Toma se rongeait les ongles. Il faisait les cent pas dans le couloir menant à la chambre de son prisonnier. Il avait déjà fait un premier faux pas avec lui. Il ne voulait pas donner son identité, tout du moins pas aussi rapidement. Mais la scène à laquelle il avait assisté la veille l'avait quelque peu m'y en transe.

Il s'arrêta brusquement quand les souvenirs de la scène lui revint en pleine figure.

Ce matin là, il avait décidé de parler avec son prisonnier. Il voulait déjà lui informer que Benedictus "s'occupait de son cas". L'archevêque avait apparemment quelques pistes pour essayer d'exorciser Hamza des Ombres. Mais il fallait amener cela avec bienveillance. Hamza était sans doute acquis aux Ombres, mais d'après Benedictus, il y avait une possibilité pour que celui ci cède et revienne vers la Lumière, ce que voulait Toma. Il fallait juste trouver ce qui pourrait ramener le prêtre ombre vers la Sainte Lumière. C'était en quelque sorte la mission du jeune homme. Mais ce dernier n'avait que très peu parler avec Hamza. Il abaissait toujours sa capuche, de peur d'être reconnu, et ne déposait que des plateaux garnis de nourritures pour que le prisonnier puisse manger. Il ne s'attardait jamais.

Il y avait aussi une autre raison. A chaque fois qu'il venait, Hamza avait à ses cotés une Ombre. Une Ombre qui terrifiait Toma. Il avait pourtant combattu plus terrifiant que cette chose, mais celle ci était beaucoup plus mystique, et suinté l'amertume et l'antipathie.

Quand il était entré dans la chambre ce matin là, il s'attendait à trouver Hamza dans son lit. Il était généralement couché, la tête coté mur, comme s'il boudait. Sauf que cette fois, il le trouva à terre. La tête posée contre le mur, les jambes écartés, les yeux brillants, il murmurait des mots incompréhensible. Sa respiration saccadée indiquait à Toma une sorte de malaise. Jusqu'à ce qu'il comprenne.

L'Ombre au dessus de lui, lui caressait les parties intimes. Il y avait même une bosse qui se formait sous la robe. Hamza était au bord de l'extase.

Toma frissonna à cette vue. Il courut poser le plateau sur la table habituelle, et se pencha sur Hamza.

L'Ombre feula brusquement, mais Toma n'en tint pas compte. Il récita une prière à la va vite, suppliant la Lumière de venir illuminer ce lieu. Une explosion étincelante éclaira la pièce et fit disparaitre l'Ombre.

- Tarenn... souffla Hamza les yeux fermés

- Frère Hamza, revenez à vous!!

Alors que Toma pensait prendre appui sur le sol, il posa sa main sur la bosse émergente d'Hamza. Ce dernier gémît encore plus fort. Toma se mit à rougir quand il découvrit qu'il ne s'était pas posé au bon endroit. Mais au lieu de s'enlever, il agrippa un peu plus la protubérance du prêtre ombre, la serrant dans sa main pour découvrir que ce dernier était sur le point de jouir. Excité par une telle vue, Toma perdit raison. Il commença à caresser le sexe de son ainée avec plus de vigueur qu'il ne le voulait.  Il avait devant lui un homme qu'il admirait en secret et qui était prêt à prendre son pied avec lui sans qu'il ne le sache. chaque attouchement faisait gonfler un peu plus le sexe d'Hamza. Son souffle court s'accélérait un peu plus, et Toma commençait à être dans le même état que lui. Il sentait son désir grandir en lui et son pénis pointé légèrement.

Mais à ce moment là, les yeux d'Hamza s'ouvrirent. Toma se statufia, il prit peur et se défit de sa tache. Hamza trembla et avança une main pour toucher la joue de Toma puis il l'effleura doucement. Le jeune prêtre, d'un léger penchent de tête, accompagna cette main si frêle.

- Rohakan? Je ne rêve pas? Tu es revenu...

Le visage de Toma se tordit au nom de son frère ainé. Il se mordit ses lèvres d'angoisse. Hamza avait prononcé le prénom de son frère, ce n'était pas lui qu'il attendait... Bien Sur puisqu'ils ne se connaissaient que de vue.

Il eut le cœur lourd, car au fond de lui, cela lui faisait mal qu'on puisse le confondre avec son grand frère. Il est vrai qu'ils avaient tous les deux le même visage. Ils ne pouvaient pas renier qu'ils avaient été de la même fratrie. Mais Toma n'était Rohakan... Pour bien des raisons.

Soudain Hamza se précipita dans ses bras. Il se plaqua contre lui, comme s'il avait peur de le perdre, pressant ainsi son érection contre son bas ventre. Un long frisson parcourut le corps du jeune Godfroy. Alors qu'il voulut le prendre dans ses bras à son tour, le discernement revint dans son esprit. Il ne voulait pas être pris pour Rohakan. A contrecœur il répondit :

- J'ai... bien peur que vous me confondiez ,

Hamza se figea à son tour. Il se détacha et lui fit face. Il leva les yeux vers lui.

