Assy : les caprices du destin (2)
Le lendemain, Assy s'était réveillé vers midi. En sursaut. En temps normal elle ne dort jamais jusqu'à pareille heure. Mais, la veille elle avait mis du temps à dormir. Trop troublée, trop perturbée par tout ce qui s'était passé. Oui, elle avait continué à envoyer des messages à tonton Ibrahima. Bizarre. Oui. La sensation était très bizarre. Elle était encore au lit quand elle a prit son téléphone pour relire les messages et s'assurer qu'elle ne rêvait pas.
« Je suis désolée, mais je dois réviser demain avec mon groupe » avait-elle répondu à son « s'il te plait » pathétique.
Il avait alors mis du temps à répondre
« C'est dommage. Dans ce cas, il ne faut pas que je te dérange. Mais ce n'est que partie remise...pourquoi tu ne dors pas encore Assy ? »
« Je révisai »
« Décidemment, tu ne te repose donc jamais »
« Et vous ? Pourquoi vous ne dormez pas encore ? »
Elle avait mis du temps à appuyer sur la touche envoi. Oui, c'était un peu déplacé. Mais le cadre s'y prêtait un peu aussi
« Je regarde la télé...»
« ...en pensant à toi »
C'était le dernier message. Elle ne savait pas trop quoi répondre. Et encore maintenant, elle était perturbée par ce message. Comme la veille, elle a lut et relut le message. Non juste la dernière phrase. Elle n'a pu empêcher son cœur de s'emballer. Mais mon Dieu que lui arrivait-il donc ? Que penser de tout cela ? Si jamais tata Nafi apprenait ce qui se passait dans son dos, elle n'osait même pas imaginer ce qu'elle allait faire. Non, elle ne devait surtout pas encourager tonton Ibrahima. Et comment il pouvait lui envoyer ce genre de message. Lui si distant, si réservé. Il ne donnait pas l'impression d'être un coureur de jupon. Au contraire. En plus, elle était trop jeune pour lui.
A part Elhadj, elle n'avait jamais laissé un homme l'approcher. Dès qu'elle sentait qu'on lui portait un peu d'intérêt, elle s'empressait de poser des barrières, de mettre des limites. Elhadj était très jaloux et elle ne voulait pas de problème. Mais avec tonton Ibrahima, c'était différent. Oui, ce message l'avait complètement perturbée.
Elle était encore dans ses réflexions quand elle a entendu la voix d'Elhadj. Elle s'est rapidement levée et la dépassé dans la cour pour aller se doucher et revenir s'habiller. Il est entré quand elle avait fini de s'habiller
- ma belle. Je viens te chercher pour aller voter. Allons-y vite.
Elle avait fini et il s'est empressé de prendre le portefeuille et le téléphone d'Assy. Cette dernière à eu un petit moment de panique. Elhadj avait l'habitude de fouiller son téléphone mais aujourd'hui il était trop pressé. Sans insister, elle l'a suivi et est allé voter pour le candidat de son chéri. Comme il était occupé à diligenter d'autres militants, elle a vite récupéré ses affaires avant de rentrer pour réviser. Sa mère l'attendait et lui a demandé d'être plus ferme avec Elhadj qui se croyait tout permis avec elle.
- comme s'il avait une femme ici. hann...il vient te prendre comme ça... rouspétait-elle
- maman arrête. Il veut juste avoir des voix.
Mais elle ne l'écoutait même pas. Assy n'était d'humeur à polémiquer avec sa mère à propos d'Elhadj. Donc elle a prit ses affaires et a rejoins son groupe de travail, ne cessant de penser à Tonton Ibrahima.
Quand Lundi, elle a repris le travail, tata Nafi lui a annoncé que tonton Ibrahima avait voyagé et qu'il ne reviendra que dans une dizaine de jours. Sans trop savoir pourquoi, elle était déçue...de ne pas le revoir, de ne pas pourvoir s'expliquer avec lui. Mais finalement, elle se dit que c'était mieux pour elle et qu'elle allait en profiter pour l'évacuer de son esprit.
Et de toute façon, elle était occupée avec ses révisions. Tata Nafi ne voulait rien comprendre quand elle lui expliquait qu'elle devait rester un peu tard à ses cours pour réviser et chaque soir elle râlait comme ce n'est pas permis. Mais elle tenait bon. Quand elle commençait à rouspété, elle s'efforçait de ne pas l'écouter, se contentant de baisser la tête et de prendre un air affligée. Elle pensait à autre chose le temps qu'on lui passe un savon. Elle voyageait le temps de la prise de tête, avant de s'excuser encore une fois et de retourner vaquer à ses occupations. De toute façon, il ne restait plus beaucoup de temps avant le bac. Elle est même allé jusqu'à lui demander de lui permettre de rester chez elle pendant ces deux semaines pour qu'elle puisse réviser, mais elle a refusé disant qu'elle n'avait personne pour garder Sophie. Donc la nuit, elle était obligé de sortir pour s'installer sur la terrasse pour réviser jusqu'à des heures impossibles. Heureusement que Dina était dans la chambre pour lui surveiller Sophie. Malgré tout cela, malgré le stress du bac qui approchait, elle ne pouvait s'empêcher de penser à tonton Ibrahima. De manière maladive. Elle s'en voulait, se sermonnait, mais replongeait.
Pour essayer de l'oublier, elle appelait Elhadj qui lui donnait des nouvelles des élections. Son candidat avait gagné et il était sur un petit nuage. Le weekend, il est passé à la maison et lui a donné un billet de 10 mille francs. Une vraie fortune pour Elhadj qui ne lui avait jamais remis plus de 5000. Même en temps de fête.
- Elhadj, tu as dévalisé un coffre ? demanda t'elle étonnée.
Il a rigolé
- mais non. Mr Mbaye m'a offert 100 milles pour l'aide que je lui ai apporté pour la victoire. Toi-même tu sais que je me suis décarcassé comme un beau diable.
- oui...en tout cas merci. C'est beaucoup. Tu n'aurais pas du.
- achète-toi du crédit dessus, et donne à ta maman aussi de ma part.
Elle a regardé le billet, un peu découragée.
- mais, toi donne à ma mère et laisse-moi cela. Je dois payer le transport pour la période du bac.
Il a prit un air agacé
- c'est dix milles. Tu peux avoir le transport et donner à ta mère.
Elle ne dit plus rien et l'a raccompagné. Plus tard, elle a remis le billet de dix milles à sa mère en lui disant que c'était de la part d'Elhadj. Mère Saly était étonnée. Elhadj n'était pas le genre à donner de l'argent. Mais elle a quand même prié pour Elhadj et remercié Assy. Mais cette dernière était quand même un peu déçue par l'attitude de son chéri. Mais n'osait pas trop le dire de peur qu'il le prenne mal et lui dise encore une fois qu'elle avait bien changé. Sa mère a-t-elle compris, s'est-elle doutée de quelque chose. Toujours est-il qu'en partant le lendemain, elle lui a remis 5000 en lui disant que c'était une tontine qu'elle avait décroché.
Elle a donc repris le travail et Sophie lui rendait la vie difficile. Combinée à ses révisions, c'était tout juste laborieux. Mais elle tenait bon. En milieu de semaine, alors qu'elle rentrait fatiguée de ses révisions, elle a eut la surprise de voir tonton Ibrahima au salon. Voir. Non. En fait, elle a juste entendu sa voix. Et ceci avait mis tous ses sens en ébullitions. Elle n'avait pas entendu tata Nafi parler de son retour. Mais bon, elle était tellement ailleurs ces temps ci qu'elle ne remarquait rien.
Elle est allé déposer ses affaires, quand tata Nafi l'a appelé pour aller lui chercher des rafraichissements à la boutique et de les servir au salon. C'est donc le cœur battant qu'elle est entrée avec un plateau de verre qu'elle a posé avec précaution sur la table avant de se tourner vers tonton Ibrahima et lui tendre la main. Tata Nafi était dans la cuisine et son ami Khalil répondit au téléphone sur la terrasse du salon. Il a prit sa main et elle n'a pu s'empêcher de frémir à ce doux contact ;
- Assy...
Elle a levé les yeux et ils se sont regardés. Un temps qui a semblé durer une éternité pour Assy. Apparemment il venait d'arriver et avait l'air un peu fatigué.
- c'n'est pas là la belle Assy...
Il lâcha la main brusquement. Un peu trop peut être. C'était tonton Khalil, l'ami de tonton Ibrahima. Toujours aussi taquin.
- bonjour tonton, dit-elle respectueusement en faisant une belle génuflexion
- alors Sophie te fais toujours des misères ? je me demande toujours comment tu fais Assy.
Elle s'est contentée de sourire avant de s'éclipser rapidement. La main qu'avait serrée tonton Ibrahima semblait la bruler et elle était complètement perturbée. Elle est allée préparer Sophie qui était toute agitée et qui essayait de lui expliquer que son père était rentré. Quand elle a réussi à la calmer et à la faire dormir, elle en a aussi profité pour dormir un peu car elle avait pris l'habitude de se réveiller vers minuit pour continuer à réviser. Donc beaucoup plus tard, elle est montée sur la terrasse avec ses cours. Avec la chaleur qui commençait à s'installer, c'était un endroit magnifique pour réviser, même si avec la lampe il y avait des insectes qui s'invitaient. Elle faisait des vas et viens sous la lampe en tenant son cahier pour mémoriser ses cours. Elle préférait rester debout pour ne pas dormir
- Assy ?
Elle sursauta et se retourna brusquement, prête à fuir. Mais, quand elle a reconnu tonton Ibrahima, elle s'est restée assise, le cœur battant
- excuse-moi de t'avoir fait peur. J'ai entendu quelqu'un monter et je voulais vérifier
- c'est moi. Je...heuu...je révisais. Dit-elle sentant un profond trouble la gagner, surtout que tonton Ibrahima s'approchait lentement d'elle.
Il était maintenant à quelques centimètres d'elle et elle avait levé la tête pour le regarder.
- tu révise quoi ? dit-il en tendant la main pour prendre son cahier, frôlant au passage son épaule dénudé.
Elle a frissonné à ce contact, mais tonton Ibrahima a continué à la regarder fixement, augmentant son trouble. Elle était persuadé qu'il entendait les battements de son cœur. Oui, c'était perceptible car sa poitrine se soulevait et s'abaissait au rythme de sa respiration qui s'était accéléré.
- ca va Assy ? demanda t-il avec un petit sourire.
Elle hocha la tête et cette fois s'éloigna rapidement. Il lui fallait de l'air car elle avait l'impression d'étouffer, que tonton Ibrahima lui pompait toute l'oxygène.
