Ils étaient jeunes, beaux, et s'aimaient plus que tout au monde, bien que ni l'un ni l'autre ne semblait s'en rendre compte. Ils paraissaient vivre sur un nuage qu'eux seuls pouvaient atteindre, et qui demeurait désespérément inaccessible aux autres, ces autres qui les contemplaient.
Leur rencontre avait été un hasard, un pur caprice du destin. Une rencontre simple et efficace, d'une banalité affligeante. Un vrai cliché. Ils s'étaient croisés dans la rue, s'étaient regardés du coin de l'œil, puis avaient marché dans deux directions opposées.
Ensuite, tout était allé très vite. Ils s'étaient recroisés par hasard, enfin décidés à s'adresser la parole, s'étaient découvert des amis communs, des points communs, et ce jusqu'à une passion commune : la musique.
Ils avaient commencé à passer du temps ensemble, à parler et à rire. À se fréquenter de plus en plus. Et à s'aimer sans le savoir. Mais, sans doute pris par un accès de timidité, ils ne se l'avouèrent jamais.
Un jour, les deux amoureux grandirent et se quittèrent. Ils firent des études séparément, trouvèrent chacun un travail qui leur plaisait, et se marièrent chacun avec une autre personne. Ils eurent des enfants heureux. Lorsqu'ils se revirent, la jeune femme devenue mère de famille jeta un œil à l'alliance de l'homme qui lui faisait face. Elle se mit à pleurer à torrents et n'avoua ce crime affreux, cet amour qui l'embrasait, que dans sa lettre d'adieux.