La douleur, encore une fois. Hamza avait mal. Ses paupières papillonnèrent le temps que son esprit se remette du choc qu'il avait reçu. Quand il eut les yeux bien ouvert, il ne reconnaissait pas la chambre dans laquelle qu'il avait été enfermé depuis des semaines. Il était dans un endroit sombre et humide. Il jura :

- Merde, cette fois je suis réellement dans une prison.

- Je ne vous pensez pas injurieux!

La voix de Toma détonna dans l'enclos d'Hamza. Les yeux à peine habitués à la pénombre, il découvrit le prêtre gigantesque contre un mur de la salle. Assis sur un sol bien crasseux, il voulut se lever mais découvrit qu'il était entravé par des cordes bien serrés, glissés dans des anneaux de fer qui était fixés dans le mur à l'opposé de Toma. Cet harnachement l'empêchait de se mouvoir. Pire il s'aperçut qu'il était pratiquement nu. Il ne lui restait qu'un seul pan de tissu qui lui couvrait ses parties intimes. Pris de panique, Hamza s'agita encore plus et enjoint son cadet :

- Toma! Détache moi!

- Non... D'abord il va falloir que vous retrouviez la voix de la Sainte Lumière.

Toma afficha un sourire bien malsain pour Hamza.

- Quoi? Non... Ce n'est pas ce que je veux, Je l'ai déjà dit à Benedictus! Vous ne pourrez pas me faire revenir vers elle.

- Ha oui? Et pourquoi? Si j'emploie la manière forte? Un contrôle mental devrait arranger cela.

- Tu crois que cela suffirait? Tu es si naïf ! Même si tu fais cela, la Lumière me m'accepterait pas ainsi.

Hamza chercha dans la pénombre une deuxième silhouette, sans succès.

- Où est Benedictus d'abord?

- Il n'est pas là... répondit Toma

Il resta muet quelques instants avant de reprendre :

- Il me suffirait de vous torturer d'une autre façon...

Il se redressa et commença à faire les cents pas.  Pendant que son gardien était occupé à réfléchir, Hamza essaya de se défaire de ses liens, en vain. Les cordages étaient bien trop serrés et complexes à défaire. Soudain il se sentit abattu. Lui qui pensait avoir l'ascendance sur le plus jeune, se retrouvait maintenant dans une situation bien plus dangereuse de tout point de vue. Pourquoi l'avait il déshabillé ? Pourquoi l'avoir attaché ? Et surtout il semblait que tout ceci était l'initiative de Toma et non pas de Benedictus.

- Il n'est pas au courant n'est ce pas? Demanda Hamza comme une évidence.

Toma se braqua immédiatement à la question. Il se rongea les ongles de nervosité, puis acquiesça tout en venant vers lui.

- Il n'est pas au courant, il ne prends aucune initiative pour vous sauver, il se fiche de vous... Alors que moi je vais le faire, je vais vous sauver des ombres!

Perplexe, Hamza le regarda venir vers lui. Il n'arrivait plus à savoir si Toma était effectivement bien ici pour le transformer et le forcer à revenir vers la Lumière, ou bien s'il y avait autre chose derrière cette mascarade. Toma le surplomba tout en l'inspectant de ses yeux. Puis il s'accroupit à son niveau.

- Benedictus a d'autres chats à fouetter, voilà pourquoi il n'est pas ici, voila pourquoi il ne sait rien de tout ceci, murmura t'il.

Hamza frissonna à ses mots et surtout au comportement étrange du jeune prêtre.

- Wilfried m'a dit que vous étiez un homme bon, un ange. Moi je ne vois qu'un démon devant moi. Celui qui a arraché mon frère adoré à la vie.

- Non... répondit Hamza, Non, c'est la guerre, le fléau, Arthas qui nous l'ont arraché, aussi bien moi et que toi. J'ai autant de chagrin que toi Toma.

Toma releva ses yeux vers ceux d'Hamza. Ce dernier crut voir une tristesse infinie, avant que la colère ne reprenne le dessus.

- Vous m'avez arraché mon frère bien aimé, celui que j'admirai tant, celui que j'aimais de tout mon cœur, celui qui tenait tête à notre père. Il était exemplaire au sein de notre famille, et vous, vous l'avez trainé dans l'enfer de la luxure! AVOUEZ!!!

Hamza eut un mouvement de recul au mot prononcé par Toma. Il le regarda hagard, peu sûr de celui qui se trouvait en face de lui.

- Non, répéta Hamza, Sa transformation a eu raison de lui. Sa perversité s'en ai trouvé décupler quand il a été un chevalier de la mort. Et ...

Hamza se mordit les lèvres, ressassant ses souvenirs. Akan était devenu un homme plus sûr de lui, et l'amour qu'il portait à Hamza, avait éclaté au grand jour.

- Ton frère, m'aimait depuis toujours, Murmura Hamza avant de reprendre :

- Quand il était Paladin, il n'avait jamais su me le dire. Une fois devenu Chevalier de la mort, il s'est senti pousser des ailes et me l'a avoué... Et moi je...

Hamza ne termina pas sa phrase. Dans son esprit, il revit la lettre annonçant la mort de Tarenn. Et Akan qui était prêt de lui à ce moment là. Lui qui l'aimait de toute son âme et de tout son cœur. Hamza s'était laissé aller dans les bras de son ami.