- SVT...dit-elle lentement
Il a continué à la regarder, sans trop comprendre ce qu'elle disait.
- pardon ?
- heuu...vous m'avez demandé ce que je révisais. C'est mes cours de SVT.
Il est sorti de sa torpeur et a baissé les yeux sur le cahier qu'il tenait entre ses mains.
- ha ok. Tu es brave Assy. Le bac c'est pour quand ?
- il reste une semaine.
- et tu es prête ?
Il disait cela en s'approchant à nouveau. Non, elle était déjà allé se coller au mur, si il venait encore, elle n'aurait même plus par ou s'enfuir. E s'il s'approchait encore, il allait remarquer son trouble, voir sa panique. Non. Sans trop réfléchir, elle essaya de passer devant lui rapidement, mais trop tard, il l'a saisi par la taille et l'a maintenu fermement contre lui.
- Assy...
- s'il vous plait...je dois y aller.
Il bougea un peu et ils se retrouvèrent debout l'un en face de l'autre. Et surtout collé l'un à l'autre. Une véritable bouffée d'angoisse l'envahit à cet instant. N'importe qui pouvait venir. Ils étaient dans un coin sombre de la terasse, mais la lumière était allumée.
- Assy, pourquoi tu me fuis comme cela ? demanda t-il doucement, la voix rauque
Elle sentait son souffle sur son visage, et cette sensation d'intimité, de sensualité, la rendait encore plus nerveuse.
- et vous pourquoi me poursuivez-vous comme cela...dit-elle la voix tremblante
Il sentait les battements sourds de son cœur contre sa poitrine. Dire que pendant tout son voyage, il n'avait cessé de penser à elle. Il s'était pourtant sermonné, se disant que ce n'était même pas raisonnable d'essayer d'entretenir une quelconque relation avec elle. Il s'en ait voulu d'avoir fouillé le portable de sa femme pour en tirer le numéro d'Assy. Et surtout, il s'en veut toujours de lui avoir envoyé des messages. Oui, ce n'était pas bien.
Malgré tout, il se retrouvait en pleine nuit sur cette terrasse avec elle, la serrant dans ses bras. Ne pouvant s'empêcher de la toucher, de regarder cette poitrine, presque mise à nue par le débardeur un peu trop grand, de s'émouvoir de cette crainte qu'il lisait dans ces yeux. Sans trop réfléchir, il se pencha, sur le point de l'embrasser. Elle ne faisait aucun mouvement et leur nez se touchaient. Leurs regards étaient soudés. Les yeux apeurés d'Assy le saisirent. Dans un moment de lucidité, il la relâcha. Mais elle n'a pas bougé, comme hypnotisée. Lui aussi respirait sourdement. Il se retenait. Douloureusement. Il ne comprenait pas. Pourtant, il venait de faire l'amour à sa femme. Il s'était levé pour se laver et faire ses dernières prières quand il a senti un mouvement sur la terrasse. Il devait se ressaisir. Il s'est alors éloigné
- excuse-moi Assy.
- ...
- tu me perturbe ces temps ci. Je ne devrais pas te dire ce genre de choses, pas à mon âge...mais tu me...
Il a soupiré semblant chercher ses mots, laissant Assy complètement perdue, incapable de bouger, et de sortir un mot.
- écoute, je ne vais pas t'embêter. Je te laisser étudier. Après tes examens, on va en reparler. Ca marche ?
Elle s'est contenté d'hocher la tête, toujours déboussolée. Il s'est alors retourné et est parti. N'ayant plus le cœur à étudier, elle est partie se coucher, l'esprit tourmenté par tout cela. Elle ne savait plus quoi faire. Elle trouva Dina toujours assise sur le lit en train de réviser aussi pour ses examens à l'université
- Assy, aujourd'hui tu reviens tôt. Qu'est ce qui se passe ?
- j'ai des maux de tête Dina...dit-elle en mettant son matelas et en se couchant.
- pourquoi tu refuse toujours de dormir avec moi ? soffe nga torope...tu as des maux de tête. Viens te coucher sur le lit. Et puis ton chéri a appelé plusieurs fois. J'ai du décrocher pour lui dire que tu étais monté pour réviser.
Elhadj. Comment pouvait-elle être aussi troublée par tonton Ibrahima alors qu'elle aimait son Elhadj. En temps normal, elle était capable de rabrouer tout homme qui osait l'approcher. Mais pour celui là...
- tu n'as pas l'air bien Assy. Va prendre un médicament.
Elle le regardait sans vraiment la voir. Dina était tellement gentille avec elle. Elle lui donnait des habits, lui parlait souvent et en fait elles étaient de bonnes amies. Même si sa sœur n'approuvait pas trop. D'ailleurs, c'est elle qui ne voulait pas qu'Assy dorme avec Dina. Donc elle dormait par terre. Mais ce soir, elle a préféré se coucher sur le lit.
Le lendemain, elle était tout aussi perturbée, mais elle se replongea dans ses activités, bien décidé à s'occuper d'abord de ses examens. Elle n'eut d'ailleurs pas le temps de voir tonton Ibrahima. Quand il rentrait, il était tard et partait tôt le matin. La période des examens arriva vite et bien entendu trouver un arrangement avec tata Nafi s'avéra compliqué. Mais il fallait bien qu'elle aille faire son bac. Finalement, Nafi amenait Sophie le matin chez sa mère et la ramenait le soir, et elle put ainsi passer ses épreuves.
Elle avait le soutien de sa famille et de ses amis. Elhadj appelait toute la journée pour savoir comment s'était passé les épreuves et s'inquiétait vraiment pour elle. Sa mère était presqu'aussi stressée qu'elle et ne le cachait pas. Pour elle surtout, elle n'avait pas le droit d'échouer, et même si elle avait l'impression de passer à côté de ses sujets, elle gardait toujours espoir. Dina aussi était très présente et s'occuper tous les soirs de lui remonter le moral. Surtout quand elle revenait les larmes aux yeux, convaincu qu'elle n'avait pas bien traité les épreuves. Et heureusement qu'elle était là. Tata Nafi ne lui demandait jamais rien, tandis que Tonton Ibrahima affichait une grande indifférence depuis leur dernière conversation. Elle en était à la limite frustrée, surtout qu'elle n'arrivait pas à le sortir de sa tête. Oui, il occupait toutes ses pensées et c'en était parfois douloureux.
Mais le soir ou elle a terminé des épreuves, alors qu'elle commençait à somnoler car soulagé et surtout fatigué par ses difficiles journées, elle reçut un message
« Alors ? Tout s'est bien passé ? »
Elle a su que c'était tonton Ibrahima.
« Oui ca va » répondit-elle
« J'ai prié tous les jours pour toi »
Elle a souri.
« C'est vrai ? Merci »
Puis plus rien. Elle a attendu en vain l'arrivé d'un message, mais rien. Et elle s'est même énervé quand elle s'est empressé de prendre son téléphone qui venait de signaler l'arrivée d'un autre message, et qu'elle a vu que c'était Elhadj qui lui souhaitait une bonne nuit. Mais qu'est ce qui lui prenait donc.
Elle est ainsi partie en weekend sans autre nouvelle de tonton Ibrahima. En attendant ses résultats, et pour se changer les idées, elle est partie à la plage avec sa copine Khady et Elhadj. Ce dernier était sur un petit nuage et voyait la vie en rose car son politicien lui promettait monts et merveilles. Elle l'écoutait d'une oreille distraite, ne s'empêcher de laisser ses pensées aller vers tonton Ibrahima. Elle aurait voulu partager la joie d'El hadj, lui montrer qu'elle était contente pour elle. Mais non, elle n'y arrivait pas et a préféré lier ce fait au stress de l'attente des résultats qui devaient tomber dans les jours à venir.
et elles sont arrivées ces résultats. Assy était assise sans pouvoir bouger. Il commençait à faire sombre et elle ne savait pas depuis combien de temps elle était assise là. Le centre commençait à se vider de ses candidats. Les uns heureux, les autres en larmes. Et elle était assise. Attendant quelque chose qui n'arriverait jamais. Elle n'avait même pas réussit à passer au second tour. Ajournée. Tout simplement. Elle était venue seule, et n'avait prévenue personne. Toutes ses pensées allaient vers sa mère. Comment allait-elle lui dire ça. Comment ? Mère Saly avait placée tous ses espoirs en elle. Elle se devait de réussir. Au lieu de cela, elle n'était même pas capable de décrocher le bac.
Elle se leva difficilement et réussit à rentrer. Elle croisa tata Nafi qui se mit à râler encore une fois, ne faisant même pas attention à sa mine triste. Plus tard, alors qu'elle était sur le point de dormir, c'est dina qui remarqua tout.
- Assy, tu as eu tes résultats ?
- oui, Dina. J'ai échoué. Encore.
Dina s'est redressé sur son lit. Etonnée.
- et tu garde comme cela ton calme ?
- que veux tu que je fasse Dina ? Je n'y peut rien.
Ayant pitié, elle se leva et l'enlaçant tendrement
- je suis vraiment désolée Assy. Mais n'abandonne pas. La prochaine fois sera la bonne.
La pauvre Assy avait le cœur gros, mais ne voulait pas pleurer. Non. Elle avala difficilement pour faire passer la boule qui s'était formé au fond de sa gorge.
- merci Dina, dit-elle tristement en refoulant les larmes qui pointaient le bout de leur nez.
Plus tard, ne trouvant le sommeil, ayant la gorge nouée et ce sentiment d'oppression, elle se leva et se dirigea vers la terrasse. Et c'est là qu'elle a craquée. Les larmes sortaient par flots. Elle était obligée de se mordre le bras pour ne pas crier, tellement toutes les émotions débordaient. Elle était assise sur une chaise, le visage entre ses mains et pleurait douloureusement, pliée en deux.
C'est dans cet état qu'Ibrahima l'a trouvé. Il eut peur un moment, pensant qu'il y avait quelque chose de grave.
- Assy, ca va ? demanda t-il en s'agenouillant devant elle.
Mais elle a continué à pleurer sans rien dire. il était là, complètement impuissant face à tant de détresse.
- parle moi je t'en supplie. C'est quoi ? tu es malade.
Toujours rien. Elle a continuée à pleurer. Finalement, il s'est décidé à attendre qu'elle se calme. Et ca lui a pris du temps. Au bout d'une bonne demi heure, il n'entendait que de petits hoquets, mais elle était toujours pliée et le visage entre ses mains.
- Assy ? Tu va mieux.
Cette fois elle a relevé la tête lentement en essuyant ses larmes.
- tu ne veux pas me dire ce qui ne va pas ? dit-il en approchant une chaise de la sienne.
