24. Malgré la sédation
Lévitant jusqu'au niveau de la cabine éventrée, au travers de son point de vue - celui d'une caméra de vidéo surveillance - le drone constate qu'une prisonnière s'est évadée. Sans plus attendre, activant à leur maximum ses moteurs, il se propulse dans le dédale de couloirs à la poursuite de la fugitive.
Boitillante, Julia arpente maintenant un long passage interminable qui, identique au précédent, est lui aussi bordé de cabines individuelles où sont enfermées d'autres adolescentes. Laissant vagabonder son regard à mesure qu'elle progresse à bon rythme dans l'étrange enfilade, elle remarque que chaque fille qui y est retenue dans un harnachement de fauteuil gynécologique présente un stade plus ou moins avancé de grossesse. Certaines arborent un ventre parfaitement plat, d'autre l'ont légèrement bombé, alors que les plus proches de l'accouchement en on un bien rebondit comme un ballon de foot.
À peine la rouquine a-t-elle le temps de s'interroger sur l'indescriptible horreur qui défile devant ses yeux, que, dans son dos, le drone qui la pourchasse se rapproche dangereusement d'elle. Sortant de son abdomen un canon, il est prêt à faire feu.
Dans le couloir, la surprenant complètement, une première rafale de tirs manque de tuer Julia. Éventrant dans une gerbe d'étincelles un caisson se trouvant tout près, les projectiles déchiquettent telle une vulgaire feuille de papier l'adolescente qui y est profondément endormie.
Malgré la sédation circulant toujours dans ses veines et la blessure à la cuisse qui la handicape, Julia parvient à accélérer sa course emportée par une violente montée d'adrénaline. Ayant retrouvé une stature bien droite et sans trop se l'expliquer, elle a presque semé l'engin de mort quand une seconde rafale est tirée au niveau de ses jambes.
Perdant l'équilibre, la rouquine exécute avec la même dextérité qu'une gymnaste une roulade vers l'avant. L'instant suspendu dans une pesanteur comparable au ralenti filmé d'un exploit sportif devient alors un véritable moment de grâce. Évoluant au milieu des particules de métal en fusion qui giclent dans tous les sens, Julia se retourne pour faire face au drone de combat qui fonce vers elle. Son genou droit en contact avec le sol et sa jambe en appui sur son pied gauche, elle braque dans un mouvement chevaleresque son arme vers la menace et enclenche la gâchette pour tirer.
Expulsé dans un sifflement, le projectile qui fend l'air devenu électrique entre dans l'artillerie de l'engin volant qui s'apprêtait à nouveau à faire feu. Sous l'action des forces contraires, il implose littéralement dans un déferlement de vapeur noirâtre. Se disloquant telles des étoiles filantes, ses morceaux de carcasse incandescents rebondissent alors sur le sol, les plus près de la fugitive venant finir leur course à quelques centimètres à peine de ses pieds.
La folie de cet instant qui a révélé en Julia des capacités surhumaines retombe tout net quand l'arme qu'elle tient dans sa main restée tendue émet un bip continu. Ce son qui la force à approcher la tranche du pistolet de son regard lui fait remarquer qu'un voyant rouge signalant que le chargeur est vide vient de s'allumer. Dernier cran d'une gradation qui en compte cinq, cette lumière passe à l'orange et le bruit d'alarme prolongé s'arrête. Sans en connaître réellement le fonctionnement, la rouquine comprend bien qu'à la manière d'une batterie, l'arme vient de commencer à se recharger par elle-même.
Malgré sa blessure à la cuisse qui la fait grimacer, Julia se relève. Sans s'en être rendu compte, elle fait maintenant dos à un mécanisme de double porte qui dans un claquement sourd se déverrouille annonçant ainsi la reprise des hostilités. S'en écartant, la rouquine fait volte-face à mesure que l'engrenage qui s'ouvre dévoile à son embrasure, camouflée derrière une épaisse pellicule de brume, deux silhouettes de taille humaine portant des combinaisons de protection aux couleurs sombres.
Alors que les mystérieuses entités font leurs premiers pas dans le couloir, dégageant le passage, près d'elle, Julia atteint de justesse une cabine individuelle. Utilisant l'unique interrupteur qui se trouve à l'extérieur, elle en déverrouille l'accès et s'y engouffre avant d'être vue.
Le souffle court et l'adrénaline en berne, la fugitive s'effondre littéralement à terre et laisse échapper de ses mains le pistolet qui l'accompagnait jusqu'alors. Subitement assommée par l'effet du sédatif lui ayant été partiellement administré, elle cherche de ses yeux une réalité déformée à laquelle se raccrocher pour retarder au maximum sa perte de conscience.
Dans le couloir, au moment où le sas du caisson se referme tout juste derrière Julia, les silhouettes de taille humaine découvrent au sol les restes encore fumants du drone que l'adolescente vient d'abattre. Affublées de casques dont les visières opaques cachent leurs origines, d'une impulsion sur un bouton de commande situé sur leurs avant-bras, les entités déclenchent l'apparition de quatre nouveaux drones de combat. Se déployant à proximité de leurs maîtres, les engins de mort se mettent alors en chasse.
Saine et sauve au sein de l'espace réduit du caisson où elle s'est réfugiée, Julia, malgré sa vision troublée par la sédation, voit, lui faisant face, une prisonnière. Tout comme les autres, cette dernière se trouve prise au piège d'un mécanisme de fauteuil gynécologique. Nue, inconsciente et son visage caché derrière une épaisse frange de cheveux noirs, elle semble avoir atteint le stade final de sa grossesse.
Les paupières lourdes et son corps ayant presque démissionné, la rouquine qui ne parvient plus à bouger s'est figée dans une posture proche de la lamentation. Un frisson d'effroi la traverse, quand apparaît par le haut de la cabine, une lumière aveuglante qui cache la mécanique d'un bras-robot. Il s'agit de la même articulation contre laquelle Julia s'était battue et qui arbore à son extrémité une scintillante lame de bistouri qui semble l'avoir prise pour cible.
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Merci beaucoup d'avoir lu ce nouveau chapitre. J'espère que vous l'avez aimé autant que les précédents. N'hésitez pas à me dire ce que vous en avez pensé et à cliquer sur la petite étoile pour voter :)Je vais continuer de publier la suite au rythme d'un chapitre par semaine tous les dimanches matin vers 10 heures. Bises à toutes et à tous.
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