- L'avez vous seulement aimé en retour!!?? gronda Toma

Le prêtre Ombre ferma les yeux devant l'évidence. Il plissa les yeux. Akan s'était trouvé au bon moment et au bon endroit pour consoler Hamza. Mais s'il n'y avait pas eu tout ceci, Hamza n'aurait jamais vu à quel point Rohakan l'aimait, il serait resté au près de Tarenn, son seul et unique véritable amour.

Il ouvrit péniblement les yeux. Il devait faire face à la vérité et la dire à Toma, son frère, qui attendait une réponse.

- J'ai aimé ton frère, oui, mais pas d'amour, pas comme lui pouvait m'aimer. Il était mon ami, il a même été plus que cela, je ne te mentirai pas. Nous avons été amant, il m'a réconforté après la perte de celui que j'aimais. Mais...

Encore une fois, Hamza se mordit les lèvres. La réponse était maintenant si évidente. Il s'était servi d'Akan comme d'un bouche trou.

Soudain une main se plaqua contre la gorge d'Hamza. Il eut le souffle coupé, et l'étau continuait de se resserrer.

- Tommmaaa, geint Hamza manquant de plus en plus de souffle.

- Silence, SILENCE, je ne veux plus vous entendre! Comment, Comment avez vous pu vous servir de mon frère comme un vulgaire mouchoir!

- Tommmaaa, je t'en prie, ton frère comptait beaucoup pour moi!

- Hier! Vous avez dit que je lui ressemblais, que vous ne pourriez que tomber sous le charme! C'était ... C'était des mensonges!?

Hamza se crispa encore plus. Son Ombre lui avait fait dire n'importe quoi...

- Écoute moi Toma, laisse moi t'expliquer! Je... n'arrive plus à respirer, arrête ceci...

La pression sur son cou était tellement forte, qu'il était sur le point de perdre connaissance. Il allongea son bras pour intercepter celui de Toma dans un ultime effort.

- Tommmaa, gémit Hamza

Soudain la pression disparut. L'air entra dans les poumons d'Hamza lui provoquant une douleur et une sensation de nausée. Il toussa tout en reprenant sa respiration tant bien que mal. En conséquence de cette étreinte, de la bave coula au coin des lèvres. Hamza n'arrivait plus à aspirer sa salive. Il avait frôlé la mort, et cette mort avait le visage de Rohakan.

Un pouce cueillit le surplus de salive qu'Hamza avait produit et se porta jusqu'à la bouche de Toma. Il le suçota longuement sans dire un mot tout en regardant Hamza. Puis il sourit.

C'est un fou! murmura son Ombre

Tiens, tu te pointes! tu ne pouvais pas venir m'aider avant ? demanda Hamza à son Double qui s'était tapis dans son esprit pendant tout ce temps.

Il est fou de toi !!! reprit son Double.

Hamza le regarda de nouveau. Toma prenait du plaisir à lécher son pouce qui était auparavant couvert de sa bave.

un baiser par procuration? rit l'Ombre

- Qu'est que tu fais ? Demanda Hamza incertain de vouloir entendre la réponse.

Les yeux de Toma le transperça de toute part.

- Je me bats contre moi même, contre ma nature. Vous êtes là devant moi, attaché, prisonnier. Je ne peux espérer plus... Celui que j'ai tant admiré derrière les pierres de la Cathédrale. Derrière mon frère... Je peux le toucher, le caresser, le prendre s'il faut.

- Toma? Tu divagues ... grogna Hamza.

-  Ai je l'air de divaguer... demanda le cadet s'ancrant encore plus dans le regarde d'Hamza

La main où il avait sucé son pouce longuement, se détacha de sa bouche et vint se poser délicatement sur le torse du blond. Il remonta tout en douceur vers l'un des tétons exposés à son regard. Hamza frissonna, de peur mais aussi de désir. Ses souvenirs avec Akan se mêlèrent au présent. Et le visage de son ami se superposa sur celui de son frère. Il plissa les paupières, incertain de ce qu'il pouvait se passer. Toma lui pinça brutalement son bouton rosé, gonflé par les caresses.

- Toma, cesse ceci... geint Hamza tout en essayant de retrouver la raison

- Cesser tout ceci, alors que je vous ai à ma merci? Alors que je pourrais abuser de vous, tranquillement.

Hamza paniqua, les images du viol sous les arcades de la ville lui revint en pleine figure. Il ne voulait pas que cela se reproduise, car maintenant plus personne ne pourrait le sauver. Il s'agita et cria pour faire revenir à la raison le jeune prêtre

- Toma! Tu n'es pas de ce genre là! Ce n'est pas ton objectif! Rappelle toi, tu dois me sauver des Ombres!

La main arrêta de torturer son téton brusquement. Le regard de Toma changea, comme s'il revenait à la raison. Il grimaça, se prit la tête et puis grogna des mots incompréhensibles.

Quelque chose cloche chez lui... dit son double

je sais, je le vois, il est comme moi... Comme s'il avait une double personnalité, comme si... Il était en train de devenir comme moi. Comme...

Hamza se revit au tout début de sa transformation. Quand son Double prenait possession de lui. Toma se comportait comme il le faisait au Norfendre. Les airs absents, les propos qui n'avaient pas de sens, l'impression de devenir fou...

- Je... balbutia Toma

Il se recula doucement, tout en se frotta le front.

- Toma... dit doucement Hamza, Toi aussi, il faut te sauver...