- je n'ai pas eu mon bac. Dit-elle tristement.
Il s'en était un peu douté. Mais comme elle l'avait vu vaquer à ses occupations tranquillement...
- je suis désolé Assy. Vraiment.
Elle a soupiré. Puis s'essuyant tranquillement le visage, s'est levé et est allée s'accouder au mur de la terrasse. Il l'a suivi et s'est mis à lui parler, lui demandant de ne pas baisser les bras et de s'accrocher. Elle ne disait rien et se contentait de regarder la rue, l'air ailleurs
- merci tonton.
Il s'était approché. Elle semblait tellement triste, tellement fragile, qu'il n'a pas résisté. Il l'a pris dans ses bras et l'a retourné. Il se faisait face et cette fois, Assy a soutenu son regard. A ce moment, l'électricité entre eux était palpable malgré la peine qu'elle ressentait. L'entendre respirer bruyamment tout d'un coup lui fit de l'effet. Il ya bien longtemps qu'il n'avait pas ressenti un sentiment si fort et si agréable à la fois. Oui, Assy avait réveillé en lui des sentiments qu'il croyait ne plus jamais ressentir. De l'envie, de l'excitation, bien sure mêlé à une peur d'engager quoi que se soit avec elle. Ce n'était pas une fille pour elle. Non, il n'avait rien à lui offrir et pourtant, il se sentait poussé vers elle comme un aimant. Et là, il ne tenait plus. Il en avait marre de devoir refréner ses envies. Sans plus réfléchir il se baissa et saisit ses lèvres.
Le moment de surprise passé, Assy aurait du le repousser, fuir, mais non. Elle était là, attendant la suite, espérant qu'il ne s'arrêterait pas. Et il ne s'est pas arrêté. Il l'a encore plus serré contre lui et a accentué son baiser. Que ses lèvres étaient douces...elle se surprit à répondre, à entrouvrir la bouche, pour céder le passage à cette langue qui explorait sa bouche. Elle s'est étonnée de cette explosion de sensation qui partait du bas ventre et semblait irradier dans tout son corps. C'était trop. Elle poussa un petit gémissement, ce qui poussa Ibrahima à s'écarter légèrement, mais leurs lèvres étaient toujours collées et elle cherchait son souffle, toujours étonné par les émotions qu'elle ressentait.
- Assy...
Entendre son nom murmuré comme cela, lui fit revenir sur terre. Elle s'écarta lentement et baissa la tête. Honteuse. Que venait-elle de faire ? La plénitude fit place à un sentiment de panique. Elle se tint la lèvre et regarda tonton Ibrahima.
- ca va maintenant ? demanda t-il avec un petit sourire.
Incapable de dire le moindre mot, elle se contenta hocher la tête. il se pencha à nouveau et déposa un rapide baiser sur ses lèvres avant de l'attirer vers la chaise et de la mettre sur ses genoux.
- tu méritais de décrocher ton bac Assy. Tu as travaillé dur.
Cette phrase eut le don de remplir ses yeux de larmes.
- que vais-je dire à ma mère. J'ai tellement honte. Dit-elle en laissant couler des larmes.
Ibrahima les essuya lentement, lui provoquant un petit frisson ; ils se regardèrent un moment et cette fois, c'est Assy qui se pencha, et posa ses lèvres sur les siennes. Il la laissa faire, mais malheureusement, elle s'écarta, comme tétanisée par son audace. Elle se leva rapidement et il en fit de même.
- Assy, je sais que tu es perturbée. Je ne vais pas insister maintenant. Mais quand tout sera plus calme, je veux qu'on se pose et qu'on discute.
- de quoi ?
- tu sais bien de quoi.
Oui, elle savait. Mais elle ne voulait pas en parler. Non, tout devait s'arrêter là. Elle ne pouvait pas faire ça à tata Nafi et surtout elle n'osait pas. Elle serait capable de la tuer. Et sa mère. Et Elhadj.
Elle se dégagea bien décidé à mettre un terme à la discussion.
- désolé. Je dois y aller.
Il lui tint le bras
- promet moi qu'on en reparlera...Assy
- Non, tonton Ibrahima. Je ne peux pas faire cela.
Elle se libéra et regagna sa chambre...l'esprit complètement en ébullition....
Assy n'arrivait pas à se lever. Sophie se trémoussait sur le lit en demandant à manger, mais elle n'avait pas la force de bouger le petit doigt. Elle avait l'impression que sa tête allait exploser. Normal. Elle avait passé la nuit à pleurer. Une vraie crise existentielle. Elle se demandait ce qu'elle allait faire de sa vie. Elle espérait tellement avoir le bac et ainsi trouver une bourse et aller à l'université. Mais tous ses projets étaient à l'eau. Et le pire c'est qu'elle ne savait même pas comment l'annoncer à sa mère. Comment lui dire qu'elle n'avait pas réussi, qu'elle n'avait pas décroché le sésame qui devait permettre d'ouvrir pas mal de porte. Son avenir s'assombrissait tout d'un coup. Sophie venait de sortir et c'est la voix de tata Nafi qui criait, la sortit de sa torpeur.
- Assy, qu'est ce qui t'arrive. Pourquoi tu dors jusqu'à cet heure ?
Elle était à l'entrée de la chambre et criait à lui en crever les tympans. Elle se releva difficilement et s'assit sur le lit
- désolé tata. J'ai des maux de tête, dit-elle doucement.
Cette fois elle entra et la regarda de haut.
- Assy, ne te fout pas de moi. Ces derniers jours c'était ton examen, avant c'était tes cours, après tes révisions. Tu trouves toujours un prétexte pour ne pas travailler. Et pourtant chaque samedi tu rentres et chaque fin de mois tu me tends la main pour que je te paye. Et je ne dis rien, j'essaie de comprendre. Ma patience a des limites. Je ne suis pas ton égale, tu m'as compris. Tu as intérêt à te lever rapidement et à aller travailler. Sophie est réveillée depuis longtemps et elle me fatigue. Tu n'es même pas capable de la changer. Lève-toi.
Elle allait partir quand elle s'est retournée
- je t'avais interdit de dormir sur le lit de Dina. Tu es trop effrontée. Comme si chez toi il y avait un lit...
Assy s'efforçât de se lever sans rien dire et arrangea le drap, le cœur gros. Elle ne savait même plus pourquoi. Comme d'habitude tata Nafi n'avait pas été tendre. Et le pire c'est qu'elle ne s'inquiétait même pas un peu pour elle. Depuis 2 jours qu'elle avait ses résultats et passait son temps à pleurer, elle ne disait rien. La veille, elle l'avait trouvé recroquevillée derrière le frigo à pleurer, mais elle l'avait à peine regardé. Même le gardien avait remarqué sa mine triste et l'avait réconforté. Dina avait été merveilleuse avec elle. La réconfortant, la soutenant l'aidant comme une véritable amie. Elhadj aussi était très peinée et ne cessait d'appeler. Mais jusqu'à présent, elle n'osait rien dire à sa mère. La veille encore, elle lui disait que les résultats n'étaient pas encore sortis. Et pendant ce temps tata Nafi la traitait comme de la merde. Elle commençait à ne plus supporter cette situation.
Et tonton Ibrahima. Il se comportait comme d'habitude...enfin presque. Il lui envoyait souvent des messages de réconfort et elle se dépêchait de les supprimer sans répondre. Elle a regretté ce qui s'était passé entre eux et à mis cela sur le compte de son état de déprime de ce soir là. Mais elle n'arrivait pas à expliquer les sentiments qu'elle ressentait pour lui. Car oui, elle savait qu'elle en ressentait. Malheureusement. Tous ces faits, plus le comportement de tata Nafi la rendirent très triste. Ses larmes coulaient en permanence. Fatou la regardait impuissante, ne sachant plus quoi lui dire. D'ailleurs, elle n'avait plus envie qu'on lui parle. Elle voulait juste qu'on la laisse digérer sa peine. Evacuer. Ca passera.
Toute la journée, elle s'est efforcée de faire son travail. Quand tata Nafi est arrivée, elle était déjà prête.
- tata, je voudrais aller voir ma mère s'il te plait.
- quoi ? Tu oses me demander encore la permission de partir. Tu attendras le weekend. Tu exagère.
- s'il te plait. En fait je n'ai pas réussi au bac et je voudrais le lui dire directement au lieu de lui annoncer par téléphone.
Elle l'a regardé. Dina lui avait dit qu'Assy avait échoué au bac et ça ne l'avait pas touché plus que ça. Au contraire, elle se dit qu'ainsi elle laisserait ses cours et se consacrerait uniquement à son travail. Elle ne comprenait pas l'acharnement qu'elle mettait pour avoir son bac. Dans son cas, elle pouvait se contenter de ce travail, surtout qu'elle trouvait qu'elle le payait plutôt bien.
- tu attendras samedi Assy. Dans deux jours. Je dois sortir. J'ai des courses à faire et il n'y a personne pour surveiller Sophie. Tu as pris trop de permissions ces temps ci. J'en ai marre de toi. Et puis je dois me préparer, sors de ma chambre.
Assy l'énervait. Elle avait assez de problème comme cela. Son magasin de prêt à porter commençait à se vider et elle devait aller chercher de la marchandise. Malheureusement, elle avait dépensé tout son argent. Elle n'espérait que sur son très cher mari pour lui donner des sous. Encore. Quoi qu'elle puisse lui reprocher, elle devait reconnaitre que son cher et tendre était très amoureux d'elle et satisfaisait ses moindres caprices. Oui, son mari l'aimait. A la folie. Surement plus qu'elle, car depuis qu'elle s'était rendue compte que sa fille était malade, elle lui en voulait. Et ce fait créait parfois des problèmes dans leur couple, et elle se montrait parfois très désagréable avec lui. Mais le pauvre se sentait coupable et était très patient avec elle. Et elle en abusait. Sauf que ces temps ci, elle voulait de l'argent et malgré ses efforts, elle le sentait un peu distant, soucieux. Ça devait être le boulot. Elle était décidée à aller le retrouver à son bureau et l'inviter. Comme cela après une bonne nuit, elle aura ce qu'elle voulait. Mais avant elle a prit son téléphone pour composer le numéro de mère Saly. Le comportement d'Assy commençait à l'énerver.
- maman Saly, c'est nafi...
- Nafi ma fille comment tu vas ? Ça fait longtemps comme va la famille ?
- tout le monde va bien maman. En fait je t'appelais à propos de Assy, commença t'elle
Mère Saly se redressa sur son lit et l'écouta attentivement.
