Après mes révélations, je me dégage de l'emprise de Quatre, me dirigeant sans réfléchir vers la sortie. Tentant de rassembler mes idées, même si à cet instant, j'ai l'impression de perdre la tête et la sensation que le sol est en train de se dérober sous mes pieds. Sans parler de cette foutue boule dans le creux de l'estomac qui me fait prendre conscience que je viens de perdre le point d'ancrage qui me relie au monde réel.

– Addison, crie Quatre, après m'avoir couru après alors qu'il m'attrape le bras, me forçant à lui faire face. Et si t'essayais de te calmer une minute,  son regard posé sur moi, inquiet et soucieux.

– Je... ne trouvant plus mes mots, plongeant mon regard dans le sien. Je ne peux pas faire ça. Pas maintenant, secouant ma tête de droite à gauche. Je dois y aller, dis-je, ne lui laissant pas le temps de me retenir cette fois-ci. 

Je retourne directement au dortoir. Tandis que mes camarades de chambrée dorment encore, je me dirige vers les douches. Je retire mécaniquement mes fringues et me mets sous le jet, ne laissant couler que l'eau froide le long de ma colonne et sur tout le reste de mon corps, me laissant submerger un moment, alors que prise d'un sentiment de solitude et de tristesse inexpliqué, je me mets à pleurer sans pouvoir me contrôler. Ni même m'arrêter. Puis je sors de la douche. Je m'essuie et prends des fringues propres dans la valise rangée sous mon lit et m'habille, puis je finis par m'asseoir sur mon lit, ma tête calée contre le mur, mes genoux pliés et remontés contre ma poitrine, mes bras ballants sur les côtés, repensant à ce qu'il vient de se passer.

J'ai beau retourner ça dans tous les sens dans mon esprit de divergente. Il n'y a aucune explication logique ou rationnelle à ce que je viens d'apprendre ou de vivre. J'ai bien entendu ce que m'a dit cette femme. J'étais dans l'un de ses souvenirs. Ça ne se pouvait pas. C'est impossible. Et quand bien même était-ce le cas. Qu'est-ce que ça signifie concrètement ? Qu'est-ce que je suis censée comprendre ? Et si le sérum ne m'induit pas dans une simulation, pourquoi ai-je eu cette réaction totalement controversée ? Tout ça n'a pas de sens. Se peut-il que les rumeurs que l'on raconte sur Elsewhere soient fondées ? Qu'elle est capable de faire des choses qu'elle ne soupçonne pas. S'il s'agit réellement de moi. Comment pourrais-je contrôler quoi que ce soit alors que j'ai été incapable de le faire après avoir avalé ce fichu sérum ?

– Ady. Salut, se fait entendre alors que je sens qu'on s'approche de moi. Hey, des doigts claquant devant mes yeux. Addison, sentant ensuite une main posée sur mon épaule qui me secoue légèrement. Est-ce que ça va ? sentant qu'on me regarde alors que je relève soudainement ma tête, une voix me rappelant à l'ordre.

– Christina, dis-je, me redressant subitement en voyant mon amie, revenant machinalement à la réalité. Je vais bien. Désolée, je me suis perdue dans mes pensées.

– Je vois ça, lance-t-elle, un léger sourire sur les lèvres. T'inquiète pas. C'est bientôt fini. Plus que quelques jours et tout ça là, dit-elle, scrutant les alentours en faisant de grands gestes. Ça appartiendra au passé.

– Quoi ? relevé-je, surprise, ne sachant pas où elle veut en venir. De quoi tu parles ?

– L'épreuve finale, répond-elle, un fin sourire sur le visage.

– Dans trois jours, on passe l'épreuve finale et on saura enfin si on a réussi le test pour devenir officiellement des audacieux, poursuit Will qui vient de s'asseoir près de Christina, un sourire fier sur le visage.

– On dirait que ça t'est complètement sorti de la tête, se redresse Al, m'observant d'un air légèrement inquiet.

– Oui, je... dis-je, fronçant les sourcils, ne sachant pas quoi répondre. Je crois que la fatigue mentale est en train d'avoir ma peau, tenté-je de plaisanter, alors que je leur lance un faux sourire pour être convaincante.

– Alors reprends toi parce que les entraînements se continuent, poursuit Chris. D'ailleurs, regardant l'horloge au dessus de nos têtes. On va finir par être en retard si on se bouge pas les fesses, sortant précipitamment de son lit. 

Je les regarde se dépêcher tout en se bousculant. Al qui bouscule l'épaule de Will, alors que celui-ci heurte le front de Christina. Je dois bien reconnaître que cette légèreté m'arrache un faible sourire. Une fois prêts, ils quittent le dortoir. Je passe une dernière fois de l'eau fraîche sur mon visage avant de les rejoindre.

Nous nous retrouvons à la salle d'entraînement afin de peaufiner nos combats, malgré que nous avons déjà passé l'épreuve physique et que pour la plupart, nous avons réussi. Éric dit que ça nous permet de ne pas nous relâcher et qu'il faut être prêt à toute menace et toute éventualité. Alors on s'exécute sans réfléchir, ni même se poser de questions d'ailleurs.

Après quasiment trois heures à se battre les uns contre les autres, nous avons droit à deux heures de liberté. Je suis la première à quitter la salle, sans dire un mot, n'attendant personne. Je reprends une douche rapide, mets des fringues propres et me dirige ensuite sur le toit de mon immeuble. Celui où j'aime me retrouver afin de me ressourcer, décompresser et me calmer. Et dans ce cas, retrouver un semblant de normalité.

Je suis assise sur le rebord, les pieds qui pendent dans le vide alors que je les balance mécaniquement. Une main posée de chaque côté de mes cuisses.

Un courant d'air vient me caresser le visage. Je penche alors ma tête en arrière, inspirant profondément, me laissant happer par la douce fraîcheur de l'effleurement du souffle sur ma peau.

Après plusieurs minutes, Quatre m'a rejoint. Il ne dit rien. Il me sourit affectueusement avant de s'asseoir à mes côtés, ses doigts effleurant les miens. Je le laisse faire, un sentiment de sécurité me parcourant l'échine.

Il tourne ensuite son visage devant lui, scrutant l'horizon, tandis qu'après deux minutes, j'attrape sa main dans la mienne, tournant mon visage vers le sien. Plongeant ensuite mes yeux dans les siens alors que la culpabilité vient subitement de m'envahir. Je le fixe un moment avant d'arriver à lui murmurer quelques mots :

– Je suis désolée.