La pluie battante, ruisselait sur le carrosse qui transportait Hamza. Face à lui, Benedictus, extrêmement silencieux, s'appliquait à écrire une missive.  A ses cotés, la Tremblote. Ce dernier tripotait ses doigts d'angoisse.

- Ne vous inquiétez pas... Ils ne vous trouverons pas, répondit Benedictus à ce geste si anodin. Je vous ai promis que je vous protégerai... Alors détendez vous.

Hamza détourna son regard de son voisin pour le porter sur l'extérieur. Il allait enfin sortir du bois de la pénombre. Il pleuvait vraiment très fort, si fort que la rivière en contre bas du bois, gonflait inexorablement.

- Et si ils ne lâchaient pas l'affaire! Glapit la Tremblote.

- Vous avez réussi à vous cacher d'eux jusqu'à maintenant, je pense qu'ils ont autre chose à fouetter, Roland...

Hamza sentit une pointe d'agacement dans la voix de Benedictus. Ce dernier avait fini d'écrire sa missive, et la rangea précautionneusement dans un carquois. Son regard se posa sur Hamza qui détourna immédiatement le sien. Les voix dans sa tête étaient revenues en force et murmurèrent en boucle les mêmes mots :

Fuis !

Traite!

Hamza pesta à voix basse. Il passa négligemment sa main sur son front, essayant de se débarrasser des murmures avec un geste un peu trop simpliste. Il avait pensé qu'après l'intervention de Benedictus, les ombres allèrent le laisser en paix. Un bel espoir, vite démantelé par les ténèbres. Peu de temps après s'être habiller et descendu de sa chambre de fortune, juste avant de monter dans la carriole qui était affrétée spécialement pour le petit groupe d'hommes, les murmures avaient repris de plus belle. Il constata que dès qu'il se rapprochait de l'Archevêque, les murmures montèrent en puissance dans son esprit.

Quelque chose clochait.

Hamza se reconcentra sur l'instant présent, essayant de faire abstraction des chuchotements dans sa tête. Il zieuta sur Roland, puis demanda l'air le plus distant possible :

- Pourquoi est t'il avec nous? demanda t'il tout en désignant la tremblote d'un coup de tête.

Celui ci sursauta, puis regarda à son tour Benedictus.

- Je l'ai embauché. J'ai estimé qu'il ne devait plus rester dans ce coin misérable de nos terres, il a... expié son péché, répondit l'Archevêque quelque peu irrité par cette question.

Hamza regarda du coin de l'œil la tremblote. Il ne connaissait que les rumeurs sur lui. La mort d'une famille entière, par sa faute. C'était assez pour le juger.

- Connais tu la Faux d'Elune, mon cher élève? demanda subitement Benedictus

A son nom, la tremblote fut pris de spammes incontrôlés.

- J'en ai vaguement entendu parlé. D'après ce que je sais d'elle, c'est une arme magique, fabriqué avec le croc de l'un des anciens Goldrinn, sorte de demi dieux auprès des Elfes de la nuit.

- Le fait que tu es fréquenté un elfe, a permis d'approfondir tes connaissances, finalement, il y a du bon dans cette abomination.

Tues le!!! Hurlèrent alors les voix dans la tête du jeune prêtre.

Hamza grimaça, essayant de retenir la fureur qui montait en lui. Il serra les dents, sentant que son pouvoir d'Ombre montait en puissance. Il ferma les yeux et pris une grande inspiration.

- La Faux d'Elune, fut été longtemps dans les mains des Elfes, puis elle a mystérieusement disparu avec son porteur, pour réapparaitre dans les mains d'un pauvre mineur...

Hamza rouvrit les yeux, et découvrit la Tremblote si pale, qu'il avait l'impression que celui ci allait disparaitre.

- Le pauvre mineur, fut attaqué avec ses congénères, dans cette mine de l'enfer... raconta Benedictus

- Ils... Ils étaient si nombreux, si violent, si sanguinaire et...Je n'ai rien pu faire, se mit à geindre la Tremblote.