- maman, Assy je la considère comme ma petite sœur, mais elle en abuse. Je ne voulais rien te dire car je sais les rapports que tu as avec ma mère. Mais trop c'est trop. Depuis le début de l'année, je la laisse sortir à 16 heures et elle de reviens qu'à 21 heures. J'aurais pu refuser cela, mais comme elle m'a dit que c'était pour son bac, j'ai accepté. Mais Assy est fainéante et paresseuse. Elle triche dans son travail et se croit tout permis. Elle se prend pour une princesse. Les domestiques se mettent en pagne, mais Assy est en jean et body. Toujours. celle là elle veut travailler ??
- Nafi, l'interrompit mère Saly. Ha tout ce que tu me dis là m'étonne vraiment de ma fille. Assy je l'ai éduqué, mais haaa. Si c'est elle qui fait ce que tu dis, je me chargerai personnellement de lui parler.
- Je ne fais que ça. Lui parler. Mais elle n'en fait qu'à sa tête. Et tu sais Machallah, elle est très belle, parfois elle reste dehors tellement tard que j'ai peur qu'elle ne soit en train de fricoter avec des hommes.
- Nafi, tu te trompes. Ma fille n'est pas comme cela. Mais écoute. J'ai entendu tout ce que tu m'as dit. Je te promets de lui parler.
- oui, merci. Je ne veux que son bien. Je l'encourageais toujours dans ses études. C'est pourquoi quand elle m'a dit qu'elle a échoué au bac je l'ai bien sermonné.
Mère Saly a sursauté. Echouer au bac.
- Nafi tu dis qu'elle a échoué au bac ?
- waw. Haa...elle ne te l'a pas dit ?
Mère Saly a gardé le silence. Avant de prendre congé lentement.
Tata Nafi venait de sortir, dépassant Assy sans un mot. Elle ne comprenait pas pour quelle raison elle la détestait comme cela. Elle n'arrivait même pas à éprouver un peu de compassion pour elle. Elle venait de lui dire qu'elle n'avait pas eu son bac et elle n'a eu aucun mot compréhensif à son égard. Non elle ne comprenait pas. Elle a à peine franchi la porte que son téléphone a sonnée. C'était sa mère.
- maman...
- Ma fille, comment tu vas ?
A sa voix, elle a senti qu'elle savait.
-...
- Nafi vient de m'appeler. Elle m'a dit que tes résultats étaient sortis.
Son cœur s'est empli. Pourquoi tata Nafi avait parlé à sa mère. Et pourtant, elle lui avait bien dit qu'elle souhaitait le lui dire de vive voix et pas au téléphone. Ses larmes se sont mises à couler
- maman, je suis désolée....
- ne dis pas ca Assy. Tu n'as pas à être désolée. Ce n'était pas ta chance c'est tout. le Bon Dieu a son programme ma fille et personne n'y peut rien. Rend lui grâce de t'avoir donné la force de faire cet examen. Moi je suis fière de toi. Je vois tout ce que tu fais pour moi. Dieu le voit. Il te le rétribuera ma chérie. Sèche tes larmes
Assy a éclaté en sanglot. La voix de sa mère s'était brisée et elle n'a pas supporté.
- maman je suis désolée...continuait-elle a dire en sanglotant. Je ne savais pas comment te le dire. Je voulais venir, mais ...
Elle entendait sa mère respirer sourdement à l'autre bout du fil. Elle savait qu'elle pleurait aussi.
- maman pardon...cria t'elle presque en descendant le long du mur ou elle était adossé, et en se recroquevillant sur elle-même.
-arrête Assy. Arrête voyons. Khana tu ne croies plus en Dieu ? Arrête de pleurer. Tout ira bien. La vie est ainsi faite. Mais n'aie pas peur. Tant que moi Salymata Hanne ta mère, je prie pour toi, tu n'aura que la paix...Nafi m'a dit que tu passais ton temps à t'absenter pour n'importe quelle raison et qu'en plus tu lui manquais de respect.
-hannn
Elle se mit à lui expliquer tout ce que Nafi venait de lui dire. Assy a à nouveau éclaté en sanglot.
- Non Assy arrête de pleurer et écoute moi. Je te connais ma fille. Je sais de quoi tu es capable. Mais Nafi est comme ta grande sœur. Excuse-toi et passez à autre chose. Fais le pour moi et les bons rapports que j'ai avec sa mère. C'est tout le conseil que je peux te donner.
Elle n'a rien dit et mère Saly avait raccrochée, la laissant perdue et en larmes.
Oui, Mère Saly avait raccroché son téléphone car elle ne supportait plus les pleurs de son enfant. Elle avait mal pour elle. Très mal. La pauvre ne méritait pas cela. Tout ce que Nafi venait de lui dire l'étonnait. Assy s'occupait très bien de cette petite. Mais Nafi devait être très compliqué, même si Assy ne s'était jamais plainte. Jamais.
Après le coup de fil de sa mère, Assy est restée prostrée, ne sachant plus quoi faire. Tout cela commençait à être tout juste insupportable. Elle n'en pouvait plus. En même temps pleurer ne changerait rien. Elle est donc allée prendre une bonne douche et a continué à s'occuper de Sophie. Le couple Aidara est revenu tard, et quand elle est allée leur ouvrir la porte, en les voyant entrer, elle eut un petit pincement au cœur. Tata Nafi avait devancé son mari. Ce dernier lui a lancé un long regard et s'est même permis de poser sa main sur la sienne dans un geste pour refermer la porte. Assy a rapidement retiré sa main, avant de détourner la tête. Elle était vraiment gênée et n'aimait pas cette situation. Elle est allée se coucher rapidement après avoir répondu à un coup de fil d'Elhadj qui s'inquiétait pour elle. Il l'encourageait beaucoup et était pressé de la voir le weekend pour la réconforter. Quand Assy lui avait dit qu'elle avait échoué, il était prêt à venir la trouver pour la voir, mais elle avait décliné disant qu'il n'avait qu'à attendre et qu'elle allait bien.
En pleine nuit, Sophie s'est réveillée pour réclamer de l'eau et elle s'est levée. Elle allait sortir de la cuisine quand elle est tombée sur tonton Ibrahima qui venait, vêtu d'un short et torse nu. Elle n'a pu s'empêcher d'admirer son corps musclé. Il se tenait devant la porte et elle n'avait d'autre choix que d'attendre qu'il se pousse.
- Assy...
Elle a continué à baisser la tête, sans répondre. Tout ce qu'elle voulait c'était passer.
- excusez-moi. C'est Sophie qui veut boire. Elle va bientôt se mettre à crier.
- s'il te plait, je voudrais te parler. Rejoins moi tout à l'heure sur la terrasse.
Elle ne disait rien
- regarde moi Assy...
Elle a levé la tête et leurs regards se sont croisés. Elle a frémit car ses yeux se sont attardés sur ses lèvres et le souvenir de leur baiser lui est revenu. Elle a alors rapidement baissé la tête et sans répondre a insisté pour passer. Ibrahima s'est alors écarté car il a entendu un cri de Sophie. Après avoir pris un verre d'eau, il est allé s'installer au salon pour attendre Assy. Il fallait qu'il lui parle. Oui, Ibrahima avait eu un pincement au cœur ces derniers jours en voyant le masque de tristesse infini qui habitait le beau visage d'Assy. Il se sentait tellement impuissant. De ne pouvoir lui parler, de ne pouvoir la toucher. Oui c'était frustrant. Donc il voulait la voir pour la réconforter, la rassurer et aussi il avait tellement envie de la tenir à nouveau dans ses bras, l'embrasser. Oui, il était au salon à regarder un film, en attendant que Sophie se rendorme et qu'ils se retrouvent en haut.
Cette dernière était encore troublée et après avoir recouché Sophie, elle est restée un moment assise à réfléchir sur tout ce qui s'était passé dernièrement. Une chose était sure. Elle ne devait plus avoir de contact avec Tonton Ibrahima. C'était trop dangereux. Surtout depuis qu'il s'était embrassé. Ce baiser, elle en rêvait toutes les nuits depuis la dernière fois. Elle avait déjà embrassé Elhadj, mais avec lui, elle était souvent pressée qu'il s'arrête et n'avait jamais éprouvé ces sensations. Malgré la peine, à chaque fois qu'elle y pensait, elle avait cette sensation que ses lèvres frémissaient au souvenir du baiser. C'était terrible et elle avait envie d'oublier cela. Oui, elle ne voulait plus y penser. Cependant l'idée que tonton Ibrahima l'attendait sur la terrasse la troublait. Surtout après qu'il lui ai envoyé un message lui disant qu'il était en haut et n'attendait qu'elle.
Nafi ne comprenait pas. Ils avaient passé une bonne soirée, et depuis tout à l'heure Ibrahima était sorti pour soir disant chercher de l'eau. Mais ça faisait une éternité. Il lui avait promis de l'argent pour son voyage, mais elle voulait le remercier à sa façon. Elle avait revêtue une belle tenue sexy et l'attendait avec une position très suggestive sur le lit. En vain. Il devait être au salon à regarder encore la télévision. Sa manie à regarder la télé jusque très tard, avait poussé Nafi à éliminer le poste qu'ils avaient dans leur chambre. Elle n'aimait pas le bruit quand elle dormait. Donc, quand il voulait regarder, il sortait s'installer au salon. et c'était tant mieux pour elle. Parfois, son mari l'énervait. Mais aujourd'hui, elle avait sorti l'artillerie et après avoir attendu très longtemps, elle s'est levée, a enfilé ses pantoufles et est allé chercher son cher et tendre, bien décidé à le remercier pour son cadeau.
Elle ne l'a pas trouvé au salon, mais la télé était allumée. Elle allait le chercher dans la cuisine quand elle a entendu du bruit venant de la terrasse. Bizarre. Malgré la peur, elle est montée lentement et l'a vu...
- Ibrahima.
Il sursauté. Il avait entendu les pas et a pensé que c'était Assy qui venait.
- Nafi ? Tu ne dors pas.
- non et toi qu'est ce que tu fais ici ?
Il semblait un peu troublé
- rien, je prenais de l'air...
Elle a eut un petit rire
- à cette heure ? Dis plutôt que tu appelais au téléphone. Ibrahima tu appelais qui ?
Fermement, elle s'est approché et a arraché le téléphone qu'il avait en main. Heureusement qu'il ne gardait jamais les historiques de ses messages avec Assy. Il les supprimait sur le champ. Donc quand elle s'est mise à fouiller son téléphone, il avait juste peur qu'Assy ne se pointe à cet instant.
- tu es contente ? Nafi, tu exagères. Tu penses vraiment que je te trompe.
Elle lui jeta son téléphone.
