59. In the middle with you
Au moment où l'introduction de la chanson des Stealers Wheel « Stuck In The Middle With You » a laissé place à un rythme beaucoup plus entraînant, buvant au goulot la bouteille de liquide blanc qu'elle tient toujours en main, la responsable qui avance vers Julia se met à chantonner les paroles tout en exécutant de curieux mouvements de danse :
— « Well I don't know why I came here tonight, I got the feeling that something ain't right, I'm so scared in case I fall off my chair, And I'm wondering how I'll get down the stairs, Clowns to the left of me, Jokers to the right, here I am, Stuck in the middle with you. Yes I'm stuck in the middle with you. »
Arrivée au niveau de sa prisonnière, remontant légèrement sa jupe, la «délurée », après avoir posé la bouteille sur le coin de table, se met à califourchon sur le fauteuil. Installée comme si elle chevauchait Julia, elle vient en quelques secondes de faire basculer son interrogatoire vers l'absurde.
Dans cette posture indécente, alors qu'elle semble à présent frotter son entre-jambes contre le corps de l'adolescente, la blonde approche son visage du sien. Utilisant à nouveau le tutoiement pour paraître plus intime, elle murmure à son oreille :
— Ton fœtus était délicieux, puis elle chantonne : « Here I am, Stuck in the middle with you. Yes I'm stuck in the middle with you. »
Après un court instant durant lequel elle toise Julia de son regard démoniaque, que sa prisonnière n'ose pas croire les mots qu'elle vient d'entendre, la geôlière renchérit :
— Tu voudrais peut-être que je te montre la cicatrice qu'a laissée la césarienne ? Est-ce que ça te ferait plaisir ? Est-ce que tu aimerais ça ?
Toujours parfaitement stoïque, Julia, dont les paupières sont restées closes, peut maintenant sentir l'haleine de celle qui lui parle - un relent écœurant de viande crue, d'alcool et de tabac froid, ce qui lui donne instantanément un violent haut-le-cœur.
Dans une étreinte devenue langoureuse, la responsable libère d'une pression sur un mécanisme la bouche de Julia et en actionnant un second système, elle s'offre un accès illimité à son torse. Maintenant affranchie de ces quelques entraves, Julia, si elle sort de sa posture léthargique, peut avoir une mobilité presque complète de sa tête.
À l'arrière-plan de ce calvaire se jouant au centre de l'impériale construction de salle de banquet, la tentative de forcer l'ouverture de la double porte est à présent couverte par les paroles et la musique des Stealers Wheel qui se diffuse toujours par des haut-parleurs : « Clowns to the left of me, jokers to the right, Here I am, stuck in the middle with you. »
Quand le pont du titre « Stuck In The Middle With You » et son solo de guitare commence et ambiance la situation d'une étrange manière, sans se préoccuper de l'arrivée prochaine de ceux qui la stopperont, la responsable reprend l'interrogatoire de Julia :
— J'ai besoin de savoir tout ce que tu sais sur ces créatures. Pas parce que ça m'intéresse, mais parce que c'est devenu une question de vie ou de mort. La survie, toi au moins, tu peux comprendre ça ?
La blonde au comportement lunatique glisse maintenant sur le torse de Julia une main baladeuse. Elle se met à caresser du bout des doigts le tissu du débardeur de couleur sombre et sa bouche beaucoup trop près de l'oreille de l'adolescente, elle lui murmure :
— Écoute-moi. C'est très simple. Si tu me dis ce que tu sais sur ces créatures, je te promets que je ne les laisserai pas te faire de mal. Tu ne le connais pas encore comme moi je le connais, mais celui qui vient pour t'enlever à moi fera tout pour te faire parler. Absolument tout. Jusqu'à disséquer ton cerveau pour en violer le plus insignifiant des souvenirs.
Sa tête comme imbriquée dans celle de sa prisonnière, c'est dans une étreinte devenue sexuelle que la blonde l'embrasse sur la bouche avant de lui mordre la lèvre inférieure et de poursuivre, son front collé au sien :
— S'il te plaît, Julia, dis-moi tout ce que tu sais sur ces créatures, susurre-t-elle dans un souffle qui se prolonge pour ne devenir qu'un sifflement à peine audible.
Mais alors qu'à l'autre bout de la pièce le tumulte en provenance de la double porte n'a toujours pas cessé, que plus rien ne semble pouvoir mettre fin à son calvaire en dehors de la mort, Julia rouvre les yeux et elle mord à pleine bouche l'intégralité du nez de celle qui l'interroge.
Prise au piège de cette attaque sournoise, la responsable tente de s'y soustraire. Il ne lui faut que quelques secondes d'un effort aussi brutal que douloureux pour se sortir de l'agression qu'elle subit, néanmoins, son nez a été arraché.
Privée de cette excroissance de peau et de cartilage qui formait auparavant la pointe majestueuse de son visage, la blonde s'écarte brusquement de Julia comme elle aurait fui la peste. Hurlant des mots incompréhensibles, elle atterrit sur le coin de table et sa montre entrant en contact avec le meuble fait alors stopper net la musique. Glissant à terre tout en emportant dans son sillage l'ensemble de ce qui s'y trouvait rassemblé, la responsable rejoint le sol dans un tintamarre strident de casseroles rebondissant sur le marbre et de vaisselle s'y brisant.
Celle dont la queue de cheval s'est détachée durant la culbute cherche maintenant d'une main fébrile la serviette grise tombée près d'elle. L'attrapant, elle s'empresse de la déplier pour s'en couvrir le visage.
Le nez de sa geôlière toujours en bouche, Julia, d'un puissant crachat, le rejette de côté. Puis toute son attention se porte sur l'infâme personnage qui, à plat ventre sur le sol, est hors de son champ de vision cachée derrière l'imposant coin de la table. Profitant de cet instant de répit, Julia tente à nouveau de forcer ses entraves lorsqu'elle entend la blonde articuler d'une voix nasillarde feutrée au travers du tissu :
— Espèce de... Espèce de sal... Espèce de salope ! Petite pute ! Sale pute ! Tu vavas... Tu vas me le payer.
Trouvant sur le sol la cloche argentée, la responsable s'en approche en rampant vers elle. La serviette qu'elle tient toujours et qui dissimule le bas de son visage est à présent maculée de son propre sang. Regardant son reflet déformé dans la surface réfléchissante, c'est avec appréhension qu'elle retire lentement le morceau de tissu. En découvrant que l'absence de son nez laisse maintenant voir l'intérieur des os de sa cavité nasale, la blonde se décompose et éclate en sanglots :
— Mon vivi... Mon visa... Mon visage. Mon si beau visage.
Explosant littéralement d'un émoi qui la submerge, elle se redresse brusquement et, sur le coin de table, Julia peut voir apparaître la main de sa geôlière qui est armée de la fourchette.
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Merci beaucoup d'avoir lu ce cinquante-neuvième chapitre. J'espère que vous l'avez aimé autant que les précédents. N'hésitez pas à me dire ce que vous en avez pensé et à cliquer sur la petite étoile pour voter :) La suite ce mercredi. Bises à toutes et tous.
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