien, fit-il en regardant le ciel.
Il entendit un hoquet de surprise. Sur le coup, il se sentit fier : c'était sa phrase, celle qu'il lui répétait à chaque conversation pour lui rappeler qu'il avait encore une vie à voir. Tout va bien.
– Octavius ?
Alex avait l'air inquiet, alors il inspira et sourit :
– Ça va. Vraiment, ça va. En fait, je t'appelais pour...
Il devait s'expliquer correctement. Il devait essayer de lui présenter les choses de sorte qu'il comprenne qu'Octavius se sentait mieux. Pas bien, mais mieux.
Il avançait doucement.
– Je crois que j'ai quelque chose en tête.
– ... tu as quelque chose en tête ?
Il paraissait suspicieux, comme s'il ne comprenait vraiment pas ce qu'il entendait par là. Alex lui posait la question à chaque fois qu'ils se parlaient, il lui demandait s'il y arrivait, si ça allait mieux, s'il pouvait créer quelque chose. Mais là, il devait très certainement essayer de ne pas se faire de faux espoir.
– Quelque chose en tête. Une idée. J'ai l'impression de pouvoir le faire.
– C'est vrai ?
Cette fois, c'était sorti plus vite. Cette exclamation releva la tête de sa chienne qui la pencha ensuite sur le côté. Il lui caressa le crâne.
– Je ne suis pas encore certain de la trame, et j'ai juste un fil conducteur mais... mais je crois vraiment que je peux le faire. J'ai vraiment besoin d'évoquer quelques trucs, quelques souvenirs et... et j'ai l'histoire parfaite pour. Ça va mettre un moment, et ça sera sûrement pas le meilleur –
– Octavius, l'interrompit Alex. C'est génial. Vraiment. On s'en fiche s'il n'est pas parfait : on n'a même pas besoin de le publier si ça peut te rassurer. Écris juste.
Quand il raccrocha, ces mots résonnèrent encore un peu alors qu'il fermait les yeux tandis que sa tête partait en arrière.
Écris juste.
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Des bisous !
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