- je ne sais pas. Vous êtes tous pareils les hommes. Tous des salopards. Mais je te préviens, si j'apprends que tu me trompes, je te tue.
Elle parlait sur un ton menaçant et il ne pouvait que la croire. Il se dit à ce moment qu'il jouait vraiment avec le feu en essayant de vouloir parler à Assy, sous son propre toit. Elle a continué à rouspéter et bien sur, comme à son habitude à exagérer en sortant des grossièretés.
- arrête Nafi. S'il te plait.
Avant qu'il ne termine, elle a tourné le dos, furieuse. Il est encore resté un bon moment avant de redescendre pour se diriger vers la chambre.
- regarde ce que j'avais préparé pour toi.
Nafi avait allumé des bougies et portait une nuisette rouge qui dévoilait tout son corps. Sur le coup au lieu d'être ravi, il était...agacé.
Il s'était approché, mais Nafi n'avait toujours pas décoléré. Elle éteignait rageusement les bougies.
- mais tu n'es qu'un crétin.
- Assy arrête.
Un moment, elle se rendit compte qu'il ne lui avait pas encore donné son chèque et se radoucit un peu.
- désolé. Mais je t'attends depuis un bon moment et toi tu va sur la terrasse à faire je ne sais quoi.
Il s'est senti coupable. Coupable de ressentir des sentiments pour Assy, coupable d'insister auprès d'elle alors qu'il avait une famille, une femme. Non, il n'était pas comme cela. Il devait refreiner les pulsions qu'il sentait quand il voyait cette belle jeune fille.
- excuse-moi, je ne savais pas, dit-il en s'approchant lentement de sa femme et en l'enlaçant.
Le lendemain, Assy s'était réveillé le cœur plus léger. Elle avait passé la nuit à réfléchir et maintenant sa décision était prise. Oui. Elle ne savait pas trop quoi faire de son avenir, mais pour l'instant présent, elle savait. Elle n'en parlerait à personne, car elle ne voulait pas être influencée. Elle avait presque 20 ans et pouvait décider d'elle-même de ce qu'elle a envie de faire. Le soir, elle a patiemment attendu que Sophie dorme pour aller trouver tata nafi. Elle était assise sur la table à manger du salon à faire des calculs, tandis que tonton Ibrahima regardait la télé en feuilletant un journal.
- tata Nafi, s'il te plait je voudrais te parler.
Elle a levé la tête avec un air agacée
- Assy, ces temps-ci tu oses...vraiment. Qu'est ce que tu me veux encore.
Assy soupira lentement pour se donner une contenance. Surtout pour essayer de réfrener cette colère qui montait en elle.
- j'ai eu ma mère. Elle m'a dit que tu lui avais dit que j'avais échoué au bac. Et pourtant 5 minutes avant, je t'avais dit que je voulais le lui annoncer de vive voix.
- et après ?
- après ? tata Nafi, qu'est ce que je t'ai fait ? Pourquoi tu es allé raconter toutes ces mensonges sur moi.
- quels mensonges ? Surveille ton langage avec moi.
- Non tata. J'en ai marre de surveiller mon langage. Ca fait un an que je suis ici et j'ai tout entendu de ta part. Tout. Sans rien dire. Parce que ma mère me le demandait et aussi parce que je ne manque jamais de respect à des gens plus âgée que moi. Mais tata Nafi, tu n'es pas mieux que moi. Walay. Ce travail, je le fais pour ma mère, pour l'aider. C'est vrai, on est pauvre, mais pas misérable.
Sa voix s'est brisée et les larmes ont commencé à couler. Mais elle n'avait pas terminé. Elle a vu tonton Ibrahima se lever, mais il ne disait rien
- je ne suis pas misérable, mais toi chaque jour, tu me traites comme telle. Comme une moins que rien. Tu dis que je ne dois pas dormir sur le lit de Dina parce que je n'ai pas de lit chez moi. eh bien si tata. Chez moi, on n'a rien, mais quand je rentre, je dors sur un lit. c'est ici que je dors par terre. Chez moi, je mange à ma faim. Je ne suis pas sale. Je porte un jean, parce que Sophie est violente et tire sur mon pagne, ce n'est pas pratique. Je supporte pleins de choses. Regarde mes bras.
Après avoir essuyé ses larmes, elle a étalé ses bras devant Nafi. Il y avait des cicatrices
- Sophie, quand elle est fâchée, elle me mord. Parfois jusqu'au sang. Elle me jette des objets, me blesse. Je me soigne tout en sachant que si je t'en parle, tu va m'insulter ou me traiter de menteuse. Quand Sophie casse quelque chose, tu le prélèves de mon salaire. pourtant je mérite chaque centime que tu me payes.
- Assy...
C'était tonton Ibrahima qui essayait de la calmer car elle parlait de plus en plus fort en pleurant. Oui, elle parlait fort parce qu'elle avait le cœur serré et les mots sortaient difficilement. Elle s'essoufflait.
- Non, je n'ai pas fini. Je ne suis pas une tricheuse, mon travail je le fais normalement. Si j'avais voulu être mauvaise, je ne serais pas là. Mais je te pardonne tout. Mais ce que tu as fait, en annonçant mon échec au bac à ma mère m'a le plus blessé. Ma mère c'est ma vie. Personne n'y touche. Mon échec te fout au pôle nord parce que tu n'as jamais eu un mot gentil pour moi, mais ma mère non. Tu n'avais pas le droit de le lui dire. là, Je n'en peux plus. J'arrête. demain je rentre chez moi et je ne viendrais plus
Nafi s'était levée
- Assy arrête maintenant. Depuis tout à l'heure je t'écoute sans rien dire, mais tu ne vas pas me manquer de respect. Imbécile.
Tonton Ibrahima s'était approché et mis entre elles
- Nafi arrête voyons. Mais tu te rends comptes de ce que tu fais.
- toi ne te mêle pas de cela. Tu dis que tu arrêtes ? Tu ne va pas passer la nuit ici. Fous le camp. Et si tu penses que je vais te payer tu rêves. Tu n'as rien foutu durant ce mois et..
Assy l'interrompit
- Gardes ton argent tata Nafi. Mon seul regret, c'est de laisser Sophie. c'est elle qui va souffrir
Elle a éclaté en sanglot avant de se diriger vers la chambre. Elle entendait les cris de Nafi
- Walay si tu dors dans cette maison, je te tue. Ingrate. Après tout ce que j'ai fait pour toi. Fais tes bagages et fout le camp.
- c'est quoi tout ce bruit Assy, demanda Dina surprise
- excuse moi Dina, je devais t'en parler, mais je m'en vais.
- Quoi ? Tu t'es disputé avec Nafi ?
- oui, et je pars. Tu va vraiment me manquer Dina.
- Assy, ne pars pas. Attend je vais parler à Nafi
- Non ne fais surtout pas ça. C'est moi qui lui ai dit que j'arrête.
Elle a éclaté en sanglot. Encore.
- je n'en peux plus Dina. C'est trop dur. Je ne réussirais jamais dans ma vie. Mais je ne veux pas être malheureuse.
Elle rangeait en même temps ses affaires et elle a fini rapidement tandis que Dina continuait à vouloir la convaincre de rester. Mais elle l'a enlacé tendrement avant de lui promettre de l'appeler.
Elle était très tard et elle avait à peine milles franc sur elle. En sortant, elle a entendu une dispute entre Nafi et son mari, mais elle a pressé le pas, se demandant comment faire. Elle a marché un bon moment avant d'atteindre l'arrêt de bus. Elle y a trouvé un jeune homme qui lui a dit que le dernier bus devait venir d'un moment à l'autre. Enfin il croyait. Elle s'est assise en priant car elle avait vraiment peur. Un moment le jeune homme est parti la laissant seule. Encore une fois, elle a paniqué et a pris son téléphone pour appeler Elhadj. Il n'a pas décroché. Elle ne voulait pas appeler sa mère et lui faire peur. D'ailleurs, elle se demandait si c'était une bonne idée de rentrer à cette heure. Et puis elle habitait si loin. Ses larmes ont commencé à couler quand tout à coup, elle a vu la voiture de tonton Ibrahima se garer et ce dernier en sortir.
Il s'était disputé avec Nafi. Il ne supportait pas cette méchanceté. Il avait bien vu que Nafi n'était pas gentil avec Assy, mais là c'était trop.
- il faut arrêter tes méchancetés. De toutes les filles qui se sont occupé de Sophie, Assy a été la meilleure. Sophie évolue. Au lieu de la remercier, tu lui fais des misères.
Nafi a éclaté de rire.
- Sophie évolue. Sophie est folle. Tu comprends ça. Même si tu prenais la meilleure nounou du monde, ça ne changera rien.
- bien, maintenant qu'Assy est partie, tu as intérêt à te retrousser les manches et t'occuper de ta fille.
- tu peux toujours rêver. J'ai réservé un billet. Je vais chercher de la marchandise. Tu n'a qu'à t'en occuper toi-même.
Elle l'a planté là et est allé dans sa chambre. Il était dépassé et avait envie de parler à Assy. Elle ne méritait pas cela. Surtout après avoir fait attention à ses cicatrices sur son bras. Elle devait être couchée. Il attendrait demain. Non, il ne pouvait pas imaginer qu'elle ait osé sortir à cette heure.
- je vais chez Khalil, dit-il en prenant ses clés.
Il avait envie de parler. Oui, il fallait qu'il se libère. Il éprouvait des sentiments pour cette fille. Et après tout, ce départ était mieux pour lui. Il pourrait l'oublier puisqu'il ne la verrait plus. En passant devant l'arrêt, il faillit heurter le poteau. C'était bien Assy qui était assise à l'arrêt toute seule alors qu'il faisait très tard.
- Assy.
Elle a sursauté et dès qu'elle l'a vu, elle s'est mise à pleurer.
- mais qu'est ce que tu fais à cette heure ici ?
Elle a essuyé ses larmes
- j'attends le bus pour rentrer.
-lève toi je te ramène à la maison.
- Non, tata Nafi va me tuer si elle me voit demain.
- cette maison est à moi. Pas à Nafi.
Il criait presque.
- non dans ce cas laissez moi dormir ici.
Il a soupiré.
- Bon lève toi, je t'amène quelque part pour que tu y passe la nuit. Demain tu rentres chez toi.
Elle a hésité un moment avant de se lever et de le suivre dans la voiture. Elle était tellement fatiguée. Mentalement, psychologiquement, physiquement. Elle était sur le point de craquer.
Alors qu'il roulait tranquillement en silence, elle n'a pas tenue
- j'ai tellement mal à la tête. dit-elle doucement.