- Vous n'êtes pas Rohakan, lâcha Hamza.

- Je ne suis pas Rohakan... répondit il amer. 

- Qui êtes vous? Osa Hamza

Toma se redressa de toute sa hauteur, attrapa ses cheveux ballants pour les envoyer derrière ses épaules, il inspira fortement. Il fallait qu'il ai à tout pris l'ascension sur son acolyte pour la suite de sa mission. Il ouvrit la bouche et d'une voix roque il répondit :

- Je m'appelle Toma, comme vous le savez, et je suis le frère cadet de feu mon frère... Rohakan Godfroy.

A ces mots, Toma crut qu'Hamza allait perdre connaissance. Il s'affaissa brusquement à terre, ses yeux balayant de gauche à droite le sol, paniqué. Puis il releva la tête vers Toma sans un mot.

- Je suis désolé... De ne pas être celui que vous vouliez...

Et sans dire autre chose, il se retourna et partit en vitesse de la chambre, laissant Hamza hébété avec surement plus de question qu'avant.

La porte de la chambre était gardée par deux prêtres en permanence. Mais dès que Toma montait, les prêtres prenaient une pause souvent bien mérité. Il était donc seul face à la porte. Il se massa les tempes essayant de trouver une approche qui pouvait convenir à Hamza.

- Tu réfléchis trop mon vieux... se dit il à lui même.

Il attrapa la poignée, tourna la clé et entra de nouveau dans cette pièce, un plateau garni comme à son habitude.

Il s'attendait à trouver Hamza boudant, mais non, ce dernier était assis sur le bord du lit et l'observa s'avancer dans la chambre. Toma ne fit pas de cas et posa le plateau comme il avait l'habitude de faire. Il prit celui qui était à présent vide. Il ne trouvait pas le courage d'entamer la conversation, mais contre toute attente ce fut Hamza qui l'entama :

- Vous n'êtes plus obligé de porter cette capuche... Toma Godfroy.

Toma se raidit immédiatement, car Hamza venait de prendre la main sur le futur échange. Il courba le dos comme si le poids des mots de son ainé lui pesait et se massa le visage contrarié. Il fallait absolument qu'il montre son coté le plus strict. Il inspira fortement, et dégagea son visage. Il se retourna vers Hamza dont les sourcils étaient froncés. Ils restèrent tous les deux à se regarder en chien de faïence. Quand soudain Toma se rendit compte que pour une fois Hamza était seul. Réellement seul, sans cette foutue Ombre. Il se détendit imperceptiblement, mais assez pour qu'Hamza s'en aperçoive.

- Alors... Vous? Enfin tu es le frère de Rohakan? J'aurai dû m'en douter. Rohakan n'est plus de ce monde et je crains fort que cela soit définitif cette fois...

- Vous... ne m'avez pas reconnu?

- Aurais je dû?

Toma baissa la tête contrarié.

- Nous nous sommes croisés, je vous l'accorde très peu de fois, mais assez pour que moi je me souvienne de vous...

Hamza détourna le regard, gêné, il se gratta la gorge puis repris.

- Tu es le cadet c'est cela?

- Maintenant oui, mais sinon j'étais le troisième de la fratrie avant que Rohakan ne meurt.

- Ho... oui c'est vrai, vous avez une sœur.

- Ouais...

La tension monta d'un cran. Toma avait très peu de relation avec sa sœur Magdelina. Il l'avait toujours vu comme une opportuniste et d'un caractère bien trop insupportable. Son mariage était un fiasco, et elle l'avait mis sur le compte de Rohakan. Elle était aussi calculatrice que leur père pouvait l'être.

- Tu dois être très fort...

Toma l'observa quelques secondes avant de lui demander :

- Par rapport à ma taille?

- Je dois l'avouer que tu es grand, très grand, j'ai même l'impression que tu es aussi grand que ...

Il se tue subitement et rougit sans raison. Puis il se reprit :

- Comme un elfe de la nuit...

Toma croisa les bras. Bien sur qu'il était aussi grand qu'un elfe de la nuit, il était même parfois plus grand que certains entre eux. Hamza se reprit et dit :

- Non, en fait je parlais de puissance...

- Comme cela?

- Tu as réussi à faire fuir mon Ombre, répondit Hamza tout en le cherchant des yeux.

- Ho! s'étonna alors le jeune prêtre.

- Je ne sais pas ce que tu as fait, mais il boude dans un coin de mon esprit... ha ! ça me fait des vacances...

L'occasion était trop belle pour ne pas la saisir.

- Vous ? Vous ne supportez pas les Ombres, le vide? Vous? Un prêtre Ombre?

- Je n'ai jamais dit cela, grogna Hamza

- Pourtant c'est bien ce que vous avez dit... Des vacances, qui pourrait dire de ses pouvoirs qu'il a envie de les retirer. C'est la même chose!

Hamza se contracta à cette affirmation. Toma en profita pour s'avancer jusqu'à lui. Il le dominait complètement maintenant. De réflexe, il sourit. Il sentait maintenant que son interlocuteur était acculé.