Hamza sourcilla aux comportements de la Tremblote. L'histoire avait été rapporté et surement déformé à la Capitale, la transformant en une banale rumeur. Il sentit alors de la pitié face à l'homme qui se balançait maintenant d'avant en arrière. Sa main se dirigea vers la jambe de son voisin, et s'y posa délicatement. La Tremblote alors se statufia. Il posa son regard sur la main du prêtre puis lança un regard apeuré. Hamza retira alors sa main, comme s' il avait l'impression de lui poser une malédiction. Une de plus.

- Vois tu, Hamza, Roland fut longtemps pourchassé par des cavaliers noirs, à cause de cette Faux...

- Seulement, je ne l'avais plus!! je l'avais perdu... Je.

la tremblote se remit à se balancer.

- Et c'est là qu'il a fait la terrible erreur de se réfugier dans une petite ferme... Où une gentille famille vivait tranquillement ses derniers moments de bonheur. Quelle tristesse, les cavaliers ont trouvé l'endroit où se cachait Roland.

Plus Benedictus en disait sur l'histoire, plus la Tremblote se mettait en boule. Hamza comprit alors que Roland ne tenait plus psychologiquement. C'était une sorte de torture d'entendre de nouveau le drame.

- Ils ont trouvé que des humains... sans la Faux, bien sur. Et ces êtres abominables ont tout simplement massacré la famille, sans aucune distinction, furieux peut être de ne pas mettre la main sur l'artefact...

- Qu'est que j'aurai pu faire!!!! Hurla Roland

Sans se préoccuper de l'état de la Tremblote, Benedictus continua.

- Évidemment, Roland n'avait pas assez de cran pour s'interposer...

- Cela suffit... Maitre, gronda Hamza avec le dégout dans sa bouche J'ai compris.

- Mais tu ne sais pas finalité des choses. Si la Faux était activement recherchée c'est qu'elle détenait un immense pouvoir. Le pouvoir de transformer les gens en bêtes assoiffées de sang...

Hamza alors devina, Il en avait entendu parler par Tarenn, lors d'une nuit lorsqu' il contait les histoires de son peuple. Pour repousser l'une des premières invasions de la Légion ardente, certains druides avaient étudié la possibilité d'avoir la force de Goldrinn, leur demi dieu. Afin de repousser l'attaque, ils développèrent une forme bestial mais difficilement contrôlable. Malfurion décida de les bannir dans le rêve d'Émeraude jusqu'à la fin des temps, du moins c'est ce qu'il était prévu...

- Les worgens... Lâcha le prêtre.

- La Faux d'Elune devait avoir la particularité de calmer les ardeurs de ces bêtes féroces, mais aussi le pouvoir de les invoquer, continua Benedictus.

- Mais ce ne fut pas le cas...murmura Hamza. Je comprends mieux la présence des worgens dans ce bois, cela signifie qu'un elfe, possédant la Faux d'Elune, était passé par ici. Mais ces bêtes sont sauvages. Je ne comprends pas alors pourquoi...?

Hamza se tue. Il avait déjà rencontré un worgen, qui avait été relevé par le roi Lich. Mais celui ci s'était tenu plutôt tranquille. Il n'avait eu que très rarement des accès de rage, du moins quand il était en humain. Pour lui, les worgens pouvaient contrôler leur sauvagerie. 

Le carrosse tangua au passage du pont reliant le bois de la pénombre et la foret d'Elwynn. Benedictus jeta un coup d'œil sur l'eau de la rivière qui montait. Il fronça des sourcils, puis se remit à lustrer sa barbe silencieusement.

Hamza scrutait Roland qui s'était enfin calmé. Son air déconfit, parlait pour lui. Il avait vécu un drame que tout le monde lui mettait sur son dos. Alors que finalement ce n'était pas de sa faute.

Passé le pont, les chevaux accélèrent alors sur le chemin menant à la Capitale. Dans quelques heures, Hamza allait revoir son foyer, mais une angoisse remontait. Qu'allait il advenir de lui? Comment Benedictus allait pouvoir l'aider? C'était un homme de Lumière, Il n'était pas censé connaitre les Ombres... A moins qu'il disposait d'une quelconque information.

La lassitude du voyage commença à peser sur Hamza, et il ferma les yeux. Pratiquement aussitôt il fut happé par le sommeil et s'enfonça au plus profond des ténèbres. Ici, il pouvait trouver un semblant de paix où il se sentait en sécurité, pour le moment.