Sans un mot, il s'est arrêté à une pharmacie et est sorti avec un sachet.
- prend. Dès qu'on arrive tu va boire cela.
Elle a hoché la tête.
- on va ou ?
- j'ai un appartement meublé aux maristes que je mets en location. Il n'y a personne là bas actuellement. Tu peux y passer la nuit tranquillement.
- c'est joli, dit-elle en posant son sac sur le canapé.
Il a juste souri avant de se diriger vers la cuisine et de revenir avec un verre d'eau
- tiens bois ton cachet.
Elle le prépara et s'assit sur le fauteuil tandis que tonton Ibrahima avait disparu dans une pièce de l'appartement. Il est revenu quelques minutes plus tard
- je t'ai préparé le lit. Tu peux aller te doucher et te coucher. Je vais te chercher à manger si tu as faim...
- Non, dit-elle en se levant.
Il se tenait l'un en face de l'autre. Soudain, Assy remarqua qu'ils étaient seuls et son cœur s'emballa. Mais tonton Ibrahima ne faisait aucun geste vers elle.
- Assy, je ne reviendrais pas sur ce qui s'est passé ce soir. C'est légitime. Tu as trop supportée. merci pour tout ce que tu as fait pour Sophie
Elle a baissé la tête. Confuse. il y a eu un long silence entre eux.
- je t'aime Assy.
Ces maux de tête lui jouaient des tours. Elle a cru mal entendre et n'a eut aucune réaction.
- Assy...
Elle a sursauté et relevé la tête.
- je sais que c'est ridicule, bête, irresponsable aussi, mais je n'y peux rien. Depuis des semaines, j'essaie de lutter contre cela, mais je n'y arrive pas. Je suis plus âgé que toi, je suis marié et père de famille. Et pourtant tu arrive à m'émouvoir. Je ne t'obligerais à rien. Mais je tenais à te le dire. Tu me...
- Pourquoi ?
Il a haussé les épaules, cherchant une réponse
- pourquoi la terre est ronde ? Pourquoi le ciel est bleu ? Pourquoi tu t'appelle Assy ?
Elle a souri
- la terre est ronde à cause de l'attraction, le ciel est bleu à cause de la diffusion de la lumière solaire sur l'atmosphère, et je m'appelle Assy comme ma grand-mère paternelle, Assyatou Fall
Il s'est approché, les mains dans les poches, et la regardant fixement. Qu'est ce qu'elle le trouvait beau.
- puisque tu as réponse à tout, dis-moi pourquoi tu m'attire autant
Elle s'est troublée, bafouillant, ne sachant quoi dire alors qu'Ibrahima était là, tranquille à la regarder avec un petit sourire. Il s'est alors approché et a pris son visage entre ses mains avant de déposer un léger baiser sur ses lèvres. Mais elle n'en avait pas assez. Elle voulait plus. Elle s'est rapprochée encore et a posé ses mains sur sa taille. Involontairement. ils se sont embrassés passionnément. Elle en avait le souffle coupé et toutes ses sensations l'effrayaient. Lui évitait de la toucher car il avait peur des pulsions qu'Assy réveillait en lui.
- j'ai un copain...et c'est sérieux, dit-elle en s'écartant un peu. Et vous vous êtes marié. Ce n'est pas bien.
Bien sur il aurait du se douter qu'elle avait un petit copain. Belle comme elle était. Et ça l'a énervé.
- ça ne change rien à ce que je ressens pour toi.
- je ne travaille plus pour vous. On ne se verra plus. Ça sera plus simple.
- c'est ça ta solution ?
Elle n'en voyait pas d'autres. Elle devait avouer que les sentiments qu'elle commençait à éprouver pour son patron ont joué sur sa décision. Elle ne devait pas permettre qu'il se passe quoi que ca soit entre eux. Sa mère ne le supporterait jamais. En plus il y avait Elhadj. Son amoureux.
- tonton Ibrahima...
- arrête de m'appeler tonton...
Elle a ouvert la bouche, incapable de réfléchir...ce n'était pas une bonne idée de venir ici avec lui. Elle a reculé avant de prendre son sac.
- je crois qu'il vaut mieux que je parte.
- reste. J'allais partir. Je ne vais pas insister Assy. J'éprouve les mêmes scrupules que toi. Je ne suis pas un coureur de jupon. Je n'ai jamais trompé ma femme. Et le pire tu n'es pas vraiment mon genre. Tu es très belle certes, mais trop jeune pour moi, trop timide....
- alors pourquoi ?
Non elle ne comprenait vraiment pas. Elle aussi le trouvait différent de son Elhadj, qu'elle prenait pour une référence puisqu'elle l'aimait. Tonton Ibrahima était plus mature, plus beau, plus grand, plus...âgé aussi. Et surtout était marié à la fille de la bienfaitrice de sa mère. Trop de choses. Plus qu'elle ne peut en supporter.
Comme il ne trouvait pas de réponse et comme il voyait qu'Assy était complètement perdue, il a préféré prendre congé plutôt que de la perturber plus qu'elle ne l'était. Elle est allée se coucher l'esprit ailleurs, en pensant à sa dure journée. Et à tonton Ibrahima. Dès demain, elle partirait d'ici, et ils ne se reverraient plus. C'était la meilleure chose à faire.
Le bruit de la sonnerie lui semblait lointain. Assy mit du temps à se réveiller et à se souvenir de ce qui s'était passé la veille. Elle se releva alors brusquement. Oui, elle entendait sonner à la porte. Sursautant, elle courut ouvrir et se trouva face à tonton Ibrahima qui tenait un sachet dans ses mains.
- désolé, je dormais.
- et ton téléphone ? J'ai essayé d'appeler mais ça ne passait pas.
Depuis la veille, elle l'a cherché en vain.
- j'ai du le laisser à l'arrêt de bus. Je ne le trouve plus.
- tu me laisses entrer quand même.
Elle s'écarta prestement, et il passa devant elle lentement. Elle ne put s'empêcher de respirer l'odeur de son parfum et d'apprécier son pantalon Kaki, son Lacoste et ses belles sandales. Oui, il était toujours bien habillé.
- tu as bien dormi ? demanda t'il en déposant le sachet sur la table et en se dirigeant vers elle.
Tout d'un coup, elle était intimidée. Elle était en peignoir de bain et devait avoir une sale tête. La veille elle avait trouvé une salle de bain tellement accueillante qu'elle s'était laissé allé à une longue douche, mouillant ses cheveux et laissant l'eau couler longtemps sur tout son corps, espérant en même temps faire couler tous ses soucis. A défaut, elle s'est sentie mieux et s'est endormie dès qu'elle a posé la tête sur l'oreiller. Et ça lui avait fait du bien. Le peignoir, elle l'avait trouvé sur le lit et l'avait enfilé.
- oui, j'ai bien dormi. dit-elle en passant une main sur ses longs cheveux ébouriffés qui lui tombait sur les épaules, pour essayer de les arranger dans un sursaut de coquetterie, ce qui fit sourire Ibrahima.
- tu es très belle Assy...
Là, elle avait juste envie de disparaitre tellement elle était gênée. Elle bafouilla des paroles incompréhensibles avant de disparaitre dans la salle de bain. Après une douche rapide, elle s'habilla, arrangea la chambre et prit ses affaires pour partir. Mais elle eut la surprise de sa vie en voyant sur la table du salon un petit déjeuner royal. Sur un plateau était posés des croissants, du lait, du sucre, des cartons de jus de fruits. Tonton Ibrahima regardait la télévision et a souri quand il l'a vu entrer.
- je t'ai préparé un petit déjeuner.
Elle ne savait pas ou se mettre et a hésité. Jamais de sa vie, on ne lui avait présenté ce genre de choses pour son petit déjeuner. Une petite lueur dans sa vie sombre...
- c'est trop tonton...dit-elle en s'approchant lentement
- je t'ai dit de ne pas m'appeler tonton...
Elle ne dit rien et s'assit sur le fauteuil opposé à celui d'Ibrahima.
- c'est pour toi, sers toi.
Elle ne se fit pas prier. Elle avait faim. Elle mangeait en silence, un peu gênée par cette sorte de proximité. Elle avait l'impression que la pièce était petite et ne savait pas où poser son regard. Qui s'attardait de temps en temps sur les tableaux qui ornaient la pièce. Partout sauf sur Ibrahima. Finalement, elle a levé les yeux et à croisé ceux de ce dernier fixé sur elle. Intense. Elle a avalé difficilement la bouchée avant de se lever.
- j'ai bien mangé. Merci pour tout. Maintenant je dois rentrer.
Il s'est levé et l'a aidé à débarrassé. Elle s'apprêtait à faire la vaisselle, mais il l'a arrêté.
- laisse tomber. Il y a une personne qui vient nettoyer tous les jours.
Elle a quand même insisté pour nettoyer tout, tandis qu'il est retourné s'installer au salon. Elle le sentait très distant ou préoccupé. Mais ne voulait rien demander. Elle voulait juste rentrer et tourner la page.
- je suis prête. S'il vous plait, prêtez-moi votre téléphone. Je voudrais appeler ma mère pour la prévenir.
Il lui tendit son téléphone dernier cri et elle ne sur même pas comment l'utiliser. Il sourit et le reprit pour l'aider avant de lui tendre à nouveau.
- Assy tu es ou ? s'écria sa mère dès qu'elle reconnut sa voix ? Tu va bien ? Nafi m'a appelé ce matin pour me dire que tu avais quitté la maison depuis hier ? Tu es ou ?
Elle semblait paniquée.
- je vais bien maman. Je vais t'expliquer tout à l'heure ; je viens.
- aye Assy, depuis tout à l'heure j'ai eu tellement peur.
- je vais bien maman.
- alhamdoulillah
Elle voulait savoir ce qui s'était passé, mais elle promit de tout lui dire une fois sur place.
- merci. dit-elle en lui tendant l'appareil.
Il le prit en souriant. Il avait tellement envie de la prendre dans ses bras, de la rassurer. Il voulait lui dire à quel point elle l'émouvait, mais il savait que ce n'était pas le moment. Hier, quand il lui a parlé, il a remarqué son aire dépassé...apeuré. Non, elle avait assez de problème. Il devait attendre. Attendre qu'elle soit plus disposée à l'écouter, attendre qu'elle soit plus prête à l'accueillir dans sa vie. Car oui, il voulait d'elle dans sa vie. D'une manière ou d'une autre.
- tu compte faire quoi Assy ? demanda t-il
Elle haussa les épaules et aussitôt le masque de tristesse revint sur son beau visage
- je ne sais même pas. Je vais rentrer et parler à ma mère.