- Tais toi, murmura t'il

- Je sais que vous étiez l'un des meilleurs prêtre au service de la Lumière. Comment avez vous pu vous détourner d'elle, elle qui vous avez pris sous son aile?

- Le meilleur ? répéta Hamza dubitatif

- Oui, les Légendes se construisent vite vous savez, et puis Maitre Benedictus le pense aussi.

Il sentit alors qu' Hamza se rétracta au nom de l'Archevêque. Il s'enfonça sur le lit et alla se caler contre le mur.

- Vous... semblez avoir un différent avec Benedictus, demanda faussement Toma, car il le savait très bien qu'Hamza et l'Archevêque n'était plus en très bon terme.

- Un différent? C'est plus que cela... répondit Hamza mais sans développer plus.

- Allons... Il pense à vous, il se soucie de vous.

- Et m'enferme dans une chambre où je ne puis m'échapper? Il a une drôle de façon de se soucier de moi! 

Hamza s'était relevé, pointant du doigt la fenêtre barrée. Il était en colère visiblement. Toma choppa son bras qui pointait et l'abaissa vers lui. Obligé de suivre le mouvement, Hamza se trouva presque plaqué contre Toma.

- Croyez moi... Il veut vous aider, dit Toma en insistant sur tous les mots.

Hamza se mit subitement à rougir. Ils étaient si près l'un de l'autre qu'ils pouvait sentir leurs respirations. Le prêtre ombre tourna la tête, essayant de cacher son rougissement.

- Pourquoi détournez vous votre regard?? demanda Toma avec suspicion

Hamza fronça encore plus les sourcils, et il zieuta Toma

- Tu... Tu ressembles tellement à ton frère, si près... J'en suis bouleversé. C'est tout.

- Oui, vous étiez très proche tous les deux, je le sais. Toutes ces années à grandir ensemble, vous étiez presque comme des frères... dit Toma jaloux d'une telle relation.

Hamza ne répondit pas, il se cacha encore plus, jusqu'à tordre son bras encore sous l'emprise de Toma. Ce dernier trouva la réaction un peu trop excessive, et puis il réfléchit... Lorsque Rohakan était revenu dans la demeure familiale en tant que chevalier de la mort, il avait eu une conversation avec sa famille. Une houleuse conversation, dont elle avait laissé des traces dans la mémoire de Toma. Même s' il n'avait pas eu le temps de parler avec son frère, bien trop occupé à détruire son père, il se rappela d'une chose. Le lendemain, leur père avait reçu un émissaire de la Lame d'ébène, et c'est après cette entrevue que Rohakan avait fuit de la maison familiale. Son père avait été fou de rage. Pendant des jours il avait répété qu'il avait plus de fils ainé et qu'il haïssait la personne qui l'avait "enrôlé" dans le pêché. Toma comprit que c'était un prêtre, mais il n'avait jamais su qui cela pouvait être.

Devant Hamza, il fit alors le rapprochement.

- C'était vous?

Hamza retourna la tête d'un air interrogateur.

- La personne qui s'était enfui avec Rohakan, c'était vous! C'était vous qui l'aviez embrassé pour tourmenter notre père.

Hamza entrouvrit la bouche sans qu'un seul son ne sorte, il semblait interloqué, puis il prit une grande inspiration. Il arracha alors le bras de l'empoigne de Toma.

- Je ne sais pas de quoi tu parles!?

- Si... susurra Toma, le démon au visage d'ange, voilà ce que répétait mon père à longueur de temps, c'était vous! Vous aviez succombé au charme de mon frère! Vous aimiez mon frère!!!

Toma était en train de crier sans s'en rendre compte.

- Je... Bien sur que j'aimais énormément ton frère, il a toujours été présent dans ma vie, il a été un ami exemplaire, et je...

- Vous étiez plus que des amis! Ho Sainte Lumière...

Toma se mit à tourner en rond, frénétiquement il marmonna :

- Vous vous êtes embrassés dans le bureau de mon père, il a été tourmenté par cette vision pendant si longtemps...

Puis il s'arrêta brusquement. Il tourna la tête vers Hamza qui était acculé contre le mur de nouveau. Il s'approcha jusqu'à lui et plaqua une main contre le mur, le bloquant encore plus.

- Avez vous fait autre chose ?...

Hamza se retint de respirer. Il regarda Toma les yeux écarquillés, puis subitement, il baissa la tête.

- Oui...murmura t'il.

La main plaquée contre le mur, s'enroula sur elle même et d'un coup, il cogna la paroi si fort qu'il fit trembler la chambre entière.

La porte s'ouvrit soudainement et deux prêtres entèrent tour à tour. Ils cherchèrent du regard qui avait pu provoqué un tel vacarme.

- Tout va bien? demanda l'un entre eux

- Oui, gronda Toma, extrêmement bien...

Il attrapa le menton d'Hamza pour le faire remonter vers son visage. A quelque centimètre de sa bouche, il murmura :

- Je n'en ai pas fini avec vous... Je reviendrai demain et les choses sérieuses commenceront.

Puis il lâcha le prêtre ébranlé par ses mots et sortit de la pièce sans dire un mot.