Il y eut un silence. Elle s'assit sur le fauteuil à côté. Lassement.
- mais je crois que je vais chercher un autre travail. Je ne peux pas permettre de rester à ne rien faire. J'aurais tellement voulu avoir mon bac, aller à l'université, avoir une bourse, aider ma mère
Une larme coula lentement sur sa joue. Elle l'essuya rapidement en se forçant à sourire.
- ma mère n'a que moi. On n'a pas toujours vécu comme cela. depuis une dizaine d'année, , je la vois courir pour nous donner à manger, pour nous permettre de faire nos études, pour qu'on réussisse. Pendant des années, je l'entendais gémir toute la nuit de douleur et de fatigue car toute la journée, elle a fait les linges pour ne pas qu'on manque de quelques choses. Elle se tuait à la tâche pour nous. Et pourtant, elle se levait le matin et repartait. Sans jamais se plaindre. Au contraire. Je me jurais alors qu'un jour, elle ne ferait plus cela. Mais...
Sa voix s'était brisée et elle a enfouie son visage entre ses mains, essayant de maitriser les sanglots qui l'étranglait. Elle respirait bruyamment pour se contenir.
- Assy...je suis désolé, dit-il en s'asseyant à côté d'elle et en lui touchant le dos. Et ton père ? Il est mort ?
Elle se releva et essuya ses larmes.
- je n'ai pas de père. Il nous a abandonné. J'avais 10 ans. Ma mère pensait que je ne comprenais rien, mais je voyais tout. J'entendais tout. Ma mère pleurait tous les soirs. Je l'entendais. Je ne dormais pas. On était seule. Personne n'est venu nous aider. Personne.
Elle murmurait ses mots, regardant un point invisible devant elle, complètement plongée dans ses souvenirs, le visage grave, douloureux.
Oui, elle se souvenait de tout. Elle entendait sa mère faire attendre des créanciers. Elle se souvient de ce jour ou sa mère avait son frère sur le dos, et la tirait d'une main et est allé déposer tous ses bijoux chez un monsieur qui lui a assuré que sa maison ne sera pas saisie. Et pourtant, ils ont du partir. Et tourner en rond. A la recherche d'un gite. Désespérément. Elle se souvient des paroles dures de ses tantes, sœurs de son père envers sa mère, de leur refus de les héberger, de les aider. Oui, elle se rappelait de tout et c'était la première fois qu'elle en parlait. Même avec sa mère, elles n'ont jamais parlé de son père.
- Assy...
Elle sortit de sa torpeur et regarda Ibrahima qui lui tendait un mouchoir. Elle le prit et essuya ses larmes.
- ne laisse pas tomber Assy. Tu y arriveras.
Elle le regarda.
- Non, je suis fatiguée tonton Ibrahima. Tellement fatiguée.
- tu ne dois pas. Tu viens de me dire que tu dois aider ta mère. Ce n'est pas en baissant les bras que tu va y arriver. La vie n'est pas toujours facile. Parfois on passe par des moments très durs. Mais il fait savoir se relever, affronter les choses et avancer. Moi je crois en toi.
Elle le regarda sans rien dire et haussa les épaules. Il avait envie de la protéger, de l'aider, mais son téléphone sonna à ce moment. Nafi
- mais tu es ou ? Sophie est très agitée. Je suis fatiguée. Je dois sortir. Tu as intérêt à revenir la surveiller.
- Nafi, s'il te plait, arrête de crier.
- je ne crie pas, je t'expose les faits. je ne suis pas là pour m'occuper de ta fille.
Et crac elle avait raccroché.
- désolée, c'est moi qui vous retiens. Je vais partir. Encore merci pour tout.
Elle avait déjà atteint la porte et l'ouvrait quand il l'a rattrapé.
- attend. Tiens prend ceci, dit-il en lui tendant une enveloppe
- Non...
- écoute tu as travaillé tout ce mois. Ce n'est pas normal qu'on ne te paye pas voyons.
Elle a hésité une seconde. Elle n'avait pas trop le choix. Si elle refusait, ça allait être cailloux pour elle et puis elle avait travaillé ce mois.
- merci dit-elle en mettant rapidement l'enveloppe dans son sac sans regarder.
Il la déposa à l'arrêt de bus le plus proche en continuant à la conseiller. Il l'a regarda s'éloigner, triste de ne pouvoir faire plus pour elle. Mais il voulait juste lui laisser le temps de traverser tout ça. Il reviendra dans sa vie. C'était obligé.
- maman...
- oh ma Assy
Elle lui tendit ses bras et elle plongea en éclatant en sanglot. Ce sentiment de culpabilité ne la quittait pas.
- aye Assy, khana tu veux que je pleure ?
Incapable de parler, elle secoua la tête entre les pans du boubou de sa mère
- Donc arrête toi aussi. Tu as toujours été brave Assy. Ne te laisse pas aller ma chérie, mon cœur, tu es ma vie.
Elle se mit à lui chanter ses louanges en évoquant ses lointains ancêtres guerriers, la faisant sangloter de plus belle. Mais Mère Saly chantonnait en souriant, les larmes coulant sans qu'elle ne cherche à les retenir. Elle avait mal pour sa fille. Au bout de quelques minutes, Assy se releva
- Nopi nga ?
Elle se força à sourire pour rassurer sa mère.
- man tu m'as manqué. Ne t'inquiète pas. Ça va passer.
Mère Saly lui posa pleins de questions sur les résultats et elle lui expliqua que c'était les maths et les physiques qui l'avaient fait tomber. Elle était passée à côté.
- la prochaine fois sera la bonne ma fille...
- maman, je ne pense pas que je vais refaire le bac. Il faut que j'essaie de faire quelque chose de ma vie.
- qu'est ce qui s'est passé avec Nafi ? demanda t-elle gravement
Assy se mit à lui expliquer tout. Et quand elle eut fini, sa mère était bouche bée. Dire qu'Assy ne lui disait rien. Elle ne se plaignait jamais. Elle se sentit coupable. C'était à elle de protéger ses enfants pour leur éviter de vivre ce genre de choses.
- mais ne t'inquiète pas. Dès demain, j'irais chercher du travail. Je restais avec tata Nafi à cause de toi. Je savais les relations que tu as avec sa mère. Mais c'était trop.
- et tes études Assy.
Elle soupira.
- le plus important c'est qu'on vive. Il faut que je travaille maman.
- j'ai ma petite table.
- mais c'est difficile pour toi d'aller au marché. Je sais que tes arthroses te font trop souffrir. Tu fais des efforts. Les études je les reprendrais plus tard. Je te le promets. Pour le moment laisse-moi chercher du travail.
Elles discutèrent encore pendant longtemps de son avenir sans trop s'entendre. Assy voulait travailler et essayer de mettre sa mère et son frère dans de meilleures conditions, tandis que mère Saly voulait qu'elle termine ses études. Mais sa décision était prise.
Le soir, elle ne fut pas surprise de voir venir Elhadj. Elle était assise à discuter avec ses voisines devant la maison car mère Saly avait des maux de tête et avait préféré se coucher très tôt. En fait, elle était plus perdue dans ses pensées. Dès qu'elle le vit un fort sentiment de culpabilité l'envahit. Ou de honte peut être. De s'être laissé aller avec un autre homme, de l'avoir laissé l'embrasser et surtout coupable de ressentir des sentiments aussi fort pour cet homme. Qui plus est un homme marié. Elle ne devait pas. Elle ne pouvait pas. Elhadj ne méritait pas cela. En plus elle ne pouvait pas effacer du jour au lendemain les sentiments qu'elle avait pour lui. Non. Elle l'aimait. Et pas un autre. Donc elle l'accueillit avec un grand sourire car il affichait une mine grave surement pour compatir à son échec
- ma chérie, tu va bien ? Tu m'as manqué tu sais. Dit-il en la tirant et en l'amenant main dans la main
- toi aussi tu m'as manqué.
- et le moral ? Tu tiens le coup ?
Elle hocha la tête et se blotti dans ses bras en l'enlaçant par la taille
- comme je t'ai vu ça va beaucoup mieux.
il marchait lentement en discutant.
- je t'ai appelé toute la journée et je tombais sur ta boite vocale, dit-il
- je l'ai perdu depuis hier. Au fait, j'ai arrêté mon travail chez tata Nafi.
Elle lui a expliqué brièvement pourquoi elle avait décidé de partir. Il comprenait. En parlant ils étaient arrivés presque chez Elhadj et ce dernier lui proposait de rentrer quelques minutes.
- Non, Elhadj, retournons. Ma mère ne se sent pas bien.
- Assy, je te demande juste de rentrer une minute. Ce n'est pas diable quand même.
Elle hésita un moment avant d'entrer. Dès qu'elle s'assit, Elhadj vint se blottir contre elle. Presqu'automatiquement, elle pensa à tonton Ibrahima. Son visage lui revint, son odeur, ses lèvres. Et elle se recula.
- Assy. Ça fait tellement longtemps. Tu peux au moins m'embrasser.
-Elhadj, je n'ai pas la tête à cela. Tu peux comprendre ca quand même.
- ça va te remonter le moral, dit-il en souriant
Il approchait son visage. Elle ne voulait pas et tourna la tête pour éviter ses lèvres.
- s'il te plait Elhadj.
Il soupira et s'écarta. Parfois il ne comprenait plus Assy. Il l'aimait à la folie, mais sa timidité commençait à lui peser. Surtout qu'avec ses activités politiques, il rencontrait pleins de jolies filles qui lui faisaient comprendre qu'il les intéressait. Mais non, son cœur était à Assy et il ne voulait pas la tromper. Même si parfois il était vraiment tenté. Mais il était exclusif. Quand il n'avait pas de sentiments, il avait du mal. Après tout c'était un homme et avait des besoins. Mais avec Assy...seulement elle.
- Assy, tu sais que je t'aime. Si c'était possible même demain je t'épouse. Mais on ne peut pas. Mais je suis un homme Assy. J'ai besoin d'un peu d'affection, que tu me montres que tu m'aimes un peu.
- mais je t'aime
- oui je sais...mais ...
Il n'arrivait pas à exprimer tout ce qu'il voulait et il préférait laisser tomber. Il savait qu'Assy l'aimait et comme lui n'attendait que le mariage soit scellé entre eux. C'était mieux. Si c'était un autre, il aurait pu penser qu'elle avait quelqu'un d'autre, mais lui savait qu'Assy n'était pas ce genre. Non, Assy ne connaissait que lui.
- c'n'est pas grave ma chérie. Dit-il en déposant un bisou sur sa joue. Je t'aime quand même. Et j'ai une bonne nouvelle.
- c'est quoi ?
- Mr Mbaye est pressenti comme ministre dans le nouveau gouvernement. Il m'a appelé pour m'en parler et figure toi que dans ce cas, il va faire de moi son conseiller.
- c'est vrai ?
- ahh...encore faut-il qu'il soit ministre. Donc prie pour lui et donc pour moi.
Elle était contente pour lui. Il avait beaucoup d'ambitions et lui souhaitait vraiment le meilleur. Ils restèrent à discuter et elle lui dit que dès lundi, elle comptait sillonner la ville pour chercher du travail.
- pour le moment je n'ai pas de portable. Je vois que tu en a deux nouveaux. Ou est ton ancien ?
- il est là. Mais je vais aller à Podor rendre visite à ma mère comme c'est les vacances scolaires. Je vais le lui amener. C'est Mr Mbaye qui m'a mis en rapport avec son fournisseur et m'a demandé de prendre des portables.
- dans ce cas donne-moi un...
Il a semblé réfléchir un moment
- Assy, prend le portable de ta mère. Elle n'en a pas besoin. En attendant. Dès que j'ai une rentrée d'argent, je t'en achèterais un.
Comme d'habitude, quand on lui parlait d'argent ou de dépense, il était agacé.
- je plaisante Elhadj. Ce n'est pas grave. Je dois partir.
Il la raccompagna et promit de passer le lendemain chez elle pour voir sa mère. Il devait partir voir sa mère et sur le coup l'appela pour qu'elle lui parle. Sa mère était une toucouleur qui même si elle comprenait le wolof, ne le parlait presque pas. Mais cette fois elle fit l'effort de lui demander des nouvelles de sa mère et de l'encourager pour m'examen qu'elle a échoué. Assy connaissait la plupart des membres de la famille d'Elhadj et ces derniers étaient très gentils avec elle.
Plus tard, sur le point de se coucher, elle se rappela l'enveloppe que lui avait remit tonton Ibrahima et l'ouvrit. Elle faillit tomber à la renverse. Il y avait 150 milles. En billets tout neufs. Elle compta et recompta et du s'y prendre à 5 fois pour s'assurer qu'il y avait cette somme. Elle paniqua un moment se demanda ce qu'il fallait faire. Puis, se raisonna. Elle avait besoin de cet argent et ne savait pas quand elle en aurait un nouveau. Et puis elle avait décidé de ne plus avoir de contact avec la famille Aidara. Donc elle se fit une raison. Difficilement car elle ne pouvait s'empêcher de penser à tonton Ibrahima. Une véritable obsession. Elle se surprenait à prier de ne plus penser à lui. Elle ne voulait plus. Pour cela, elle essayait de penser fort à son chéri. Mais rien. Elle pensait encore à Ibrahima avant de dormir.
Le lundi, elle se leva sans trop savoir ou se diriger. Elle avait gardé son argent après avoir donné une bonne partie à sa mère en lui disant que c'était les économies qu'elle gardait. Donc elle était bien décidée à trouver du travail. Elle prit un car et descendit vers les Sicap. Elle ne voulait plus travailler dans les familles et donc se limiter à toquer dans les boutiques pour demander s'il ne cherchait pas de vendeuse. Elle sillonna toute la zone en vain. C'était toujours les mêmes réponses négatives. Elle reçut quelques propositions désobligeantes, mais passa son chemin. Le soir, elle était tellement fatiguée par autant de marche qu'elle ne se déshabilla pas pour dormir. Le lendemain, elle se rendit en ville et fit le tour des restaurants pour voir s'ils avaient besoins de serveuses ou même d'aide dans la cuisine. Mais toujours rien. Certains prirent son numéro de téléphone en promettant de rappeler. Elle avait pris celui de sa mère car Elhadj n'était pas disposé à lui donner un portable. Quand elle recevait des coups de fil le soir, elle était pleins d'espoir, mais était toujours obligé de déchanter. On lui faisait des propositions indécentes, en lui faisant miroiter des salaires extraordinaires. Un propriétaire de restaurant l'a appelé pour lui dire qu'elle lui plaisait et que si elle voulait, elle lui trouverait un poste de serveuse, mais il fallait se retrouver dans une auberge avant. Elle refusait toujours et se dit qu'elle devait patienter.
Toute la semaine, à part ces propositions indécentes, elle n'a rien eut de concret. Et elle commençait à désespérer. Alors qu'elle sillonnait le plateau elle croisa son cousin Malik. Ce dernier sachant qu'elle cherchait du travail lui proposa de faire des photos de mode car elle avait un visage magnifique. Elle déclina poliment. Non, timide comme elle était elle n'était pas intéressée par ce genre de chose. Néanmoins, il prit son contact et promit de la rappeler s'il trouvait quelque chose de concret.
Le vendredi, elle est rentrée complètement découragée et a trouvé mère Souka, la maman de Nafi en grande discussion avec sa mère. Après l'avoir salué, on l'invita à venir s'assoir
- Assy, je suis venue voir ta mère quand Nafi m'a dit que tu étais rentrée chez toi. Quand elle m'a expliqué ce qui s'était passé, je lui ai dit que la Assy que j'ai vu ne ferait jamais cela. Toutes les mères connaissent leurs enfants, qu'ils soient bons ou mauvais. Je sais que Nafi n'est pas facile. Tu es la première à t'être occupé de Sophie pendant si longtemps et ça il faut être une personne bien pour le faire. Actuellement, ils n'ont personne pour s'occuper d'elle et tu connais Nafi. Elle n'aime pas s'occuper de son enfant. La fille qu'elle avait trouvée est restée 2 jours avant de fuir car Sophie n'en voulait pas. Depuis hier elle est chez moi et passe son temps à te réclamer. Ta mère m'a dit que tu cherchais du travail. Reviens Assy. Je parlerais à Nafi. Ca va s'arranger.
Assy avait gardé la tête baissée en l'écoutant. Elle avait beaucoup de respect pour mère Souka et ne voulait pas lui refuser un service. Mais pour retourner chez tata Nafi, il n'en était pas question
- maman Souka, je t'ai entendu. Je veux que tu sache que j'aime Sophie. Je la considère comme ma sœur. C'est pourquoi le seul regret que j'ai eu en partant c'était de la laisser la bas. Ça ne me plait pas, mais il le fallait. Nafi ne me supporte pas. Elle me fait et me dit beaucoup de mal. Je ne lui en veux pas. Mais je ne veux pas qu'on en arrive à des extrémités. C'est mieux de se séparer comme cela. J'irais la voir plus tard pour lui demander pardon, mais je suis désolé, je ne retournerais pas la bas.
Mère Souka continua à parler pour la convaincre mais elle resta ferme.
Le soir même, elle reçut un appel sur le téléphone de sa mère qu'elle avait confisqué. Sa mère et son frère dormaient et elle sortit de la chambre pour répondre. C'était un numéro masqué et son cœur fit un bon en devinant de qui il s'agissait.
- allo dit-elle doucement le cœur battant
- Assy...
Son nom dit de cette façon lui donna des frissons.
- tonton Ibrahima...
- je t'avais demandé d ne plus m'appeler comme cela voyons...
- mais...
- pas de mais, pour toi ça sera Iba.
Elle pouffa.
- et puis, on n'a aucun lien de parenté qui puisse faire de moi ton oncle. Si c'est pour l'âge, tu te trompe Assy, je ne suis pas si vieux que cela. je sais que tu pense que je suis proche de la retraite, mais en fait...
Il ne put terminer car Assy était parti sur un éclat de rire. Ça faisait plaisir de l'entendre rire comme cela. Puis plus sérieusement
- tu m'as manqué tu sais.
Elle stoppa son rire et garda le silence. Et pourtant c'était vrai. Il ne pouvait s'empêcher de penser à elle. A la maison, Sophie tournait en rond en répétant son nom et en la cherchant partout. C'était triste de la voir. Nafi ne s'en souciait pas plus que cela et il avait été dans une agence qui lui avait donné une qui n'était pas resté 2 jours. On lui avait promis une autre qui devait commencer le lundi. Mais Sophie réclamait Assy. Et lui aussi d'ailleurs. Mais il ne voulait plus qu'elle revienne à la maison. Non c'était malsain. Parcequ'il avait des sentiments pour elle et il aurait des scrupules en la sachant sous le même toit que sa femme.
- tu ne dis rien. Donc je ne t'ai pas manqué ?
- Si...dit-elle dans un souffle, à peine perceptible. Vous m'avez manqué
- Tu...
- quoi ?
- quand tu me parles en français tu utilise « vous ». C'est fini tout ça ok. Bon on recommence.
Avant qu'elle ne comprenne, il avait raccroché. Encore sous le coup de la surprise, le téléphone sonna à nouveau et c'était lui.
- salut jolie jeune fille
- salut.
- qui ?
-...heu...Iba
- voila...
- tu fais quoi de beaux depuis que tu es partie ?
Elle sourit
- rien. Je suis là. Et comment va Sophie.
- elle passe son temps à te réclamer. Tu lui manques
- elle aussi me manque tellement. J'aimerais vraiment lui rendre visite.
- pourquoi tu ne viens pas ? Tu a peur de Nafi.
Ils éclatèrent de rire et se mirent à discuter tranquillement. Nafi lui expliqua qu'elle cherchait du travail sans vraiment entrer dans les détails et il lui promit de chercher pour elle auprès de ses amis. Une demi-heure plus tard, ils étaient encore au téléphone et un moment alors qu'elle rigolait, elle a entendu sa mère l'appeler.
- je dois y aller. Ma mère m'appelle.
- ok. Je te rappellerais.
- au fait ou as-tu pris le numéro de ma mère ?
- c'est toi qui me l'as donné.
Comme elle réfléchissait en silence...
- la dernière fois tu as utilisé mon téléphone pour l'appeler.
- c'est vrai.
- allez bonne nuit Assy dit-il dans un souffle.
Elle frissonna, tellement sa voix était sensuel en disant son nom.
- Bonne nuit Ibrahima...
Elle raccrocha rapidement et rejoignit sa mère qui s'inquiétait de ne pas la voir à coté d'elle. Elle ne dormit pas rapidement. Elle se mit encore à penser à tonton Ibrahima...Non, Iba. Elle sourit en se remémorant toute leur conversation. Elle avait vraiment des sentiments pour lui. Sinon comment expliquer ce sentiment de béatitude qui l'emplissait, ce sourire qui ne quittait pas son visage, même dans la pénombre de la chambre. Elle aurait le temps de culpabiliser et de réfléchir à ce qui se passait entre eux plus tard ; pour le moment, elle voulait juste savourer...
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